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15/11/2018 | FRANCE | N°17-26754

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 novembre 2018, 17-26754


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

Vu l'article L. 711-1 du code de la consommation ;

Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, qu'un créancier a formé un recours contre la décision d'une commission de surendettement des particuliers ayant déclaré recevable la demande de M. X... tendant au traitement de sa situation financière ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande de traitement de la situation financière de M. X..., le jugement relèv

e qu'il serait pour le moins malvenu que M. X... profite de la procédure de surendet...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

Vu l'article L. 711-1 du code de la consommation ;

Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, qu'un créancier a formé un recours contre la décision d'une commission de surendettement des particuliers ayant déclaré recevable la demande de M. X... tendant au traitement de sa situation financière ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable la demande de traitement de la situation financière de M. X..., le jugement relève qu'il serait pour le moins malvenu que M. X... profite de la procédure de surendettement pour ne pas rembourser la somme perçue, à titre de provision, par décision du conseil des prud'hommes de Brive-la-Gaillarde qu'il doit rembourser à la succession par suite de l'arrêt d'infirmation rendu par la cour d'appel de Limoges le 20 septembre 2016 ;

Qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser la mauvaise foi de M. X..., le juge du tribunal d‘instance a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 16 août 2017, entre les parties, par le juge du tribunal d‘instance de Brive-la-Gaillarde ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le juge du tribunal d‘instance de Tulle ;

Condamne la Fondation Raoul Follereau aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Fondation Raoul Follereau, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen de cassation fait grief au jugement infirmatif attaqué d'avoir jugé M. Christophe X... irrecevable à la procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers ;

Aux motifs que « selon l'article L 711-1 du code de la consommation, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. Le seul fait d'être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l'ensemble des dettes non-professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement. L'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement.
La situation de surendettement s'apprécie au regard de l'ensemble des ressources du débiteur, quelle qu'en soit l'origine. La procédure de désendettement est ouverte si le débiteur se trouve en situation de surendettement au regard de ses obligations non professionnelles, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon qu'elles peuvent ou non faire l'objet de remise, rééchelonnement ou effacement. La situation de surendettement du débiteur s'apprécie en comparant ses ressources actuelles ou futures et ses dettes exigibles. Si, le paiement par le débiteur de ses dettes entame ses ressources vitales, c'est qu'il est dans l'impossibilité manifeste de régler son passif.
En l'espèce, le conseil de la fondation Raoul Follereau indique que le recours n'est pas formé dans le but de récupérer la somme de 1 500 € figurant dans le tableau des créances, mais pour alerter du comportement du débiteur qui, selon elle, a organisé son insolvabilité et détourné des fonds ;
Il est produit aux débats la décision de la cour d'appel de Limoges du 20 septembre 2016 qui infirme la décision du conseil de prud'hommes, et juge qu'il n'y avait pas eu de contrat de travail entre M. X... Christophe et M. Z.... En effet, M. Z..., sous mesure de protection de curatelle ne pouvait pas signer un contrat de travail à M. X... ;
M. X... Christophe a perçu la somme de 14 848,88 € par suite de la décision qui a fait l'objet d'un appel, qui devait être conservée à titre de provision, fait figurer au titre de ses dettes ce montant majoré des 6 000 € pour frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le tableau des créances.

Il ressort également de ce dossier qu'une procédure est pendante devant le tribunal de grande instance de Brive concernant la perception par la soeur et le frère de M. X... Christophe du bénéficie de deux contrats d'assurance vie signés par M. Z.... Il était sous mesure de protection de curatelle simple, selon décision du juge des tutelles du 30 septembre 1996. Ces contrats auraient été souscrits sans l'assistance de son curateur l'UDAF de la Corrèze, alors qu'il ne pouvait pas faire seul "des actes de disposition sur son patrimoine, réception de capitaux et à leur emploi".
Il ressort de l'histoire de M. Z..., grand invalide de guerre, et lourdement handicapé, qu'il a été bénéficiaire de conséquentes pensions à ce titre. M. X... Christophe aurait tiré profit de cet argent comme l'attestent les nombreux prélèvements sur les comptes bancaires (justifiés au débat par la fondation Raoul Follereau) et les non moins nombreux signalements faits aux autorités chargées de le protéger.
Il serait pour le moins mal venu que M. X... Christophe profite de la procédure de surendettement pour ne pas rembourser la somme perçue, à titre de provision, par décision du conseil de prud'hommes de Brive, qu'il doit rembourser à la succession par suite de l'arrêt d'infirmation rendue par la cour d'appel de Limoges le 20 septembre 2016.
Dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde à venir concernant les contrats d'assurance vie, et de l'éventuel pourvoi sur l'arrêt de la cour d'appel de Limoges, il convient de déclarer M. X... Christophe irrecevable à la procédure de surendettement des particuliers.
Il convient, en conséquence, de dire que le recours est bien fondé et de prononcer l'irrecevabilité du dossier de M. X... Christophe à la procédure de surendettement des particuliers » (jugement p 2 etamp; 3) ;

1°) Alors que le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi, laquelle est présumée et suppose que soit établie la conscience de créer ou d'aggraver son endettement en fraude des droits des créanciers ; que le simple fait de devoir rembourser des sommes allouées par un jugement en exécution d'un arrêt infirmatif est insuffisant pour écarter la bonne foi ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance a jugé M. X... irrecevable à la procédure de traitement des situations de surendettements des particuliers aux motifs qu'il serait malvenu que M. X... profite de la procédure de surendettement pour ne pas rembourser la somme perçue, à titre de provision, par décision du conseil de prud'hommes de Brive, qu'il doit rembourser par suite de l'arrêt infirmatif de la cour d'appel de Limoges le 20 septembre 2016 ; qu'en retenant la mauvaise foi de M. X... par ces seuls motifs, sans établir sa conscience de créer ou d'aggraver son endettement en fraude des droits des créanciers, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 711-1 du code de la consommation ;

2°) Alors que la bonne foi s'apprécie au jour où le juge statue et au vu de l'ensemble des faits qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, le juge d'instance a déclaré M. X... irrecevable à la procédure de traitement des situations de surendettement car il aurait tiré profit des pensions dont M. Z..., son employeur, avait bénéficié en qualité d'invalide de guerre handicapé ; qu'en statuant par ce motif inopérant puisque sans rapport avec la situation de surendettement, survenue ultérieurement, dès lors que M. Z... est décédé en [...] , et qu'elle résulte de l'impossibilité dans laquelle s'est trouvé M. X... de rembourser les indemnités qui lui avaient été allouées par le jugement du conseil de prud'hommes de Brive-la-Gaillarde en date du 20 mars 2014 qu'il devait rembourser en exécution de l'arrêt infirmatif rendu par la cour d'appel de Limoges le 20 septembre 2016, le juge d'instance a violé l'article L 711-1 du code de la consommation ;

3°) Alors que la bonne foi, condition de recevabilité de la demande d'admission à une procédure de surendettement, s'apprécie en la personne de la personne surendettée ; qu'en jugeant M. X... irrecevable à la procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers aux motifs que sa soeur et son frère auraient perçu le bénéfice de deux contrats d'assurance vie signés par M. Z... sans l'assistance de son curateur, ce qui ferait l'objet d'une procédure pendante devant le tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde, le juge d'instance a derechef violé l'article L 711-1 du code de la consommation ;

4°) Alors que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'en considérant que M. Z..., sous curatelle, ne pouvait pas signer un contrat de travail avec M. X... (jugement p 2 in fine), et que les contrats d'assurance vie ont été signés par M. Z... sans l'assistance de son curateur (jugement p 3 § 2), le tribunal s'est contredit, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-26754
Date de la décision : 15/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Brive-la-Gaillarde, 16 août 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 nov. 2018, pourvoi n°17-26754


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.26754
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