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28/11/2018 | FRANCE | N°17-20782

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 novembre 2018, 17-20782


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon arrêt attaqué, que M. Y..., se disant au bénéfice d'un contrat de travail promis par Mme X... en qualité de gérante de l'enseigne Le Chalet à Pizza, a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour condamner Mme X... à verser à M. Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour ruptur

e abusive d'une promesse d'embauche, l'arrêt retient que Mme X... a informé M. Y... qu'il...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon arrêt attaqué, que M. Y..., se disant au bénéfice d'un contrat de travail promis par Mme X... en qualité de gérante de l'enseigne Le Chalet à Pizza, a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que pour condamner Mme X... à verser à M. Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive d'une promesse d'embauche, l'arrêt retient que Mme X... a informé M. Y... qu'il serait embauché en qualité de livreur, dans le cadre d'un temps plein de 35 heures en lui précisant ses horaires de travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la promesse ne précisait ni rémunération ni date d'embauche de sorte qu'elle ne constituait ni une offre de contrat de travail ni une promesse unilatérale de contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné Mme X... à payer à M. Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive d'une promesse d'embauche, l'arrêt rendu le 16 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi :

Déboute M. Y... de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive de la promesse d'embauche ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à la SCP Gouz-Fitoussi la somme de 1 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gouz-Fitoussi, avocat aux Conseils, pour Mme X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR, infirmant les dispositions du jugement entrepris relatives à la promesse d'embauche, condamné Mme X... en qualité de gérante de l'enseigne Le Chalet à Pizza à verser à M. Y... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive d'une promesse d'embauche ;

AUX MOTIFS QU'« incarcéré dans l'attente de son jugement, M. Y... a été rendu destinataire le 14 avril 2012 d'un courrier de Mme X... libellé comme suit : « Je soussignée Mme X... Ingrid demeurant [...] , certifie être en pleine création d'entreprise, plus précisément une pizzeria et, recherchant un livreur, je me porte garante pour lui proposer un contrat à durée indéterminée avec une période d'essai d'un mois. Pour le moment, je n'ai pas de numéro de SIRET mais la chambre des métiers de l'artisanat de Beauvais peut vous confirmer ma formation et l'ouverture de cette pizzeria. J'obtiendrai mon numéro de RCS le 27 avril 2012 après la fin de ma formation. L'ouverture de la pizzeria est prévue pour le début du mois de juin 2012 » ; que M. Y... était ensuite rendu destinataire d'un second courrier daté du 4 mai 2012 libellé comme suit : « Je soussignée Mme X... Ingrid, certifie proposer un contrat à durée indéterminée avec période d'essai à M. Y... Jean-Marie. Je souhaiterais lui proposer un contrat à temps plein de 35 heures avec heures supplémentaires envisageables et deux jours de repos par semaine. Ses horaires seront : de 11h à 14h et de 18h à 22h30. Mon entreprise ouvrira ses portes le 11 juin 2012. Pour le moment je n'ai pas de numéro de SIRET, j'ai fait ma formation et mon numéro est en cours. Je devrais le recevoir le 14 mai 2012. Je vous joins avec cette lettre une copie de mon attestation de stage et une copie de ma déclaration à la chambre des métiers » ; que M. Y... indique avoir fait valoir ces promesses d'embauche devant la justice qui en a tenu compte en ce qu'il est sorti de détention le 15 mai 2012 ; qu'il précise avoir contacté à plusieurs reprises Mme X... qui n'a pas souhaité mettre à exécution son engagement et qui ne lui a proposé de travailler qu'une seule soirée moyennant une rémunération de 20 euros ; que soutenant à titre principal avoir été embauché selon contrat à durée indéterminée sans contrat écrit et à titre subsidiaire, considérant que les engagements pris par Mme X... au sein des courriers susvisés n'ont pas été respectés, M. Y... a saisi le conseil des prud'hommes de Beauvais qui, par jugement du 10 septembre 2013, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment ; que l'écrit qui précise les conditions de l'emploi proposé, le lieu et la durée de travail, la rémunération et la date d'entrée en fonction constitue non pas une simple proposition d'emploi mais une promesse d'embauche s'analysant en un véritable engagement unilatéral de fourniture d'emploi qui oblige l'employeur envers le destinataire de l'offre et qui ne peut être valablement rompu ou rétracté sans faute pour le promettant, étant observé que l'acceptation de la promesse par le destinataire a pour effet de conférer à celle-ci la valeur d'un véritable contrat de travail ; qu'en l'espèce, il ressort des éléments du dossier que la promesse d'emploi adressée par Mme X... à M. Y... ne précisait ni les conditions de rémunération ni la date d'embauche, que M. Y... ne démontre pas avoir accepté cette promesse, qu'il ne produit pas d'éléments de preuve de la fourniture d'un travail effectif au service de Mme X... ou de l'enseigne Le Chalet à Pizza ou d'une rémunération susceptible de caractériser l'existence d'une relation de travail ou encore d'instructions ou de consignes reçues par l'employeur susceptibles d'établir un lien de subordination à son égard ; que les premiers juges ont donc à bon droit estimé que M. Y... n'était pas lié à Mme X..., gérante du Chalet à Pizzas, par un contrat de travail ; qu'il ressort cependant des éléments du dossier et plus particulièrement des courriers susvisés que Mme X... a informé M. Y... qu'il serait embauché en qualité de livreur, dans le cadre d'un temps plein de 35 heures et en lui précisant ses horaires de travail ; que l'existence d'une véritable promesse d'embauche doit en conséquence être retenue ; qu'il n'est pas justifié de circonstances de nature à légitimer une rétractation de cette promesse d'embauche ; qu'en rompant son engagement unilatéral de fourniture d'emploi, Mme X... a commis une faute dont elle doit réparation à hauteur du préjudice subi par M. Y... ; qu'il sera en conséquence accordé à l'appelant des dommages-intérêts couvrant à la fois le préjudice matériel et moral à hauteur de la somme indiquée au dispositif ; que le jugement entrepris sera par conséquent infirmé de ce chef ; que la procédure de licenciement ou de résolution judiciaire n'ayant pas vocation à s'appliquer en ce que la promesse d'embauche n'a pas reçu exécution, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre des rappels de salaires, indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférent et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de remise de documents de contrat sous astreinte » ;

1°) ALORS QU'une promesse unilatérale de contrat de travail suppose que soient précisées la date d'entrée en fonction et la rémunération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les écrits adressés par Mme X... à M. Y... ne précisaient « ni les conditions de rémunération ni la date d'embauche » (arrêt attaqué, p. 4 § 3, et p. 3) ; que dès lors, en jugeant néanmoins que « l'existence d'une véritable promesse d'embauche [devait] (
) être retenue » et que Mme X... avait commis une faute en « rompant son engagement unilatéral de fourniture d'emploi » (arrêt attaqué, p. 4 §§ 6 et 8), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;

2°) ALORS, en tout état de cause, QU'une offre de contrat de travail suppose que soient précisées la date d'entrée en fonction et la rémunération ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les écrits adressés par Mme X... à M. Y... ne précisaient « ni les conditions de rémunération ni la date d'embauche » (arrêt attaqué, p. 4 § 3, et p. 3) ; que dès lors, en jugeant néanmoins que « l'existence d'une véritable promesse d'embauche [devait] (
) être retenue » et que Mme X... avait commis une faute en « rompant son engagement unilatéral de fourniture d'emploi » (arrêt attaqué, p. 4 §§ 6 et 8), la cour d'appel, à supposer qu'elle ait entendu retenir l'existence d'une offre de contrat de travail, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-20782
Date de la décision : 28/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 16 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 nov. 2018, pourvoi n°17-20782


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gouz-Fitoussi, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.20782
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