LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen pris en sa première branche, ci-après annexé :
Attendu que la procédure prud'homale étant orale, le compte-rendu par les juges du fond des moyens et prétentions des parties fait foi jusqu'à inscription de faux ; que la cour d'appel ayant constaté que le salarié avait renoncé en cause d'appel à sa demande de résiliation judiciaire, le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et sur le second moyen, ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté les demandes de Monsieur X... tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et, subsidiairement, à voir constater l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et tendant à la condamnation de la société ELIXIS DIGITAL à lui verser des indemnités de rupture, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de préavis et de congés payés ;
AUX MOTIFS QU' « en cause d'appel, Monsieur X... renonce à sa demande de résiliation judiciaire mais fait valoir que son licenciement serait dénué de cause réelle et sérieuse au seul motif que l'inaptitude pour laquelle il a été prononcé, serait due à l'exécution déloyale du contrat de travail. Cependant, cette déloyauté n'étant pas établie. Monsieur X... fait également valoir que son licenciement comportait en réalité un motif économique déguisé. Cependant, il ne rapporte pas la preuve de cette allégation et ne conteste ni la réalité de son inaptitude, ni le respect par l'employeur de son obligation de reclassement. Le jugement doit être confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L'inaptitude physique, non contestée, empêchant le salarié d'exécuter le préavis, le jugement doit également être confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité de préavis et de congés payés afférents » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU' « aux termes de l'article L.1222-1 du Code du Travail le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que le salarié qui reproche à son employeur des manquements graves à ses obligations contractuelles peut demander au Conseil de résilier son contrat de travail ; qu'en cas de résiliation, la rupture est considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et qu'à défaut de résiliation, la relation contractuelle se poursuit ; que Monsieur Philippe X... a saisi le Conseil en demande de la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à la Société ELIXIS DIGITAL pour divers manquements de la Société ELIXIS DIGITAL à ses obligations contractuelles ; que la régularisation salariale, effectuée ou restant à parfaire, ne saurait fonder une résiliation judiciaire ;
que Monsieur Philippe X... fait état du manquement grave dans l'exécution du contrat de travail par son employeur résultant de l'absence de précision sur les bulletins de salaire du coefficient conventionnel précis correspondant à ses fonctions ; que la Société ELIXIS DIGITAL en reconnaissance de cet oubli a fait à Monsieur Philippe X... le 26 novembre 2014 une proposition de classification conventionnelle précise ; que la Société ELIXIS DIGITAL ne pouvant unilatéralement imposer à un salarié une classification a attendu un accord exprès à cette proposition ; que Monsieur Philippe X... n'a jamais donné son consentement à cette proposition avant le licenciement ; que l'anomalie constituée par l'oubli de la mention du coefficient conventionnel précis ne saurait fonder une résiliation judiciaire ; qu'aucune rémunération complémentaire de nature contractuelle n'était en vigueur ; que le contrat de travail de Monsieur Philippe X... précisait qu'il «pourra s'ajouter des primes sur objectifs, sur des projets ponctuels. L'employeur ne contracte aucune obligation quant à la récurrence de ces primes ou à leurs montants » ; que Monsieur Philippe X... ne rapporte pas la preuve d'une obligation contractuelle de l'employeur à lui verser des primes selon des modalités de calcul, de fréquence ou de montant définis ; que Monsieur Philippe X... ne rapporte la preuve ni n'établit la gravité des différents manquements que son employeur aurait commis dans l'exécution du contrat de travail ; que le Conseil juge que les faits reprochés par Monsieur Philippe X... à la Société ELIXIS DIGITAL ne justifient pas de la résiliation judiciaire du contrat de travail ; En conséquence, le Conseil déboute Monsieur Philippe X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail. Sur la demande de dire et juger que le licenciement pour inaptitude est sans cause réelle ni sérieuse que les articles L.1226-2 et L1226-10 du Code du Travail disposent que si à l'issue de la suspension de son contrat de travail, le salarié est déclaré, par le médecin du travail, inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer « un autre emploi approprié à ses capacités (...) aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail » ; que l'article L1226-12 du Code du Travail indique que « Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement », et précise que «L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III [du Code du Travail] » ; qu'une inaptitude totale a été déclarée par le Médecin du Travail ; qu'à la suite de cette inaptitude, la Société ELIXIS DIGITAL a effectué une recherche approfondie de reclassement interne et externe, aboutissant à la sélection de deux postes de travail, dont un fut proposé au salarié après avis favorable du Médecin du Travail ; que ce poste proposé a été refusé par Monsieur Philippe X... ; que le Conseil juge que le licenciement prononcé repose sur une cause réelle et sérieuse ; En conséquence, le Conseil déboute Monsieur Philippe X... de sa demande de dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse » ;
1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses dernières conclusions écrites, auxquelles la cour s'est expressément référée, Monsieur X... sollicitait, à titre principal, la résiliation judiciaire de son contrat de travail (V., p. 13), ne concluant que subsidiairement à l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement ; qu'en affirmant pourtant que celui-ci avait renoncé à cette demande en résiliation, la cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses dernières conclusions, auxquelles la cour s'est expressément référée, Monsieur X... faisait valoir que la société ELIXIS DIGITAL n'avait pas sérieusement recherché de solution de reclassement, puisque, notamment, le poste qui lui avait été proposé devait s'exercer dans les locaux dans lesquels il avait travaillé et sous la responsabilité de Monsieur Z..., c'est-à-dire dans les conditions qui avaient conduit à son inaptitude, et qu'elle n'avait effectuée que des recherches fantaisistes de reclassement externe au sein du groupe auquel appartient la société (V. p. 17) ; qu'en affirmant que Monsieur X... ne contestait pas le respect par l'employeur de son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QU'un licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse s'il repose sur une inaptitude du salarié qui est imputable au comportement de l'employeur ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir que son inaptitude résultait du comportement de Monsieur Z... et des conditions de travail qui lui avaient été imposées ; qu'en ne recherchant pas si l'inaptitude de l'exposant n'était pas imputable au comportement de son supérieur et à ses conditions de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 4.040,11 € les sommes auxquelles la société ELIXIS DIGITAL devait être condamnée à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... tendant à la condamnation de la société ELIXIS DIGITAL à lui verser une indemnité pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article L. 3243-3 du code du travail, l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat. Aux termes de l'article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Il appartient donc au salarié de produire au préalable des éléments de nature à étayer sérieusement sa demande. En l'espèce, par lettre du 15 octobre 2014, Monsieur X... a argué de la nullité de la convention de forfait et réclamé à la société ELIXIS DIGITAL le paiement d'un rappel de salaires de 76 089 euros en rémunération d'heures supplémentaires. Les parties s'entendent en effet sur la nullité de la convention de forfait et sur le fait que Monsieur X... était rémunéré sur la base de 35 heures par semaine. Suite à la demande de la société ELIXIS DIGITAL, Monsieur X... lui a alors adressé, le 22 décembre 2014, un tableau de calcul et a estimé que seule restait due la somme de 7 554,27 euros bruts qu'elle lui a ensuite réglée par chèque du 12 mars 2015. Devant le conseil de prud'hommes, Monsieur X... réclamait un rappel de salaires, non plus de 76 089 euros, mais de 39 123,78 euros. Dans le cadre de la présente instance, il demande la somme de 49 137 euros, produit un tableau de calcul journalier, ainsi que des courriels échangés tôt le matin ou tard le soir. Il produit également l'attestation de Madame A... qui déclare qu'il commençait sa journée de travail régulièrement avant 9 heures et restait après son départ vers 18 heures. De son côté, la société ELIXIS DIGITAL produit un procès-verbal de constat dressé le 21 janvier 2016 relatif à l'historique de navigation de Monsieur X... sur internet à partir de l'ordinateur mis à sa disposition, ainsi que les documents recueillis dans ce cadre, notamment un historique des connections. Monsieur X... demande à la cour d'écarter ces pièces des débats au motif qu'elles auraient été collectées frauduleusement, en l'absence de déclaration préalable à la CNIL et sans que lui même ait été préalablement informé de la collecte et du traitement de ses données personnelles. Cependant, les fichiers présents sur les ordinateurs mis à disposition des salariés par l'employeur et qui ne sont pas identifiés comme étant personnels ont nécessairement un caractère professionnel, de même que les connexions effectuées sur cet ordinateur sont présumées avoir un caractère professionnel et ne constituent pas des données nominatives dont la collecte est soumises à déclaration à la CNIL ainsi qu'à une information du salarié concerné. Tel étant le cas en l'espèce, la société ELIXIS DIGITAL, pouvait valablement produire les pièces en cause. Il résulte de l'historique des connections qu'à de multiples reprises, Monsieur X... s'est connecté sur des sites n'ayant aucun rapport avec son activité professionnelle pour une durée totale de 71 heures entre les mois de février 2013 et octobre 2014, ce qui contredit le décompte qu'il produit. Par lettre officielle du 17 février 2017, le conseil de la société ELIXIS DIGITAL a proposé à celui de Monsieur X... d'organiser, à sa charge la tenue d'un nouveau constat d'huissier sur son ancien poste de travail en sa présence, avec la possibilité d'être accompagné par un expert de son choix qui pourrait accéder au poste. Monsieur X... ne prouve, ni même n'allègue avoir accepté cette proposition et ne formule aucune contestation précise des éléments recueillis, de telle sorte que les éléments produits par l'entreprise doivent être considérés comme probants. La société ELIXIS DIGITAL produit également l'attestation de Monsieur B..., ancien collègue de Monsieur X..., qui déclare que "ses absences répétées pour des rendez-vous personnels pendant ses horaires de travail m'ont souvent été rapportées par des collaborateurs, fragilisant le statut des managers". Il résulte par ailleurs, qu'après avoir varié à deux reprises dans le nombre d'heures supplémentaires qu'il prétend avoir réalisées, Monsieur X... présente un troisième décompte comportant des incohérences, telle la mention de travail effectué le 11 juin 2013 alors qu'il se trouvait en arrêt pour maladie ou encore d'un déjeuner de travail du 23 mai 2013, en réalité repoussé au 4 juin et compté deux fois. Enfin, la société ELIXIS DIGITAL produit l'agenda électronique de Monsieur X..., ainsi qu'un historique des horaires réalisés selon elle par lui, faisant apparaître seulement 45,44 heures supplémentaires. Il résulte de la confrontation entre ces différents éléments, que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a estimé. compte tenu des sommes que l'entreprise avait déjà versées au titre des heures supplémentaires, que le montant restant dû s'élevait à 4 040,11 euros, correspondant à 91 heures supplémentaires, nombre d'ailleurs non contesté par la société ELIXIS DIGITAL. Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point et d'ajouter la somme de 404,01 euros au titre des congés payés afférents. Sur la demande de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement Du fait du rappel de salaire dû au titre des heures supplémentaires, Monsieur X... est fondé à percevoir ce rappel que le conseil de prud'hommes a évalué à juste titre à 229,13 euros et doit être débouté du surplus de cette demande. Sur la demande d'indemnité compensatrice de la contrepartie obligatoire en repos Monsieur X... n'ayant pas dépassé le contingent annuel de 220 heures supplémentaires sur lequel cette demande est fondée, doit en être débouté. Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé Il résulte des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, que le fait, pour l'employeur, de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie du salarié un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli est réputé travail dissimulé et ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires. En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées par l'employeur ne résulte pas d'une volonté frauduleuse de sa part, mais de l'absence de contrôle du temps de travail en présence d'une convention de forfait que les parties croyaient alors valable. Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de cette demande ;
1°) ALORS QUE les juges du fond doivent motiver leurs décisions sans pouvoir se contenter de simples affirmations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que l'absence de déclaration des heures supplémentaires non-rémunérées effectuées par Monsieur X... résultait, non d'une intention frauduleuse, mais de l'absence de contrôle de son temps de travail en présence d'une convention de forfait que les parties croyaient alors valable ; qu'en statuant ainsi, sans ni justifier de cette prétendue croyance commune, ni préciser les pièces qui fondaient cette affirmation, après avoir au contraire constaté que « les parties s'entend[ai]ent sur la nullité de la convention de forfait », la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6§1 de la Convention ESDH ;
2°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux moyens opérants des parties ; qu'en l'espèce, l'exposant contestait le caractère probant du constat d'huissier établi non-contradictoirement produit par la société ELIXIS DIGITAL, en faisant notamment valoir que l'huissier avait repris les déclarations de l'adversaire, que l'ordinateur avait manifestement été manipulé après le départ de Monsieur X... de l'entreprise et avant l'intervention de l'huissier, que ce dernier n'identifiait pas avec certitude l'ordinateur examiné et que le fichier d'historique avait été manipulé (V. p. 26) ; qu'en retenant le constat établi dans ces conditions, sans s'expliquer sur son caractère probant, ni répondre aux conclusions de l'exposant sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6§1 de la Convention ESDH.