La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/12/2018 | FRANCE | N°15-10856

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 décembre 2018, 15-10856


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 4 novembre 2014), que le 11 avril 1987, une collision s'est produite en France entre le véhicule conduit par M. D... C... , de nationalité espagnole, assuré auprès de la société Ercos, aux droits de laquelle vient la société Liberty Seguros, et celui conduit par M. Régis X..., assuré auprès de la société GMF assurances, accident au cours duquel Mme Elodie X..., alors âgée de onze mois, a été grièvement blessée ; que par jugement du 2 décembre 199

3, la société Ercos, l'association le Bureau central français (le BCF) et la ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 4 novembre 2014), que le 11 avril 1987, une collision s'est produite en France entre le véhicule conduit par M. D... C... , de nationalité espagnole, assuré auprès de la société Ercos, aux droits de laquelle vient la société Liberty Seguros, et celui conduit par M. Régis X..., assuré auprès de la société GMF assurances, accident au cours duquel Mme Elodie X..., alors âgée de onze mois, a été grièvement blessée ; que par jugement du 2 décembre 1993, la société Ercos, l'association le Bureau central français (le BCF) et la société GMF assurances ont été condamnées in solidum à indemniser intégralement le préjudice subi par Mme Elodie X... et ses parents, les deux premiers étant tenus à indemnisation dans la limite de cinq millions de francs (762 245,09 euros) pour chaque victime ; que, faisant valoir qu'il n'avait jamais reçu signification d'un quelconque acte de procédure avant octobre 2009, M. D... C... a relevé appel le 12 mars 2010 du jugement du 2 décembre 1993 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Liberty Seguros et le BCF font grief à l'arrêt de dire que la société Liberty Seguros, in solidum avec le BCF, serait tenue à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme Elodie X... et de M. et Mme X..., alors, selon le moyen, que les conditions particulières de la police d'assurance portant garantie « illimitée » de responsabilité civile souscrite par M. D... C... auprès de la société Ercos stipulaient expressément, s'agissant de la « sortie à l'étranger » : « assurance obligatoire CEE » ; que l'article 22 des conditions générales de cette police stipulait expressément que les garanties prévues par la police d'assurance s'appliquaient « aux sinistres survenus sur le territoire espagnol, la principauté d'Andorre ou tout autre pays stipulé par le ministère de l'économie et des finances, par application du traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE. Lorsque le sinistre se produira à l'étranger, dans les limites territoriales décrites ci-avant, la garantie sera accordée dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays de survenance du sinistre » ; qu'il en résultait clairement que la police d'assurance illimitée ne s'appliquait que sur le territoire espagnol, une extension de garantie étant concédée à l'assuré pour les pays membres de la CEE, mais dans la limite des seuils légaux de responsabilité applicables dans ces Etats ; que pour décider que l'article 22 des conditions générales de la police d'assurance constituait une limitation de garantie, nulle en raison de sa prétendue absence de clarté et de transparence, la cour d'appel a pourtant postulé que la garantie illimitée avait une vocation universelle en retenant « que la police d'assurance contractée par M. Antoni D... C... auprès de la société Ercos (Liberty Seguros) comprend une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation » et « qu'aucune clause ne spécifie expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol, à commencer par celle relative à la responsabilité civile « illimitée » » ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire de la police, laquelle n'offrait une garantie illimitée que pour le seul territoire national espagnol, en violation de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, qu'ayant relevé, d'une part, que la police d'assurance contractée par M. D... C... auprès de la société Liberty Seguros prévoyait une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation, qu'aucune clause ne spécifiait expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol et que l'article 28 des conditions générales, intitulé « Objet de la couverture », spécifiait que « l'assureur garantit avec le champ et jusqu'aux limites stipulées dans les conditions particulières de cette police le paiement des indemnités... », d'autre part, que l'article 22 des conditions générales prévoyait que, lorsque le sinistre se produira à l'étranger, dans la principauté d'Andorre ou tout autre pays stipulé par le ministère de l'économie et des finances, par application du traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE, « la garantie sera accordée dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays de survenance du sinistre », faisant ainsi ressortir l'ambiguïté née du rapprochement de ces clauses, c'est sans méconnaître les stipulations de la police qu'elle a souverainement interprétées, que la cour d'appel, après avoir écarté la clause limitative par application du droit espagnol, a retenu que la garantie de l'assureur était illimitée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société Liberty Seguros et le BCF font grief à l'arrêt de dire que le BCF, in solidum avec la société Liberty Seguros, serait tenu à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme Elodie X... et de M. et Mme X..., alors, selon le moyen, que le BCF est garant de l'indemnisation des victimes d'accidents survenus sur le territoire français dans lesquels est impliqué un véhicule terrestre à moteur ayant son lieu de stationnement habituel sur le territoire d'un Etat membre de l'Union européenne dans les limites et conditions applicables à l'assurance automobile obligatoire ; qu'à la date de l'accident de la circulation dont ont été victimes les consorts X..., l'assurance automobile obligatoire prévoyait un seuil de garantie de cinq millions de francs par victime de sinistre corporel ; que cette somme constituait donc le plafond légal de la garantie du BCF ; qu'en retenant pourtant que le BCF était tenu à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme Elodie X... et des époux X..., la cour d'appel a violé l'article 2 de la directive 72/166 CEE du 24 avril 1972, l'article L. 211-4 du code des assurances, ensemble l'article R. 211-7 du code des assurances, dans sa rédaction issue du décret n° 86-21 du 7 janvier 1986, applicable en la cause ;

Mais attendu que le BCF est tenu dans les mêmes limites que l'assureur étranger qu'il représente ; qu'ayant jugé que la société Liberty Seguros était tenue à une garantie illimitée des conséquences de l'accident du 11 avril 1987, la cour d'appel a décidé à bon droit que le BCF était tenu de manière identique ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Liberty Seguros et le Bureau central français aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à Mme Elodie X... et à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros, ainsi que la somme globale de 3 000 euros, d'une part, à M. D... C... , d'autre part, in solidum à la société GMF assurances ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Liberty Seguros et le Bureau central français.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la Compagnie LIBERTY SEGUROS, in solidum avec le BCF, serait tenue à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Madame Elodie X... et des consorts X... ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'obligation de la compagnie Liberty Seguros et du Bureau central français :

Que nonobstant la discussion concernant l'absence de production du contrat d'assurance conclu entre M. Antoni D... C... et la compagnie Ercos devant les premiers juges qui s'y réfèrent toutefois [page 6 du jugement, avant dernier paragraphe], il est constant que cette pièce est régulièrement communiquée et discutée en cause d'appel ;

Qu'à l'examen de ce contrat, rédigé en langue espagnole avec sa traduction jointe [pièce 2 de M. Antoni D... C... ], en date du 31 mai 1986, il ressort que :

* dans le cadre intitulé « Garanties Assurance volontaire » :

sous la mention « Responsabilité civile et garanties (ou cautions selon l'appelant) », figure le terme : « Illimitée » ;

sous la mention « Sortie à l'étranger », figurent les termes : « Assurance Obligatoire CEE » ;

* dans le cadre réservé aux « clauses d'extension des conditions particulières de l'assurance volontaire et de l'assurance des passagers », sont référencées :

la clause 01 relative à « l'extension des garanties à l'Andorre », au titre de l'élargissement des limites géographiques fixées par l'article 22 des conditions générales ;

la clause 02 relative au « contrôle d'alcoolémie » ;

Que pour conclure à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la compagnie Ercos, désormais la compagnie Liberty Seguros, et le Bureau central français ne seront tenus à indemnisation que dans la limite de 5 millions de francs (762 245,09 euros) pour chaque victime, ces parties intimées soutiennent que la garantie responsabilité civile revendiquée par l'assuré se trouve ainsi contractuellement limitée au seul territoire espagnol, en l'état de la mention « sortie à l'étranger : assurance obligatoire CEE » figurant aux conditions particulières de la police et de l'article 22 des conditions générales ;

Que cet article 22 prévoit notamment que d'une part, les garanties couvertes par la police prennent effet pour les sinistres ayant eu lieu sur le territoire espagnol, la Principauté d'Andorre mais aussi dans tout autre pays déterminé par le Ministère des Finances comme l'exige le Traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE et d'autre part, lorsque le fait a eu lieu à l'étranger, mais dans l'étendue territoriale décrite précédemment, la garantie est accordée dans les limites et les conditions minimales prévues dans la législation du pays sur le territoire duquel le sinistre a eu lieu ;

Qu'il est constant qu'en application de l'article R. 211-7 du Code des assurances, alors en vigueur au jour de l'accident, la limite était fixée à « au moins à cinq millions de francs par victime », soit 762 245,09 euros ;

Que toutefois, ainsi qu'il ressort de l'argumentation développée par M. Antoni D... C... comme par la société GMF, et plus précisément à la lumière des consultations établies par Maître Oscar B..., le 12 février 2014 et son complément en date du 11 avril 2014 [pièces 7 et 9 de M. Antoni D... C... ], la cour constate :

que la police d'assurance contractée par M. Antoni D... C... auprès de la compagnie Ercos (Liberty Seguros) comprend une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation ;

qu'aucune clause ne spécifie expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol, à commencer par celle relative à la responsabilité civile « illimitée » ;

qu'il s'en évince que toute clause venant limiter les effets de la clause relative à la responsabilité civile illimitée s'analyse comme une clause limitative, en ce qu'elle vient exclure un territoire ou réduire le montant de l'indemnisation ;

que tel est le cas de l'article 22 des conditions générales qui ne tend qu'à limiter l'objet du contrat qui se trouve en réalité délimité par l'article 28 des mêmes conditions, sous l'intitulé « Objet de la couverture », lequel dispose que « l'assureur garantit avec le champ et jusqu'aux limites stipulées dans les conditions particulières de cette police le paiement des indemnités... » ;

que si l'article 22 inclut la France parmi les territoires sur lesquels sont survenus les sinistres ainsi couverts, la garantie n'est accordée que « dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays sur le territoire duquel s'est produit le sinistre », ce qui n'implique pas nécessairement que seule l'assurance obligatoire serait concernée plutôt que d'autres points tels que liés à l'évaluation de certains dommages ou lésions ;

qu'enfin, la mention « sortie à l'étranger : assurance obligatoire CEE » opère, sans être explicite, une restriction du caractère illimité de la garantie responsabilité civile et dans le cas contraire, elle opérerait alors une restriction du champ territorial sans aucunement la définir, encore moins préciser où et en quoi serait limitée la garantie dite « illimitée » ;

Que dès lors, s'agissant de clauses limitatives au sens du droit espagnol, leur validité découle du respect des dispositions de l'article 3, alinéa 1er, dernier paragraphe de la loi 50/1980 du 8 octobre 1980 sur le contrat d'assurance, en ce que ces clauses doivent « se distinguer afin d'être perçues facilement pour assurer leur connaissance incontestable par l'assuré » et « être acceptées par écrit par le preneur (assuré), qui doit en être signataire » ;

Que force est de constater qu'au cas d'espèce, la clause dont se prévaut la compagnie Liberty Seguros relative à la « sortie à l'étranger » n'est ni mise en évidence, encore moins n'a été acceptée par écrit par M. Antoni D... C... et surtout, que l'absence de clarté et de transparence dans la police d'assurance dont s'agit n'est pas de nature à recevoir application par une restriction des droits de l'assuré, alors que celui-ci avait tout lieu de penser que tout risque découlant de la circulation était couvert, en l'état du contrat à garantie illimitée ainsi conclu ;

Qu'il en est tout autant d'une limitation exprimée dans une condition générale, telle que celle exprimée aux termes de l'article 22, qui n'a pas plus été mise en évidence ou distinguée au sens de l'article 3 précité de la loi 50/1980, encore moins acceptée expressément par l'assuré ;

Que dans ces conditions, sans qu'il n'y ait lieu de se prononcer sur la nécessité d'un sursis à statuer, inopérant au cas d'espèce, infirmant le jugement dont appel en ce sens, la cour dira que la compagnie Liberty Seguros et le Bureau central français seront tenus in solidum à une garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme Elodie X... et des époux X... » ;

ALORS QUE les conditions particulières de la police d'assurance portant garantie « illimitée » de responsabilité civile souscrite par Monsieur C... auprès de la compagnie ERCOS stipulaient expressément, s'agissant de la « sortie à l'étranger » : « assurance obligatoire CEE » ; que l'article 22 des conditions générales de cette police stipulait expressément que les garanties prévues par la police d'assurance s'appliquaient « aux sinistres survenus sur le territoire espagnol, la principauté d'Andorre ou tout autre pays stipulé par le Ministère de l'Economie et des Finances, par application du traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE. Lorsque le sinistre se produira à l'étranger, dans les limites territoriales décrites ci-avant, la garantie sera accordée dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays de survenance du sinistre » ; qu'il en résultait clairement que la police d'assurance illimitée ne s'appliquait que sur le territoire espagnol, une extension de garantie étant concédée à l'assuré pour les pays membres de la CEE, mais dans la limite des seuils légaux de responsabilité applicables dans ces Etats ; que pour décider que l'article 22 des conditions générales de la police d'assurance constituait une limitation de garantie, nulle en raison de sa prétendue absence de clarté et de transparence, la Cour d'appel a pourtant postulé que la garantie illimitée avait une vocation universelle en retenant « que la police d'assurance contractée par M. Antoni D... C... auprès de la compagnie Ercos (Liberty Seguros) comprend une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation » et « qu'aucune clause ne spécifie expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol, à commencer par celle relative à la responsabilité civile « illimitée » » (arrêt, p. 12, alinéas 2 et 3) ; qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a méconnu la force obligatoire de la police, laquelle n'offrait une garantie illimitée que pour le seul territoire national espagnol, en violation de l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le BCF, in solidum avec la Compagnie LIBERTY SEGUROS, serait tenu à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Madame Elodie X... et des consorts X... ;

AUX MOTIFS QUE « Sur l'obligation de la compagnie Liberty Seguros et du Bureau central français :

Que nonobstant la discussion concernant l'absence de production du contrat d'assurance conclu entre M. Antoni D... C... et la compagnie Ercos devant les premiers juges qui s'y réfèrent toutefois [page 6 du jugement, avant dernier paragraphe], il est constant que cette pièce est régulièrement communiquée et discutée en cause d'appel ;

Qu'à l'examen de ce contrat, rédigé en langue espagnole avec sa traduction jointe [pièce 2 de M. Antoni D... C... ], en date du 31 mai 1986, il ressort que :

* dans le cadre intitulé « Garanties Assurance volontaire » :

sous la mention « Responsabilité civile et garanties (ou cautions selon l'appelant) », figure le terme : « Illimitée » ;

sous la mention « Sortie à l'étranger », figurent les termes : « Assurance Obligatoire CEE » ;

* dans le cadre réservé aux « clauses d'extension des conditions particulières de l'assurance volontaire et de l'assurance des passagers », sont référencées :

la clause 01 relative à « l'extension des garanties à l'Andorre », au titre de l'élargissement des limites géographiques fixées par l'article 22 des conditions générales ;

la clause 02 relative au « contrôle d'alcoolémie » ;

Que pour conclure à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la compagnie Ercos, désormais la compagnie Liberty Seguros, et le Bureau central français ne seront tenus à indemnisation que dans la limite de 5 millions de francs (762 245,09 euros) pour chaque victime, ces parties intimées soutiennent que la garantie responsabilité civile revendiquée par l'assuré se trouve ainsi contractuellement limitée au seul territoire espagnol, en l'état de la mention « sortie à l'étranger : assurance obligatoire CEE » figurant aux conditions particulières de la police et de l'article 22 des conditions générales ;

Que cet article 22 prévoit notamment que d'une part, les garanties couvertes par la police prennent effet pour les sinistres ayant eu lieu sur le territoire espagnol, la Principauté d'Andorre mais aussi dans tout autre pays déterminé par le Ministère des Finances comme l'exige le Traité d'adhésion de l'Espagne à la CEE et d'autre part, lorsque le fait a eu lieu à l'étranger, mais dans l'étendue territoriale décrite précédemment, la garantie est accordée dans les limites et les conditions minimales prévues dans la législation du pays sur le territoire duquel le sinistre a eu lieu ;

Qu'il est constant qu'en application de l'article R. 211-7 du Code des assurances, alors en vigueur au jour de l'accident, la limite était fixée à « au moins à cinq millions de francs par victime », soit 762 245,09 euros ;

Que toutefois, ainsi qu'il ressort de l'argumentation développée par M. Antoni D... C... comme par la société GMF, et plus précisément à la lumière des consultations établies par Maître Oscar B..., le 12 février 2014 et son complément en date du 11 avril 2014 [pièces 7 et 9 de M. Antoni D... C... ], la cour constate :

que la police d'assurance contractée par M. Antoni D... C... auprès de la compagnie Ercos (Liberty Seguros) comprend une couverture illimitée des préjudices engendrés par un accident de la circulation ;

qu'aucune clause ne spécifie expressément une limitation territoriale de l'assurance au seul territoire espagnol, à commencer par celle relative à la responsabilité civile « illimitée » ;

qu'il s'en évince que toute clause venant limiter les effets de la clause relative à la responsabilité civile illimitée s'analyse comme une clause limitative, en ce qu'elle vient exclure un territoire ou réduire le montant de l'indemnisation ;

que tel est le cas de l'article 22 des conditions générales qui ne tend qu'à limiter l'objet du contrat qui se trouve en réalité délimité par l'article 28 des mêmes conditions, sous l'intitulé « Objet de la couverture », lequel dispose que « l'assureur garantit avec le champ et jusqu'aux limites stipulées dans les conditions particulières de cette police le paiement des indemnités... » ;

que si l'article 22 inclut la France parmi les territoires sur lesquels sont survenus les sinistres ainsi couverts, la garantie n'est accordée que « dans les limites et conditions minimales prévues par la législation du pays sur le territoire duquel s'est produit le sinistre », ce qui n'implique pas nécessairement que seule l'assurance obligatoire serait concernée plutôt que d'autres points tels que liés à l'évaluation de certains dommages ou lésions ;

qu'enfin, la mention « sortie à l'étranger : assurance obligatoire CEE » opère, sans être explicite, une restriction du caractère illimité de la garantie responsabilité civile et dans le cas contraire, elle opérerait alors une restriction du champ territorial sans aucunement la définir, encore moins préciser où et en quoi serait limitée la garantie dite « illimitée » ;

Que dès lors, s'agissant de clauses limitatives au sens du droit espagnol, leur validité découle du respect des dispositions de l'article 3, alinéa 1er, dernier paragraphe de la loi 50/1980 du 8 octobre 1980 sur le contrat d'assurance, en ce que ces clauses doivent « se distinguer afin d'être perçues facilement pour assurer leur connaissance incontestable par l'assuré » et « être acceptées par écrit par le preneur (assuré), qui doit en être signataire » ;

Que force est de constater qu'au cas d'espèce, la clause dont se prévaut la compagnie Liberty Seguros relative à la « sortie à l'étranger » n'est ni mise en évidence, encore moins n'a été acceptée par écrit par M. Antoni D... C... et surtout, que l'absence de clarté et de transparence dans la police d'assurance dont s'agit n'est pas de nature à recevoir application par une restriction des droits de l'assuré, alors que celui-ci avait tout lieu de penser que tout risque découlant de la circulation était couvert, en l'état du contrat à garantie illimitée ainsi conclu ;

Qu'il en est tout autant d'une limitation exprimée dans une condition générale, telle que celle exprimée aux termes de l'article 22, qui n'a pas plus été mise en évidence ou distinguée au sens de l'article 3 précité de la loi 50/1980, encore moins acceptée expressément par l'assuré ;

Que dans ces conditions, sans qu'il n'y ait lieu de se prononcer sur la nécessité d'un sursis à statuer, inopérant au cas d'espèce, infirmant le jugement dont appel en ce sens, la cour dira que la compagnie Liberty Seguros et le Bureau central français seront tenus in solidum à une garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Mme Elodie X... et des époux X... » ;

ALORS QUE le BCF est garant de l'indemnisation des victimes d'accidents survenus sur le territoire français dans lesquels est impliqué un véhicule terrestre à moteur ayant son lieu de stationnement habituel sur le territoire d'un Etat membre de l'Union européenne dans les limites et conditions applicables à l'assurance automobile obligatoire ; qu'à la date de l'accident de la circulation dont ont été victimes les consorts X..., l'assurance automobile obligatoire prévoyait un seuil de garantie de cinq millions de francs par victime de sinistre corporel ; que cette somme constituait donc le plafond légal de la garantie du BCF ; qu'en retenant pourtant que le BCF était tenu à garantie illimitée des conséquences de l'accident survenu le 11 avril 1987 au préjudice de Madame Elodie X... et des époux X..., la Cour d'appel a violé l'article 2 de la directive 72/166 CEE du 24 avril 1972, l'article L. 211-4 du Code des assurances, ensemble l'article R. 211-7 du Code des assurances, dans sa rédaction issue du décret n° 86-21 du 7 janvier 1986, applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-10856
Date de la décision : 13/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 04 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 déc. 2018, pourvoi n°15-10856


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:15.10856
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award