LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 18 octobre 2004, Mme X..., vivant en concubinage avec M. Z..., a acquis un terrain sur lequel elle a fait réaliser la construction d'une maison, partiellement financée au moyen, d'une part, d'un prêt par elle souscrit, d'autre part, du produit de la vente d'un bien appartenant à M. Z... ; qu'en outre, ce dernier et Mme X... ont contracté un prêt pour procéder à l'agencement de la maison ; que, le 2 février 2007, à la suite de leur séparation survenue avant la réception de la construction, M. Z... et Mme X... ont établi un acte sous seing privé, prévoyant la vente de la maison édifiée sur le terrain de cette dernière et, après remboursement des prêts contractés par les parties, une répartition du prix de vente à hauteur de 70 % pour Mme X... et 30 % pour M. Z... ; que, se prévalant de cet acte, la première a, par acte du 20 juillet 2012, assigné le second en paiement d'une somme correspondant à 30 % de l'évaluation du prix de la maison et sollicité, à titre subsidiaire, la mise en vente de celle-ci ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire qu'elle devra procéder à la vente de son bien conformément à l'acte du 2 février 2007, dans un délai de six mois, le prix de vente devant être fixé à la moyenne de trois valorisations faites par trois notaires ;
Attendu qu'après avoir, dans l'exercice de son pouvoir souverain, apprécié les termes de cet acte et considéré qu'il valait transaction et comportait un engagement futur et non conditionnel pris par Mme X... de vendre son immeuble et de payer à M. Z... 30 % du prix de la vente, s'analysant, en raison de l'accomplissement d'un acte extérieur, en une condition potestative licite, la cour d'appel a pu en déduire que, même si aucune date ou aucun terme n'avait été fixé, eu égard à la procédure alors pendante contre le constructeur au titre de diverses malfaçons, laquelle s'est achevée en juillet 2010, le vente devait intervenir dans un délai raisonnable ; qu'ayant constaté que près de dix ans s'étaient écoulés depuis la signature de la transaction, elle a pu imposer à Mme X... de procéder à cette vente dans un certain délai, en vue d'exécuter son engagement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt condamne Mme X..., à défaut de vente dans un délai de six mois ou en cas de décision de ne pas vendre son bien, à payer à M. Z... la somme réclamée ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen de Mme X... qui faisait valoir qu'en application de l'acte du 2 février 2007, il y avait lieu de déduire le solde des prêts restant dû, avant d'opérer la ventilation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur la seconde branche de ce moyen :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour fixer la valeur du bien et condamner Mme X... à payer à M. Z... 30 % de cette somme, à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou de décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, l'arrêt se fonde sur une expertise réalisée à la demande de celle-ci ;
Qu'en statuant ainsi, alors que cette expertise avait été réalisée unilatéralement à la demande de l'une des parties et n'était corroborée par aucun autre élément de preuve, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme X..., à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou la décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, à payer à M. Z... la somme de 141 000 euros avec intérêts de droit, l'arrêt rendu le 30 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit et signé par lui et par Mme Pecquenard, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir, infirmant le jugement, dit que Mme X... devra procéder à la vente de son bien immobilier sis [...] « [...] » à [...] (44) conformément à la convention du 2 février 2007, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent arrêt, le prix de vente étant fixé à la moyenne de trois valorisations qui devront être faites par trois notaire de la presqu'île guérandaise installés sur les communes de [...], [...] et [...], condamné Mme X..., à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou de décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, à payer à M. Z... la somme de 141 000 € avec intérêts de droit ;
AUX MOTIFS QU'il résulte de la convention litigieuse impliquant des concessions réciproques entre les parties, que celles-ci, qui venaient de mettre fin à leur vie commune, en formalisant après un rendez-vous le 21 décembre 2006 auprès de Me Benoît B..., notaire assistant à [...], un accord transactionnel le 2 février 2007, ont voulu prévenir une contestation à naître au sens de l'article 2044 du code civil, portant sur les conditions de vente de la maison [...], alors qu'à cette époque comme le relève l'intimée, l'immeuble n'était pas réceptionnable ni vendable et que la procédure contre la société Depreux Construction uniquement financée par elle, n'était pas achevée (le protocole d'accord avec la société Depreux a été conclu le 6 juillet 2010 et le procès-verbal de réception de la maison a eu lieu le 26 juillet 2010, soit près de cinq années après la date contractuellement prévue) ; que toutefois, la commune intention des parties au sens de l'article 1156 du code civil, était de concrétiser un accord dans la perspective future et certaine de la vente de ce bien par Mme X..., l'emploi des termes : conviennent et arrêtent d'ores et déjà et l'usage du futur : le prix de vente .. sera réparti comme suit, 70 % du prix reviendra à Mme X... 30 % reviendra à M. Y... Z..., cette répartition du prix se fera .., ce qui est corroboré par le petit mot établi de la main de l'intimée à l'attention des parents de son ex concubin pour Noël 2006, soit à une date contemporaine à la signature de l'acte du 2 février 2007, mentionnant : Soyez rassurés, je ne devrai rien à Y... après la vente de la maison, soit avec l'emploi du futur simple et non du conditionnel ; que la cause de l'obligation de Mme X..., tenant à respecter la répartition du prix de vente de la maison lui appartenant et à indemniser son ex concubin de la valeur des investissements réalisés qui a été convenue, est directement liée au projet de mise en vente dudit bien, même si aucune date ou aucun terme n'est fixé, eu égard à la procédure pendante contre la société Depreux Construction ; que l'engagement de payer à M. Z... 30 % du prix de la vente du bien litigieux consiste non en une simple déclaration de volonté, mais dans l'accomplissement d'un acte extérieur et constitue non une condition purement potestative qui serait nulle aux termes de l'article 1174 du code civil, mais une condition simplement potestative licite ; que M. Z... n'est tenu de patienter jusqu'à la réalisation de la vente que pendant un délai raisonnable, alors qu'il s'est écoulé presque 10 ans depuis la rédaction de l'acte du 2 février 2007 ; que par application des dispositions de l'article 1901 du code civil, il sera fait droit à la demande de l'appelant tendant à dire que Mme X... devra procéder à la vente de son bien immobilier conformément à la convention dans un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt, le prix de vente étant fixé à la moyenne de trois valorisations qui devront être faites par trois notaires de la presqu'île guérandaise installés sur les communes de [...], [...] et [...], et celle-ci à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou de décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, sera condamnée à payer à M. Z... la somme de 141 000 € avec intérêts, étant précisé que le bien litigieux a été évalué le 11 juillet 2012 par l'agence Patrimoine Modernisation, cabinet immobilier au Pouliguen, à la somme de 470 000 €, qu'il est donc fondé à réclamer la somme de 141 000 € correspondant à 30 % de cette somme ;
ALORS QUE l'obligation demeure conditionnelle tant que la condition suspensive n'est pas accomplie ; que l'arrêt attaqué retient que Mme X... s'est engagée à payer à M. Z... 30 % du prix de la vente du bien, de sorte que cet engagement est suspendu à la réalisation d'une condition extérieure, à savoir le fait de trouver un acquéreur ; qu'en condamnant néanmoins Mme X... à « procéder à la vente » dans un délai de six mois et, « à défaut de vente » dans ce délai, à payer à M. Z... la somme de 141 000 € correspondant à 30 % de la valeur estimée du bien, tandis même que Mme X... n'aurait pas empêché l'accomplissement de la condition, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1181 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE) :IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir, infirmant le jugement, condamné Mme X..., à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou de décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, à payer à M. Z... la somme de 141 000 € avec intérêts de droit ;
AUX MOTIFS QUE par application des dispositions de l'article 1901 du code civil, il sera fait droit à la demande de l'appelant tendant à dire que Mme X... devra procéder à la vente de son bien immobilier conformément à la convention dans un délai de six mois à compter de la signification de l'arrêt, le prix de vente étant fixé à la moyenne de trois valorisations qui devront être faites par trois notaires de la presqu'île guérandaise installés sur les communes de [...], [...] et [...], et celle-ci à défaut de vente dans un délai de six mois passé la signification de l'arrêt ou de décision de celle-ci de ne pas vendre son bien, sera condamnée à payer à M. Z... la somme de 141 000 € avec intérêts, étant précisé que le bien litigieux a été évalué le 11 juillet 2012 par l'agence Patrimoine Modernisation, cabinet immobilier au Pouliguen, à la somme de 470 000 €, qu'il est donc fondé à réclamer la somme de 141 000 € correspondant à 30 % de cette somme ;
1) ALORS QUE l'acte du 2 février 2007 fixait la répartition du prix de vente entre Mme X... et M. Z... « après remboursement des prêts contractés par les parties » ; que Mme X..., qui faisait valoir avoir « contracté un prêt de 180 000 € dont les mensualités courent jusqu'en 2024 », soutenait ainsi qu' « en cas de vente de la maison (
), il conviendrait de déduire le solde des prêts restant dû, avant d'opérer la ventilation » (conclusions, p. 13) ; qu'en condamnant néanmoins, à défaut de vente dans les 6 mois, Mme X... à payer à M. Z... la somme de 141 000 € correspondant à 30 % de la valeur estimée du bien, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE, en toute hypothèse, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non contradictoire ; qu'en se fondant exclusivement, pour fixer la valeur du bien à 470 000 € et condamner Mme X... à payer à M. Z... 30 % de cette somme, sur l'expertise réalisée par l'agence Patrimoine Modernisation à la demande de M. Z... et dont les conclusions étaient contestées par Mme X... (conclusions, p. 16), la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.