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19/12/2018 | FRANCE | N°13-26940

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 2018, 13-26940


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 27 septembre 2013), que M. Y... a été engagé le 28 octobre 2006 en qualité de VRP multicartes par la société Loisirs distributions aux droits de laquelle est venue la société Racer ; que le 2 juillet 2008, la société Crocs Europe, qui avait confié à la société Loisirs Distribution la distribution exclusive de ses produits, a informé cette dernière de la rupture de leur relation commerciale à effet du 2 janvier 2009 ; qu'après avoir, par lettre du 7 novembre 2008

, informé son employeur que les commandes printemps-été n'avaient pas été ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 27 septembre 2013), que M. Y... a été engagé le 28 octobre 2006 en qualité de VRP multicartes par la société Loisirs distributions aux droits de laquelle est venue la société Racer ; que le 2 juillet 2008, la société Crocs Europe, qui avait confié à la société Loisirs Distribution la distribution exclusive de ses produits, a informé cette dernière de la rupture de leur relation commerciale à effet du 2 janvier 2009 ; qu'après avoir, par lettre du 7 novembre 2008, informé son employeur que les commandes printemps-été n'avaient pas été honorées et réclamé le paiement des commissions sur les commandes non livrées, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail résultant de l'absence de livraison des commandes et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes à ce titre ;

Sur le premier moyen, le deuxième moyen pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches et sur le quatrième moyen pris en sa troisième branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié certaines sommes au titre des commissions de 2008 et de 2009 alors, selon le moyen, que lorsqu'il est prévu par voie d'usage que les commandes non menées à bonne fin n'ouvrent pas droit à commission, le VRP ne peut être payé que sur les commandes livrées et payées, sauf pour lui à démontrer que l'absence de livraison est imputable à faute à l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté l'existence d'un usage en vertu duquel le VRP était payé après facturation au client et donc livraison des produits et non pas après la prise des commandes mêmes acceptées par l'employeur ; qu'il était constant que le rappel sollicité correspondait à des commandes prises par M. Y... auprès des clients mais non livrées par l'employeur par suite du comportement de son fournisseur ; qu'en condamnant cependant l'employeur à un rappel de commissions pour des commandes non livrées et non payées aux prétextes inopérants que l'absence de livraison des produits commandés et de paiement de ces commandes par le client ne constituait pas pour lui un cas de force majeure et que M. Y... était totalement étranger à l'absence de livraison, sans constater une faute de l'employeur à l'origine de l'absence de livraison et de paiement des commandes litigieuses, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des principes régissant les usages, l'article 1134 du code civil et l'article L. 7313-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'absence de livraison des produits commandés et donc de paiement par le client était directement liée à la relation entre la société employeur et son fournisseur, la cour d'appel a retenu que cette situation ne pouvait en conséquence constituer pour elle un cas de force majeure susceptible d'être opposé au salarié et que les commissions étaient dues ; qu'elle a légalement justifié sa décision ;

Et attendu que le rejet du premier et du deuxième moyens prive de portée le troisième moyen et le quatrième moyen pris en ses deux premières branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Racer aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Racer

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de M. Y... s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la société RACER à lui payer les sommes de 9.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2.823,07 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 282,30 € de congés payés afférents, et 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements de l'employeur à ses obligations sont établis et suffisamment graves pour lui imputer la rupture, soit dans le cas contraire, ceux d'une démission. En l'occurrence, dans son courrier de prise d'acte, le salarié a relevé que malgré ses diverses demandes, les commandes prises par lui et adressées il son employeur depuis plus de deux mois et demi, n'étaient pas honorées et a considéré en conséquence que le contrat de travail était résilié du fait de l'employeur. La société RACER reconnaît ne pas avoir honoré les commandes prises par son salarié mais rappelle qu'elle n'a pas été livrée par la société CROCS EUROPE BV qui a préféré livré directement la clientèle française à compter du 2 janvier 2009. Elle estime que cet empêchement indépendant de sa volonté constitue un cas de force majeure l'exonérant de toute responsabilité, la lettre de Monsieur Y... devant s'analyser en une démission. Toutefois, même en considérant que l'absence de livraison des produits ne pourrait être imputée à faute à la société employeur, il n'en demeure pas moins que la société LOISIRS DISTRIBUTION, nonobstant la dénonciation du contrat de distribution en juillet 2008 avec effet au 2 janvier 2009, a laissé son salarié dans l'ignorance de celle-ci (Monsieur Y... soutient n'avoir été informé de la situation que le 16 décembre 2008) et surtout, comme l'a relevé le conseil de prud'hommes, s'est abstenue de prendre les mesures nécessaires s'imposant dans le cadre de la relation salariale, le VRP ne pouvant en tout état de cause poursuivre son activité à compter du 3 janvier 2009 étant rappelé que la prise d'acte est intervenue un mois plus tard. Monsieur Y... relève à juste titre le comportement fautif de la société employeur qui l'a laissé travailler inutilement alors même qu'il supportait les frais engagés pour ses tournées. Cette attitude fautive de la société LOISIRS DISTRIBUTION désormais RACER est suffisamment grave pour lui imputer la rupture du contrat de travail qui doit produire en conséquence les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé sur ce point ainsi que sur les dommages et intérêts alloués par le conseil de prud'hommes non remis en cause dans leur montant par Monsieur Y... qui en sollicite le maintien » ;

ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE « La prise d'acte de la rupture n'est ni une démission, ni un licenciement mais a pour conséquence de rompre immédiatement le contrat de travail (Cassation sociale du 30 juin 2010,09-41.456). Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission" (Cassation Sociale du 25 juin 2003, N° 01-43.578). Par lettre du 2 février 2009, Monsieur Y... a pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison des manquements graves reprochés à son employeur. L'employeur, qui est tenu d'exécuter son contrat de travail de bonne foi, doit fournir aux salariés le travail prévu, ainsi que les moyens nécessaires à son exécution. Il manque ainsi à son obligation de loyauté en cas de défaut ou d'insuffisance d'information tardive sur les conditions de travail (cassation sociale du16 février 1989N° 85-46.116). L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige. Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit (Cassation Sociale du 29 juin 2005, N° 03-42.804). Il ressort des articles 1134 du code civil et L. 1222-1 du code du travail que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi entre ceux qui les ont faites et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi. La prise d'acte de Monsieur Y... fait suite aux conséquences de la perte de marche de la société RACER. Il apparaît que le contrat commercial entre les sociétés CROCS HOLLANDE et RACER a été rompu dans un climat conflictuel, qui fait l'objet d'une procédure judiciaire commerciale à AMSTERDAM. La société CROCS HOLLANDE n'a pas honoré les commandes passées par la société RACER jusqu'à la fin du préavis de six mois contractuel. La prise d'acte de Monsieur Y... est causée par la rupture brutale des relations entre la société CROCS HOLLANDE et la société RACER. La société CROCS HOLLANDE informe les clients en FRANCE dès le 22 octobre 2008 qu'à effet du 2 janvier 2009, la société LOISIRS DISTRIBUTION(RACER) cessera toute activité liée à la marque CROCS. A partir de cette date, la société CROCS EUROPE a choisi GPG compagnie pour commercialiser les produits CROCS. Le fait que la société LOISIRS DISTRIBUTION (RACER) n'ait pu obtenir la livraison des marchandises CROCS lui est exclusivement imputable et a empêché Monsieur Y... d'exécuter son travail. Ce n'est que le 16 décembre 2008, que la société LOISIRS DISTRIBUTION a informé Monsieur Y... que ses relations commerciales avec la SOCIETE CROCS EUROPE étaient rompues depuis le 2 juillet 2008. Suite au conflit entre les sociétés, la société LOISIRS DISTRIBUTION(RACER) pouvait licencier économique Monsieur Y... à partir du 3 janvier 2009 pour perte de marché, sachant que Monsieur Y... était V.R.P. multicarte et distribuait uniquement les chaussures CROCS, ou lui fournir un autre marché. Il en résulte que le conseil dit que la prise d'acte de M. Y... s'analyse en licenciement aux torts exclusifs de la société LOISIRS DISTRIBUTION (RACER) et devra verser la somme de 9.000,00 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;

1. ALORS QUE la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par un salarié ne peut produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'en cas de manquement imputable à l'employeur ; qu'en cas de résiliation du contrat de distribution exclusif assortie d'un préavis, le distributeur conserve, pendant ce préavis, son exclusivité sur la distribution des produits objet du contrat de sorte qu'il est en droit d'enregistrer des commandes de ses clients et ces commandes doivent lui être livrées par le fournisseur ; qu'en retenant, par motifs adoptés, que l'absence de livraison aux clients des marchandises dont commande avait été passée par l'intermédiaire de M. Y... serait exclusivement imputable à la société LOISIRS DISTRIBUTION (aux droits de laquelle vient la société RACER), quand le jugement constatait dans le même temps que le fournisseur, qui avait résilié le 2 juillet 2008, à effet du 2 janvier 2009, le contrat de distribution exclusif le liant à la société LOISIRS DISTRIBUTION n'avait pas honoré les commandes passées par cette société durant le préavis, de sorte que cette absence de livraison n'était pas imputable à l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 1147 du Code civil, L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

2. ALORS QUE si l'employeur est tenu d'informer le VRP de la rupture des relations commerciales avec le fournisseur des produits qu'il représente, il suffit qu'il le fasse dans un délai raisonnable précédant la cessation effective des relations ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt que M. Y... reconnaissait avoir été informé le 16 décembre 2008 de la rupture des relations commerciales entre la société CROCS EUROPE BV et la société LOISIRS DISTRIBUTION (aux droits de laquelle vient la société RACER) qui ne prenait effet qu'au 2 janvier 2009 ; qu'en reprochant à l'employeur d'avoir laissé jusque là dans l'ignorance M. Y... de la dénonciation du contrat intervenue en juillet 2008, sans préciser en quoi l'information, donnée plus de deux semaines avant l'expiration du contrat, n'avait pas été donnée dans un délai raisonnable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

3. ALORS QU' en cas de résiliation du contrat de distribution exclusif assortie d'un préavis, le distributeur conserve, pendant ce préavis, son exclusivité sur la distribution des produits objet du contrat de sorte qu'il est en droit d'enregistrer des commandes de ses clients et ces commandes doivent lui être livrées par le fournisseur ; qu'en affirmant que l'employeur, laissant son salarié dans l'ignorance, jusqu'au 16 décembre 2008, de la résiliation du contrat de distribution en juillet 2008 avec effet au 2 janvier 2009, avait eu un comportement fautif en laissant M. Y... travailler inutilement alors qu'il supportait les frais engagés pour ses tournées, quand le salarié n'avait effectué aucun travail inutile avant d'être informé de cette résiliation, l'absence de livraison des produits commandés par son intermédiaire durant le préavis étant imputable à une violation de ses obligations par le fournisseur, la cour d'appel a violé les articles 1147 du Code civil, L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail ;

4 ALORS QUE le juge ne peut déclarer la prise d'acte de la rupture justifiée sur la base d'un manquement qui n'a été invoqué par le salarié ni dans la lettre de prise d'acte, ni dans ses conclusions ; qu'en se fondant, pour dire la prise d'acte justifiée, sur la circonstance que l'employeur, nonobstant la dénonciation du contrat de distribution en juillet 2008 avec effet au 2 janvier 2009, s'était abstenu de prendre les mesures nécessaires s'imposant dans le cadre de la relation salariale, à savoir le licencier ou lui confier un autre marché, le VRP ne pouvant en tout état de cause poursuivre son activité à compter du 3 janvier 2009, quand M. Y... n'invoquait aucunement ce manquement, la cour d'appel a violé les articles L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société RACER à payer au salarié les sommes de 2.629,97 € au titre des commissions de 2008, outre 262,99 € de congés payés afférents, 19.267,71 € au titre des commissions de 2009, outre 1.926,77 € de congés payés afférents,

AUX MOTIFS QUE « Monsieur Y... sollicite la somme de 2.642,57 euros au titre des commissions dues pour l'année 2008 et celle de 19.286,61 euros au titre de l'année 2009, ces commissions correspondant aux commandes prises par lui auprès des clients mais non livrées par la société employeur. La société RACER signale que les commissions étaient versées au VRP seulement après livraison et paiement par le client; elle fait valoir que si elle n'a pu honorer les commandes, c'est en raison de l'existence d'un cas de force majeure résultant de ce que la société CROCS EUROPE BV ne l'a pas livrée mais a livré en direct la clientèle française à compter du 2 janvier 2009. Il est exact, au vu des bulletins de salaire et du document annexé à ceux-ci détaillant les commandes générant les commissions, que Monsieur Y... était payé après facturation au client et donc livraison des produits et non pas après la prise des commandes mêmes acceptées par l'employeur. Cependant même si cet usage doit être considéré comme une clause de bonne fin nonobstant l'absence de contrat de travail écrit il n' en demeure pas moins que l'absence de livraison des produits commandés et donc de paiement par le client est directement liée à la relation entre la société employeur et son fournisseur ; cette situation ne peut en conséquence constituer pour elle un cas de force majeure pouvant être opposé au salarié et ce, d'autant qu'il lui est loisible, dans le cadre de l'action engagée par elle à l'encontre de la société CROCS EUROPE BV, de solliciter la réparation de son préjudice y compris celui découlant du paiement des salaires qu'elle est contrainte d'assurer. Monsieur Y... qui a effectué normalement son travail et est totalement étranger à l'absence de livraison, doit en être rémunéré. Les documents versés aux débats par la société employeur démontrent que les commandes prises par Monsieur Y... non livrées en 2008 s'élevaient à 37.571 euros et celles devant être livrées en 2009 à 275.263 euros. Sur la base d'un taux de commission de 7 %, il est dû à l'appelant les sommes de 2.629,97 € au titre des commissions de 2008 et de 19.267.71 euros pour 2009 outre 10 % de congés payés y afférents. Si le rappel de commissions au titre de 2008 soit 2.892,76 euros congés payés inclus doit porter intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2008, date de réception de la mise en demeure adressée par le salarié, il n'en est pas de même pour le rappel de salaire dû au titre de l'année 2009 alors qu'à la date de cette mise en demeure, les dites commissions n'étaient pas encore exigibles puisque les produits devaient être livrés et payés en 2009. La somme de 19.267,71 euros outre les congés payés due pour 2009 portera quant à elle intérêts au taux légal à compter du 19 février 2013, date des conclusions de Monsieur Y... devant la Cour étant souligné que le salarié ne réclamait en première instance que la somme de 4 749,50 euros et que le montant précis alloué par la Cour n'a été fixé par lui que dans les dites conclusions » ;

1. ALORS QUE lorsqu'il est prévu par voie d'usage que les commandes non menées à bonne fin n'ouvrent pas droit à commission, le VRP ne peut être payé que sur les commandes livrées et payées, sauf pour lui à démontrer que l'absence de livraison est imputable à faute à l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté l'existence d'un usage en vertu duquel le VRP était payé après facturation au client et donc livraison des produits et non pas après la prise des commandes mêmes acceptées par l'employeur (arrêt, p. 4, deux derniers §) ; qu'il était constant que le rappel sollicité correspondait à des commandes prises par M. Y... auprès des clients mais non livrées par l'employeur par suite du comportement de son fournisseur ; qu'en condamnant cependant l'employeur à un rappel de commissions pour des commandes non livrées et non payées aux prétextes inopérants que l'absence de livraison des produits commandés et de paiement de ces commandes par le client ne constituait pas pour lui un cas de force majeure et que Monsieur Y... était totalement étranger à l'absence de livraison, sans constater une faute de l'employeur à l'origine de l'absence de livraison et de paiement des commandes litigieuses, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des principes régissant les usages, l'article 1134 du Code civil et l'article L. 7313-1 du Code du travail ;

2. ALORS en tout état de cause QUE constitue un cas de force majeure l'événement extérieur, irrésistible et imprévisible ; que le distributeur exclusif d'un produit n'est pas responsable du fait de son fournisseur qui, ayant résilié le contrat de distribution exclusif avec un préavis, refuse fautivement de livrer les commandes passées par l'intermédiaire des salariés du distributeur durant le préavis ; qu'en affirmant que l'absence de livraison des produits commandés et donc de paiement par le client était directement liée à la relation entre la société employeur et son fournisseur et ne pouvait en conséquence constituer pour elle un cas de force majeure pouvant être opposé au salarié, quand il s'agissait là d'un fait extérieur à l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 1148 du Code civil, ensemble l'article L. 7313-1 du Code du travail ;

3. ALORS de même QUE constitue un cas de force majeure l'événement extérieur, irrésistible et imprévisible ; qu'en affirmant que l'absence de livraison des produits commandés et donc de paiement par le client était directement liée à la relation entre la société employeur et son fournisseur et ne pouvait en conséquence constituer pour elle un cas de force majeure pouvant être opposé au salarié, sans préciser en quoi le manquement du fournisseur à son obligation de livrer les commandes passées durant le préavis ne constituait pas, pour l'employeur distributeur, un fait imprévisible et irrésistible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1148 du Code civil, ensemble l'article L. 7313-1 du Code du travail ;

4. ALORS QU'en se fondant, pour exclure la force majeure, sur la circonstance qu'il était loisible à la société RACER, dans le cadre de l'action engagée par elle à l'encontre de la société CROCS EUROPE BV, de solliciter la réparation de son préjudice y compris celui découlant du paiement des salaires qu'elle est contrainte d'assurer, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1148 du Code civil, ensemble l'article L. 7313-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société RACER à payer au salarié la somme de 2.823,07 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 282,30 € de congés payés afférents,

AUX MOTIFS QUE « s'agissant du préavis, Monsieur Y... demande le paiement de la somme perçue par lui les trois derniers d'exercice normal d'activité soit juillet août et septembre 2008, prétention contestée par la société RACER qui approuve le premier juge d'avoir retenu la moyenne annuelle des salaires en 2008 soulignant que l'appelant lui-même fait état de difficultés apparues à compter de juillet 2008. Compte tenu de la nature du produit vendu, il est incontestable que l'activité de Monsieur Y... était fluctuante ce qui impactait de façon importante sa rémunération. Il est exact, au vu des bulletins de salaire de 2007 et 2008 que les mois d'été étaient beaucoup plus rémunérateurs que les mois de février, mars et avril correspondant au préavis. Dans ces conditions, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a retenu la moyenne mensuelle des salaires de 2008 sauf à tenir compte de ce que la somme annuelle de 14.852,11€ prise en compte par le conseil de prud'hommes inclut des congés payés qui ont à tort été ajoutés aux trois mois de préavis. Par ailleurs si le conseil de prud'hommes a déduit à juste titre 30 % correspondant aux frais professionnels, il doit être ajouté le rappel de commissions accordé par la Cour pour l'année 2008. La moyenne mensuelle de rémunération de l'année 2008 déterminant le montant du préavis s'élève en conséquence à 13.501,91 € (14.852,11xl00:110) + 2.629,97 E = 16.131,88 € X 70 % = 11.292,31 € :12= 941,02 € ; l'indemnité compensatrice de préavis est ainsi égale à 941,02 x 3 = 2.823,07 € outre 282,30 € de congés payés y afférents »

1. ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen du chef de dispositif ayant dit que la prise d'acte de la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'employeur à payer une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2. ALORS subsidiairement QUE la cour d'appel s'étant fondée, pour fixer le montant de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, sur le rappel de commissions qu'elle a accordé pour l'année 2008, la cassation à intervenir sur le deuxième moyen du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à ce rappel de commissions entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'employeur à payer une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société RACER à payer au salarié la somme de 18.000 € à titre d'indemnité de clientèle,

AUX MOTIFS QUE « en application des dispositions de l'article L 7313-13 du code du travail, en cas de rupture du contrat de travail à durée indéterminée par l'employeur et sauf faute grave, le Voyageur Représentant Placier a droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui. Il incombe au VRP qui prétend à une indemnité de clientèle de démontrer l'existence d'une création, d'un développement personnel de la clientèle qu'il visitait pour le compte de son employeur ainsi que le préjudice subi par lui du fait de ne plus visiter lad ite clientèle pour l'avenir. En l'occurrence, la création de la clientèle par Monsieur Y... est indiscutable dès lors que la société LOISIRS DISTRIBUTION devenue la société RACER ne commercialisait pas les chaussures CROCS sur le secteur de Monsieur Y... avant de le recruter à cette fin. Cependant, contrairement à ce qu'il indique, la forte notoriété de la marque ne découle pas spécifiquement de son travail mais, ainsi qu'il ressort des documents versés aux débats par la société intimée, est liée à la nature du produit (commercialisé dans 90 pays fin 2008) et aux actions menées tant par la société CROCS EUROPE que par CROCS FRANCE DISTRIBUTION (actuellement société RACER) venant elle-même aux droits de la société LOISIRS DISTRIBUTION. Toutefois, si la notoriété de la marque a contribué au développement de la clientèle, celui-ci résulte également du travail personnel du VRP. Par ailleurs, le fait que la société employeur ne soit plus en mesure d'exploiter la clientèle créée par Monsieur Y... n'est pas de nature à le priver de son indemnité de clientèle, son préjudice étant incontestable dès lors qu'il ne peut plus exploiter la clientèle spécifique attachée au produit. Au vu de ces éléments, de la durée d'exercice de son activité et des commissions perçues (hors frais professionnels), l'indemnité de clientèle due à Monsieur Y... sera fixée à la somme de 18.000 euros » ;

1. ALORS QUE l'indemnité de clientèle n'étant due que lorsque la rupture du contrat de travail du VRP est imputable à l'employeur, la cassation à intervenir sur le premier moyen du chef de dispositif ayant dit que la prise d'acte de la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse entraînera par voie de conséquence la censure de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'employeur à payer une indemnité de clientèle au VRP, par application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

2. ALORS QUE la cour d'appel s'étant fondée, pour fixer le montant de l'indemnité de clientèle, sur le montant des commissions, la cassation à intervenir sur le deuxième moyen du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à verser un rappel de commissions entraînera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a condamné l'employeur à payer une indemnité de clientèle, en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;

3. ALORS QUE le VRP licencié a droit, en principe, à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que le VRP avait contribué à créer et développer une clientèle, sans constater une augmentation en nombre et en valeur ni préciser quelle était sa part personnelle dans la création et le développement de la clientèle ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 7313-13 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-26940
Date de la décision : 19/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 27 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 2018, pourvoi n°13-26940


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:13.26940
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