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12/12/2018 | FRANCE | N°17-27776

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 décembre 2018, 17-27776


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par lettre de mission du 24 avril 2008, la société Mont-Blanc orthopédie (la société MBO) a confié à la société d'expertise comptable In Extenso Mont-Blanc (la société In Extenso) des missions comptables, fiscales, juridiques et sociales ainsi qu'une mission spécifique de secrétariat et de soutien administratif, un salarié de la société In Extenso devant à ce titre être présent à temps partiel dans la société MBP ; que, les relations contractuelles entre le

s parties s'étant interrompues en 2014, la société In Extenso a demandé le pai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par lettre de mission du 24 avril 2008, la société Mont-Blanc orthopédie (la société MBO) a confié à la société d'expertise comptable In Extenso Mont-Blanc (la société In Extenso) des missions comptables, fiscales, juridiques et sociales ainsi qu'une mission spécifique de secrétariat et de soutien administratif, un salarié de la société In Extenso devant à ce titre être présent à temps partiel dans la société MBP ; que, les relations contractuelles entre les parties s'étant interrompues en 2014, la société In Extenso a demandé le paiement d'un solde d'honoraires, que la société MBO a été enjointe de régler par une ordonnance d'un président de tribunal de commerce, à laquelle elle a formé opposition ; qu'estimant avoir réglé à tort la revalorisation des honoraires annuels demandée par la société In Extenso et que celle-ci avait surfacturé ses prestations administratives, la société MBO a demandé à titre reconventionnel la condamnation de la société In Extenso à lui rembourser différentes sommes ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société MBO concernant le dépassement d'honoraires, l'arrêt retient que la clause de réactualisation contractuellement prévue n'imposait pas la signature d'un avenant pour la revalorisation des honoraires et que, en ayant payé pendant plusieurs exercices les honoraires, sans faire usage de la faculté de dénonciation prévue au contrat, la société MBO avait accepté les augmentations litigieuses ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société MBO qui soutenait que, les termes de la lettre de mission ne contenant aucune indication permettant de déterminer ou d'encadrer l'actualisation des honoraires de l'expert-comptable lors de chaque renouvellement de sa mission par tacite reconduction, cette stipulation constituait une condition purement potestative qui devait être déclarée nulle, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société MBO fondée sur la surfacturation des prestations administratives, l'arrêt retient que les premiers juges ont considéré, à tort, qu'un avenant aurait dû être établi, dès lors qu'en application des termes de la lettre de mission, il n'y avait pas lieu de distinguer entre les prestations de secrétariat administratif et de présentation des comptes annuels ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la clause d'actualisation litigieuse autorisait la modification unilatérale à la baisse par le cabinet d'expertise comptable, sans contrepartie financière, du nombre d'heures effectuées par son intervenant au sein de la société MBO pour la réalisation des tâches du poste secrétariat administratif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de restitution des paiements intervenus en vertu de l'exécution provisoire, l'arrêt rendu le 19 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société In Extenso Mont-Blanc aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Mont-Blanc orthopédie la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

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Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Mont-Blanc orthopédie.

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné reconventionnellement la SA IN EXTENSO MONT BLANC à payer à la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE la somme de 25.720,79 € TTC au titre des surfacturations sur le poste « secrétariat et administratif » et, statuant à nouveau, d'avoir condamné la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE à payer à la SA IN EXTENSO MONT BLANC la somme de 11.971,80 € TTC avec intérêts légaux à compter du 23 juillet 2014 et capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du code civil,

AUX MOTIFS QUE :

« Les premiers juges ont considéré à juste titre que la société MONT BLANC ORTHOPEDIE ne pouvait demander paiement de la somme de 6.811,80 € TTC au titre du dépassement des honoraires puisque leur augmentation résultait de la régularisation des honoraires annuels conventionnellement prévus qui n'était pas soumise à la signature d'un avenant.

En outre, en payant pendant plusieurs exercices les honoraires litigieux sans faire usage de la faculté de dénonciation prévue au contrat, la société MONT BLANC ORTHOPEDIE a accepté les augmentations litigieuses.

Par contre, les premiers juges ont estimé qu'il convenait d'établir un avenant pour la revalorisation des prestations administratives.

Ils ont ainsi introduit une distinction que rien ne justifie puisqu'en effet, la clause relative à l'actualisation concerne l'ensemble des prestations contenues dans la lettre de mission.

Par ailleurs, le grief tenant à l'absence de distinction entre les différentes prestations fournies par l'expert comptable se révèle infondé puisqu'en effet les factures distinguent les prestations de secrétariat administratif de celles relatives aux missions de présentation des comptes annuels, et en tout cas, il n'apparaît pas que la société IN EXTENSO MONT BLANC ait réclamé des honoraires au titre des « prestations optionnelles ».

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Il convient enfin d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré pour faire droit à la demande de la société IN EXTENSO MONT BLANC, sous réserve cependant que la demande relative aux intérêts de retard, formulée de façon ambiguë, ne fait pas clairement référence aux dispositions de l'article L. 441-6 du code de commerce, et à défaut dans la lettre de mission de dispositions spécifiques (page 3). »

1- ALORS QUE le jugement doit être motivé à peine de nullité ; Que le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs ; Que la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE faisait valoir en page 12 de ses conclusions d'appel (prod. 2) que, les termes de la lettre de mission ne contenant aucune indication permettant de déterminer ou d'encadrer l'actualisation des honoraires de l'expert comptable lors de chaque renouvellement de sa mission par tacite reconduction, cette stipulation constituait une condition purement potestative qui devait être déclarée nulle et non avenue conforment aux dispositions de l'article 1174 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; Qu'en énonçant, sans répondre à ce moyen de droit opérant, que les premiers juges ont estimé à juste titre que la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE ne pouvait demander le remboursement de la somme payée au titre du dépassement des honoraires, leur augmentation résultant de la régularisation contractuellement prévue qui n'était pas soumise à la signature d'un avenant, et la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE ayant accepté les augmentations litigieuses en les payant pendant plusieurs exercices sans faire usage de la faculté de dénonciation prévue au contrat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2- ALORS QUE le juge, tenu de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; Que la SA IN EXTENSO MONT BLANC n'a jamais soutenu dans ses conclusions d'appel (prod. 3) que la clause de réactualisation des honoraires insérée dans la lettre de mission liant les parties l'autorisait à modifier unilatéralement à la baisse, sans contrepartie financière, le nombre d'heures de présence de son intervenant dans les locaux de la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE conventionnellement prévu pour l'exécution des tâches du poste « secrétariat et administratif » ; Qu'en relevant d'office et sans provoquer un débat contradictoire entre les parties le moyen pris de ce qu'en estimant qu'il convenait d'établir un avenant pour la revalorisation des prestations administratives, les premiers juges avaient introduit une distinction que rien ne justifie, la clause relative à l'actualisation concernant l'ensemble des prestations convenues dans la lettre de mission, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3- ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; Que la lettre de mission des 18 février et 24 avril 2008 (prod. 4) stipule seulement que les honoraires de l'expert comptable sont actualisés à chaque renouvellement de mission et ne contient aucune clause autorisant l'expert comptable à modifier unilatéralement à la baisse et sans contrepartie financière le nombre de demi-journées effectuées par son intervenant pour l'exécution des tâches stipulées au poste d'intervention récurrente « secrétariat et administratif » ; Qu'en la présente espèce, la demande de la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE au titre des surfacturations des prestations était principalement fondée sur le nombre de demi-journées réellement effectuées en son sein par l'intervenant de la SA IN EXTENSO par rapport aux stipulations contractuelles n'ayant fait l'objet d'aucun avenant (cf. prod. 2 p. 13 à 15) ; Qu'en déboutant la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE de sa demande de confirmation du jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la SA IN EXTENSO à payer à la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE la somme de 25.720,79 € TTC au titre de la surfacturation des prestations administratives au seul motif qu'en estimant qu'il convenait d'établir un avenant pour la revalorisation des prestations administratives, les premiers juges avaient introduit une distinction que rien ne justifie, la clause relative à l'actualisation concernant l'ensemble des prestations contenues dans la lettre de mission, la cour d'appel, qui n'a pas recherché ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions dont elle était saisie si la clause d'actualisation litigieuse autorisait la modification unilatérale à la baisse par le cabinet d'expertise comptable, sans contrepartie financière, du nombre d'heures effectuées par son intervenant au sein de la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE pour la réalisation des tâches du poste « secrétariat et administratif », n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

4- ALORS QUE le jugement doit être motivé à peine de nullité ; Que le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs ; Que la SARL MONT BLANC ORTHOPEDIE se prévalait en pages 9 et 10 de ses conclusions d'appel (prod. 2) des dispositions combinées des articles 1134 du code civil et 151 du décret n° 2012-432 du 30 mars 2012 pour démontrer que la modification à la baisse et sans contrepartie financière du nombre de demi-journées de présence dans ses locaux de l'intervenant de la SA IN EXTENSO pour effectuer les tâches stipulées au poste « secrétariat et administratif » de la lettre de mission constituait une modification des modalités d'exécution de la mission confiée au cabinet d'expertise comptable nécessitant la signature soit d'un avenant, soit d'une nouvelle lettre de mission ; Qu'en s'abstenant totalement de s'expliquer sur ce moyen de droit opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-27776
Date de la décision : 12/12/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 19 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 déc. 2018, pourvoi n°17-27776


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.27776
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