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11/12/2018 | FRANCE | N°17-85869

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 décembre 2018, 17-85869


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

-
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L'association Ardeva,
L'association Andeva, parties civiles,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 15 septembre 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim.,14 avril 2015, n°14-85.334), dans l'information ouverte contre personne non dénommée des chefs notamment d'homicides et blessures involontaires, a annulé la mise en examen de M. Jean-Luc X... ;

La COUR, statuant après débats

en l'audience publique du 7 mai 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'art...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

-
-
L'association Ardeva,
L'association Andeva, parties civiles,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 15 septembre 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim.,14 avril 2015, n°14-85.334), dans l'information ouverte contre personne non dénommée des chefs notamment d'homicides et blessures involontaires, a annulé la mise en examen de M. Jean-Luc X... ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 mai 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Straehli, Mme Durin-Karsenty, MM. Ricard, Parlos, Bonnal, Cathala, conseillers de la chambre, M. Barbier, Mme de Lamarzelle, conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme le Dimna ;

Greffier de chambre : Mme Hervé aux débats, Mme Z... au délibéré ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE ET HANNOTIN, la société civile professionnelle COUTARD ET MUNIER-APAIRE, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA, les avocats de parties ayant eu la parole en dernier ;

Sur le pourvoi formé par l'association Andeva :

Attendu que l'association Andeva s'est régulièrement pourvue en cassation contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 15 septembre 2017 ;

Attendu qu'elle n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son conseil, un mémoire exposant ses moyens de cassation ; qu'il y a lieu, en conséquence, de la déclarer déchue de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale ;

Sur le pourvoi formé par l'association Ardeva :

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 19 janvier 2018, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 24 avril 2006, l'Association régionale de défense des victimes de l'amiante du Nord et du Pas-de-Calais (Ardeva) et Serge J... , salarié de la société Chantiers du Nord et de la Méditerranée (Normed) sise à Dunkerque, ont porté plainte auprès du procureur de la République en dénonçant les dommages résultant, pour les salariés de cette société et leurs épouses, de l'exposition à l'amiante ; qu'une information judiciaire a été ouverte ; que d'autres victimes s'étant constituées partie civile, divers réquisitoires supplétifs ont été joints ; que le juge d'instruction a mis en examen du chef d'homicides involontaires sur les personnes de Serge J... , Martine A..., Arlette B... et Sylviane C..., M. X..., en sa qualité de fonctionnaire au ministère du travail, affecté à la direction des relations du travail et chef du bureau "Hygiène en milieu du travail", également secrétaire du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels ; qu'il lui était reproché, entre 1977 et 1994, par ses fonctions et sa participation active au comité permanent amiante (CPA), d'avoir créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou de n'avoir pas pris les mesures permettant de l'éviter, en connaissance de la gravité des risques encourus par les salariés de la société Normed du fait de leur exposition à l'amiante ; que M. X... a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en annulation de sa mise en examen ;

En cet état ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité déposée par l'association Ardeva par mémoire spécial du 17 septembre 2018 ;

Attendu que ce mémoire est irrecevable dès lors qu'il a été déposé postérieurement au 7 mai 2018, date à laquelle l'affaire a été examinée à l'audience et mise en délibéré, aucune réouverture des débats n'étant intervenue dans ce dossier ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 2, 80, 80-1, 85, 173,173-1,174, 202, 206, 459, 512, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 121-3, 221-6, 222-19, 223-1 du code pénal, 6 de la convention européenne des droits de l'homme, le principe de respect de l'égalité des armes, manque de base légale et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la mise en examen de M. X..., constaté que celui-ci avait la qualité de témoin assisté ;

"aux motifs que « la requête en annulation a été présentée dans les formes et les délais légaux prévus à l'article 173-1 du code de procédure pénale ; qu'elle est donc régulière et recevable ; que selon l'article 173-1 du code de procédure pénale, celui-ci disposait, sous peine d'irrecevabilité, d'un délai de 6 mois à compter de la notification de sa mise en examen pour faire connaître les moyens venant à l'appui de sa demande en annulation de celle-ci ; qu'une telle disposition n'est cependant pas applicable au ministère public ; que la chambre de l'instruction a en outre le droit en vertu de l'article 174 du même code de relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile et que dès lors que les parties ont été à même d'en débattre, ce qui est le cas en l'espèce pour les moyens que les parties civiles voudraient voir écarter, elle fera usage en tant que de besoin de ce droit ; qu'il résulte de l'article 80-1 du code de procédure pénale qu'à peine de nullité le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à rencontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont il est saisi ; que M. X... soit mis en examen des chefs de blessures et homicides involontaires concernant des personnes réputées avoir contracté une pathologie liée à leur exposition à l'amiante sur le site des chantiers de la société Normed à Dunkerque, et pour certaines d'entre elles, d'en être décédées ; que la mise en examen porte pour chacun des requérants sur des victimes précisément nommées; que la formulation en est suffisamment explicite pour exclure l'interprétation du Comité anti-amiante jussieu, tendant à l'étendre à d'autres victimes potentielles ; qu'il n'est pas contesté que les pathologies dont sont ou ont été atteintes ces victimes résultent de leur exposition à l'amiante, sur le site des chantiers de la société Normed ; qu'il n'est pas non plus contesté pour les victimes des faits qualifiés d'homicides involontaires que leur décès résulte de telles pathologies; qu'il résulte des éléments du dossier que les victimes ont été exposées à l'amiante, dans le cadre de leur emploi sur le site des chantiers de la société Normed -par une manipulation directe d'amiante ou de matériaux en contenant, soit par leur évolution dans un univers pollué par des poussières résultant de travaux de calorifuge age, flocage ou autres ; qu'il est reproché au mis en examen d'avoir, par des négligences ou imprudences constitutives de fautes caractérisées, en toute connaissance de cause des risques d'une particulière gravité courus par les personnes exposées à l'amiante, connu comme cancérigène et des dangers de l'usage contrôlé de l'amiante, en contribuant à créer la situation qui a permis la réalisation des dommages ou en ne prenant pas les mesures permettant de les éviter, s'agissant de la préservation de la santé et de la vie des salariés de la société Normed, involontairement causé des blessures ou des homicides sur telles personnes précisées ; que, ce faisant, le juge d'instruction s'est placé sur le terrain de l'article 121-3 alinéa 4 du code pénal, concernant "les personnes qui n'ont pas directement causé le dommage", et qu'il ne pouvait d'ailleurs en être autrement dès lors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que les requérants aient été par une action directe à l'origine des pathologies déclenchées ; que le magistrat instructeur s'est également placé explicitement sur le terrain de la faute caractérisée, et qu'il ne pouvait d'ailleurs là aussi en être autrement dès lors qu'aucune loi ou règlement ne soumettait les activités menées par M. X... à une quelconque règle particulière de sécurité dont la violation aurait pu être à l'origine du dommage ; qu'il convient à cet égard de remarquer que les parties civiles qui sollicitent subsidiairement que la responsabilité du mis en examen soit recherchée pour inobservation d'une obligation particulière de sécurité se garde bien de préciser de laquelle il s'agirait et quel en serait le fondement textuel ; qu'il appartient à la cour de contrôler, s'agissant du requérant, s'il résulte des éléments de l'information, relativement aux faits qui lui sont reprochés et à la période de prévention visée, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait, des indices graves ou concordants rendant vraisemblable, y compris au regard du lien de causalité, qu'il ait pu participer à la commission des faits d'homicides et de blessures involontaires qui lui sont reprochés au terme de sa mise en examen ; qu'en cas de réponse négative, elle n'a pas à rechercher si le comportement visé pourrait comporter une autre qualification, étant observé surabondamment que la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui" proposée à titre subsidiaire par les parties civiles se heurte au même obstacle juridique que la recherche d'une responsabilité sur le fondement de la violation d'une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; que la mise en examen reposant sur le seul terrain envisageable de la faute caractérisée, la vraisemblance de la participation du requérant à la commission de l'infraction, telle qu'elle est définie par la loi, implique qu'il n'y ait pas d'obstacle dirimant à la constatation du fait qu'il ne pouvait ignorer le risque d'une particulière gravité qu'il faisait courir à autrui du chef d'homicides involontaires au travers de la faute relevée à son encontre ; qu'il résulte de la mise en examen que le magistrat instructeur retient en substance comme fautif, à l'encontre de M. X... d'une part, des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, et d'autre part, sa participation active au CPA dont l'action aurait empêché la prise de la décision de l'interdiction de cette substance et contribué jusqu'au 1er janvier 1997 à l'insuffisance des mesures de protection des personnes exposées ; que le principe d'un usage contrôlé de l'amiante avait été retenu en France, avant la création du CPA, mais également, pour M. X... qui est le seul dont la prévention couvre une période antérieure, avant celle de sa prise de fonction ; qu'il avait été introduit en droit interne par le décret du 17 août 1977, qui fixait pour la première fois des valeurs limites auxquelles les salariés pouvaient être exposés dans leur emploi, alors qu'était déjà connu le caractère cancérigène de l'amiante et qu'on était " dans l'incertitude quant à une valeur "seuil" protégeant du risque de cancer ; que cette option prise par la France a été ensuite renforcée par la politique adoptée à l'échelle européenne à compter de 1983, sans que l'influence du CPA. ou de ses membres n'ait à cet égard été mise en cause ; que jusqu'en 1996, il n'a été dérogé à cette politique qu'en matière de flocage (à partir de 1977-1978), et pour la crocidolite (à partir de 1988), pour lesquels l'interdiction a prévalu ; que les conditions de travail sur le chantier de la société Normed étaient donc, à l'époque de la prévention, réglementées par la fixation de valeur limite d'exposition, dont les niveaux ont été progressivement revus à la baisse, au fur et à mesure de la transposition des directives européennes, puis dans le prolongement des études Peto et E.../D... de 1995, par le décret du 7 février 1996 ; que ces valeurs sont ainsi passées de 2 fibres/ml en 1977 à 1 f/cm3 en 1987, à 0,6 f/cm3 en 1992, à 0,3 f/ml sur 8 heures en 1996, pour le chrysolite, et de 2 fibres/ml en 1977 à 0,5 f/cm3 en 1987, à 0,3 f/cm3 en 1992, et à 0,1 f/cm3 sur 1 heure en 1996 pour les amphiboles ; que la politique de l'usage contrôlé servait les intérêts de l'industrie, mais également ceux de la préservation de l'emploi, ainsi que l'admis l'un des syndicalistes entendus ; que le CPA s'y montrait attaché, l'a incontestablement défendue et a milité en sa faveur ; que, pour autant, il ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans le maintien de cette orientation, que ce soit au niveau national ou international, ni ait empêché l'expression de points de vue divergents comme la réalisation de recherches scientifiques, susceptibles d'aboutir à un revirement de politique ; que les études scientifiques mettant en exergue les dangers de l'amiante ont en effet continué à être menées en France comme à l'étranger, et y compris par des personnalités scientifiques proches du CPA, telles MM. D... et E..., professeurs, dont l'étude épidémiologique menée à Jussieu a montré en 1995 qu'il existait un risque même en cas de faibles expositions ; que, par ailleurs, les pouvoirs publics disposaient de leurs propres organes d'expertise (le CSHPF dans lequel siégeait un membre de l'industrie) et consultatif paritaire (le CSPRP) ; que les responsables des directions centrales de l'Etat ont unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du CPA, dont certains ignoraient même l'existence et dont rien ne laisse paraître dans le dossier qu'il les aurait malgré tout à leur insu inspirés ; que l'indépendance des pouvoirs publics est d'ailleurs démontrée par l'orientation nouvelle qu'ils ont prise, sans même d'ailleurs recueillir l'avis du CPA, en 1995-1996, dès lors qu'ils ont pris connaissance de l'étude Peto ; que cette indépendance n'est pas remise en cause par le fait que certains membres de l'administration, agissant eux-mêmes dans le cadre de la politique de l'usage contrôlé de l'amiante, politique dont la détermination excédait largement leur niveau de compétence, ont à l'occasion mis à profit les compétences (pluridisciplinaires), les initiatives (notamment en matière de prévention), les relais (en particulier à l'égard des entreprises) voire ]a plume de cette structure, ce qui a permis aux pouvoirs publics d'exploiter certains travaux, au demeurant utiles, de ses groupes de travail, pour renforcer la prévention ; que dès lors que le postulat posé par le juge d'instruction de l'influence du CPA sur les décisions publiques en matière d'amiante n'est pas étayé par les éléments de l'information, la participation de M. X... à ces structures, à ses travaux, voire à ses interventions, ne peut être réputée être à l'origine du retard pris par la France dans l'interdiction de I'amiante et de l'insuffisance des mesures de protection des populations exposées, en particulier sur le site de la société Normed ;

"aux motifs également, que M. X..., qui se voit plus particulièrement reprocher par le magistrat instructeur des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, était ingénieur de formation et ne disposait pas de connaissances médicales ; que bien que l'ayant intégrée le 1er décembre 1971, il n'a commencé à apparaître sur les organigrammes de la Direction des Relations du Travail qu'à compter de 1982, en qualité de chef du bureau CT4 ; que ce bureau était chargé des mesures d'hygiène applicables dans les entreprises, des risques toxicologiques, physiques, infectieux et parasitaires, des agréments des organismes de vérification et de contrôle (suivi technique), des tableaux des maladies professionnelles ; que ce service a été unanimement décrit comme étant dépourvu à l'époque de moyens suffisants en personnel au regard de l'ensemble des problématiques relevant de sa compétence ; que le suivi de l'action des services d'inspection du travail et de l'inspection médicale du travail relevait d'un autre bureau que le sien ; que M. X... était placé sous l'autorité d'un sous-directeur, et à l'échelon supérieur d'un directeur ; qu'il ne bénéficiait pas d'une délégation de signature, ni d'une délégation de pouvoir, et n'était donc pas en mesure d'exprimer pour le compte du ministère du travail une position autre que celle qui avait été arrêtée par sa hiérarchie ; que si les parties civiles ont rappelé qu'il avait admis devant la commission du Sénat avoir pu disposer d'une certaine autonomie et d'un pouvoir réel de proposition, il ne détenait aucun pouvoir de décision et que l'influence qui lui est prêtée sur les détenteurs de ce pouvoir ne repose sur aucun élément précis et concret ; que le dossier démontre que la production normative est soumise à des procédures consultatives particulièrement lourdes, et donc à des délais qui s'imposaient à M. X..., et que ]a transposition des directives 83/418 et 851610 relevait de la DGCCRF et non du ministère du travail ; que les carences, manquements, retards, insuffisances reprochés à M. X... relevaient de pouvoirs et de moyens dont il était dépourvu, la faute évoquée par le juge d'instruction ne peut lui être imputable ;

"aux motifs, enfin, que les législations adoptées à l'étranger ou les recommandations d'organisation internationales dont il est fait état dans le dossier ne traitaient que de la manière dont d'autres pays avaient géré le risque lié à l'usage de l'amiante, ou que les instances internationales préconisaient de le faire, mais ne constituaient pas en elles-mêmes des outils de connaissance de ce risque, qui n'était pas encore complètement appréhendé ; que la perception de la particulière gravité du risque ne pouvait pas non plus résulter du nombre de pathologies déclenchées ou de décès enregistrés ; qu'elle était en effet masquée par la durée de la latence des pathologies en rapport avec l'amiante (d'au moins 10 ans, et pouvant aller jusqu' à 20 à 40 ans), si bien que si les chiffres relatifs aux maladies professionnelles étaient en constante augmentation, ils étaient légitimement attribués à des expositions antérieurs à la mise en oeuvre du décret du 17 août 1977; que le rappel historique de l'évolution des connaissances scientifiques ne doit pas faire perdre de vue qu'elles ne se sont pas imposées de façon évidente et indiscutée au fur et à mesure des découvertes énumérées ; qu'à l'époque de la prévention, les risques engendrés par l'utilisation du minéral en cause faisaient encore l'objet en France comme à l'étranger de nombreuses études, si bien que les connaissances étaient en constante évolution ; que la prise en compte des résultats des études expérimentales ou épidémiologiques était d'autant plus difficile que le risque était fonction de nombreux paramètres (type d'amiante, dimension des fibres, types/durées/intensité des expositions) et différait selon la nature de la pathologie étudiée ; que "la relative longueur des délais de remise du rapport", dont les ministères du travail et des affaires sociales se sont plaints auprès de l'Inserm en 1996, laquelle était en partie due à "la méthode de travail de l'équipe qui a préféré, à une juxtaposition de points de vue divergents, la recherche d'un consensus sur l'analyse des risques" est d'ailleurs la preuve que, même aux yeux des spécialistes, le sujet faisait débat ; qu'il est certes constant qu'à la fin des années 70, l'amiante était déjà considéré depuis longtemps comme un produit dangereux, notamment cancérigène ; que, si la fixation de valeurs limite d'exposition était réputée protéger efficacement contre le risque d'asbestose, l'existence ou non d'un seuil en dessous duquel le risque de cancer- et, en particulier, le mésothéliome- pouvait être écarté, était encore incertaine ; que même l'expertise collective de l'Inserm, pourtant fondée sur la synthèse des enseignements susceptibles d'être tirés de 1200 rapports et études publiés à l'échelle internationale, n'a d'ailleurs pas abouti à une réponse catégorique sur ce point, puisqu'elle a indiqué qu'il existait une incertitude sur la forme exacte de la relation dose-risque de cancer pour les expositions inférieures à 1 fibre/ml ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par les mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à leur encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés ; qu'en conséquence, il ne se déduit pas de l'information l'existence d'indices grave ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux délits d'homicides involontaires sur les personnes de MM. J... , A..., B... et C... ; qu'il y a donc lieu d'annuler sa mise en examen sur le fondement de l'article 80-1 du code de procédure pénale, et de canceller la phrase «nous notifions à la personne qu'elle est mise en examen pour les faits qui lui ont été notifiés» en cote D252/5 ; que par voie de conséquence, il sera constaté que, par application de l'article 174-1 du code de procédure pénale, M. X... a la qualité de témoin assisté ; qu'eu égard à la nullité prononcée, il n'y a pas lieu de se prononcer sur d'autres moyens de nullité ; que l'examen de la totalité de la procédure n'a pas révélé d'autre méconnaissance de la loi de nature à affecter sa régularité » ;

"1°) alors que, si le ministère public peut lui-même saisir la chambre de l'instruction par une requête en nullité sans être enfermé par le délai de forclusion de six mois prévu pour les mis en examen, les témoins assistés et les parties civiles, il lui est toutefois, en principe, impossible d'introduire des moyens nouveaux, à l'appui de cette requête, postérieurement à la saisine de la chambre de l'instruction, sous peine d'irrecevabilité ; que le ministère public est, à cet égard, irrecevable à présenter, plusieurs années après la saisine de la chambre de l'instruction, des moyens nouveaux tendant à l'annulation d'une mise en examen, et notamment à l'occasion d'un renvoi, devant ladite chambre de l'instruction, ordonné après cassation d'un premier arrêt d'annulation de la mise en examen, sauf à démontrer ; qu'il n'aurait pu les connaître avant; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué a admis la recevabilité de moyens nouveaux présentés par le ministère public, en 2016, à l'occasion d'un renvoi intervenu après cassation, en 2015, d'un précédent arrêt ayant annulé les mises en examen litigieuses, et donc plusieurs années après la saisine de la chambre de l'instruction ; qu'en statuant ainsi (arrêt p. 25), en excipant de ce que le ministère public ne serait pas tenu par le délai de forclusion de six mois prévu à l'article 173-1, la chambre de l'instruction, qui, pour déclarer recevables des moyens qui ne l'étaient pas, s'est abstraite du principe d'interdiction de présenter des moyens nouveaux postérieurement à sa saisine, auquel le ministère public était soumis, et qui n'a ni démontré, ni même seulement relevé qu'il n'aurait guère pu connaître ces moyens avant leur présentation tardive, a violé les textes et principes susvisés ;

"2°) alors que, par principe, sont irrecevables les moyens de nullité nouveaux dont les parties, et notamment le ministère public, font état, tardivement, devant la chambre de l'instruction ; que, par exception, celle-ci peut toutefois les relever d'office, malgré une telle présentation tardive, dans l'hypothèse particulière où ces moyens seraient d'ordre public ; qu'au cas présent, pour faire échapper les moyens nouveaux, présentés par le ministère public plusieurs années après la saisine de la chambre de l'instruction, tendant à l'annulation de la mise en examen litigieuse, à l'irrecevabilité prévue par l'article 174 du code de procédure pénale, ladite chambre de l'instruction les a relevés d'office, quoiqu'ils ne fussent pas d'ordre public ; qu'en statuant ainsi, au prétexte erroné qu'elle pouvait relever d'office tout moyen de nullité qu'elle jugerait utile, la chambre de l'instruction, qui s'est abstraite de la distinction de principe entre les moyens d'ordre public et les autres moyens, afin d'adopter, en l'espèce, ces derniers, pourtant irrecevables, a violé les textes et principes susvisés ;

"3°) alors que, en tout état de cause, l'irrecevabilité des moyens de nullité nouveaux présentés tardivement devant la chambre de l'instruction par une partie ne peut être purgée que par, d'une part, la démonstration de ce que ladite partie ne pouvaient pas les connaître avant et, partant, les présenter plus tôt, ou, d'autre part, par la possibilité pour la chambre de l'instruction de relever ces moyens d'office s'ils sont d'ordre public; qu'au cas présent, la chambre de l'instruction a contourné l'irrecevabilité des moyens nouveaux présentés par le ministère public et le mis en examen, en les relevant d'office, en vertu du droit qu'elle aurait de «relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile» ; qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction, qui n'a pas procédé aux recherches gui lui incombaient, tant sur la date à laquelle ces moyens avaient été présentés initialement ou la date à laquelle la partie en cause avait pu connaître les moyens nouveaux, que sur leur éventuel caractère d'ordre public, a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés ;

"4°) alors que, en tout état de cause, le respect de l'égalité des armes suppose que chaque partie ait la possibilité de défendre sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que ce principe, qui ne se confond pas avec le principe du contradictoire, interdit notamment qu'une partie, ne pouvant, pour cause de forclusion, présenter des moyens nouveaux au juge pénal, se trouve avantagée par rapport à son adversaire, en voyant lesdits moyens portés par le ministère public ou relevés d'office par le juge pour contourner ladite forclusion ; qu'au cas présent, le mis en examen a, devant la chambre de l'instruction statuant sur renvoi après cassation, soit bien au-delà des six mois suivant leur mise en examen, bénéficié de la présentation de moyens nouveaux lui étant favorables, par le relais des réquisitions du ministère public, que la chambre de l'instruction ne pouvait accueillir, faute pour eux d'avoir été présentés dans les délais prévus par les articles 173-1 et 174 du code de procédure pénale; qu'en décidant d'accueillir ces moyens présentés tardivement, au prétexte que le ministère public les adopterait ou qu'elle pourrait les relever d'office, et que les parties avaient été à même d'en débattre, la chambre de l'instruction, qui a placé la partie civile dans une situation de net désavantage par rapport au mis en examen, et ce sans que le respect du contradictoire puisse purger un tel désavantage de ses vices, a violé les textes et principe susvisés ;

"5°) alors que, en tout état de cause, une chambre de l'instruction relevant d'office certains moyens de nullité, en vertu de l'article 174 du code de procédure pénale, doit précisément identifier lesdits moyens ; que, notamment, lorsqu'elle excipe de son droit de relever des moyens d'office pour purger de leur irrecevabilité des moyens nouveaux présentés tardivement par les parties, la chambre de l'instruction doit faire le départ, parmi ces moyens, entre ceux qu'elle adopte et ceux qu'elle ne relève pas d'office et qui demeurent donc irrecevables; qu'au cas présent, la chambre de l'instruction a entendu purger de leur irrecevabilité les moyens nouveaux, relayés par le ministère public au profit des mis en examen, en faisant «usage en tant que de besoin» du droit qu'elle aurait «de relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile » ; qu'en se déterminant ainsi, sans jamais préciser lesquels, parmi les moyens présentés par le mis en examen et le ministère public, elle entendait sauver de leur irrecevabilité en les faisant siens, la chambre de l'instruction, qui n'a procédé qu'à un relevé d'office purement abstrait, a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés ;

"6°) alors que l'irrecevabilité des moyens de nullité nouveaux présentés tardivement devant la chambre de l'instruction par les parties ne peut être purgée que par, d'une part, la démonstration de ce que les parties ne pouvaient pas les connaître avant et, partant, les présenter plus tôt, ou, d'autre part, la possibilité pour la chambre de l'instruction de relever ces moyens d'office s'ils sont d'ordre public ; qu'au cas présent, pour annuler la mise en examen litigieuse, l'arrêt attaqué accueille, au coeur de sa motivation, un moyen selon lequel il existerait un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par le mis en examen du risque d'une particulière gravité auquel les victimes étaient exposées ; qu'elle relève encore que le CPA n'aurait pas eu d'influence sur les décideurs publics ; qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a fait sien des moyens gui n'avaient pas été invoqués lors de la saisine initiale de la chambre de l'instruction et que, n'étant pas d'ordre public, elle ne pouvait relever d'office, a violé les textes et principes susvisés ;

"7°) alors que, à titre subsidiaire, une chambre de l'instruction relevant d'office certains moyens de nullité, en vertu de l'article 174 du code de procédure pénale, doit précisément identifier lesdits moyens; que, notamment, si elle considérait que la forclusion, empêchant les mis en examen de présenter des moyens nouveaux, pourrait être neutralisée par le relais d'une présentation de ces moyens par le ministère public, auquel le délai de forclusion de l'article 173-1 du même code ne s'imposerait pas, ce ne pourrait être qu'au prix d'une vérification de ce que tous les moyens soulevés par les mis en examen ont bien été repris par les réquisitions du ministère public et donc purgés de leur irrecevabilité ; qu'au cas présent, pour balayer la critique, présentée par les parties civiles, de la nouveauté des moyens de nullité soulevés par le mis en examen, l'arrêt attaqué se borne à affirmer que l'article 173-1 du code de procédure pénale ne s'applique pas au ministère public, qui relaye ces moyens ; qu'en se déterminant ainsi, abstraitement, sans rechercher si tous les moyens présentés par le mis en examen et critiqués, pour leur nouveauté, par les parties civiles, coïncidaient bien avec les moyens de nullité suggérés par le ministère public dans ses réquisitions, la chambre de l'instruction, qui n'a pas vérifié si le mécanisme de purge de l'irrecevabilité des moyens nouveaux, imaginé par elle, était bien opérant pour chacun de ces moyens, a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés ;

Attendu que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que, pour prononcer sur la requête en annulation de sa mise en examen présentée par M. X..., l'arrêt, abstraction faite de motifs erronés au regard de l'article 609-1 du code de procédure pénale, mais surabondants, relatifs aux pouvoirs de la chambre de l'instruction, saisie sur renvoi de cassation, d'accueillir un moyen nouveau de nullité proposé par le ministère public ou d'en soulever un d'office, a pris en considération le seul moyen de nullité pris de l'absence d'indices graves ou concordants, lequel avait été soumis par l'intéressé dans sa requête, les arguments, fussent-ils nouveaux, développés au soutien de ce moyen et retenus par la juridiction de renvoi ne constituant pas eux-mêmes des moyens distincts de nullité ;

D'où il suit que le grief fait à la chambre de l'instruction d'avoir excédé les limites de sa saisine, telle que délimitée par l'arrêt de la Cour de cassation étant mal fondé, le moyen est inopérant ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 2, 80, 80-1, 85, 173, 173-1, 174, 202, 206, 459, 512, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 121-3, 221-6, 222-9, 223-1 du code pénal, 6 de la convention européenne des droits de l'homme, le principe de respect de l'égalité des armes, manque de base légale et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la mise en examen de M. X..., constaté que celui-ci avait la qualité de témoin assisté ;

"aux motifs que «la requête en annulation a été présentée dans les formes et les délais légaux prévus à l'article 173-1 du code de procédure pénale ; qu'elle est donc régulière et recevable ; que selon l'article 173-1 du code de procédure pénale, celui-ci disposait, sous peine d'irrecevabilité, d'un délai de 6 mois à compter de la notification de sa mise en examen pour faire connaître les moyens venant à l'appui de sa demande en annulation de celle-ci ; qu'une telle disposition n'est cependant pas applicable au ministère public ; que la chambre de l'instruction a en outre le droit en vertu de l'article 174 du même code de relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile et que dès lors que les parties ont été à même d'en débattre, ce qui est le cas en l'espèce pour les moyens que les parties civiles voudraient voir écarter, elle fera usage en tant que de besoin de ce droit ; qu'il résulte de l'article 80-1 du code de procédure pénale qu'à peine de nullité le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont il est saisi ; que M. X... soit mis en examen des chefs de blessures et homicides involontaires concernant des personnes réputées avoir contracté une pathologie liée à leur exposition à l'amiante sur le site des chantiers de la société Normed à Dunkerque, et pour certaines d'entre elles, d'en être décédées ; que la mise en examen porte pour chacun des requérants sur des victimes précisément nommées; que la formulation en est suffisamment explicite pour exclure l'interprétation du Comité anti-amiante jussieu, tendant à l'étendre à d'autres victimes potentielles ; qu'il n'est pas contesté que les pathologies dont sont ou ont été atteintes ces victimes résultent de leur exposition à l'amiante, sur le site des chantiers de la société Normed ; qu'il n'est pas non plus contesté pour les victimes des faits qualifiés d'homicides involontaires que leur décès résulte de telles pathologies ; qu'il résulte des éléments du dossier que les victimes ont été exposées à l'amiante, dans le cadre de leur emploi sur le site des chantiers de la société Normed, -par une manipulation directe d'amiante ou de matériaux en contenant, soit par leur évolution dans un univers pollué par des poussières résultant de travaux de calorifugeage, flocage ou autres ; qu'il est reproché au mis en examen d'avoir, par des négligences ou imprudences constitutives de fautes caractérisées, en toute connaissance de cause des risques d'une particulière gravité courus par les personnes exposées à l'amiante, connu comme cancérigène et des dangers de l'usage contrôlé de l'amiante, en contribuant à créer la situation qui a permis la réalisation des dommages ou en ne prenant pas les mesures permettant de les éviter, s'agissant de la préservation de la santé et de la vie des salariés de la société Normed, involontairement causé des blessures ou des homicides sur telles personnes précisées ; que, ce faisant, le juge d'instruction s'est placé sur le terrain de l'article 121-3 alinéa 4 du code pénal) concernant "les personnes qui n'ont pas directement causé le dommage", et qu'il ne pouvait d'ailleurs en être autrement dès lors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que les requérants aient été, par une action directe, à l'origine des pathologies déclenchées ; que le magistrat instructeur s'est également placé explicitement sur le terrain de la faute caractérisée, et qu'il ne pouvait d'ailleurs là aussi en être autrement dès lors qu'aucune loi ou règlement ne soumettait les activités menées par M. X... à une quelconque règle particulière de sécurité dont la violation aurait pu être à l'origine du dommage ; qu'il convient à cet égard de remarquer que les parties civiles qui sollicitent subsidiairement que la responsabilité du mis en examen soit recherchée pour inobservation d'une obligation particulière de sécurité se garde bien de préciser de laquelle il s'agirait et quel en serait le fondement textuel ; qu'il appartient à la cour de contrôler, s'agissant du requérant, s'il résulte des éléments de l'information, relativement aux faits qui lui sont reprochés et à la période de prévention visée, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait, des indices graves ou concordants rendant vraisemblable, y compris au regard du lien de causalité, qu'il ait pu participer à la commission des faits d'homicides et de blessures involontaires qui lui sont reprochés au terme de sa mise en examen ; qu'en cas de réponse négative, elle n'a pas à rechercher si le comportement visé pourrait comporter une autre qualification, étant observé surabondamment que la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui" proposée à titre subsidiaire par les parties civiles se heurte au même obstacle juridique que la recherche d'une responsabilité sur le fondement de la violation d'une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; que la mise en examen reposant sur le seul terrain envisageable de la faute caractérisée, la vraisemblance de la participation du requérant à la commission de l'infraction, telle qu'elle est définie par la loi, implique qu'il n'y ait pas d'obstacle dirimant à ]a constatation du fait qu'il ne pouvait ignorer le risque d'une particulière gravité qu'il faisait courir à autrui du chef d'homicides involontaires au travers de la faute relevée à son encontre ; qu'il résulte de la mise en examen que le magistrat instructeur retient en substance comme fautif, à l'encontre de M. X... d'une part, des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, et d'autre part, sa participation active au CPA dont l'action aurait empêché la prise de la décision de l'interdiction de cette substance et contribué jusqu'au 1er janvier 1997 à l'insuffisance des mesures de protection des personnes exposées ; que le principe d'un usage contrôlé de l'amiante avait été retenu en France , avant la création du C.P.A., mais également, pour M. X... qui est le seul dont la prévention couvre une période antérieure, avant celle de sa prise de fonction ; qu'il avait été introduit en droit interne par le décret du 17 août 1977, qui fixait pour la première fois des valeurs limites auxquelles les salariés pouvaient être exposés dans leur emploi, alors qu'était déjà connu le caractère cancérigène de l'amiante et qu'on était dans l'incertitude quant à une valeur "seuil" protégeant du risque de cancer ; que cette option prise par la France a été ensuite renforcée par la politique adoptée à l'échelle européenne à compter de 1983, sans que l'influence du C.P.A. ou de ses membres n'ait à cet égard été mise en cause ; que jusqu'en 1996, il n'a été dérogé à cette politique qu'en matière de flocage (à partir de 1977-1978), et pour la crocidolite (à partir de 1988), pour lesquels l'interdiction a prévalu ; que les conditions de travail sur le chantier de la Normed étaient donc, à l'époque de la prévention, réglementées par la fixation de valeur limite d'exposition, dont les niveaux ont été progressivement revus à la baisse, au fur et à mesure de la transposition des directives européennes, puis dans le prolongement des études Peto et E.../D... de 1995, par le décret du 7 février 1996 ; que ces valeurs sont ainsi passées de 2 fibres/ml en 1977 à 1 f/cm3 en 1987, à 0,6 f/cm3 en 1992, à 0,3 f/ml sur 8 heures en 1996, pour le chrysolite, et de 2 fibres/ml en 1977 à 0,5 f/cm3 en 1987, à 0,3 f/cm3 en 1992, et à 0,1 f/cm3 sur 1 heure en 1996 pour les amphiboles ; que la politique de l'usage contrôlé servait les intérêts de l'industrie, mais également ceux de la préservation de l'emploi, ainsi que l'admis l'un des syndicalistes entendus ; que le C.P.A. s'y montrait attaché, l'a incontestablement défendue et a milité en sa faveur; que, pour autant, il ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans le maintien de cette orientation, que ce soit au niveau national ou international, ni ait empêché l'expression de points de vue divergents comme la réalisation de recherches scientifiques. susceptibles d'aboutir à un revirement de politique ; que les études scientifiques mettant en exergue les dangers de l'amiante ont en effet continué à être menées en France comme à l'étranger, et y compris par des personnalités scientifiques proches du C.PA., telles MM. D... et E..., professeurs, dont l'étude épidémiologique menée à Jussieu a montré en 1995 qu'il existait un risque même en cas de faibles expositions ; que, par ailleurs, les pouvoirs publics disposaient de leurs propres organes d'expertise (1e C.S.H.P.F. dans lequel siégeait un membre de l'industrie) et consultatif paritaire (le C.S.P.R.P.) ; que les responsables des directions centrales de l'état ont unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du C.P.A., dont certains ignoraient même l'existence et dont rien ne laisse paraître dans le dossier qu'il les aurait malgré tout à leur insu inspirés ; que l'indépendance des pouvoirs publics est d'ailleurs démontrée par l'orientation nouvelle qu'ils ont prise, sans même d'ailleurs recueillir l'avis du CPA, en 1995-1996, dès lors qu'ils ont pris connaissance de l'étude Peto ; que cette indépendance n'est pas remise en cause par le fait que certains membres de l'administration, agjssant eux-mêmes dans le cadre de la politique de l'usage contrôlé de l'amiante, politique dont la détermination excédait largement leur niveau de compétence, ont à l'occasion mis à profit les compétences (pluridisciplinaires), les initiatives (notamment en matière de prévention), les relais (en particulier à l'égard des entreprises) voire la plume de cette structure, ce qui a permis aux pouvoirs publics d'exploiter certains travaux, au demeurant utiles, de ses groupes de travail, pour renforcer la prévention ; que dès lors que le postulat posé par le juge d'instruction de l'influence du CPA sur les décisions publiques en matière d'amiante n'est pas étayé par les éléments de l'information, la participation de M. X... à ces structures, à ses travaux, voire à ses interventions, ne peut être réputée être à l'origine du retard pris par la France dans l'interdiction de l'amiante et de l'insuffisance des mesures de protection des populations exposées, en particulier sur le site de la Normed ;

"aux motifs, également, que :"M. X..., qui se voit plus particulièrement reprocher par le magistrat instructeur des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, était ingénieur de formation et ne disposait pas de connaissances médicales ; que bien que l'ayant intégrée le 1er décembre 1977, il n'a commencé à apparaître sur les organigrammes de la Direction des Relations du Travail qu'à compter de 1982, en qualité de chef du bureau CT4 ; que ce bureau était chargé des mesures d'hygiène applicables dans les entreprises, des risques toxicologiques, physiques, infectieux et parasitaires, des agréments des organismes de vérification et de contrôle (suivi technique), des tableaux des maladies professionnelles ; que ce service a été unanimement décrit comme étant dépourvu à l'époque de moyens suffisants en personnel au regard de l'ensemble des problématiques relevant de sa compétence ; que le suivi de l'action des services d'inspection du travail et de l'inspection médicale du travail relevait d'un autre bureau que le sien ; que M. X... était placé sous l'autorité d'un sous-directeur, et à l'échelon supérieur d'un directeur ; qu'il ne bénéficiait pas d'une délégation de signature, ni d'une délégation de pouvoir, et n'était donc pas en mesure d'exprimer pour le compte du ministère du travail une position autre que celle qui avait été arrêtée par sa hiérarchie ; que si les parties civiles ont rappelé qu'il avait admis devant la commission du Sénat avoir pu disposer d'une certaine autonomie et d'un pouvoir réel de proposition, il ne détenait aucun pouvoir de décision et que l'influence qui lui est prêtée sur les détenteurs de ce pouvoir ne repose sur aucun élément précis et concret ; que le dossier démontre que la production normative est soumise à des procédures consultatives particulièrement lourdes, et donc à des délais qui s'imposaient à M. X..., et que la transposition des directives 83/478 et 85/610 relevait de la DGCCRF et non du ministère du travail ; que les carences, manquements, retards, insuffisances reprochés à M. X... relevaient de pouvoirs et de moyens dont il était dépourvu, la faute évoquée par le juge d'instruction ne peut lui être imputable ;

"aux motifs, enfin que : " les législation adoptées à l'étranger ou les recommandations d'organisation internationales dont il est fait état dans le dossier ne traitaient que de la manière dont d'autres pays avaient géré le risque lié à l'usage de l'amiante, ou que les instances internationales préconisaient de le faire, mais ne constituaient pas en elles-mêmes des outils de connaissance de ce risque, qui n'était pas encore complètement appréhendé ; que la perception de la particulière gravité du risque ne pouvait pas non plus résulter du nombre de pathologies déclenchées ou de décès enregistrés ; qu'elle était en effet masquée par la durée de la latence des pathologies en rapport avec l'amiante (d'au moins 10 ans, et pouvant aller jusqu'à 20 à 40 ans), si bien que si les chiffres relatifs aux maladies professionnelles étaient en constante augmentation, ils étaient légitimement attribués à des expositions antérieurs à la mise en oeuvre du décret du 17 août 1977 ; que le rappel historique de l'évolution des connaissances scientifiques ne doit pas faire perde de vue qu'elles ne se sont pas imposées de façon évidente et indiscutée au fur et à mesure des découvertes énumérées ; qu'à l'époque de la prévention, les risques engendrés par l'utilisation du minéral en cause faisaient encore l'objet en France comme à l'étranger de nombreuses études, si bien que les connaissances étaient en constante évolution ; que la prise en compte des résultats des études expérimentales ou épidémiologiques était d'autant plus difficile que le risque était fonction de nombreux paramètres (type d'amiante, dimension des fibres, types/durées/intensité des expositions) et différait selon la nature de la pathologie étudiée ; que "la relative longueur des délais de remise du rapport", dont les ministères du travail et des affaires sociales se sont plaints auprès de l'Inserm en 1996, laquelle était en partie due à "la méthode de travail de l'équipe qui a préféré, à une juxtaposition de points de vue divergents, la recherche d'un consensus sur l'analyse des risques" est d'ailleurs la preuve que, même aux yeux des spécialistes, le sujet faisait débat ; qu'il est certes constant qu'à la fin des années 70, l'amiante était déjà considéré depuis longtemps comme un produit dangereux, notamment cancérigène ; que, si la fixation de valeurs limite d'exposition était réputée protéger efficacement contre le risque d'asbestose, l'existence ou non d'un seuil en dessous duquel Je risque de cancer et, en particulier, le mésothéliome -pouvait être écarté, était encore incertaine ; que même l'expertise collective de l'Inserm, pourtant fondée sur la synthèse des enseignements susceptibles d'être tirés de 1200 rapports et études publiés à l'échelle internationale, n'a d'ailleurs pas abouti à une réponse catégorique sur ce point, puisqu'elle a indiqué qu'il existait une incertitude sur la forme exacte de la relation dose-risque de cancer pour les expositions inférieures à 1 fibre/ml ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par les mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à leur encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés ; qu'en conséquence, il ne se déduit pas de l'information l'existence d'indices grave ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux délits d'homicides involontaires sur les personnes de MM. J... A..., B..., C... ; qu'il y a donc lieu d'annuler sa mise en examen sur le fondement de l'article 80-1 du code de procédure pénale, et de canceller la phrase «nous notifions à la personne qu'elle est mise en examen pour les faits, qui lui ont été notifiés» en cote D252/5 ; que par voie de conséquence. il sera constaté que par application de l'article 174-1 du code de procédure pénale, M. X... a la qualité de témoin assisté ; qu'eu égard à la nullité prononcée, il n'y a pas lieu de se prononcer sur d'autres moyens de nullité; que l'examen de la totalité de la procédure n'a pas révélé d'autre méconnaissance de la loi de nature à affecter sa régularité » ;

"alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'au cas présent, pour justifier que la demande d'annulation de la mise en examen ne soit étudiée, quant à la matérialité des faits sur lesquels doivent porter les indices graves ou concordants dont l'existence est contrôlée, qu'au regard d'un nombre restreint de victimes devant avoir été nommées par les réquisitoires successifs du ministère public, l'arrêt attaqué a affirmé que la mise en examen porte sur des victimes précisément nommées, de sorte que « la formulation parfaitement explicite de la mise en examen exclut catégoriquement l'interprétation » des parties civiles, qui tendrait « à l'étendre au-delà de ces quatre décès » (arrêt attaqué, p. 25) ; qu'en statuant ainsi, cependant que, dans une information ouverte pour des infractions d'homicide et blessures involontaires, lorsque la faute d'imprudence a causé de nombreux dommages, les différentes victimes de ces dommages entrent dans le champ de la saisine in rem du juge d'instruction sans qu'un réquisitoire supplétif soit nécessaire ; qu'il importe peu, à cet égard, que toutes ces victimes ne se soient pas encore constituées parties civiles ; de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre de l'instruction a violé les textes et principes susvisés ;

Attendu que la chambre de l'instruction a considéré que la formulation parfaitement explicite de la mise en examen de M. X... exclut l'interprétation soutenue par les parties civiles tendant à l'étendre à d'autres décès que ceux de Serge J... , Martine A..., Arlette B... et Sylviane C... ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, dès lors que M. X... a été mis en examen du chef d'homicide involontaire sur ces quatre personnes, à l'exclusion de toute autre victime ;

Que dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 2, 80, 80-1, 85, 173, 173-1, 174, 202, 206, 459, 512, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 121-3, 221-6, 222-19, 223-1 du code pénal, 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe de respect de l'égalité des armes, manque de base légale et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la mise en examen de M. X..., constaté que celui-ci avait la qualité de témoin assisté ;

"aux motifs que «la requête en annulation a été présentée dans les formes et les délais légaux prévus à l'article 173-1 du code de procédure pénale ; qu'elle est donc régulière et recevable ; que selon l'article 173-1 du code de procédure pénale, celui-ci disposait, sous peine d'irrecevabilité, d'un délai de 6 mois à compter de la notification de sa mise en examen pour faire connaître les moyens venant à l'appui de sa demande en annulation de celle-ci ; qu'une telle disposition n'est cependant pas applicable au ministère public ; que la chambre de l'instruction a en outre le droit en vertu de l'article 174 du même code de relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile et que dès lors que les parties ont été à même d'en débattre, ce qui est le cas en l'espèce pour les moyens que les parties civiles voudraient voir écarter, elle fera usage en tant que de besoin de ce droit ; qu'il résulte de l'article 80-1 du code de procédure pénale qu'à peine de nullité le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont il est saisi; que M. X... soit mis en examen des chefs de blessures et homicides involontaires concernant des personnes réputées avoir contracté une pathologie liée à leur exposition à l'amiante sur le site des chantiers de la Normed à Dunkerque, et pour certaines d'entre elles, d'en être décédées ; que la mise en examen porte pour chacun des requérants sur des victimes précisément nommées; que la formulation en est suffisamment explicite pour exclure l'interprétation du Comité anti-amiante Jussieu, tendant à l'étendre à d'autres victimes potentielles ; qu'il n'est pas contesté que les pathologies dont sont ou ont été atteintes ces victimes résultent de leur exposition à l'amiante, sur le site des chantiers de la Normed ; qu'il n'est pas non plus contesté pour les victimes des faits qualifiés d'homicides involontaires que leur décès résulte de telles pathologies; qu'il résulte des éléments du dossier que les victimes ont été exposées à l'amiante, dans le cadre de leur emploi sur Je site des chantiers de la Normed, -par une manipulation directe d'amiante ou de matériaux en contenant, soit par leur évolution dans un univers pollué par des poussières résultant de travaux de calorifugeage, flocage ou autres; qu'il est reproché au mis en examen d'avoir, par des négligences ou imprudences constitutives de fautes caractérisées, en toute connaissance de cause des risques d'une particulière gravité courus par les personnes exposées à l'amiante, connu comme cancérigène et des dangers de l'usage contrôlé de l'amiante en contribuant à créer la situation qui a permis la réalisation des dommages ou en ne prenant pas les mesures permettant de les éviter, s'agissant de la préservation de la santé et de la vie des salariés de Normed, involontairement causé des blessures ou des homicides sur telles personnes précisées ; que, ce faisant, Je juge d'instruction s'est placé sur le terrain de l'article 121-3 alinéa 4 du code pénal, concernant "les personnes qui n'ont pas directement causé le dommage", et qu'il ne pouvait d'ailleurs en être autrement dès lors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que les requérants aient été, par une action directe, à l'origine des pathologies déclenchées ;

"que le magistrat instructeur s'est également placé explicitement sur le terrain de la faute caractérisée, et qu'il ne pouvait d'ailleurs là aussi en être autrement dès lors qu'aucune loi ou règlement ne soumettait les activités menées par M..X... à une quelconque règle particulière de sécurité dont la violation aurait pu être à l'origine du dommage ; qu'il convient à cet égard de remarquer que les parties civiles qui sollicitent subsidiairement que la responsabilité du mis en examen soit recherchée pour inobservation d'une obligation particulière de sécurité se garde bien de préciser de laquelle il s'agirait et quel en serait le fondement textuel ;qu'il appartient à la cour de contrôler, s'agissant du requérant, s'il résulte des éléments de l'information, relativement aux faits qui lui sont reprochés et à la période de prévention visée, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait, des indices graves ou concordants rendant vraisemblable, y compris au regard du lien de causalité, qu'il ait pu participer à la commission des faits d'homicides et de blessures involontaires qui lui sont reprochés au terme de sa mise en examen ; qu'en cas de réponse négative, elle n'a pas à rechercher si le comportement visé pourrait comporter une autre qualification, étant observé surabondamment que la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui" proposée à titre subsidiaire par les parties civiles se heurte au même obstacle juridique que la recherche d'une responsabilité sur le fondement de la violation d'une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; que la mise en examen reposant sur le seul terrain envisageable de la faute caractérisée, la vraisemblance de la participation du requérant à la commission de l'infraction, telle qu'elle est définie par la loi, implique qu'il n'y ait pas d'obstacle dirimant à la constatation du fait qu'il ne pouvait ignorer le risque d'une particulière gravité qu'il faisait courir à autrui du chef d'homicides involontaires au travers de la faute relevée à son encontre ; qu'il résulte de la mise en examen que le magistrat instructeur retient en substance comme fautif, à l'encontre de M. X... d'une part, des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, et d'autre part, sa participation active au CPA dont l'action aurait empêché la prise de la décision de l'interdiction de cette substance et contribué jusqu'au 1er janvier 1997 à l'insuffisance des mesures de protection des personnes exposées ; que le principe d'un usage contrôlé de l'amiante avait été retenu en France . avant la création du CPA, mais également, pour M. X... qui est le seul dont la prévention couvre une période antérieure, avant celle de sa prise de fonction; qu'il avait été introduit en droit interne par le décret du 17 août 1977, qui fixait pour la première fois des valeurs limites auxquelles les salariés pouvaient être exposés dans leur emploi, alors qu'était déjà connu le caractère cancérigène de l'amiante et qu'on était dans l'incertitude quant à une valeur "seuil" protégeant du risque de cancer ; que cette option prise par 1a France a été ensuite renforcée par la politique adoptée à l'échelle européenne à compter de 1983, sans que l'influence du CPA ou de ses membres n'ait à cet égard été mise en cause ; que jusqu'en 1996, il n'a été dérogé à cette politique qu'en matière de flocage (à partir de 1977-1978), et pour la crocidolite (à partir de 1988), pour lesquels l'interdiction a prévalu ; que les conditions de travail sur le chantier de la Normed étaient donc, à l'époque de la prévention, réglementées par la fixation de valeur limite d'exposition, dont les niveaux ont été progressivement revus à la baisse, au fur et à mesure de la transposition des directives européennes, puis dans le prolongement des études Peto et E.../D... de 1995, par le décret du 7 février 1996 ; que ces valeurs sont ainsi passées de 2 fibres/ml en 1977 à 1 f/cm3 en 1987, à 0,6 Vcm3 en 1992, à 0,3 flml sur 8 heures en 1996, pour le chrysolite, et de 2 fibres/ml en 1977 à 0,5 f/cm3 en 1987, à 0,3 f/cm3 en 1992, et à 0,1 f/cm3 sur 1 heure en 1996 pour les amphiboles ; que 1a politique de l'usage contrôlé servait les intérêts de l'industrie, mais également ceux de la préservation de l'emploi, ainsi que l'admis l'un des syndicalistes entendus ; que le CPA s'y montrait attaché, l'a incontestablement défendue et a milité en sa faveur; que, pour autant, il ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans Je maintien de cette orientation, que ce soit au niveau national ou international, ni ait empêché l'expression de points de vue divergents comme la réalisation de recherches scientifiques, susceptibles d'aboutir à un revirement de politique ; que les études scientifiques mettant en exergue les dangers de l'amiante ont en effet continué à être menées en France comme à l'étranger, et y compris par des personnalités scientifiques proches du CPA, telles MM. D... et E..., professeurs, dont l'étude épidémiologique menée à Jussieu a montré en 1995 qu'il existait un risque même en cas de faibles expositions ; que, par ailleurs, les pouvoirs publics disposaient de leurs propres organes d'expertise (le CSHPF dans lequel siégeait un membre de l'industrie) et consultatif paritaire (le CSPRP) ; que les responsables des directions centrales de l'Etat ont unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du CPA, dont certains ignoraient même l'existence et dont rien ne laisse paraître dans le dossier qu'il les aurait malgré tout à leur insu inspirés ; que l'indépendance des pouvoirs publics est d'ailleurs démontrée par l'orientation nouvelle qu'ils ont prise, sans même d'ailleurs recueillir l'avis du CPA, en 1995-1996, dès lors qu'ils ont pris connaissance de l'étude Peto ; que cette indépendance n'est pas remise en cause par le fait que certains membres de l'administration, agissant eux-mêmes dans le cadre de la politique de l'usage contrôlé de l'amiante, politique dont la détermination excédait largement leur niveau de compétence, ont à l'occasion mis à profit les compétences (pluridisciplinaires), les initiatives (notamment en matière de prévention), les relais (en particulier à l'égard des entreprises) voire la plume de cette structure, ce qui a permis aux pouvoirs publics d'exploiter certains travaux, au demeurant utiles, de ses groupes de travail, pour renforcer la prévention ; que dès lors que le postulat posé par le juge d'instruction de l'influence du CPA sur les décisions publiques en matière d'amiante n'est pas étayé par les éléments de l'information, la participation de M. X... à ces structures, à ses travaux, voire à ses interventions, ne peut être réputée être à l'origine du retard pris par la France dans l'interdiction de l'amiante et de l'insuffisance des mesures de protection des populations exposées, en particulier sur le site de la Normed ;

"aux motifs que M. X..., qui se voit plus particulièrement reprocher par le magistrat instructeur des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, était ingénieur de formation et ne disposait pas de connaissances médicales ; que bien que l'ayant intégrée le 1er décembre 1977, il n'a commencé à apparaître sur les organigrammes de la Direction des Relations du Travail qu'à compter de 1982, en qualité de chef du bureau CT4 ; que ce bureau était chargé des mesures d'hygiène applicables dans les entreprises, des risques toxicologiques, physiques, infectieux et parasitaires, des agréments des organismes de vérification et de contrôle (suivi technique), des tableaux des maladies professionnelles ; que ce service a été unanimement décrit comme étant dépourvu à l'époque de moyens suffisants en personnel au regard de l'ensemble des problématiques relevant de sa compétence ; que le suivi de l'action des services d'inspection du travail et de l'inspection médicale du travail relevait d'un autre bureau que le sien ; que M. X... était placé sous l'autorité d'un sous-directeur, et à l'échelon supérieur d'un directeur ; qu'il ne bénéficiait pas d'une délégation de signature, ni d'une délégation de pouvoir, et n'était donc pas en mesure d'exprimer pour le compte du ministère du travail une position autre que celle qui avait été arrêtée par sa hiérarchie; que si les parties civiles ont rappelé qu'il avait admis devant la commission du Sénat avoir pu disposer d'une certaine autonomie et d'un pouvoir réel de proposition, il ne détenait aucun pouvoir de décision et que l'influence qui lui est prêtée sur les détenteurs de ce pouvoir ne repose sur aucun élément précis et concret; que le dossier démontre que la production normative est soumise à des procédures consultatives particulièrement lourdes, et donc à des délais qui s'imposaient à M. X..., et que la transposition des directives 83/478 et 85/610 relevait de la DGCCRF et non du ministère du travail ; que les carences, manquements, retards, insuffisances reprochés à M. X... relevaient de pouvoirs et de moyens dont il était dépourvu, la faute évoquée par le juge d'instruction ne peut lui être imputable ;

"aux motifs les législations adoptées à l'étranger ou les recommandations d'organisation internationales dont il est fait état dans le dossier ne traitaient que de la manière dont d'autres pays avaient géré le risque lié à l'usage de l'amiante, ou que les instances internationales préconisaient de le faire, mais ne constituaient pas en elles-mêmes des outils de connaissance de ce risque, qui n'était pas encore complètement appréhendé ; que la perception de la particulière gravité du risque ne pouvait pas non plus résulter du nombre de pathologies déclenchées ou de décès enregistrés; qu'elle était en effet masquée par la durée de la latence des pathologies en rapport avec l'amiante (d'au moins 10 ans, et pouvant aller jusqu'à 20 à 40 ans), si bien que si les chiffres relatifs aux maladies professionnelles étaient en constante augmentation, ils étaient légitimement attribués à des expositions antérieurs à la mise en oeuvre du décret du 17 août 1977 ; que le rappel historique de l'évolution des connaissances scientifiques ne doit pas faire perde de vue qu'elles ne se sont pas imposées de façon évidente et indiscutée au fur et à mesure des découvertes énumérées; qu'à l'époque de la prévention, les risques engendrés par l'utilisation du minéral en cause faisaient encore l'objet en France comme à l'étranger de nombreuses études, si bien que les connaissances étaient en constante évolution ; que la prise en compte des résultats des études expérimentales ou épidémiologiques était d'autant plus difficile que le risque était fonction de nombreux paramètres (type d'amiante, dimension des fibres, types/durées/intensité des expositions) et différait selon la nature de la pathologie étudiée; que "la relative longueur des délais de remise du rapport", dont les ministères du travail et des affaires sociales se sont plaints auprès de l'Inserm en 1996, laquelle était en partie due à "la méthode de travail de l'équipe qui a préféré, à une juxtaposition de points de vue divergents, la recherche d'un consensus sur l'analyse des risques" est d'ailleurs la preuve que, même aux yeux des spécialistes, le sujet faisait débat ; qu'il est certes constant qu'à la fin des années 70, l'amiante était déjà considéré depuis longtemps comme un produit dangereux, notamment cancérigène; que, si la fixation de valeurs limite d'exposition était réputée protéger efficacement contre le risque d'asbestose, l'existence ou non d'un seuil en dessous duquel le risque de cancer et, en particulier, le mésothéliome pouvait être écarté, était encore incertaine ; que même l'expertise collective de l'Inserm, pourtant fondée sur la synthèse des enseignements susceptibles d'être tirés de 1200 rapports et études publiés à l'échelle internationale, n'a d'ailleurs pas abouti à une réponse catégorique sur ce point, puisqu'elle a indiqué qu'il existait une incertitude sur la forme exacte de la relation dose-risque de cancer pour les expositions inférieures à 1 fibre/ml ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par les mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à leur encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés ; qu'en conséquence, il ne se déduit pas de l'information l'existence d'indices grave ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux délits d'homicides involontaires sur les personnes de MM. J... , A..., B... et C... ; qu'il y a donc lieu d'annuler sa mise en examen sur le fondement de l'article 80-1 du code de procédure pénale, et de canceller la phrase « nous notifions à la personne qu'elle est mise en examen pour les faits qui lui ont été notifiés» en cote D2S2/5 ; que par voie de conséquence, il sera constaté que, par application de l'article 174-1 du code de procédure pénale, M. X... a la qualité de témoin assisté ; qu'eu égard à la nullité prononcée, il n'y a pas lieu de se prononcer sur d'autres moyens de nullité; que l'examen de la totalité de la procédure n'a pas révélé d'autre méconnaissance de la loi de nature à affecter sa régularité » ;
"1°) alors qu'une chambre de l'instruction saisie d'une demande tendant à l'annulation d'une mise en examen est tenue de vérifier s'il n'existe pas, au regard de l'intégralité des pièces du dossier d'instruction, au moins un indice grave ou au moins deux indices concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi ; que cela implique notamment, d'un point de vue formel, que la chambre de l'instruction fasse des références, explicites et précises, à toutes les cotes du dossier d'instruction à l'aune desquelles elle examine l'existence d'indices graves ou concordants ; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué, pour annuler la mise en examen en discussion, a procédé par exposé d'un nombre limité d'éléments, présentés comme étant à décharge mais non étayés par des renvois précis au dossier d'instruction, et à partir desquels la chambre de l'instruction a cru pouvoir forger sa conviction selon laquelle ne se déduisait pas «de l'information l'existence d'indices grave ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux faits d'homicides et de blessures involontaires visés» à sa mise en examen (arrêt attaqué, p. 28) ; qu'en statuant ainsi, sans jamais citer, ni viser aucune des -pourtant très nombreuses -pièces du dossier d'instruction, la chambre de l'instruction, qui n'a pas réalisé l'audit complet dudit dossier, auquel elle était légalement tenue, mais a procédé par simple pesée d'un nombre limité d'éléments sélectionnés par elle et non référencés, a violé les textes et principes susvisés ;

"2°) alors que, conformément à la doctrine dite « de l'unique objet », une chambre de l'instruction saisie d'un contentieux de l'annulation ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, se comporter en juge saisi d'un contentieux de la réformation ; qu'à cet égard, lorsqu'elle a à connaître de demandes tendant à l'annulation d'une mise en examen, la chambre de l'instruction ne doit pas se comporter en juridiction d'instruction du second degré, mais bien en juge de l'annulation, tenu de contrôler minutieusement s'il existe ou non, au sein de toutes les pièces du dossier d'instruction, au moins un indice grave ou au moins deux indices concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué, pour annuler la mise en examen, a procédé par exposé d'un nombre limité d'éléments, présentés comme étant à décharge mais non étayés par des renvois précis au dossier d'instruction, à partir desquels la chambre de l'instruction a cru pouvoir forger sa conviction selon laquelle ne se déduisait pas « de l'information l'existence d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux faits d'homicides et de blessures involontaires visés» à sa mise en examen (arrêt attaqué, p. 28) ; qu'en statuant ainsi, sans jamais procéder à un audit complet du dossier d'instruction et de ses très nombreuses pièces, auquel elle était pourtant légalement tenue, la chambre de l'instruction, qui, excipant de la prise en compte d'un nombre limité d'éléments, sélectionnés par elle et non référencés, s'est comportée en juge de la réformation et non en juge de l'annulation, a excédé ses pouvoirs au regard des textes et principes susvisés ;

"3°) alors que, conformément à la doctrine dite « de l'unique objet », une chambre de l'instruction, saisie d'un contentieux de l'annulation, ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, confondre son office avec celui d'une chambre de l'instruction saisie d'un contentieux de la réformation ni a fortiori avec l'office d'une juridiction de jugement statuant sur la responsabilité pénale d'un prévenu; qu'à cet égard, une chambre de l'instruction, saisie d'une demande tendant à l'annulation d'une mise en examen, doit contrôler l'existence, au regard de toutes les pièces du dossier d'instruction, d'au moins un indice grave ou d'au moins deux indices concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi, et ne saurait donc, sans excéder ses pouvoirs, procéder à l'appréciation de la suffisance ou de l'insuffisance des charges pesant contre le mis en examen, ni, a fortiori, statue. quant à la réunion ou non des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie ; qu'au cas présent, l'arrêt attaqué n'a pas mené un audit complet du dossier d'instruction pour rechercher au moins un indice grave ou deux indices concordants rendant vraisemblable la participation aux infractions dont le juge d'instruction était saisi, mais a sélectionné un nombre limité d'éléments de fait qu'il a confrontés aux prévisions des articles 121-3, 221-6 et 221-19 du code pénal, relativement aux éléments constitutifs des infractions d'homicide et de blessures involontaires que sont, dans l'hypothèse de l'espèce, le lien de causalité indirect et la faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que les mis en cause ne pouvaient ignorer, pour en conclure, par un mécanisme d'intime conviction, qu'aucun indice grave ou concordant ne pouvait s'en déduire; qu'en statuant de la sorte, quand elle était saisie, non du règlement de la procédure ou de l'appel contre un jugement correctionnel, mais de l'annulation de mises en examen, la chambre de l'instruction, qui s'est en réalité prononcée, par une forme de préjugement, sur la suffisance des charges pesant contre le mis en cause et sur la réunion des divers éléments constitutifs des infractions d'homicide et blessures involontaires, a excédé ses pouvoirs au regard des textes et principes susvisés ;

"4°) alors que, en tout état de cause, une chambre de l'instruction, saisie d'une demande tendant à l'annulation d'une mise en examen, est tenue de vérifier, minutieusement, qu'il n'existe pas, au regard de toutes les pièces du dossier d'instruction, au moins un indice grave ou au moins deux indices concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi ; que cela implique notamment, d'un point de vue formel, que la chambre de l'instruction se réfère explicitement et précisément aux cotes du dossier d'instruction à l'aune desquelles elle examine l'existence d'indices graves ou concordants ; qu'au cas présent, pour conclure à la nullité des mises en examen, l'arrêt attaqué n'a cité aucune pièce ni visé aucune cote référencée du dossier d'instruction ; qu'en se déterminant ainsi, sans aucune référence précise au dossier d'instruction, la chambre de l'instruction, qui, se bornant à affirmer qu'il ne résulte pas «de l'information l'existence d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux faits d'homicides et de blessures involontaires visés » à sa mise en examen (arrêt attaqué, p. 28), n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler qu'elle avait bien mené un contrôle de l'existence d'indices à l'aune de chacune des pièces du dossier d'instruction, a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés ;

"5°) alors qu'une chambre de l'instruction peut annuler une mise en examen lorsqu'il existe un obstacle dirimant à la constatation d'indices graves ou concordants de la participation du mis en cause à l'infraction dont le juge d'instruction est saisi; qu'en particulier, au regard des articles 121-3, 221-6 et 222-19, et dans l'hypothèse où le caractère indirect du lien de causalité ne serait pas contesté et où ne pourrait être poursuivie qu'une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que le fautif ne pouvait ignorer, une chambre de l'instruction pourrait annuler une mise en examen s'il ressortait des pièces du dossier d'instruction qu'existât un obstacle dirimant à la constatation d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la connaissance, par le mis en examen, de l'existence dudit risque; qu'au cas présent, pour motiver l'annulation de la mise en examen de M. X..., l'arrêt attaqué a excipé d'un «obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par le mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à son encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui lui sont reprochés» (arrêt attaqué, p. 28, § 3) ; qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a procédé à la recherche, inopérante, d'un éventuel obstacle dirimant à la constatation de la connaissance, par le mis en examen, du risque encouru par les victimes, qu'elle a substituée à la recherche, que la loi exigeait d'elle, d'un obstacle dirimant à la constatation d'indices susceptibles de rendre vraisemblable la connaissance dudit risque, a violé les textes et principes susvisés ;

"6°) alors, en tout état de cause, qu'une chambre de l'instruction peut annuler une mise en examen lorsqu'il existe un obstacle dirimant à la constatation d'indices grave ou concordants de la participation du mis en cause à l'infraction dont le juge d'instruction est saisi; qu'en particulier, au regard des articles 121-3, 221-6 et 222-19, et dans l'hypothèse où le caractère indirect du lien de causalité ne serait pas contesté et où ne pourrait être poursuivie qu'une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité que le fautif ne pouvait ignorer, une chambre de l'instruction pourrait annuler une mise en examen s'il ressortait des pièces du dossier d'instruction qu'existât un obstacle dirimant à la constatation d'indices grave ou concordants de la connaissance, par les mis en examen, de l'existence dudit risque ; qu'au cas présent, pour motiver l'annulation de la mise en examen de M. X..., l'arrêt attaqué a excipé d'un « obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par les mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à leur encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés», relevant que la perception de la particulière gravité du risque encouru était obstruée par des incertitudes scientifiques censées avoir caractérisé les décennies de promotion, par le comité permanent amiante où siégeaient les mis en examen, de la politique dite « de l'usage contrôlé» ; qu'en statuant ainsi, par l'invocation, non fondée sur des références explicites et précises aux cotes du dossier de l'instruction, de doutes scientifiques censés camper un obstacle dirimant à la connaissance, par les mis en examen, du degré de gravité du risque encouru par les victimes, la chambre de l'instruction, qui, pour pouvoir annuler la mise en examen de M. X..., était légalement tenue de démontrer que les pièces du dossier d'instruction révélaient un obstacle dirimant tenant au constat d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable l'ignorance absolue, par le mis en examen, de l'existence même dudit risque, a violé les textes et principes susvisés ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 2,80,80-1,85,173,173-1,174, 202, 206, 459, 512, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 121-3, 221-6, 222 19, 223-1 du code pénal, 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, le principe de respect de l'égalité des armes, manque de base légale et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la mise en examen de M. X..., constaté que celui-ci avait la qualité de témoin assisté ;

"aux motifs que «la requête en annulation a été présentée dans les formes et les délais légaux prévus à l'article 173-1 du code de procédure pénale; qu' elle est donc régulière et recevable; que selon l'article 173-1 du code de procédure pénale, celui-ci disposait, sous peine d'irrecevabilité, d'un délai de six mois à compter de la notification de sa mise en examen pour faire connaître les moyens venant à l'appui de sa demande en annulation de celle-ci; qu'une telle disposition n'est cependant pas applicable au ministère public; que la chambre de l'instruction a en outre le droit en vertu de l'article 174 du même code de relever d'office tout moyen de nullité qu'elle juge utile et que dès lors que les parties ont été à même d'en débattre, ce qui est le cas en l'espèce pour les moyens que les parties civiles voudraient voir écarter, elle fera usage en tant que de besoin de ce droit ; qu'il résulte de l'article 80-1 du code de procédure pénale qu'à peine de nullité le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les personnes à rencontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont il est saisi; que. M. X... soit mis en examen des chefs de blessures et homicides involontaires concernant des personnes réputées avoir contracté une pathologie liée à leur exposition à l'amiante sur le site des chantiers de la société Normed à Dunkerque, et pour certaines d'entre elles, d'en être décédées; que la mise en examen porte pour chacun des requérants sur des victimes précisément nommées; que la formulation en est suffisamment explicite pour exclure l'interprétation du Comité Anti-Amiante Jussieu, tendant à l'étendre à d'autres victimes potentielles ; qu'il n'est pas contesté que les pathologies dont sont ou ont été atteintes ces victimes résultent de leur exposition à l'amiante. sur le site des chantiers de la société Normed ; qu'il n'est pas non plus contesté pour les victimes des faits qualifiés d'homicides involontaires que leur décès résulte de telles pathologies; qu'il résulte des éléments du dossier que les victimes ont été exposées à l'amiante, dans le cadre de leur emploi sur le site des chantiers de la société Normed, par une manipulation directe d'amiante ou de matériaux en contenant, soit par leur évolution dans un univers pollué par des poussières résultant de travaux de calorifugeage, flocage ou autres; qu'il est reproché au mis en examen d'avoir, par des négligences ou imprudences constitutives de fautes caractérisées, en toute connaissance de cause des risques d'une particulière gravité courus par les personnes exposées à l'amiante, connu comme cancérigène et des dangers de l'usage contrôlé de l'amiante, en contribuant à créer la situation qui a permis la réalisation des dommages où en ne prenant pas les mesures permettant de les éviter, s'agissant de la préservation de la santé et de la vie des salariés de la société Normed, involontairement causé des blessures ou des homicides sur telles personnes précisées; que, ce faisant, le juge d'instruction s'est placé sur le terrain de l'article 121-3 alinéa 4 du code pénal, concernant "les personnes qui n'ont pas directement causé le dommage", et qu'il ne pouvait d'ailleurs en être autrement dès lors qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que les requérants aient été, par une action directe, à l'origine des pathologies déclenchées ; que le magistrat instructeur s'est également placé explicitement sur le terrain de la faute caractérisée, et qu'il ne pouvait d'ailleurs là aussi en être autrement dès lors qu'aucune loi ou règlement ne soumettait les activités menées par M. X... à une quelconque règle particulière de sécurité dont la violation aurait pu être à l'origine du dommage ; qu'il convient à cet égard de remarquer que les parties civiles qui sollicitent subsidiairement que la responsabilité du mis en examen soit recherchée pour inobservation d'une obligation particulière de sécurité se garde bien de préciser de laquelle il s'agirait et quel en serait le fondement textuel ; qu'il appartient à la cour de contrôler, s'agissant du requérant, s'il résulte des éléments de l'information, relativement aux faits qui lui sont reprochés et à la période de prévention visée, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait, des indices graves ou concordants rendant vraisemblable, y compris au regard du lien de causalité, qu'il ait pu participer à la commission des faits d'homicides et de blessures involontaires qui lui sont reprochés au terme de sa mise en examen; qu'en cas de réponse négative, elle n'a pas à rechercher si le comportement visé pourrait comporter une autre qualification, étant observé surabondamment que la qualification de "mise en danger de la vie d'autrui" proposée à titre subsidiaire par les parties civiles se heurte au même obstacle juridique que la recherche d'une responsabilité sur le fondement de la violation d'une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement; que la mise en examen reposant sur le seul terrain envisageable de la faute caractérisée, la vraisemblance de la participation du requérant à la commission de l'infraction, telle qu'elle est définie par la loi, implique qu'il n'y ait pas d'obstacle dirimant à la constatation du fait qu'il ne pouvait ignorer le risque d'une particulière gravité qu'il faisait courir à autrui du chef d'homicides involontaires au travers de la faute relevée à son encontre ; qu'il résulte de la mise en examen que le magistrat instructeur retient en substance comme fautif, à l'encontre de M. X... d'une part, des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, et d'autre part, sa participation active au CPA dont l'action aurait empêché la prise de la décision de l'interdiction de cette substance et contribué jusqu'au 1er janvier 1997 à l'insuffisance des mesures de protection des personnes exposées ; que le principe d'un usage contrôlé de l'amiante avait été retenu en France, avant la création du CPA, mais également, pour M. X... qui est le seul dont la prévention couvre une période antérieure, avant celle de sa prise de fonction; qu'il avait été introduit en droit interne par le décret du 17 août 1977, qui fixait pour la première fois des valeurs limites auxqueIles les salariés pouvaient être exposés dans leur emploi, alors qu'était déjà connu le caractère cancérigène de l'amiante et qu'on était dans l'incertitude quant à une valeur "seuil" protégeant du risque de cancer ; que cette option prise par la France a été ensuite renforcée par la politique adoptée à l'échelle européenne à compter de 1983, sans que l'influence du CPA ou de ses membres n'ait à cet égard été mise en cause ; que jusqu'en 1996, il n'a été dérogé à cette politique qu'en matière de flocage (à partir de 1977-1978), et pour la crocidolite (à partir de 1988), pour lesquels l'interdiction a prévalu; que les conditions de travail sur le chantier de la Normed étaient donc, à l'époque de la prévention, réglementées par la fixation de valeur limite d'exposition, dont les niveaux ont été progressivement revus à la baisse, au fur et à mesure de la transposition des directives européennes, puis dans le prolongement des études Peto et E.../D... de 1995, par le décret du 7 février 1996; que ces valeurs sont ainsi passées de 2 fibres/ml en 1977 à 1 f/cm3 en 1987, à 0,6 f/cm3 en 1992, à 0,3 f/ml sur 8 heures en 1996, pour le chrysolite, et de 2 fibres/ml en 1977 à 0,5 f/cm3 en 1987, à 0,3 f/cm3 en 1992, et à 0,1 f/cm3 sur 1 heure en 1996 pour les amphiboles ; que la politique de l'usage contrôlé servait les intérêts de l'industrie, mais également ceux de ]a préservation de l'emploi, ainsi que l'admis l'un des syndicalistes entendus; que le CPA s'y montrait attaché, l'a incontestablement défendue et a milité en sa faveur; que, pour autant, il ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans le maintien de cette orientation, que ce soit au niveau national ou international, ni ait empêché l'expression de points de vue divergents comme la réalisation de recherches scientifiques, susceptibles d'aboutir à un revirement de politique ; que les études scientifiques mettant en exergue les dangers de l'amiante ont en effet continué à être menées en France comme à l'étranger, et y compris par des personnalités scientifiques proches du CPA, telles MM. D... et E..., professeurs dont l'étude épidémiologique menée à Jussieu a montré en 1995 qu'il existait un risque même en cas de faibles expositions ; que, par ailleurs, les pouvoirs publics disposaient de leurs propres organes d'expertise (le CSHPF dans lequel siégeait un membre de l'industrie) et consultatif paritaire (le CSPRP) ; que les responsables des directions centrales de l'Etat ont unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du CPA, dont certains ignoraient même l'existence et dont rien ne laisse paraître dans le dossier qu'il les aurait malgré tout à leur insu inspirés ; que l'indépendance des pouvoirs publics est d'ailleurs démontrée par l'orientation nouvelle qu'ils ont prise, sans même d'ailleurs recueillir l'avis du CPA, en 1995-1996, dès lors qu'ils ont pris connaissance de l'étude Peto ; que cette indépendance n'est pas remise en cause par le fait que certains membres de l'administration, agissant eux-mêmes dans le cadre de la politique de l'usage contrôlé de l'amiante, politique dont la détermination excédait largement leur niveau de compétence, ont à l'occasion mis à profit les compétences (pluridisciplinaires), les initiatives (notamment en matière de prévention), les relais (en particulier à l'égard des entreprises) voire la plume de cette structure, ce qui a permis aux pouvoirs publics d'exploiter certains travaux, au demeurant utiles, de ses groupes de travail, pour renforcer la prévention; que dès lors que le postulat posé par le juge d'instruction de l'influence du CPA sur les décisions publiques en matière d'amiante n'est pas étayé par les éléments de l'information, la participation de M. X... à cette structures, à ses travaux, voire à ses interventions, ne peut être réputée être à l'origine du retard pris par la France dans l'interdiction de l'amiante et de l'insuffisance des mesures de protection des populations exposées, en particulier sur le site de la société Normed ;

"aux motifs, également, que: « M. X..., qui se voit plus particulièrement reprocher par le magistrat instructeur des lacunes ou retards dans l'accomplissement d'actes réglementaires et des insuffisances quant à la mise en oeuvre ou le contrôle de l'application de la réglementation existante, était ingénieur de formation et ne disposait pas de connaissances médicales ; que bien que l'ayant intégrée le 1er décembre 1977, il n'a commencé à apparaître sur les organigrammes de la Direction des Relations du Travail qu'à compter de 1982, en qualité de chef du bureau CT4 ; que ce bureau était chargé des mesures d'hygiène applicables dans les entreprises, des risques toxicologiques, physiques, infectieux et parasitaires, des agréments des organismes de vérification et de contrôle (suivi technique), des tableaux des maladies professionnelles ; que ce service a été unanimement décrit comme étant dépourvu à l'époque de moyens suffisants en personnel au regard de l'ensemble des problématiques relevant de sa compétence ; que le suivi de l'action des services d'inspection du travail et de l'inspection médicale du travail relevait d'un autre bureau que le sien; que M. X... était placé sous l'autorité d'un sous-directeur, et à l'échelon supérieur d'un directeur; qu'il ne bénéficiait pas d'une délégation de signature, ni d'une délégation de pouvoir, et n'était donc pas en mesure d'exprimer pour le compte du ministère du travail une position autre que celle qui avait été arrêtée par sa hiérarchie; que si les parties civiles ont rappelé qu'il avait admis devant la commission du Sénat avoir pu disposer d'une certaine autonomie et d'un pouvoir réel de proposition, il ne détenait aucun pouvoir de décision et que l'influence qui lui est prêtée sur les détenteurs de ce pouvoir ne repose sur aucun élément précis et concret; que le dossier démontre que la production normative est soumise à des procédures consultatives particulièrement lourdes, et donc à des délais qui s'imposaient à M. X..., et que la transposition des directives 83/478 et 85/610 relevait de la DGCCRF et non du ministère du travail ; que les carences, manquements, retards, insuffisances reprochés à M. X... relevaient de pouvoirs et de moyens dont il était dépourvu, la faute évoquée par le juge d'instruction ne peut lui être imputable ;

"aux motifs, enfin, que les législations adoptées à l'étranger ou les recommandations d'organisation internationales dont il est fait état dans le dossier ne traitaient que de la manière dont d'autres pays avaient géré le risque lié à l'usage de l'amiante, ou que les instances internationales préconisaient de le faire, mais ne constituaient pas en elles-mêmes des outils de connaissance de ce risque, qui n'était pas encore complètement appréhendé; que la perception de la particulière gravité du risque ne pouvait pas non plus résulter du nombre de pathologies déclenchées ou de décès enregistrés ; qu'elle était en effet masquée par la durée de la latence des pathologies en rapport avec l'amiante (d'au moins 10 ans, et pouvant aller jusqu'à 20 à 40 ans), si bien que si les chiffres relatifs aux maladies professionnelles étaient en constante augmentation, ils étaient légitimement attribués à des expositions antérieurs à la mise en oeuvre du décret du 17 août 1977 ; que le rappel historique de l'évolution des connaissances scientifiques ne doit pas faire perde de vue qu'elles ne se sont pas imposées de façon évidente et indiscutée au fur et à mesure des découvertes énumérées ; qu'à l'époque de la prévention, les risques engendrés par l'utilisation du minéral en cause faisaient encore l'objet en France comme à l'étranger de nombreuses études, si bien que les connaissances étaient en constante évolution ; que la prise en compte des résultats des études expérimentales ou épidémiologiques était d'autant plus difficile que le risque était fonction de nombreux paramètres (type d'amiante, dimension des fibres, types/durées/intensité des expositions) et différait selon la nature de la pathologie étudiée; que "la relative longueur des délais de remise du rapport", dont les ministères du travail et des affaires sociales se sont plaints auprès de l'INSERM en 1996, laquelle était en partie due à "la méthode de travail de l'équipe qui a préféré, à une juxtaposition de points de vue divergents, la recherche d'un consensus sur l'analyse des risques" est d'ailleurs la preuve que, même aux yeux des spécialistes, le sujet faisait débat ; qu'il est certes constant qu'à la fin des années 70, l'amiante était déjà considéré depuis longtemps comme un produit dangereux, notamment cancérigène ; que, si la fixation de valeurs limite d'exposition était réputée protéger efficacement contre le risque d'asbestose, l'existence ou non d'un seuil en dessous duquel le risque de cancer -et, en particulier, le mésothéliome -pouvait être écarté, était encore incertaine; que même l'expertise collective de l'INSERM, pourtant fondée sur la synthèse des enseignements susceptibles d'être tirés de 1200 rapports et études publiés à l'échelle internationale, n'a d'ailleurs pas abouti à une réponse catégorique sur ce point, puisqu'elle a indiqué qu'il existait une incertitude sur la forme exacte de la relation dose-risque de cancer pour les expositions inférieures à 1 fibre/ml ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par les mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à leur encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés ; qu'en conséquence, il ne se déduit pas de l'information l'existence d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux délits d'homicides involontaires sur les personnes de MM. J... , A..., B... et C...; qu'il y a donc lieu d'annuler sa mise en examen sur le fondement de l'article 80-1 du code de procédure pénale, et de canceller la phrase «nous notifions à la personne qu'elle est mise en examen pour les faits qui lui ont été notifiés» en cote D252/5 ; que par voie de conséquence, il sera constaté que, par application de l'article 174-1 du code de procédure pénale, M. X... a la qualité de témoin assisté ; qu'eu égard à la nullité prononcée, il n'y a pas lieu de se prononcer sur d'autres moyens de nullité ; que l'examen de la totalité de la procédure n'a pas révélé d'autre méconnaissance de la loi de nature à affecter sa régularité » ;

"1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence; qu'au cas présent, pour annuler la mise en examen de M. X... en tant qu'ancien membre du comité permanent amiante, l'arrêt attaqué a affirmé que «le postulat posé par le juge d'instruction, de l'influence du C.P.A. [ ... ] sur les décisions publiques en matière d'amiante n'est pas étayé par les éléments de l'information» et en a déduit que «la participation de M. X... à cette structure, à ses travaux, voire à ses interventions, ne peut être réputée à l'origine de l'insuffisance des mesures de protection des populations exposées, en particulier sur le site de la société Normed »(arrêt attaqué, p. 27, § 2) ; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction, dont de nombreuses pièces corroboraient le postulat de l'influence du CP A sur les décisions publiques, ainsi que l'association Ardeva le rappelait dans ses conclusions, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que, comme le relevait l'exposante dans ses conclusions, le principe dit de «l'usage contrôlé» est un slogan dont la paternité revient au CPA ; qu'à cet égard, il ressort du dossier d'instruction que la formule «usage contrôlé» n'apparaît dans aucune pièce antérieure à 1990, date à laquelle le CPA l'emploie publiquement à l'occasion de son «Livre Blanc du CPA -L'usage contrôlé de l'amiante -Utopie ou réalité? » ; que, par ailleurs, le décret du 17 août 1977, qui a fixé des valeurs limite qui ne concernaient pas les usagers des bâtiments floqués ni les travailleurs du bâtiment, ne témoignait pas d'une politique achevée et définitivement fixée, en amont de la naissance du CPA, et ce d'autant plus au regard des recommandations formulées la même année, notamment, par le Conseil supérieur d'hygiène publique de France ; que l'arrêt attaqué a affirmé que «le principe d'un usage contrôlé de l'amiante avait été retenu en France avant la prise de fonction de M. X... à la Direction des relations du travail et la création du CPA et avait été introduit en droit interne par le décret du 17 août 1977, qui fixait pour la première fois des valeurs-limite auxquelles les salariés pouvaient être exposés dans leur emploi» (p. 26, § 5) pour en déduire que l'influence du CPA sur les décisions publiques en matière d'amiante n'était pas étayée par le dossier d'instruction; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction dont il s'inférait que le CPA avait la paternité de «l'usage contrôlé de l'amiante », et que de surcroît l'institution réglementaire de valeurs-limite en 1977, serait-elle qualifiée a posteriori «d'usage contrôlé», ne représentait qu'une étape dans la mise en oeuvre de politiques publiques sur l'amiante et non la fixation d'une solution immuable ayant précédé la naissance du CPA, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
"3°) alors que, comme le relevait l'exposante dans ses conclusions, il ressort du dossier de l'instruction que le CPA s'est opposé au projet de l'agence américaine de protection de l'environnement, en 1986, d'interdire l'amiante aux États-Unis, a fait rédiger par ses membres scientifiques un rapport s'opposant à l'interdiction présenté comme « l'avis des experts qu'il a consultés », qui a été officiellement transmis au gouvernement, et dont les conclusions sont devenues la position de la France (D1842/15-16), le CPA se réjouissant le 1er juillet 1986 de ce que « le Ministère du Travail a d'ores et déjà fait suivre le dossier du CPA par la voie officielle » et se félicitant, le 30 septembre 1986, du fait que «la démarche conduite par le CPA a été totalement relayée par l'administration française » ; qu'il ressort également du dossier que le CPA a encore oeuvré à ce que le Bureau International du Travail adopte la position de «l'usage contrôlé» plutôt que celle de l'interdiction, efforts couronnés d'un succès que le CPA relatera ainsi: « cette conférence s'est tenue en juin 1986 et a conclu en faveur de l'usage contrôlé ; qu'il est bon de noter que les délégations françaises (gouvernement, syndicats et employeurs) ont émis un avis complètement homogène après que le CPA se soit prononcé à ce sujet ; que l'avis de la France avait d'ailleurs été transmis au BIT comme étant celui du comité permanent amiante, ce gui n'est pas sans intérêt, venant d'un organisme qui, théoriquement, n'existe pas, du moins juridiquement ! » ; qu'il ressort encore du dossier de l'instruction que le CPA s'est opposé avec succès, au début des années 1990, au projet de directive européenne tendant à l'interdiction de l'amiante, dès lors que la France avait aligné sa position sur celle du CPA, au point d'être l'un des deux seuls Etats-membres à s'opposer à l'interdiction, que l'expert chargé de défendre la position de la France auprès de la commission était un membre du CPA, M. F..., qui écrirait plus tard dans une note que « ce projet d'interdiction a pu être stoppé le 3 juillet 1992 lors d'une réunion de cabinet interne à la commission, grâce aux efforts du gouvernement français », que la France, et que le CPA lui-même restituera le bilan de son action en la matière dans les termes suivants: « la Direction Générale III (marché intérieur, affaires industrielles) va proposer à la commission de reporter toute décision au sujet de l'amiante à 2 ou 3 ans ; que ce choix semble être le résultat des actions menées par le CPA au cours des deux dernières années : accueil de M. Paul G... (DG III), rencontre avec différents responsables des Directions Générales, envoi du mémorandum à la Commission Européenne, projet de convention de progrès, fourniture de données »; que l'arrêt attaqué a affirmé que l'option politique de l'usage contrôlé au détriment de l'interdiction «prise par la France a été ensuite renforcée par la politique adoptée à l'échelle européenne à compter de 1983, sans que l'influence du CPA ou de ses membres n'ait à cet égard été mise en cause» , qu'il « ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans le maintien de cette orientation, que ce soit au niveau national ou international» (p. 26 dernier §), et que «les responsables des directions centrales de l'Etat ont unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du CPA, dont certains ignoraient même l'existence, et dont rien ne laisse paraître dans le dossier qu'il les aurait malgré tout à leur insu inspirés » ; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction dont s'inférait que le CPA avait bel et bien eu une influence sur la politique nationale et internationale à l'égard de l'amiante, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'il y ait eu, en France, durant la période de la prévention, la moindre recherche scientifique susceptible d'aboutir à l'expression d'un point de vue divergent de celui défendu avec constance par le CPA et d'entraîner un revirement politique en faveur d'un abandon de l'usage et donc d'une interdiction de l'amiante; que les seules voix. dans le monde de la recherche scientifique française, qui étaient audibles sur le sujet de l'amiante étaient celles des scientifiques siégeant au CPA ; que le CSHPF et le CSPRP censés conseiller les pouvoirs publics étaient des organes purement consultatifs paritaires et en aucun cas des organes d'expertise scientifique ; que durant toutes ces années, l'expertise scientifique sur l'amiante était, en France, entre les mains du CPA et des scientifiques qui y siégeaient; qu'il a fallu attendre 1995 et 1996, dans le sillage de la diffusion médiatique du second rapport Peto, pour que des recherches scientifiques, tenant d'ailleurs davantage d'une étude épidémiologique ou d'une synthèse d'études précédentes que d'une étude sanitaire révélant la moindre connaissance nouvelle, aient lieu et soient diffusées au point d'inspirer, officiellement, à l'État, l'interdiction de 1996; qu'à ces études tardives sont rattachés les noms de MM. E... et D..., membres du CPA qui, in extremis, ont participé à une recherche dont les résultats plaidaient enfin, malgré leurs auteurs, pour une interdiction de l'amiante; que l'étude épidémiologique qu'ils ont menée à Jussieu témoigne malgré tout de ce que MM. E... et D... ont continué à brider, y compris à cette date tardive, la manifestation scientifique de la nécessité d'interdire l'amiante, notamment en n'enregistrant pas dans les données de l'étude des personnes exposées à Jussieu et qui souffraient d'une plaque pleurale pourtant déjà décelable (cas de M. H... et de Mme I...) ; que l'arrêt attaqué affirme qu'il «ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis du CPA ait empêché l'expression de points de vue divergents, comme la réalisation de recherches scientifiques, susceptibles d'aboutir à un revirement de politique; que les études scientifiques mettant en exergue les dangers de l'amiante ont en effet continué à être menées en France comme à l'étranger, et y compris par des personnalités scientifiques proches du CPA, telles MM. D... et E... professeurs dont l'étude épidémiologique menée à Jussieu a montré en 1995 qu'il existait un risque même en cas de faibles expositions »; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction dont il s'inférait que le CPA avait contrôlé durant toutes les années de la prévention la recherche scientifique sur le sujet de l'amiante et qu'aucune autre voix n'avait pu se faire entendre, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
"5°) alors que le slogan «usage contrôlé de l'amiante» laisse entendre que les conséquences négatives de l'utilisation de l'amiante pouvaient être appréhendées et minimisées, idée à laquelle la chambre de l'instruction souscrit lorsqu'elle fait remonter cette « politique» à 1977 et procède ensuite à la litanie de la baisse des « valeurs limite d'exposition» ; qu'il ressort pourtant des pièces du dossier que, des trois situations dangereuses pour la santé publique créées par l'amiante (utilisation de l'amiante sur des postes de travail dans l'industrie transformatrice de la fibre mortelle, utilisation par des ouvriers du bâtiment par exemple de produits à base d'amiante, tels des plaques de fibrociment, et enfin présence de personnes dans des locaux floqués à l'amiante exposées aux fibres en suspension dans l'air ambiant), seule la première a été considérée par le décret de 1977, et seule la première était concernée par la trajectoire d'abaissement des «valeurs limite d'exposition» dessinée par l'arrêt attaqué ; qu'en considérant que, dans les faits, la France aurait mis en oeuvre une politique, monolithique, qualifiable de « contrôlée », quand il s'agissait manifestement dans l'ensemble d'une politique d'usage libre, incontrôlé, sans interdiction, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;
"6°) alors que, lorsque, en 1995, est parue la seconde étude Peto, l'opinion publique s'est émue des résultats de cette étude épidémiologique qui réévaluait à la hausse le nombre de morts prévisibles de l'amiante en Grande-Bretagne, pressentant, à raison, que ses résultats seraient transposables à la France; que la réaction des pouvoirs publics a consisté, pour justifier un revirement de politique, et l'abandon du slogan de «l'usage contrôlé» pour entamer une interdiction, à demander une nouvelle étude, de synthèse des études produites depuis plus de 20 ans, pour présenter la sortie de ce rapport de synthèse comme un événement nouveau justifiant une réévaluation de la politique «d'usage contrôlé» ; que le CPA a dûment été consulté pour l'établissement de ce rapport de synthèse, lequel n'a pas suivi immédiatement la publication de l'étude Peto mais a pris du temps, ainsi que le constate l'arrêt attaqué en page 27,s'agissant d'un réexamen, par reproduction des résultats, de 1 200 études scientifiques; qu'en retenant que « l'indépendance des pouvoirs publics est d'ailleurs démontrée par l'orientation nouvelle qu'ils ont prise, sans même d'ailleurs recueillir l'avis du CPA, en 1995-1996, dès lors qu'ils ont pris connaissance de l'étude Peto», la chambre de l'instruction s'est, de nouveau, placée en contradiction avec les pièces du dossier ;
"7°) alors qu'une chambre de l'instruction ne saurait annuler une mise en examen si elle constate l'existence d'au moins un indice grave ou au moins deux indices concordants rendant vraisemblable la participation du mis en examen aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi ; qu'à cet égard, la mise en cause circonstanciée d'un mis en examen par une partie civile est un indice grave rendant vraisemblable sa participation aux infractions dont le juge d'instruction a été saisi, et suffit donc à justifier une mise en examen ; qu'au cas présent, en annulant la mise en examen de M. X... alors que les parties civiles avaient, dans une constitution de partie civile comme lors d'une audition, mis en cause, nommément, de façon formelle et circonstanciée, le comité permanent amiante et tous ses membres, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des textes susvisés ;
"8°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'au cas présent, pour annuler la mise en examen de M. X..., l'arrêt attaqué a retenu que qu'il aurait été dépourvu de pouvoir propre; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction, dont de nombreuses pièces démontraient que, eût-il été dépourvu du «pouvoir de signature », M. X... avait de réels pouvoirs d'influence sur l'initiation ou l'élaboration des politiques publiques, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
"9°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence; qu'au cas présent, pour annuler les mises en examen litigieuses, l'arrêt affirme «qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par le mis en examen du risque d'une particulière gravité, auquel la faute caractérisée évoquée à son encontre aurait exposé les victimes des délits de blessures et d'homicides involontaires qui leur sont reprochés» ; qu'en statuant ainsi, en contradiction avec le dossier d'instruction, duquel s'infèrent des indices graves ou concordants rendant vraisemblable la connaissance, par le mis en examen, de l'existence du risque d'une particulière gravité qu'il faisait encourir aux victimes et en contradiction avec ses propres constatations, qui établissaient que, en 1981, le Conseil Économique et Social Européen indiquait que dans l'état le plus récent des découvertes scientifiques, il n'est pas possible de fixer des niveaux d'exposition "sûre", la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Sur le 4e moyen de cassation, pris en sa 7e branche :

Attendu que la mise en cause formelle et circonstanciée, par les parties civiles, du CPA et de ses membres, dont M. X..., ne suffit pas à justifier la mise en examen de celui-ci, dès lors que cette circonstance était simplement de nature à lui permettre d'être entendu en qualité de témoin assisté en application de l'article 113-2 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le grief doit être écarté ;

Sur le 3e moyen de cassation et le 4e moyen de cassation, pris en ses autres branches :

Attendu que, pour faire droit à la demande de M. X... sollicitant l'annulation de sa mise en examen pour homicide involontaire prononcée sur le fondement de l'article 121-3 alinéa 4 du code pénal à raison de sa participation au CPA, l'arrêt attaqué énonce, d'une part, qu'il ne ressort d'aucun élément de l'information que l'avis de cette structure ait eu un poids quelconque dans le maintien de l'orientation, en France, d'un usage "contrôlé" de l'amiante, ni ait empêché l'expression de points de vue différents, comme la réalisation de recherches scientifiques, susceptibles d'aboutir à un revirement de politique, les responsables des directions centrales de l'Etat ayant unanimement indiqué qu'il n'avait été tenu aucun compte en la matière des avis du CPA, d'autre part, que l'indépendance des pouvoirs publics est démontrée par l'orientation nouvelle prise en 1995-1996 après la prise de connaissance de l'étude Peto, sans même qu'ait été recueilli l'avis du CPA ; que s'agissant par ailleurs de ses fonctions au ministère du travail, les juges relèvent que M. X..., chef du bureau CT4 à la direction des relations du travail, était placé sous l'autorité d'un sous-directeur et, à l'échelon supérieur, d'un directeur, que s'il a admis disposer d'un pouvoir de proposition, il ne détenait aucun pouvoir de décision et que l'influence qui lui est prêtée sur les détenteurs de ce pouvoir ne repose sur aucun élément précis et concret ; qu'enfin, la chambre de l'instruction souligne que, bien que l'amiante ait été considérée comme un produit cancérogène dès la fin des années 1970, l'existence d'un seuil en-dessous duquel le risque de cancer pouvait être écarté était encore incertaine, les données scientifiques étant en constante évolution à l'époque de la prévention, de sorte qu'il existe un obstacle dirimant à la constatation de la connaissance par le mis en examen du risque d'une particulière gravité encouru par les victimes ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine des faits, d'où elle a déduit qu'il n'existait pas, en l'état de l'information, d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de M. X... aux délits d'homicide involontaire sur les personnes de Serge J... , Martine A..., Arlette B... et Sylviane C..., d'une part, en l'absence de faute caractérisée susceptible de lui être reprochée du fait de ses fonctions au ministère du travail et de sa participation aux activités du CPA, d'autre part, faute pour lui d'avoir pu, dans le contexte des données scientifiques de l'époque, mesurer le risque d'une particulière gravité auquel il aurait exposé les victimes, la chambre de l'instruction, qui, sans méconnaître son office, s'est déterminée par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction et n'avait pas à préciser les références des pièces invoquées, a justifié sa décision ;
Qu'ainsi, les moyens ne sont pas fondés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs :

I - Sur le pourvoi de l'association Andeva :

CONSTATE la déchéance du pourvoi ;

II - Sur le pourvoi de l'association Ardeva :

Le REJETTE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze décembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et Mme Z..., le greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-85869
Date de la décision : 11/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 15 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 déc. 2018, pourvoi n°17-85869


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.85869
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