La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/11/2018 | FRANCE | N°18-80089

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 novembre 2018, 18-80089


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° A 18-80.089 FS-P+B

N° 2698

CK
21 NOVEMBRE 2018

CASSATION
et IRRECEVABILITE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

IRRECEVABILITE et cassation sur les pourvois formés par Mme Yvette X..., en son nom pr

opre et en qualité d'ayant droit de Pierre Y..., M. Ronan Y..., Mme Nathalie Y..., Mme Blandine Y..., en qualité d'ayants d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° A 18-80.089 FS-P+B

N° 2698

CK
21 NOVEMBRE 2018

CASSATION
et IRRECEVABILITE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

IRRECEVABILITE et cassation sur les pourvois formés par Mme Yvette X..., en son nom propre et en qualité d'ayant droit de Pierre Y..., M. Ronan Y..., Mme Nathalie Y..., Mme Blandine Y..., en qualité d'ayants droit de Pierre Y..., contre l'arrêt n° 3 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 23 novembre 2017, qui, dans la procédure suivie des chefs de blanchiment et escroquerie, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention maintenant une saisie pénale ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, M. Germain, Mme Planchon, M. Larmanjat, Mme Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, conseillers de la chambre, Mme Chauchis, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. A... ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Z..., les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général A... ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;

Sur la recevabilité des pourvois de Mme Yvette X..., veuve Y..., M. Ronan Y..., Mme Nathalie Y...et Mme Blandine Y..., en qualité d'ayants droits de Pierre Y... :

Attendu que la chambre de l'instruction a statué sur les appels d'une ordonnance de maintien de saisies pénales portant sur les soldes de comptes bancaires ouverts au nom de Pierre Y..., de Mme Yvette Y..., son épouse, ou des deux époux, qui ont été interjetés par Mme Yvette Y... et Pierre Y..., décédé en cours de l'instance d'appel, sans que les ayants droit de ce dernier ne l'aient reprise ;

Attendu qu'ainsi, n'étant pas parties à la procédure au sens de l'article 567 du code de procédure pénale, les demandeurs agissant comme ayants droit de Pierre Y..., qui n'ont pas usé de leur droit d'intervenir à l'instance d'appel, n'avaient pas qualité pour se pourvoir en cassation ;

D'où il suit que les pourvois ne sont pas recevables ;

Sur le pourvoi formé par Mme Yvette Y... en son nom propre :

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 131-21, 324-7, 12°, du code pénal, 6, 706-73, 706-103, 706-141 et suivants, 591 et 593 du code de procédure pénale :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les appels recevables, déclaré les moyens du mémoire présenté au nom de Pierre Y... irrecevables ; au fond, déclaré irrecevable la demande relative à l'extinction de l'action publique, dit les appels mal fondés, dit que le maintien de la saisie des sommes inscrites au solde des comptes concerne les comptes bancaires suivants : le compte dont M. et Mme Y... sont titulaires, n° [...], à la CIC Ouest Alençon pour un montant de 148 054,90 euros, le compte dont Mme Yvette Y... est titulaire, n° [...], à la CIC Ouest Alençon pour un montant de 696 948,67 euros, le compte dont M. Y... est titulaire, n° [...], à la CIC Ouest Alençon pour un montant de 78 191,49 euros, le compte dont M. Y... est titulaire, n° [...], à la CIC Ouest Alençon pour un montant de 5 265,64 euros, le compte dont M. et Mme Y... sont titulaire, n° [...], à la Société Générale Ouest Alençon pour un montant de 259 549,33 euros, et le compte dont M. et Mme Y... sont titulaires, n° [...], à la Société Générale Alençon pour un montant de 12 558,34 euros, et ordonné que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Mme la procureure générale ;

"aux motifs que "sur l'appel régulièrement interjeté au nom de Pierre Y..., l'avocat de Pierre Y... ne pouvait pas, à la suite du décès de Pierre Y... le [...], saisir la chambre de l'instruction d'un mémoire au nom du défunt, mais seulement, le cas échéant, au nom des ayants-droit du défunt ; qu'en conséquence, le mémoire sera déclaré irrecevable pour ce qui concerne les moyens développés au nom de Pierre Y... ; que la demande relative à la constatation de l'extinction de l'action publique devrait être déclarée irrecevable, comme étrangère à la règle de l'unique objet dont la chambre de l'instruction est saisie, à savoir l'appel d'une ordonnance de saisie pénale ; que le 27 septembre 2016, dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte pour des faits de blanchiment de fraude fiscale aggravée, l'officier de police judiciaire procédait, sur autorisation du procureur de la République financier, à la saisie pénale des sommes inscrites au solde créditeur de six comptes de dépôt ouverts au nom de Pierre Y..., de Mme Yvette Y... et de M. et Mme Y... ; que, sur requête du procureur de la République financier du 3 octobre 2016, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris autorisait, par ordonnance du 4 octobre 2016, soit dans le délai de dix jours prévu par l'article 706-154 du code de procédure pénale, le maintien des saisies des sommes inscrites au solde de ces comptes ; que la procédure relative à l'ordonnance de maintien de saisie pénale des sommes inscrites au solde des comptes de dépôt concernés est régulière ; que les investigations réalisées dans le cadre de l'enquête préliminaire ont fait apparaître que M. et Mme Y... n'ont pas déclaré de comptes bancaires ou d'assurances vie détenus à l'étranger ; que le groupe français Alma, dirigé par Pierre Y..., est détenu par la société holding familiale luxembourgeoise Roxinvest SA, qui possède de nombreuses participations capitalistiques dans des sociétés offshore, dont les sociétés Roxane INC et Worldliner INC, et que la société Rox Invest SA, sans activité économique, a pour objet l'hébergement d'un patrimoine qui, détenu par un résident fiscal français, échappe à l'impôt sur la fortune ou sur le revenu en France en l'absence de déclaration ; que la société Rox Invest SA est, en outre, titulaire d'une assurance vie à Luxembourg souscrite depuis le 6 juin 2010 auprès de la société Sogelife SA pour un capital initial versé de 45 050 000 euros ; que ces fonds, qui seront à terme disponibles et susceptibles de bénéficier à un tiers, ont pour finalité la constitution d'un patrimoine sous couvert de la société holding ; que l'enquête démontre, en outre, que la société Worldlinerinc, constituée d'abord à Niue (Nouvelle Zélande) puis transférée aux Seychelles, ne semble pas avoir d'utilité autre que de servir de société écran pour détenir la propriété d'un jet privé (CESSNA Citation J4) utilisé depuis la France, mis en location auprès de la SAS Financiere Vauxoise sise à Tours ; que cette société s'est chargée de solliciter des remboursements ou des décharges indus de TVA sur le fondement de factures d'entretien de l'avion estimées à 67 000 euros de 2012 à 2016 ; que, cependant, la société Worldliner INC ne déclare aucun chiffre d'affaires à l'administration fiscale française, alors qu'elle exerce son activité sur le sol français ; qu'elle a été titulaire d'un compte bancaire ouvert à Luxembourg auprès de la Société Générale Bank et Trust (Luxembourg), établissement bancaire également utilisé par la société holding Rox Invest SA ; que l'obtention indue d'une décharge de TVA au moyen d'une mise en scène par le biais d'une société non résidente interposée et sans consistance économique est susceptible de constituer une escroquerie à la TVA au préjudice du Trésor Public français ; qu'il apparaît qu'à la date de la saisie pénale, Pierre Y... et son épouse détenaient, directement ou indirectement, un patrimoine constitué de liquidités (2,4 millions d'euros), d'un immeuble en France (203 000 euros), d'une assurance vie évaluée à 196 621 euros et de titres de la société française SA Alma, par l'intermédiaire de la société holding Rox Invest à Luxembourg (240 millions d'euros); que le recours à des sociétés offshore peut avoir permis à Pierre Y... d'éluder en France, entre 2009 et 2014, une somme évaluée à 7 608,012 euros au titre de l'impôt sur la fortune, hors intérêts de retard et pénalités ; que ces sociétés offshore ont donc pu contribuer à convertir ou dissimuler le produit financier d'une fraude fiscale en permettant l'hébergement d'avoirs ou de biens ; que, eu égard à la qualification de blanchiment de fraude fiscale aggravée, les sommes disponibles sur le ou les comptes de dépôt de Pierre Y... et de Mme Yvette X..., épouse Y... pouvaient, à juste titre, faire l'objet d'une saisie en valeur, sur le fondement des articles 132-21, alinéa 9, du code pénal et 706-141-1 du code de procédure pénale, même si ces sommes ne constituaient pas le produit direct de la fraude ; que cette saisie pénale par équivalent, portant pour ce qui concerne les comptes de dépôt sur une somme totale de 1 200 568,37 euros, est proportionnée au montant des sommes objet du blanchiment de fraude fiscale aggravé susceptible d'avoir été commis, soit 7 608,012 euros ; qu'en outre, les sommes figurant au solde des comptes concernés constituent une partie des biens des personnes mises en cause, dont la confiscation générale est prévue par l'article 324-7, alinéa 12, du code pénal ; que la confiscation de ces sommes est également encourue sur le fondement de l'article 131-21 7 alinéa 6 du code pénal ; que la saisie a été requise de ce chef par le ministère public ; qu'il y a lieu de préciser que des erreurs matérielles affectant les désignations des titulaires des comptes et l'un des numéros de comptes, les comptes concernés sont ceux précisés au dispositif ; qu'en effet le compte CIC Ouest (succursale d'Alençon) n° [...] (et non pas [...]) [solde 78 191,49 euros] est ouvert au nom de Pierre Y... et non pas de M. et Mme Y..., le compte CIC Ouest (succursale d'Alençon) n° [...] [solde 5 265,64 euros] est ouvert au nom de Pierre Y... et non pas de M. et Mme Y..., le compte CIC Ouest (succursale d'Alençon) n° [...] [solde 696 948,67 euros] est ouvert au nom de Mme Yvette Y... et non pas de M. et Mme Y... ; qu'en l'absence de saisie pénale, une dissipation des sommes concernées aurait pour effet, en cas de poursuites pénales, de priver la juridiction de jugement de toute perspective de confiscation ; qu'en continuation de l'enquête ouverte du chef de blanchiment de fraude fiscale aggravée, d'autres personnes sont susceptibles d'être poursuivies en qualité de coauteur ou de complice de cette infraction, ou de receleur ; que l'état de santé de Mme Y... et les frais y afférents ont été suffisamment pris en considération dans le cadre d'une décision du procureur de la République de mainlevée partielle du 12 décembre 2016 ; que, dès lors, la saisie pénale des sommes inscrites au solde créditeur du compte de dépôt ouvert au nom de Mme Yvette X..., épouse Y... et des comptes de dépôt ouverts au nom de Pierre Y... et de M. et Mme Y... doit être maintenue afin de garantir le prononcé éventuel de la peine complémentaire de confiscation ; qu'en conséquence, l'ordonnance entreprise doit être confirmée" ;

"1°) alors que dès que le juge est informé officiellement du décès de la personne susceptible d'être mise en examen dans le cadre d'une enquête préliminaire - et à l'encontre de laquelle il a été procédé à une saisie, à titre conservatoire, de certains biens, pouvant faire l'objet d'une sanction complémentaire de confiscation - il doit ipso facto constater la fin de la procédure et procéder aux restitutions des biens saisis en prononçant la mainlevée des saisies pénales qui avaient été effectuées ; qu'en l'espèce, le parquet national financier avait reçu par lettre recommandée avec avis de réception du [...], l'acte de décès de Pierre Y... survenu le [...] ; qu'à compter de la réception de cette information, la juridiction alors saisie, à savoir la chambre de l'instruction, aurait dû constater la fin de la procédure et par conséquent prononcer la mainlevée de la mesure de saisie pénale spéciale prononcée à son encontre qui n'avait plus lieu d'être puisqu'aucune peine complémentaire de confiscation ne pouvait plus intervenir à l'encontre de la personne décédée ; qu'en jugeant cependant que la procédure relative à la saisie des comptes litigieux est régulière et en refusant de prononcer la mainlevée des saisies réalisées, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

"2°) alors que indépendamment de la règle de l'unique objet de l'appel, une chambre de l'instruction, informée du décès de la personne susceptible d'être mise en cause, doit ipso facto constater la fin de la procédure et ordonner la mainlevée des mesures de saisies pénales déjà effectuées en vue de garantie l'exécution d'une future peine complémentaire de confiscation qui ne pourra être prononcée contre la personne décédée au cours de l'enquête préliminaire ; que bien qu'ayant rappelé avoir eu connaissance officiellement du décès de Pierre Y... dès le [...], qu'en jugeant cependant, pour confirmer l'ordonnance de maintien de la saisie des comptes litigieux, que "la demande relative à la constatation de l'extinction de l'action publique doit être déclarée irrecevable, comme étrangère à la règle de l'unique objet dont la chambre de l'instruction est saisie, à savoir l'appel d'une ordonnance de maintien de saisie pénale", la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"3°) alors que la saisie pénale ne peut être réalisée de manière préventive dans l'attente de la mise en cause de ceux à qui le bien appartient ; qu'en l'espèce seul Pierre Y... était visé par l'enquête préliminaire diligentée pour des faits de blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée et d'escroquerie à la TVA ; qu'en revanche Mme Y... n'était pas suspectée d'avoir accompli de tels faits à quelque titre que ce soit ; qu'il n'était donc pas possible de procéder légalement à la saisie des biens appartenant à celle-ci à titre préventif, en attendant qu'elle soit elle-même mise en cause dans cette enquête ; qu'en jugeant cependant que la saisie opérée sur le compte personnel de Mme Y... et sur les trois comptes commun aux deux époux devait être maintenue, pour la seule raison qu'en continuation de l'enquête ouverte "d'autres personnes sont susceptibles d'être poursuivies en qualité de coauteur ou de complice de cette infraction ou de receleur", la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"4°) alors que les saisies ne peuvent porter que sur des biens dont la personne mise en examen se trouve être entièrement propriétaire ; qu'en l'espèce, les trois comptes litigieux dont étaient titulaires M. et Mme Y... n'étaient pas l'entière propriété de Pierre Y..., il ne pouvait valablement être procédé à la saisie des sommes inscrites sur ces comptes ; qu'en jugeant cependant que la saisie de ces comptes devait être maintenue, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"5°) alors que les saisies ne peuvent porter que sur des biens dont la personne mise en examen se trouve être entièrement propriétaire ; qu'en l'espèce, le compte dont était titulaire exclusivement Mme Y... n'était pas la propriété de Pierre Y..., il ne pouvait valablement être procédé à la saisie des sommes inscrites sur ce compte ; qu'en jugeant cependant que la saisie de ce compte devait être maintenue, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Vu l'article 131-21 du code pénal, et les articles 6, 706-141, 706-141-1, 706-148, 706-153, 706-154 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il se déduit de ces textes qu'il appartient à la chambre de l'instruction saisie d'un appel formé à l'encontre d'une ordonnance emportant saisie spéciale de biens appartenant à une personne mise en cause par une enquête préliminaire, laquelle décède au cours de l'instance, de sorte que l'action publique ne peut plus être mise en mouvement à son encontre, de s'assurer, même d'office, que les conditions légales de la saisie, dont celle du caractère confiscable des biens en application de l'article 131-21 du code pénal, demeurent réunies ; qu'à défaut, elle est tenue d'ordonner la mainlevée de la saisie ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le procureur national financier a diligenté une enquête préliminaire sur des faits de blanchiment de fraude fiscale aggravée à la suite de la révélation par les médias de l'affaire dit des "Panama papers" impliquant des résidents fiscaux français susceptibles d'avoir dissimulé leurs avoirs à l'étranger par l'intermédiaire d'entités écrans ; que les investigations ont porté sur la situation de Pierre Y..., dirigeant du groupe Alma, détenu par la société holding luxembourgeoise Rox invest SA dont les époux Y... détiennent une partie du capital, laquelle possède des participations capitalistiques dans des sociétés off shore ; qu'il en est résulté que ces dernières auraient permis de dissimuler le produit d'une infraction de fraude fiscale commise entre 2009 et 2014 et portant sur l'impôt sur la fortune éludé par Pierre Y... à hauteur de la somme de 7 608 012 euros ; que le juge des libertés et de la détention, saisi par le ministère public à cette fin, a ordonné le maintien de la saisie, effectuée par les enquêteurs en application de l'article 706-154 du code de procédure pénale, de six soldes créditeurs de comptes bancaires ouverts au nom de Pierre Y..., de Mme Yvette Y..., son épouse, ou des deux époux, au titre de la saisie en valeur du produit de l'infraction de blanchiment ainsi qu'au titre de la saisie de patrimoine ; que les époux Y... ont interjeté appel ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande relative à la constatation de l'extinction de l'action publique et confirmer le maintien des saisies, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que, si le décès de Pierre Y... n'était pas en soi de nature à entraîner la clôture des investigations et la restitution des biens saisis, cette circonstance imposait cependant à la chambre de l'instruction de rechercher s'il existait ou non des présomptions de la participation aux faits objet de l'enquête de la personne propriétaire des fonds saisis, ou dont elle a la libre disposition, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

Sur les pourvois de Mme Yvette X..., M. Ronan Y..., Mme Nathalie Y... et Mme Blandine Y..., en qualité d'ayants droits de Pierre Y... :

Les déclare IRRECEVABLES ;

Sur le pourvoi de Mme Yvette X... :

CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 23 novembre 2017 et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un novembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 18-80089
Date de la décision : 21/11/2018
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

SAISIES - Saisies spéciales - Saisie portant sur certains biens ou droits mobiliers incorporels - Décès du mis en cause - Effets - Mainlevée

Il appartient à la chambre de l'instruction saisie d'un appel formé à l'encontre d'une ordonnance emportant saisie spéciale de biens appartenant à une personne mise en cause par une enquête préliminaire, laquelle décède au cours de l'instance, de sorte que l'action publique ne peut plus être mise en mouvement à son encontre, de s'assurer, même d'office, que les conditions légales de la saisie, dont celle du caractère confiscable des biens en application de l'article 131-21 du code pénal, demeurent réunies. A défaut, elle est tenue d'ordonner la mainlevée de la saisie. Encourt dès lors la censure l'arrêt de la chambre de l'instruction qui, sur les appels formés par un mis en cause pour blanchiment et son épouse, titulaires de comptes bancaires, à l'encontre d'une ordonnance maintenant leur saisie, bien qu'informée, en cours d'instance, du décès du premier, confirme l'ordonnance, au titre de la saisie en valeur du produit de l'infraction et de la saisie de patrimoine, sans rechercher s'il existait, ou non, des présomptions de la participation aux faits objet de l'enquête de la personne propriétaire, autre que le défunt, des fonds saisis, ou dont elle a la libre disposition


Références :

article 131-21 du code pénal

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 23 novembre 2017

Sur les conséquences du décès du prévenu en cours d'instance de pourvoi en cassation, à rapprocher :Crim., 5 mai 1998, pourvoi n° 97-82669, Bull. crim. 1998, n° 149 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 nov. 2018, pourvoi n°18-80089, Bull. crim.Bull. crim. 2018, n° 195
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle Bull. crim. 2018, n° 195

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:18.80089
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award