LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 2017), que la société M-Real Alizay (la société M-Real), qui exploite une usine de pâte à papier, a commandé à la société Thermodyn la fabrication et la fourniture d'un rotor neuf ; que celui-ci, installé en décembre 2007, a été endommagé à la suite d'un incident survenu en décembre 2008 ; qu'après une expertise judiciaire, la société M-Real, aux droits de laquelle vient la société Metsa Board Oyj, et son assureur, la société IF Assurances France IARD, ont assigné la société Thermodyn en garantie des vices cachés ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Thermodyn fait grief à l'arrêt de dire que le contrat conclu entre les parties est un contrat de vente alors, selon le moyen :
1°/ qu'est un contrat d'entreprise la convention prévoyant la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le client ; qu'en décidant, après avoir constaté que « la fabrication du rotor a été effectuée au vu des plans et croquis fournis par la société M-Real et a été précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser » et qu' « il a été nécessaire de prendre en compte des données liées au process et des impositions constructives dictées par la nécessité de s'inscrire dans un environnement existant et inchangé, le produit fini ne se trouvant pas sur catalogue », que ces éléments d'individualisation ne suffisent pas à caractériser un contrat d'entreprise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, et a ainsi violé l'article 1710 du code civil ;
2°/ que lorsqu'ils portent sur un objet à fabriquer, le contrat de vente et le contrat d'entreprise se distinguent par la nature de l'objet du contrat, selon qu'il s'agit d'un travail spécifique ou d'un travail standard ; qu'en retenant la qualification de contrat de vente, motif pris que « les parties sont convenues d'un prix fixe avec référence aux conditions générales de vente et fabrication et montage dans les ateliers de la société Thermodyn », la cour d'appel a statué par un motif impropre à justifier sa décision, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1582 du code civil ;
3°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant, par motifs expressément adoptés, qu' « il n'est pas indiqué dans les éléments communiqués aux débats que le rotor fourni serait fabriqué selon des prescriptions spécifiques déterminées par la société M-Real » et, par motifs propres, que « la fabrication du rotor a été effectuée au vu des plans et croquis fournis par la société M-Real et a été précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser », la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que le contrat d'entreprise se caractérise par un travail spécifique de fabrication, répondant à une technique particulière, ou par un travail spécifique de conception, impliquant une connaissance particulière dans la façon de satisfaire les besoins du client, lesquels ne peuvent être atteints par une production en série normalisée ; qu'en écartant la qualification de contrat d'entreprise par des motifs adoptés tirés de l'absence d'exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à la société M-Real, sans répondre aux conclusions de la société Thermodyn faisant valoir que les spécifications sollicitées par la société M-Real étaient incompatibles avec une production à la chaîne, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que le contrat d'entreprise se caractérise par un travail spécifique de fabrication, répondant à une technique particulière, ou par un travail spécifique de conception, impliquant une connaissance particulière dans la façon de satisfaire les besoins du client, lesquels ne peuvent être atteints par une production en série normalisée ; qu'en écartant la qualification de contrat d'entreprise par des motifs adoptés tirés de l'absence d'exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à la société M-Real, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la société Thermodyn n'avait pas réalisé un travail de conception spécifique résultant de la prise en considération de données incompatibles avec la production automatisée qu'elle mettait en oeuvre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1710 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que, si le rotor était destiné à être intégré dans un ouvrage plus important, en l'espèce dans une turbine préexistante, et si la fabrication du rotor a été effectuée au vu de plans et croquis fournis par la société M-Real et précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser, la proposition de la société Thermodyn portait essentiellement sur la fourniture d'un bien, à savoir un « rotor avec des aubages Thermodyn (équilibré basse vitesse) » ainsi qu'un « jeu de diaphragmes, de garnitures et de porte garnitures » ; qu'il ajoute que les informations données par la société M-Real à la société Thermodyn ne constituaient, pour le rotor litigieux, que le minimum de renseignements indispensables à l'examen de la demande et qu'elles ne traduisaient pas des exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à la société M-Real ; qu'il relève aussi que le prix fixé ne comprenait pas les prestations d'installation du rotor, assurées par une société tierce, et que les parties étaient convenues d'un prix fixe avec référence aux conditions générales de vente, fabrication et montage dans les ateliers de la société Thermodyn ; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que le contrat portait sur des choses déterminées à l'avance et non sur un travail spécifique destiné à répondre aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordre, la cour d'appel, qui n'avait pas à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, sans se contredire, pu en déduire que le contrat était un contrat de vente et non d'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Thermodyn fait grief à l'arrêt de dire que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, et de la condamner à payer certaines sommes à la société IF Assurances et à la société Metsa Board Oyj, venant aux droits de la société Holding France, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir du chef de l'arrêt ayant dit que les relations contractuelles entre les parties au titre de la commande du rotor litigieux constituent un contrat de vente entraînera, par voie de conséquence, celle des chefs de l'arrêt ayant dit que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, et condamné la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619 369 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, et à verser à la société Metsa Board Oyj la somme de 305 520 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ subsidiairement, que le vice caché est un défaut rendant la chose impropre à son usage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, sans constater que les dégradations rendaient la chose impropre à son usage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du code civil ;
3°/ subsidiairement, que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'anomalie d'utilisation de la turbine par introduction d'eau n'est pas retenue en raison de l'absence de dégradations qui auraient dû accompagner la fissuration en cas par effet de l'eau sur les ailettes », sans répondre aux conclusions de la société Thermodyn soulignant qu'elle avait « apporté au cours de l'expertise judiciaire des éléments techniques substantiels (
) démontrant que les paramètres indiquaient une très forte probabilité d'ingestion d'eau dans la turbine », tenant à « une fluctuation importante de la température d'entrée et de la puissance produite dans la période précédant l'arrêt de décembre 2008, générant des variations vibratoires », et que « ce type de phénomène est généralement révélateur d'ingestion d'eau pouvant expliquer les dommages constatés, sans nécessairement s'accompagner des autres conséquences que l'expert judiciaire considérait comme requises », la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ subsidiairement, que l'existence de vices cachés ouvre à l'acquéreur une action rédhibitoire ou une action estimatoire ; que l'action rédhibitoire conduit l'acheteur à rendre la chose et à se faire restituer le prix ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619 889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305 520 euros, soit la somme totale de 924 889 euros, après avoir jugé que « les intimées sont ainsi fondées à solliciter la nullité de la vente pour vice caché sur le fondement de l'article 1641 du code civil », quand les restitutions consécutives à la nullité se limitent à la restitution du prix versé, soit la somme de 630 500 euros HT, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil, ensemble l'article 1644, du même code ;
5°/ subsidiairement, que selon l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619 889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305 520 euros, sans constater que la société Thermodyn connaissait les vices de la chose, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1645 du code civil ;
6°) subsidiairement, que l'action estimatoire consiste pour l'acquéreur à garder la chose et à se faire rendre une partie du prix, tandis que l'action indemnitaire permet à l'acquéreur d'obtenir la réparation de ses préjudices ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619 889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305 520 euros, aux motifs éventuellement adoptés que « la chose livrée ayant été conservée par la société M-Real, cette dernière entend donc se placer dans le cadre de l'action estimatoire prévue par l'article 1644 et se faire ainsi restituer une partie du prix, sans préjudice des autres dommages éventuellement subis », et que le montant des dommages « est décomposé comme suit : 129 360 euros au titre des dommages directs (démontage, remontage, assistance démarrage, remise en état du rotor) ; 154 933 euros au titre des frais supplémentaires (mise en place d'un rotor provisoire) ; 660 000 euros au titre des surcoûts achats électricité », sans préciser quel montant de la condamnation correspondait à la réduction du prix de l'action estimatoire et quel montant relevait de l'action indemnitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1644 et 1645 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'aux conclusions de la société Metsa Board Oyj, qui faisait valoir que le vice avait rendu le rotor impropre à sa destination puisqu'il avait entraîné l'arrachement du ruban du disque, ce qui avait provoqué l'arrêt de la turbine et justifié le remplacement dudit rotor, la société Thermodyn n'a rien opposé, se bornant à discuter la qualification du contrat ; qu'elle ne peut, dans ces conditions, reprocher à la cour d'appel de ne pas s'être prononcée expressément sur ce point, non contesté ;
Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel n'était pas tenue de suivre la société Thermodyn dans le détail de son argumentation relative aux éléments techniques produits au cours de l'expertise judiciaire, ni de constater spécialement que cette société connaissait les vices de la chose, dès lors que sa qualité de professionnel présumé les connaître n'était pas discutée ;
Et attendu, en troisième lieu, que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt reprend le montant des trois postes de préjudice invoqués par la société M-Real, les « dommages directs », les « frais supplémentaires » et les « surcoûts achat électricité », puis fixe celui des condamnations en tenant compte d'un coefficient de vétusté de 10 % et de l'indemnisation déjà versée par l'assureur à la société M-Real, ce dont il résulte qu'aucune somme n'était réclamée ni accordée au titre d'une réduction de prix ;
D'où il suit que le moyen, qui, inopérant en sa première branche et irrecevable en sa cinquième, nouvelle et mélangée de fait et de droit, manque en fait en ses quatrième et sixième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Thermodyn aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer aux sociétés Metsa Board Oyj et IF Assurances France IARD la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Thermodyn.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que les relations contractuelles entre les parties au titre de la commande du rotor litigieux constituent un contrat de vente régi par les conditions générales de vente de la SAS Thermodyn ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la commande n° 60104835 conclue le 31 juillet 2006 entre la société M-Real et la société Thermodyn a porté sur un ensemble aérodynamique de technologie Thermodyn comprenant la fabrication d'un rotor neuf avec études, design aérodynamique et mécanique de la nouvelle veine vapeur, selon devis 346722 Rev. 2 ; que ce devis versé aux débats porte sur la fabrication d'un rotor neuf avec des bouts d'arbres conformes aux plans « notice », des aubages de la technologie Thermodyn, un jeu de diaphragmes correspondants et un jeu de garnitures de bouts d'arbre et porte garnitures ; que le prix a été fixé à 630.500 euros ne comportant pas les travaux d'installation de la fourniture dans la machine ; que l'article 4 du devis auquel se reporte la commande a pour objet les conditions générales de vente et de location de produits et de services suivant formulaire ES-104-F ; que, par courrier recommandé du 4 août 2006 adressé à la société M-Real, la société Thermodyn se réfère à l'offre technique et commerciale n° 346722 Rev. 2 du 29 juin 2006 et confirme « que les conditions générales qui s'appliqueront à votre commande seront les ES104-F rev1 » ; que, par des motifs pertinents que la cour adopte, les premiers juges ont donné au contrat la qualification de vente et dit que le contrat se trouve régi par les conditions générales de vente correspondant au formulaire ES104-F (rév. 2) ; qu'en effet, si le rotor a été destiné à être intégré dans un ouvrage plus important, en l'espèce dans une turbine pré-existante, et si la fabrication du rotor a été effectuée au vu de plans et croquis fournis par la société M-Real et a été précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser, les sociétés intimées sont bien fondées à soutenir que la complexité du produit commandé et les adaptations à réaliser ne sont pas exclusives de contrat de vente ; qu'en l'espèce les parties sont convenues d'un prix fixe avec référence aux conditions générales de vente et fabrication et montage dans les ateliers de la société Thermodyn ; que l'attestation du 10 février 2014 de M. Y..., ingénieur et responsable du bureau d'études turbines à vapeur au sein de la société Thermodyn, confirme qu'il a été nécessaire de prendre en compte « des données liées au process et des impositions constructives dictées par la nécessité de s'inscrire dans un environnement existant et inchangé », le produit fini ne se trouvant pas sur catalogue ; que ces éléments d'individualisation ne suffisent à caractériser un contrat d'entreprise ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE le contrat de vente est défini par l'article 1582 du Code civil comme une « convention par laquelle l'un s'oblige à livrer une chose, et l'autre à la payer » ; que l'article 1710 du Code civil définit le contrat d'entreprise ou « louage d'ouvrage » comme le « contrat par lequel l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre, moyennant un prix convenu entre elles » ; que pour déterminer si une opération complexe consistant à la fois en la fourniture d'un bien et la réalisation d'études et de prestations d'installation comme c'est le cas en l'espèce, relève d'un contrat de vente ou d'un contrat d'entreprise, il est tenu compte, notamment, de l'objet principal du contrat, de l'importance respective entre la fourniture d'un bien et la réalisation de prestations de services ainsi que de l'existence ou non de spécifications techniques établies par le donneur d'ordre pour répondre à ses besoins particuliers et spécifiques ; que la société Thermodyn se présente sur son site comme concevant été fabriquant « depuis plus d'un siècle la gamme Thermodyn des compresseurs et des turbines à vapeur et assurons les services des machines tournantes » ; que cette présentation vise donc une gamme de machines conçue et élaborée par Thermodyn ; qu'en l'espèce, la proposition Thermodyn portait essentiellement sur la fourniture d'un bien, à savoir un « rotor avec des aubages Thermodyn (équilibré basse vitesse) » ainsi qu'un « jeu de diaphragmes, de garnitures et de porte garnitures » ; qu'il n'est pas indiqué dans les éléments communiqués aux débats que le rotor fourni serait fabriqué selon des prescriptions spécifiques déterminées par la société M-Real ou bien avec des matériaux fournis par M-Real ; que les spécifications données par M-Real à Thermodyn ne constituaient, pour le rotor litigieux, que le minimum d'informations indispensables à l'examen de la demande par Thermodyn et que ces spécifications ne traduisaient pas des exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à M-Real ; que le prix fixé, soit 630.500 euros ne comprenait pas les prestations de service d'installation du rotor, qui a été assurée par une société tierce, la société Samia ; que, compte-tenu des éléments versés au débat, le tribunal qualifiera le contrat passé entre Thermodyn et M-Real de contrat de vente au sens de l'article 1582 du Code civil ;
1°) ALORS QU'est un contrat d'entreprise la convention prévoyant la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le client ; qu'en décidant, après avoir constaté que « la fabrication du rotor a été effectuée au vu des plans et croquis fournis par la société M-Real et a été précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser » et qu' « il a été nécessaire de prendre en compte des données liées au process et des impositions constructives dictées par la nécessité de s'inscrire dans un environnement existant et inchangé, le produit fini ne se trouvant pas sur catalogue », que ces éléments d'individualisation ne suffisent pas à caractériser un contrat d'entreprise, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, et a ainsi violé l'article 1710 du code civil ;
2°) ALORS QUE lorsqu'ils portent sur un objet à fabriquer, le contrat de vente et le contrat d'entreprise se distinguent par la nature de l'objet du contrat, selon qu'il s'agit d'un travail spécifique ou d'un travail standard ; qu'en retenant la qualification de contrat de vente, motif pris que « les parties sont convenues d'un prix fixe avec référence aux conditions générales de vente et fabrication et montage dans les ateliers de la société Thermodyn », la cour d'appel a statué par un motif impropre à justifier sa décision, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1582 du code civil ;
3°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en relevant, par motifs expressément adoptés, qu' « il n'est pas indiqué dans les éléments communiqués aux débats que le rotor fourni serait fabriqué selon des prescriptions spécifiques déterminées par la société M-Real » et, par motifs propres, que « la fabrication du rotor a été effectuée au vu des plans et croquis fournis par la société M-Real et a été précédée d'études destinées à définir les parties d'équipements à réaliser », la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE le contrat d'entreprise se caractérise par un travail spécifique de fabrication, répondant à une technique particulière, ou par un travail spécifique de conception, impliquant une connaissance particulière dans la façon de satisfaire les besoins du client, lesquels ne peuvent être atteints par une production en série normalisée ; qu'en écartant la qualification de contrat d'entreprise par des motifs adoptés tirés de l'absence d'exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à M-Real, sans répondre aux conclusions de la société Thermodyn faisant valoir que les spécifications sollicitées par la société M-Real étaient incompatibles avec une production à la chaîne (p. 15-20), la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QUE le contrat d'entreprise se caractérise par un travail spécifique de fabrication, répondant à une technique particulière, ou par un travail spécifique de conception, impliquant une connaissance particulière dans la façon de satisfaire les besoins du client, lesquels ne peuvent être atteints par une production en série normalisée ; qu'en écartant la qualification de contrat d'entreprise par des motifs adoptés tirés de l'absence d'exigences spécifiques impliquant une fabrication particulière et propre à M-Real, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la société Thermodyn n'avait pas réalisé un travail de conception spécifique résultant de la prise en considération de données incompatibles avec la production automatisée qu'elle mettait en oeuvre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1710 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, et d'avoir condamné la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619.369 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, lesquels intérêts se capitaliseront dans les conditions de l'article 1154 du Code civil, et à verser à la société Metsa Board Oyj venant aux droits de la société Holding France la somme de 305.520 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010 lesquels intérêts se capitaliseront dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de l'expertise judiciaire diligentée par M. Z... que les dégradations du rotor de la turbine ont pour origine la rupture d'un tenon de fixation d'un élément de ruban destiné à relier plusieurs ailettes entre elles, en raison d'une fissuration par fatigue ; que cette rupture de tenon a entraîné la perte de l'élément de ruban qu'il était chargé d'immobiliser avec trois autres tenons ; que les examens de laboratoire ont fait apparaître des hétérogénéités de formation de la tête de plusieurs tenons ; que la réalisation des têtes de tenon est à conduite manuelle sur une machine semi-automatique, sans possibilité de contrôle de la qualité du plaquage du ruban sur les têtes d'ailettes ; que, selon l'expert, l'origine la plus probable des dégradations se situe dans les irrégularités de réalisation des tenons par la société Thermodyn ; que l'anomalie d'utilisation de la turbine par introduction d'eau n'est pas retenue en raison de l'absence de dégradations qui auraient dû accompagner la fissuration en cas par effet de l'eau sur les ailettes ; que les intimes sont ainsi fondées à solliciter la nullité de la vente pour vice caché sur le fondement de l'article 1641 du Code civil ; que, sur ce fondement, la société Thermodyn n'est pas fondée à réclamer l'application des clauses limitatives de garantie prévues aux articles 7 et 8 des conditions générales de vente et de location de produits et de services ; que concernant le préjudice, M. Z... mentionne que « les experts des parties ont remis à l'expert un protocole d'accord validant leur nature et leur montant : 924.889 euros », l'expert mentionnant avoir pu vérifier que « la nature des préjudices est bien en relation avec l'incident survenu au rotor de la turbine » ; que l'annexe 18 du rapport d'expertise dénommé « Procès verbal de constatations relatives à l'évaluation des dommages » correspond à ce montant qui intègre une décote de vétusté de 10% ; que le jugement déféré doit uniquement être infirmé en ce qu'il a retenu la somme de 944.293 euros au lieu de 924.889 euros ; que la société Thermodyn devra verser à la société IF Assurances la sommes de 619.369 euros que cette dernière a versée à son assuré M-Real selon quittance versée aux débats ; que la société Thermodyn devra verser le surplus à la société Metsa Board Oyj soit la somme de 305.520 euros (924.889 – 619.369) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur l'origine du sinistre, l'expert présente dans son rapport deux thèses pouvant être à l'origine des désordres :
- irrégularités de réalisation, par Thermodyn, des tenons ; les conditions d'utilisation de la turbine par M-Real ayant été normales ;
- anomalie d'utilisation de la turbine, par introduction d'eau ;
Que si l'expert indique en p. 19 de son rapport qu'il n'est pas possible de démontrer scientifiquement l'origine des désordres, il indique toutefois que la première thèse (irrégularités de réalisation des tenons, imputables à Thermodyn) est « de loin la plus probable » ; qu'aucune circonstance ni aucun élément versé au débat n'est de nature à remettre en cause l'analyse de l'expert ; que, notamment, Thermodyn n'invoque aucun élément nouveau dont l'expert n'aurait pas eu connaissance et qui justifierait une remise en cause de son appréciation ; qu'en conséquence, le tribunal dira que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon imputable à la société Thermodyn ; que, sur les responsabilités, la société M-Real sollicite la garantie des vices cachés prévue par l'article 1641 du Code civil ; que cette anomalie n'était pas détectable par M-Real au moment de la livraison en décembre 2006 ni au moment de l'installation réalisée en décembre 2007 dans la mesure où elle n'a été caractérisée qu'après une expertise judiciaire ; que cette expertise judiciaire n'a à aucun moment fait ressortir que cette anomalie aurait pu être détectée par M-Real au moment de la livraison ou de l'installation du rotor ; que l'anomalie constitue donc bien un vice caché au sens de l'article 1641 du Code civil ; que l'action de la société M-Real a été introduite moins de deux ans à compter de la découverte du vice en application de l'article 1648 du Code civil ; que l'action en garantie des vices cachés est recevable nonobstant les clauses limitatives de responsabilité contractuelle invoquées par Thermodyn qui ne peuvent pas déroger à cette garantie légale en l'espèce, s'agissant d'une vente entre professionnels de spécialités différentes ; qu'en conséquence, Thermodyn devra indemniser la société M-Real en raison du préjudice qu'elle a subi du fait de l'anomalie survenue ; que sur le préjudice, selon l'article 1644 du Code civil, l'acheteur a « le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts » ; que la chose livrée ayant été conservée par la société M-Real, cette dernière entend donc se placer dans le cadre de l'action estimatoire prévue par l'article 1644 et se faire ainsi restituer une partie du prix, sans préjudice des autres dommages éventuellement subis ; qu'en l'espèce, le rapport d'expertise indique en p. 19 que « les experts des parties ont remis à l'expert le protocole d'accord validant leur nature et leur montant : 924.889 euros » ; que ce montant est effectivement indiqué et détaillé dans le « procès-verbal de constatation relative à l'évaluation des dommages » en date du 12 mars 2010 (annexe 18 du rapport d'expertise) et signé par les experts désignés par M-Real, Thermodyn, Samia (entreprise de maintenance) et IF Assurances (assureur de M-Real) et est décomposé comme suit :
- 129.360 euros au titre des dommages « directs » (démontage, remontage, assistance démarrage, remise en état du rotor) ;
- 154.933 euros au titre des « frais supplémentaires » (mise en place d'un rotor provisoire) ;
- 660.000 euros au titre des « surcoûts achats électricité » ;
Qu'au surplus, ce montant a été repris par l'expert judiciaire qui indique en p. 20 de son rapport qu'il a « pu vérifier que la nature des préjudices est bien en relation avec l'incident survenu au rotor de la turbine » ; que la société M-Real réclame le paiement de la somme de 944.293 euros ; que la clause limitative de responsabilité aux seuls dommages directs, à l'exclusion de tous dommages indirects ou immatériels figurant à l'article 8.2 des conditions générales de vente, invoquée par la société Thermodyn est inopposable en l'espèce, le vendeur et l'acheteur n'étant pas des professionnels de même spécialité ; qu'il y a donc lieu d'écarter cette clause ; qu'en conséquence, le tribunal condamnera Thermodyn à payer à la société M-Real la somme de 944.293 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, date de l'assignation de la société M-Real » ;
1°) ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de l'arrêt ayant dit que les relations contractuelles entre les parties au titre de la commande du rotor litigieux constituent un contrat de vente entraînera, par voie de conséquence, celle des chefs de l'arrêt ayant dit que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, et condamné la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619.369 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, et à verser à la société Metsa Board Oyj la somme de 305.520 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2010, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE le vice caché est un défaut rendant la chose impropre à son usage ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que les désordres ont pour origine une anomalie de réalisation d'un tenon, constitutive d'un vice caché, sans constater que les dégradations rendaient la chose impropre à son usage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du code civil ;
3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'anomalie d'utilisation de la turbine par introduction d'eau n'est pas retenue en raison de l'absence de dégradations qui auraient dû accompagner la fissuration en cas par effet de l'eau sur les ailettes », sans répondre aux conclusions de la société Thermodyn soulignant qu'elle avait « apporté au cours de l'expertise judiciaire des éléments techniques substantiels (
) démontrant que les paramètres indiquaient une très forte probabilité d'ingestion d'eau dans la turbine », tenant à « une fluctuation importante de la température d'entrée et de la puissance produite dans la période précédant l'arrêt de décembre 2008, générant des variations vibratoires », et que « ce type de phénomène est généralement révélateur d'ingestion d'eau pouvant expliquer les dommages constatés, sans nécessairement s'accompagner des autres conséquences que l'expert judiciaire considérait comme requises » (p. 23-24), la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'existence de vices cachés ouvre à l'acquéreur une action rédhibitoire ou une action estimatoire ; que l'action rédhibitoire conduit l'acheteur à rendre la chose et à se faire restituer le prix ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619.889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305.520 euros, soit la somme totale de 924.889 euros, après avoir jugé que « les intimées sont ainsi fondées à solliciter la nullité de la vente pour vice caché sur le fondement de l'article 1641 du Code civil », quand les restitutions consécutives à la nullité se limitent à la restitution du prix versé, soit la somme de 630.500 euros HT, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil, ensemble l'article 1644, du même code ;
5°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE selon l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619.889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305.520 euros, sans constater que la société Thermodyn connaissait les vices de la chose, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1645 du code civil ;
6°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'action estimatoire consiste pour l'acquéreur à garder la chose et à se faire rendre une partie du prix, tandis que l'action indemnitaire permet à l'acquéreur d'obtenir la réparation de ses préjudices ; qu'en condamnant la société Thermodyn à verser à la société IF Assurances la somme de 619.889 euros et à la société Metsa Board Oyj la somme de 305.520 euros, aux motifs éventuellement adoptés que « la chose livrée ayant été conservée par la société M-Real, cette dernière entend donc se placer dans le cadre de l'action estimatoire prévue par l'article 1644 et se faire ainsi restituer une partie du prix, sans préjudice des autres dommages éventuellement subis », et que le montant des dommages « est décomposé comme suit :129.360 euros au titre des dommages directs (démontage, remontage, assistance démarrage, remise en état du rotor) ;154.933 euros au titre des frais supplémentaires (mise en place d'un rotor provisoire) ; 660.000 euros au titre des surcoûts achats électricité », sans préciser quel montant de la condamnation correspondait à la réduction du prix de l'action estimatoire et quel montant relevait de l'action indemnitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1644 et 1645 du code civil.