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21/11/2018 | FRANCE | N°17-27736

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 novembre 2018, 17-27736


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 205 du code civil, ensemble l'article L. 314-12-1 du code de l'action sociale et des familles ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Saint-Louis (l'EHPAD), qui avait accueilli Georges Z... du 10 avril 2012 au [...], jour de son décès, a assigné Mme X..., MM. Fabrice, Fabien, Sylvain, Raphaël Z... et Mme B..., ses obligés alimentaires, en paiement des frais d'hé

bergement restant dus après déduction des ressources de l'intéressé ;

Attendu qu...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 205 du code civil, ensemble l'article L. 314-12-1 du code de l'action sociale et des familles ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Saint-Louis (l'EHPAD), qui avait accueilli Georges Z... du 10 avril 2012 au [...], jour de son décès, a assigné Mme X..., MM. Fabrice, Fabien, Sylvain, Raphaël Z... et Mme B..., ses obligés alimentaires, en paiement des frais d'hébergement restant dus après déduction des ressources de l'intéressé ;

Attendu que, pour rejeter la demande de l'EHPAD, l'arrêt relève que Georges Z... percevait une retraite de 1 400,97 euros par mois, insuffisante pour couvrir les frais d'hébergement d'environ 1 700 euros par mois, mais que l'établissement n'explique ni les raisons pour lesquelles n'apparaissent à son profit que des versements mensuels de 1 200 euros en moyenne, ni la variation à la baisse du montant de sa créance entre juin 2016 et janvier 2017, de sorte qu'il ne justifie pas d'une dette précise et détaillée ;

Qu'en statuant ainsi, sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait l'état de besoin du créancier d'aliments, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Saint-Louis relative à la fixation de la dette alimentaire de Mme X..., MM. Fabrice, Fabien, Sylvain et Raphaël Z... et de Mme B..., l'arrêt rendu le 15 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour l'EHPAD Saint-Louis

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la demande de l'EHPAD en fixation de la dette alimentaire à l'égard des consorts X... Z... ;

AUX MOTIFS QU'« il ressort des dispositions de l'article 205 du code civil que les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. Celui qui réclame des aliments doit prouver qu'il est dans le besoin et, par là même, qu'il n'est pas en mesure d'assurer sa subsistance, spécialement en exerçant une activité rémunérée ; l'article 207 du code civil dispose que les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques. Néanmoins, quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire ; les obligations alimentaires sont prioritaires par rapport à toute autre dette ; en vertu du principe selon lequel "les aliments ne s'arréragent pas", il est constant que l'obligation alimentaire ne commence qu'à compter de la demande en justice formée par le créancier ; en l'espèce, l'EHPAD SAINT LOUIS aurait donc dû établir le montant de sa créance à compter de la date du dépôt de sa requête, le 18 septembre 2013, jusqu'à la date du décès de M. Georges Z..., le [...] ; or, les décomptes produits, tant celui daté du 6 juin 2016 que celui daté du 19 janvier 2017, ne sont établis qu'à compter du 1er avril 2014 et ne prennent pas en compte la période antérieure ; ils ne permettent donc pas d'établir le montant de la créance avec précision ; au surplus, il appartient à l'EHPAD d'établir l'état de besoin du créancier d'aliments ; il résulte certes des pièces produites par l'appelant que la pension de retraite perçue par M. Georges Z... à hauteur de 1.400,97 euros par mois (pièce n°1) était insuffisante pour couvrir l'intégralité des frais d'hébergement au sein de l'EHPAD SAINT LOUIS (en moyenne 1.700 euros par mois selon le décompte produit en pièce n°55) ; toutefois, l'EHPAD n'explique pas les raisons pour lesquelles n'apparaissent à son profit, dans les décomptes produits, que des versements mensuels de 1.200 euros en moyenne alors que M. Z... percevait une pension de retraite de 1.400 euros par mois ; enfin, alors que l'EHPAD chiffre sa créance définitive à la somme de 14.337,37 euros selon décompte du 19 janvier 2017, il sollicite dans ses dernières écritures, dans son dispositif, la fixation de la dette des consorts X... Z... à la date de décès de M. Z... à la somme de 16.222,63 euros ; les raisons pour lesquelles le montant restant dû en janvier 2017 (14.337,37 euros) est inférieur à celui indiqué en juin 2016 (16.222,63 euros) alors qu'aucun versement n'apparaît dans la colonne "recouvrements" entre ces deux dates, sont ignorées ; il y a lieu de constater, au vu de l'ensemble de ces éléments, que l'EHPAD SAINT LOUIS ne justifie pas d'une dette précise et détaillée ; en conséquence, il convient de rejeter sa demande à l'égard des consorts X... Z... » (arrêt pp. 7 et 8) ;

ALORS QUE 1°) pour débouter l'EHPAD de sa demande de paiement, la cour d'appel énonce que, l'obligation alimentaire ne commençant qu'à compter de la demande en justice formée par le créancier, celui-ci devait établir le montant de sa créance à compter de la date de dépôt de sa requête, le 18 septembre 2013, et jusqu'à la date de décès de Monsieur Z..., le [...] , et que les décomptes produits par l'EHPAD ne sont établis qu'à compter du 1er avril 2014, sans prendre en compte la période antérieure ; qu'en refusant ainsi d'examiner le bien-fondé de la créance de l'EHPAD, au motif inopérant qu'il n'était pas justifié de cette créance sur la période antérieure au 1er avril 2014, non réclamée par l'établissement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 314-12-1 du code de l'action sociale et des familles, et 205 du code civil ;

ALORS QUE 2°) les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ; que la cour d'appel constate par ailleurs qu'il résulte des pièces produites par l'EHPAD que la pension de retraite mensuelle perçue par Monsieur Z... à hauteur de 1.400,97 € était insuffisante pour couvrir l'intégralité des frais d'hébergement au sein de la maison de retraite, qui s'élevaient en moyenne à 1.700 € par mois selon le décompte produit ; qu'en déboutant l'EHPAD de ses demandes formées contre les débiteurs d'aliments de Monsieur Z..., quand elle constatait qu'il avait pourtant apporté la preuve que ce dernier était dans le besoin, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et elle a violé l'article 205 du code civil ;

ALORS QUE 3°) les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ; que la cour d'appel constate qu'il résulte des pièces produites par l'EHPAD que la pension de retraite mensuelle perçue par Monsieur Z... à hauteur de 1.400,97 € était insuffisante pour couvrir l'intégralité de ses frais d'hébergement, qui s'élevaient en moyenne à 1.700 € par mois ; qu'en caractérisant ainsi le besoin dans lequel était Monsieur Z..., justifiant le devoir d'aliments de ses enfants et petits-enfants, et en déboutant néanmoins l'EHPAD de ses demandes formées contre ceux-ci, au motif inopérant qu'il n'expliquait pas les raisons pour lesquelles Monsieur Z... ne lui avait versé mensuellement qu'une somme de 1.200 €, quand sa pension de retraite était de 1.400 € par mois, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 205 du code civil,

ALORS QUE 4°) il est interdit au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, pour débouter l'EHPAD de ses demandes, la cour d'appel affirme que « les raisons pour lesquelles le montant restant dû en janvier 2017 (14.337,37 euros) est inférieur à celui indiqué en juin 2016 (16.222,63 euros) alors qu'aucun versement n'apparaît dans la colonne "recouvrements" entre ces deux dates, sont ignorées » ; qu'en statuant ainsi, quand il résulte au contraire du décompte établi le 19 janvier 2017 (pièce produite en appel n° 68) qu'était déduit du montant dû, en 2014, un versement de 97,18 €, dit « virement BDF » daté du 26 juillet 2016 (p. 1/7), et qui ne figurait nécessairement pas dans le décompte du 6 juin 2016, la cour d'appel a dénaturé le décompte du 19 janvier 2017, et violé l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

ALORS QUE 5°) tout jugement doit être motivé ; que, pour débouter l'EHPAD de ses demandes, la cour d'appel affirme que « les raisons pour lesquelles le montant restant dû en janvier 2017 (14.337,37 euros) est inférieur à celui indiqué en juin 2016 (16.222,63 euros) alors qu'aucun versement n'apparaît dans la colonne "recouvrements" entre ces deux dates, sont ignorées » ; qu'en statuant ainsi, par simple affirmation, sans analyser, fût-ce sommairement, les deux décomptes du 6 juin 2016 et du 19 janvier 2017 (pièces n° 55 et 68), dont la simple comparaison montrait que la différence de montants s'expliquait très exactement par la déduction, par le décompte de 2017, du montant final dû, en 2014, d'un versement de 97,18 €, dit « virement BDF » daté du 26 juillet 2016 (p. 1/7), ainsi que d'une somme de 1.788,08 € qui avait été imputée le 1er juin 2016 sur le compte de Monsieur Z..., et figurait dans le décompte de 2016 (p. 5/7), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-27736
Date de la décision : 21/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 15 septembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 nov. 2018, pourvoi n°17-27736


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.27736
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