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21/11/2018 | FRANCE | N°17-11100

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 novembre 2018, 17-11100


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 novembre 2016), que M. Y..., engagé le 24 mars 1994 en qualité de télé-vendeur livreur qualification employé par la société Maximo, a vu, par avenant du 1er avril 2007, sa rémunération mensuelle portée à 2 600 euros et les primes d'objectifs mensuelles, trimestrielles et annuelles fixées à un montant pouvant atteindre annuellement 12 100 euros pour un établissement de type Gel ou 14 500 euros pour un établissement de type Maxigel ou Maximo ; qu'il bénéficiait d

'une délégation de responsabilités notamment en matière de droit du trava...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 novembre 2016), que M. Y..., engagé le 24 mars 1994 en qualité de télé-vendeur livreur qualification employé par la société Maximo, a vu, par avenant du 1er avril 2007, sa rémunération mensuelle portée à 2 600 euros et les primes d'objectifs mensuelles, trimestrielles et annuelles fixées à un montant pouvant atteindre annuellement 12 100 euros pour un établissement de type Gel ou 14 500 euros pour un établissement de type Maxigel ou Maximo ; qu'il bénéficiait d'une délégation de responsabilités notamment en matière de droit du travail ; qu'un avenant a été proposé à sa signature lui conférant la fonction d'assistant directeur d'établissement à compter du 1er mai 2008 statut cadre niveau VII moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 700 euros outre une prime annuelle définie par l'article 368 de la convention collective et des primes d'objectifs mensuelles, trimestrielles et annuelles d'un montant potentiel annuel de 5 400 euros ; qu'il a, le 19 septembre 2011, saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnisation de préjudices subis du fait d'un harcèlement moral et d'une discrimination salariale et syndicale, et en rappel de salaire sur primes ; qu'après plusieurs arrêts maladie, le salarié a été licencié, le 26 juillet 2013, pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de juger que le salarié a été victime de harcèlement moral et de la condamner au paiement d'une certaine somme à titre de dommages et intérêts de ce chef alors, selon le moyen :

1°/ qu'une rétrogradation (c'est-à-dire un déclassement professionnel) n'est pas caractérisée lorsque le salarié conserve l'essentiel de ses attributions ainsi que sa qualification et sa rémunération ; que la cour d'appel a relevé qu'à la suite de la fusion de deux établissements de la société Maximo (établissements 70 et 69) dont l'un, de moindre taille, était dirigé par le salarié, ce dernier est devenu directeur adjoint de l'établissement fusionné, que sa rémunération mensuelle a été portée à 2 700, puis 3 000 euros au lieu de 2 400 euros et qu'il a conservé la responsabilité du service livraisons et du services comptabilité ainsi qu'une délégation de pouvoir en matière disciplinaire ; que la cour d'appel aurait dû déduire de ses énonciations que la rétrogradation alléguée n'était pas caractérisée ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1103 du code civil (ancien article 1134) ;

2°/ qu'en tout état de cause, que pour caractériser une rétrogradation, les juges du fond doivent se fonder sur les fonctions effectivement exercées par le salarié avant et après le déclassement professionnel invoqué ; que la cour d'appel qui s'est exclusivement fondée sur des fiches de mission produites pour juger que les tâches du salarié s'étaient principalement cantonnées à la responsabilité du service livraisons et du service comptabilité sans rechercher les fonctions réellement exercées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

3°/ à titre subsidiaire, que le harcèlement moral suppose des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits ou à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que la seule décision de rétrogradation, à la supposer même établie, ne suffit pas à caractériser des faits de harcèlement moral ; que la cour d'appel qui s'est fondée sur l'unique mesure de rétrogradation pour retenir l'existence d'un harcèlement moral a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;

4°/ en toute hypothèse, que lorsque le salarié produit des éléments de fait de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, le harcèlement moral n'est pas constitué dès lors que l'employeur apporte les justifications d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que la rétrogradation subie n'était pas justifiée par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement sans autre précision ; qu'en statuant ainsi, bien qu'elle ait expressément constaté que l'employeur soutenait que la fusion non contestée des établissements Maximo 70 et 69 au mois de mai 2008 expliquait que le salarié soit devenu directeur adjoint de l'établissement fusionné, ce dont il résultait des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le salarié avait été placé sous l'autorité hiérarchique de son collègue, qu'un jour de RTT lui avait été accordé le 7 février 2011 sous réserve de l'autorisation de celui-ci alors qu'il rapportait auparavant directement au directeur régional, que la « nouvelle distribution des tâches » n'avait pas été acceptée par le salarié qui contestait ses conditions de rémunération, l'augmentation de salaire ne compensant pas la baisse de près des deux tiers du montant potentiel des primes, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve et de fait qui lui étaient soumis, a pu en déduire l'existence d'une rétrogradation et, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, a constaté qu'étaient établis des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral ainsi que l'absence de justification par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le deuxième moyen tiré d'une cassation par voie de conséquence ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à verser au salarié certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement et de rappel de prime et congés payés alors, selon le moyen :

1°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que le juge ne peut procéder par voie de simple affirmation ; que pour condamner l'employeur à verser au salarié un rappel de prime et de congés payés afférents, la cour d'appel s'est bornée à considérer qu'en l'état des explications données de part et d'autre, il convenait d'allouer la somme réclamée de 15 420 euros, outre les congés payés afférents ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ et que la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a condamné l'employeur au paiement d'un rappel de prime et de congés payés afférents, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif de l'arrêt qui a condamné l'employeur au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

Mais attendu que sous le couvert de vice de la motivation, le moyen ne tend en sa première branche qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis dont elle a, motivant sa décision, déduit que le salarié avait subi, du fait d'une inégalité de traitement dans le calcul des primes, un préjudice dont elle a souverainement évalué le montant ;

Et attendu que le rejet de la première branche du moyen prive de portée la seconde branche, qui tend à une cassation par voie de conséquence ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Maximo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Maximo à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me E... , avocat aux Conseils, pour la société Maximo.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR jugé que le salarié a été victime de harcèlement moral et condamné l'employeur au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef ;

AUX MOTIFS QU' « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (article L.1152-1 du code du travail et ce indépendamment de l'intention de son auteur. Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions, toute disposition ou tout acte contraire est nul (art L. 1152-3). En vertu de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4,le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail; dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement. G... Y... met en cause le comportement du Directeur régional, Maxime A..., à son égard. Il verse aux débats une masse de documents non triés. Il fait état de difficultés depuis 2006 rencontrées avec son Directeur régional ainsi qu'il ressort de la lettre du 06.12.2006 qu'il produit et des échanges de courriels avec sa Direction et évoque la modification de son contrat de travail envisagée en mai 2008 consistant selon lui en une rétrogradation au poste d'assistant Directeur d'établissement, les fonctions de Directeur d'établissement étant alors confiées à A. B...; il produit outre l'avenant qu'il n'a pas signé, des bulletins de salaire à partir de mai 2008 qui mentionnent en effet une rémunération mensuelle brut de 2. 700 €, sans que soient produites les fiches de paie de 2007, ainsi que la fonction d'assistant Directeur d'établissement. G... Y... observe que dans son jugement le tribunal de Reims a le 14.12.2012 a constaté que l'employeur évoquait I'"évolution de la dénomination de son poste la qualification et le niveau de responsabilité étant demeurés inchangés"; le tribunal a décidé que la délégation d'autorité avait persisté; il n'est pas contesté que cette modification est intervenue à l' occasion de la fusion des deux sites : celui de Morangis qui était dirigé par G... Y... et celui de Wissous dirigé par A. B.... G... Y... oppose une différence de traitement avec son collègue. Cette situation s'est traduite par une dégradation de son état de santé qui est justifiée par les documents versés et les arrêts maladie. La SAS Maximo réplique en se prévalant du rapprochement des deux établissements, celui de Morangis étant d'une taille inférieure; elle constate que lors de réunions s'étant tenues avec les salariés, G... Y... avait fait état de la fonction de Directeur adjoint, aux côtés du Directeur, A. B... à partir de décembre 2008 ; elle déclare que la qualification du salarié n'avait pas changé, ni le niveau de ses responsabilités et qu'il avait vu sa rémunération brut augmenter, que la délégation de responsabilité antérieure avait perduré en matière disciplinaire sous le contrôle du Directeur régional, et en matière d'hygiène et de sécurité; la SAS Maximo fournit des exemples des procédures disciplinaires qui ont été suivies par G... Y.... M. A... explique dans son attestation que G... Y... avait rencontré des difficultés relationnelles en raison de son comportement autoritaire; il a alors proposé que A. B..., directeur d'établissement expérimenté, apporte son aide pour la réussite de l'établisssement et un partage des responsabilités a été opéré lors du rapprochement des deux établissements, G... Y... se voyant confier la partie logistique sur les deux établissements mais aussi ceux de St Ouen et de Herblay, la dimension commerciale étant confiée à A. B... : cette distribution des tâches n'a pas été acceptée par G... Y... qui a entretenu un climat malsain en discréditant son collègue ; cette situation est en effet rapportée par S. C... formateur, A. D... téléprospecteur, mais aussi A.B... lui-même. La SAS Maximo relève enfin que les salariés du service livraison ont signé une pétition contre G... Y... le 21.09.2011 qui est produite. II est exact que G... Y... avait été déclaré apte par le médecin du travail le 06.06.2012. Par suite, les modalités de l'aide apportée à G... Y... ont été définies début 2008 ainsi qu'il résulte du courriel du 11.01.2008; les échanges de courriels produits montrent l'absence d'opposition de la part de G... Y... à cette nouvelle répartition des tâches en dépit de la non signature de l'avenant qui lui avait été proposé; à partir de mai 2008 il a bénéficié de nouvelles modalités de rémunération qu'il n'a pas critiquées immédiatement, mais début 2010 des courriels mentionnent que G... Y... demande la révision de ses conditions de rémunération et il lui est répondu qu'elles étaient revues chaque année en avril; or effectivement en avril 2010, la rémunération mensuelle de G... Y... a été portée à 3.000 €, et G... Y... n'a pas formé de nouvelles demandes sur ce point jusqu'en janvier 2011; à cette date G... Y... renouvelle ses demandes de rétablissement de ses primes de Directeur d'établissement ainsi que son titre qui devait être indiqué sur ses fiches de paie. La Direction a exposé que G... Y... avait été "aidé" par son collègue A. B... une fiche de mission est produite (p.45) qui décrit les missions dévolues au salarié dans le cadre de la répartition des tâches et responsabilités et qui sont cantonnées principalement à la responsabilité du Service livraisons et du Service comptabilité; il a été placé sous l'autorité hiérarchique de A. B... en étant nommé adjoint au Directeur d'établissement: ainsi le 07.02.2011, M. A... lui accorde un jour de RTT sous réserve de l'autorisation de A. B... ; le salarié rapportait auparavant directement à M. A...; ce dernier a bien constaté que la "nouvelle distribution des tâches" n'avaient pas été acceptée par G... Y...; le salarié a contesté ses conditions de rémunérations, qui avaient diminué puisque le montant potentiel des primes avait diminué de près de 2/3, l'augmentation de salaire ne venant pas compenser cette baisse. Il s'agit donc d'une rétrogradation, qui a pu être motivée par la non adéquation du salarié à son poste de direction, mais qu'il n'avait pas acceptée et qui ne pouvait dès lors pas lui être imposée sauf à tirer les conséquences de son refus. Cette mesure n'étant pas justifiée par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement, le harcèlement moral subi par G... Y... est démontré. La SAS Maximo sera condamnée à verser à G... Y... la somme de 20.000 € en réparation du préjudice subi. Le jugement rendu sera infirmé ».

ALORS QU'une rétrogradation (c'est-à-dire un déclassement professionnel) n'est pas caractérisée lorsque le salarié conserve l'essentiel de ses attributions ainsi que sa qualification et sa rémunération ; que la cour d'appel a relevé qu'à la suite de la fusion de deux établissements de la société Maximo (établissements 70 et 69) dont l'un, de moindre taille, était dirigé par le salarié, ce dernier est devenu directeur adjoint de l'établissement fusionné, que sa rémunération mensuelle a été portée à 2 700, puis 3 000 euros au lieu de 2 400 euros et qu'il a conservé la responsabilité du service livraisons et du services comptabilité ainsi qu'une délégation de pouvoir en matière disciplinaire; que la cour d'appel aurait dû déduire de ses énonciations que la rétrogradation alléguée n'était pas caractérisée ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1103 du code civil (ancien article 1134).

ET ALORS, en tout état de cause, QUE pour caractériser une rétrogradation, les juges du fond doivent se fonder sur les fonctions effectivement exercées par le salarié avant et après le déclassement professionnel invoqué ; que la cour d'appel qui s'est exclusivement fondée sur des fiches de mission produites pour juger que les tâches du salarié s'étaient principalement cantonnées à la responsabilité du service livraisons et du service comptabilité sans rechercher les fonctions réellement exercées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.

ALORS, à titre subsidiaire, QUE le harcèlement moral suppose des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits ou à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que la seule décision de rétrogradation, à la supposer même établie, ne suffit pas à caractériser des faits de harcèlement moral ; que la cour d'appel qui s'est fondée sur l'unique mesure de rétrogradation pour retenir l'existence d'un harcèlement moral a violé l'article L. 1152-1 du code du travail.

ALORS, en toute hypothèse, QUE lorsque le salarié produit des éléments de fait de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, le harcèlement moral n'est pas constitué dès lors que l'employeur apporte les justifications d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que la rétrogradation subie n'était pas justifiée par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement sans autre précision ; qu'en statuant ainsi, bien qu'elle ait expressément constaté que l'employeur soutenait que la fusion non contestée des établissements Maximo 70 et 69 au mois de mai 2008 expliquait que le salarié soit devenu directeur adjoint de l'établissement fusionné, ce dont il résultait des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé l'article L.1154-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR dit que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement était nul et condamné l'employeur au paiement de différentes sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour nullité de la rupture du contrat de travail, outre le remboursement aux organismes concernés des indemnités versées dans la limite d'un mois ;

AUX MOTIFS QUE « le licenciement est fondé sur l'inaptitude du salarié dont la santé s'est dégradée progressivement à partir de mars 2010 et plus particulièrement à partir de mai 2012; il a été ainsi mis en arrêt maladie du 21.11.2012 au 18.07.2013, en raison de son état dépressif qui a été constaté médicalement; il a été adressé par la médecine du travail en janvier 2013 à un centre de médecine spécialisée qui a été consulté en février 2013, puis à un médecin psychiatre consulté pour sa part en mai 2013, ce médecin préconisant Dans ce contexte une inaptitude définitive au poste. Il a été déclaré inapte définitif au poste de Directeur d'établissement le 17.06.2013, et non pas au poste d'adjoint, le médecin du travail précisant que le salarié pouvait exercer un emploi similaire "dans un autre contexte relationnel et organisationnel" ce qui mettait explicitement en cause le positionnement de G... Y... dans l'entreprise. Dans ces conditions, il convient de constater la nullité du licenciement de G... Y... par la SAS Maximo, l'inaptitude étant en lien avec le harcèlement moral démontré. En réparation, la SAS Maximo sera condamnée à verser au salarié la somme de 65 000 euros. G... Y... déclare que son inaptitude est d'origine professionnelle en raison du harcèlement moral judiciairement reconnu. Les dispositions de l'article L 1226-10 du code du travail peuvent trouver application en l'absence de reconnaissance par la CPAM du lien entre la maladie et l'inaptitude; il suffit pour la juridiction de constater que la maladie professionnelle a même partiellement causé l'inaptitude du salarié et que l'employeur avait connaissance de cette origine au moment du licenciement. Or G... Y... a saisi la juridiction prud'homale dès le 19.09.2011 d'une demande fondée sur le harcèlement moral; la médecine du travail a orienté le salarié vers une consultation spécialisée et a motivée de manière explicite son avis d'inaptitude après que l'employeur ait été confronté aux réclamations du salarié. Par suite, c'est à bon droit que G... Y... se prévaut de l'absence de respect des dispositions de l'article L.1226-12 mais cependant il ne démontre aucunement le préjudice spécifique subi. Il en est de même de l'absence de consultation des délégués du personnel. Cependant la SAS Maximo devra verser à G... Y... l'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés eu égard au caractère professionnel de l'inaptitude. Le jugement rendu sera infirmé. Lorsque le licenciement illégitime est indemnisé en application des articles L. 1235-4 du code du travail, le conseil ordonne d'office, même en l'absence de Pôle emploi à l'audience et sur le fondement des dispositions de l'article L. 123 5-5, le remboursement par l'employeur, de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du jugement, dans la limite de six mois; en l'espèce au vu des circonstances de la cause il convient de condamner, l'employeur à rembourser les indemnités à concurrence d'un mois

ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a condamné l'employeur au paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral entraînera la cassation du chef de dispositif de l'arrêt qui a jugé le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement nul en raison du harcèlement moral subi par application de l'article 624 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inégalité de traitement et la somme de 15 420 euros à titre de rappel de prime, outre les congés payés afférents;

AUX MOTIFS QUE « G... Y... fait état d'une inégalité de traitement vis à vis de son collègue A. B.... Des documents produits par l'employeur (P. 77 et 78) il ressort une ancienneté supérieure pour A. B... (03.11.1989); ce dernier est devenu Directeur d'établissement au coefficient 350 en 2003 et G... Y... en 2005; cela justifie qu'en 2010 la rémunération mensuelle de base de G... Y... ait été inférieure à celle de son collègue de 690 €; G... Y... a continué à bénéficier d'augmentations après sa rétrogradation en 2008. Mais la SAS Maximo ne tient pas compte des primes venant compléter ce salaire de base et qui n'ont plus été octroyée à G... Y... du fait de la modification de son statut à partir de mai 2008, sans son accord. L'employeur reconnaît que pour ses calculs, G... Y... s'est fondé sur les bulletins de salaire de son collègue dès lors que la SAS Maximo ne les produisait pas en justice; l'employeur ne donne aucune indication sur le montant des primes auxquelles G... Y... aurait pu prétendre au vu des résultats obtenus sur la seule gestion des livraisons, alors que. les primes attribuées à son collègue l'ont été sur ses propres résultats commerciaux, et il se borne à contester les calculs présentés; il convient de faire application des conditions imposées par l'employeur en terme de salaire de base tout en complétant cette rémunération par des primes équivalentes à celles octroyées à A. B... en l'état des explications données de part et d'autre. En conséquence, la SAS Maximo sera condamnée à verser d'une part la somme de 10000 € en réparation du préjudice subi du fait de cette inégalité de traitement, ainsi que la somme réclamée de 15 420 € pour rappel de primes outre les congés payés afférents. En conséquence le jugement rendu sera infirmé. Il y a lieu de faire droit à la demande du salarié concernant la remise des documents sociaux rectifiés ainsi que d'un bulletin de salaire rectificatif sans que l'astreinte soit nécessaire.

ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que le juge ne peut procéder par voie de simple affirmation ; que pour condamner l'employeur à verser au salarié un rappel de prime et de congés payés afférents, la cour d'appel s'est bornée à considérer qu'en l'état des explications données de part et d'autre, il convenait d'allouer la somme réclamée de 15 420 euros, outre les congés payés afférents ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 455 du code de procédure civile.

ET ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a condamné l'employeur au paiement d'un rappel de prime et de congés payés afférents, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif de l'arrêt qui a condamné l'employeur au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inégalité de traitement par application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-11100
Date de la décision : 21/11/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 nov. 2018, pourvoi n°17-11100


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, Me Rémy-Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11100
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