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14/11/2018 | FRANCE | N°17-85480

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 novembre 2018, 17-85480


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hakim Abdul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13e chambre, en date du 15 mai 2017, qui, pour infractions à la législation sur les armes, association de malfaiteurs et recel en bande organisée, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement et a ordonné une mesure de confiscation ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 octobre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du co

de de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Moreau...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hakim Abdul X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13e chambre, en date du 15 mai 2017, qui, pour infractions à la législation sur les armes, association de malfaiteurs et recel en bande organisée, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement et a ordonné une mesure de confiscation ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 octobre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6, § 3, de la Convention des droits de l'homme, des articles 132-71, 222-53, 321-1, et 321-2 du code pénal et des articles préliminaire, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Hakim Abdul X... coupable de détention en réunion de dépôt d'armes de catégories A et B ainsi que de recel d'objets contenus dans les véhicules, en provenance d'un délit, en récidive ;

"aux motifs que, en dépit des dénégations de M. Abdul X..., il ressort de la procédure et des débats que ce prévenu :
- est un proche de M. Jean-Louis A... qui a pu, à juste titre, être considéré comme le chef de la Capelette, puisqu'il vit avec sa soeur et qu'il est donc son beau-frère, même s'il prétend ne pas s'entendre avec lui ;
- a reconnu avoir été en contact avec certaines armes et objets découverts dans le box Bigot en fournissant cependant des explications évolutives et donc peu crédibles sur les lieux et les dates qui sont en tout cas différentes de celles avancées par M. Anthony B..., ce qui les fragilise encore plus ;
- a laissé son empreinte ADN sur des objets retrouvés dans le box qui, même si effectivement elle n'apparaît pas sur des armes, est présente non seulement sur les micros de talkiewalkies et sur un câble d'adaptateur mais aussi sur deux noeuds reliant des sacs contenant des munitions, étant précisé qu'un ADN féminin de la lignée A... était également présent sur le câble d'adaptateur du chargeur ; que comme l'ont à juste titre retenu les premiers juges, les éléments de la procédure sont insuffisants pour caractériser les délits de détention d'armes et de munitions de catégorie A et B retenus par la prévention, qui font de plus double emploi avec le délit de détention de dépôt d'armes ; qu'il ressort de la procédure et des justificatifs apportés par son avocat, que M. Abdul X... a été détenu du 27 février au 25 novembre 2013 ; qu'il se déduit du faisceau d'indices concordants recueillis, des éléments établissant que M. Abdul X... a participé au délit de détention d'un dépôt d'armes, après requalification pour tenir compte de la loi du 3 juin 2016 ayant créé à droit constant l'article 222-53 du code pénal au lieu et place de la codification antérieure, commis courant 2013 et jusqu'au 27 février 2013, le nombre et la qualité des armes et munitions découvertes justifiant la qualification pénale retenue, aggravée par le nombre de personnes, nécessairement au moins égal à deux, impliquées dans cette opération de stockage d'armes et objets destinés à la commission d'infractions, ainsi que du délit de recel des objets contenus dans les véhicules qui ont nécessairement été inclus dans la prévention, aggravé par la circonstance de bande organisée compte tenu du nombre de personnes impliquées et de l'action coordonnée criminelle qui en découle ;

"1°) alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en retenant que M. Abdul X... avait participé au délit de détention d'un dépôt d'armes courant 2013 et jusqu'au 27 février 2013 tout en constatant, d'une part, que le dépôt avait été loué par M. B... à M. C... par contrat du 3 juillet 2013 (M. C... ayant passé une annonce pour louer son box en juin 2013), et en admettant, d'autre part, que M. Abdul X... était incarcéré du 27 février 2013 au 25 novembre 2013 et qu'il n'avait pas accompli d'acte positif depuis sa cellule en rapport avec le dépôt d'armes, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires, en violation des textes visés au moyen ;

"2°) alors que la cour d'appel ne pouvait à la fois, et sans mieux s'en expliquer, admettre que les éléments de preuve étaient insuffisants pour caractériser les délits de détention d'armes et de munitions de catégorie A et B, et retenir que M. Abdul X... s'était rendu coupable de recel des objets contenus dans les voitures (volées en mai et en août 2013) de courant 2013 au 27 février 2013, c'est-à-dire essentiellement des armes et des munitions ; qu'elle s'est contredite sur la question de la détention desdites armes et munitions et a privé sa décision de motifs ;

"3°) alors que le juge ne peut prononcer une condamnation sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ; que le recel exige la démonstration d'un acte de détention et la caractérisation de l'infraction d'origine ainsi que la connaissance de la provenance illicite des objets détenus ; qu'en ne s'expliquant pas précisément sur les objets que M. Abdul X... aurait détenus, ni par quels actes de détention, et en n'indiquant pas en quoi leur provenance serait illicite ni si M. Abdul X... en avait connaissance, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;

"4°) alors que le tribunal correctionnel comme la cour d'appel sont saisis in rem de sorte que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n'accepte expressément d'être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention ; que la prévention ne concernait que le recel de véhicules, un véhicule Renault Kangoo (faussement immatriculé [...] avec pour immatriculation réelle [...] ) et un scooter Piaggio (faussement immatriculé [...] avec pour immatriculation réelle C[...]) ; qu'en condamnant M. Abdul X... pour recel en bande organisée des objets contenus dans ces véhicules, sans que M. Abdul X... ait consenti à être jugé sur ces faits distincts, la cour d'appel a excédé les limites de sa saisine ;

"5°) alors que tout accusé a le droit de connaître la nature et la cause de l'accusation portée contre lui ; qu'il doit être dûment et pleinement informé des modifications de l'accusation, y compris celles touchant sa « cause » (les faits matériels mis à sa charge) et doit disposer du temps et des facilités nécessaires pour y réagir et organiser sa défense sur la base de toute nouvelle information ou allégation ; qu'en retenant que les objets contenus dans les véhicules étaient nécessairement compris dans l'accusation de recel de vol des véhicules, sans s'expliquer sur ces objets, leur provenance, ni avoir informé préalablement M. Abdul X... de cette modification de la cause de l'accusation portée contre lui de façon à lui permettre d'organiser sa défense, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen.

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme partiellement qu'ont été découverts, le 23 septembre 2013, par les services de police, dans un box loué depuis le 3 juillet 2013 par B... sous une fausse identité, deux véhicules automobiles volés contenant six sacs renfermant notamment des armes et des munitions de catégories A et B ; que les recherches ont permis d'identifier des personnes connues des services de police et se situant dans l'environnement de MM. A..., D... et E..., parmi lesquels M. Abdul X..., dont l'ADN a été retrouvé sur un sac contenant des munitions, un adaptateur de câble d'alimentation pour talkie-walkie et deux talkies-walkies ; que les recherches sur les armes et objets retrouvés ont permis d'établir des liens avec plusieurs affaires criminelles en cours ou passées ; que M. Abdul X... a été interpellé le 2 juin 2014, mis en examen, placé en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant le tribunal correctionnel ; que, par ordonnance du 18 mai 2016, le juge d'instruction a renvoyé M.Abdul X... devant le tribunal correctionnel des chefs de détention d'un dépôt d'armes et de munitions de catégorie A et B, en bande organisée, association de malfaiteurs, recel aggravé, en récidive, détention d'armes et de munitions de catégorie A et B ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable d'une partie des faits et a prononcé la peine ; que M. Abdul X... et le ministère public ont interjeté appel du jugement ;

Attendu que, pour déclarer M. Abdul X... coupable de détention d'un dépôt d'arme en réunion pour la période courant 2013 jusqu'au 27 février 2013, date de son incarcération dans le cadre d'une autre procédure, l'arrêt attaqué énonce qu'il se déduit du faisceau d'indices concordants recueillis, des éléments établissant sa culpabilité ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi après avoir relevé d'une part que M.Abdul X... a été incarcéré du 27 février 2013 au 25 novembre 2013 et qu'aucun acte positif de sa part depuis sa cellule n'a été relevé en rapport avec le dépôt d'arme, d'autre part que le box a été loué à compter du 3 juillet 2013 jusqu'au moment de sa découverte le 23 septembre 2013, la cour s'est prononcée par des motifs contradictoires ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs et moyens de cassation proposés :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 15 mai 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix en Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze novembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-85480
Date de la décision : 14/11/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 nov. 2018, pourvoi n°17-85480


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.85480
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