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06/11/2018 | FRANCE | N°17-84365

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 novembre 2018, 17-84365


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hamid X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 19 juin 2017, qui, pour infractions au code de l'urbanisme, l'a condamné à 8 000 euros d'amende et a ordonné une mesure de remise en état sous astreinte ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 septembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y.

.., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme B...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hamid X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 19 juin 2017, qui, pour infractions au code de l'urbanisme, l'a condamné à 8 000 euros d'amende et a ordonné une mesure de remise en état sous astreinte ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 septembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle ROUSSEAU et TAPIE, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général E... ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Hamid X... a acquis le 24 juillet 2008 un terrain, comprenant une maison d'habitation et des abris de jardin ; que suivant procès-verbaux des 7 février et 23 octobre 2012, ont été constatées la construction en cours d'un étage sans autorisation sur une habitation principale, la présence de deux caissons d'une emprise cumulée au sol de plus de 30 m2, de deux résidences mobiles de loisirs et la construction d'une seconde maison de 71 m2 données en location, la création d'une ouverture de 3,30 m pour un portail et l'édification d'une clôture d'une hauteur variant de 1,75 mètre à 2 mètres ; que M. Hamid X... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour avoir exécuté des travaux sans permis, installé des résidences mobiles de loisirs sans autorisation et infractions au plan d'occupation des sols et au plan local d'urbanisme pour construction dans une zone agricole puis dans une zone interdite par un plan de prévention des risques naturels ; que le tribunal a rejeté l'exception de nullité du procès-verbal relatif à l'audition libre, constaté la prescription de l'action publique pour la construction d'un étage sur l'habitation principale, déclaré X... coupable pour le surplus et ordonné la remise en état ; que celui-ci et le procureur de la République ont formé appel ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 61-1, 62 et 78 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité soulevée par M. Hamid X... ;

"aux motifs que sous le régime antérieur à la réforme du 27 mai 2014, il n'y avait aucune obligation, dans le cadre d'une audition libre, de notifier à la personne entendue son droit au silence ou son droit à l'assistance d'un avocat ; que le Conseil constitutionnel avait d'ailleurs précisé le 18 juin 2012 que, sous réserve qu'il ait été rappelé à une personne à l'encontre de laquelle il apparaissait qu'il existait des raisons plausibles de soupçonner qu'elle avait commis une infraction, que les dispositions de l'article 78 du code de procédure pénale permettant de l'entendre en audition libre ne méconnaissaient pas les droits de la défense dès lors que cette personne avait été informée de la nature et de la date de l'infraction qu'on la soupçonnait d'avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux du service d'enquête ; que M. X... avait été entendu le 23 décembre 2013 en audition libre par les gendarmes de la brigade de Fréjus ; qu'il lui avait été notifié, conformément à la législation en vigueur à cette date, qu'il pouvait à tout moment quitter les locaux de l'unité ; qu'il avait reconnu, avant de répondre aux questions des gendarmes, avoir été informé des raisons pour lesquelles son audition était requise et qu'il était donc entendu « dans le cadre des deux soit-transmis du parquet de Draguignan avec clichés photographiques et des constatations » ; que l'audition de M. X... par les gendarmes de la brigade de Fréjus avait donc été tout à fait régulière et ne saurait être entachée de la moindre cause de nullité, ses droits ayant été parfaitement respectés ;

"alors que la personne à l'encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu'après avoir été informée du droit de garder le silence et d'être assistée d'un avocat lors de son audition, même avant l'entrée en vigueur de la loi du 27 mai 2014 ; qu'en énonçant que ces deux droits fondamentaux n'existaient pas avant la réforme du 27 mai 2014 pour rejeter le moyen de nullité relatif à l'audition du 23 décembre 2013, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que, pour déclarer M. X... coupable d'exécution de travaux sans permis, d'installation de résidences mobiles de loisirs sans autorisation et d'infraction au plan d'occupation des sols, l'arrêt attaqué s'appuie sur les procès-verbaux dressés le 7 février 2012 par un agent assermenté de la police municipale de Puget-sur-Argens et le 23 octobre 2012 par un contrôleur assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer, lesquels ont, en présence et avec l'accord de M. X..., relevé plusieurs infractions au code de l'urbanisme, que ces agents ont, à chaque fois, recueilli les observations faites par M. X... en réponse à leurs interrogations ; que les juges rappellent que les procès-verbaux en cette matière font foi jusqu'à preuve du contraire, leur conférant ainsi une force probante spéciale et que leur contenu n'a pas été combattu par témoin ou par écrit, selon les dispositions de l'article 431 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, abstraction faite des déclarations effectuées par le prévenu au cours de son audition par les gendarmes, sans information de son droit de se taire, ni assistance d'un avocat, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie et n'a pas porté atteinte à la présomption d'innocence, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 480-6 du code de l'urbanisme, 8, 388, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription ;

"aux motifs que la prescription avait été relevée pour les faits visant l'habitation principale et que cette prescription n'était pas remise en cause par l'appel incident du parquet, de sorte que restaient donc poursuivies en appel :
- la construction d'un bâtiment à usage d'habitation de 10,50m x 6,80m sur une hauteur de 2,65 et à moins de 4 mètres de la limite séparative,
- l'installation de deux mobil-homes et de deux caissons (algécos),
- l'édification d'un mur de clôture et d'un portail.
Qu'il était soutenu que tous ces faits étaient prescrits ;
1- Concernant la construction d'un bâtiment à usage d'habitation de 71 mètres carrés à moins de 4 mètres de la limite séparative :
En première instance, l'accusation avait démontré que cette construction avait été édifiée en période non prescrite soit après février 2009 en relevant :
- que M. X... avait lui-même déclaré que cette construction avait été édifiée par lui à la place d'un ancien chenil en 2010 ;
- qu'était produite une facture du 13 décembre 2010 concernant la résation de diverses fenêtres et ouvertures ; que ces éléments avaient emporté la conviction du tribunal pour écarter l'exception de prescription soulevée par la défense ; qu'il était affirmé en cause d'appel que la preuve de l'existence de ce bâtiment était désormais rapportée par un bail du 1er mai 2008, par le cadastre et par l'acte notarié, que ce bâtiment avait fait l'objet d'aménagements intérieurs ne nécessitant pas de permis de construire puisqu'il n'y avait pas de changement de destination et que ces travaux avaient été achevés et facturés entre juillet et décembre 2008 ; qu'il convenait de relever que la facture du 13 décembre 2010 produite en première instance n'était plus au nombre des pièces communiquées ; que l'acte notarié faisait état d'une maison à usage d'habitation d'une superficie de 128,28 mètres carrés, élevée d'un étage sur rez de jardin et d'abris de jardin ; qu'il ne mentionnait donc la présence d'aucun autre bâtiment à usage d'habitation sur le terrain ; que par ailleurs, sur l'extrait cadastral annexé à l'acte de vente, n'apparaissait sur les parcelles [...] et [...] qu'un seul volume qui correspondait à la maison de M. X..., laquelle faisait 64 mètres carrés de superficie (128 mètres carrés avec l'étage) ; qu'un autre volume d'habitation de 71 m2 de superficie aurait nécessairement été porté sur cet extrait cadastral ; que la carte d'identité de la parcelle [...] versée aux débats et sur laquelle apparaissait la nouvelle maison avait été établie en 2014 et la date du 24 juillet 2008 n'était pas celle de la résation de cette construction mais la date «de l'acte» c'est-à-dire la date d'acquisition de cette parcelle ; qu'enfin, indépendamment du fait qu'il n'est pas expliqué comment une maison achevée en décembre 2008 avait pu être donnée à bail et occupée dès le 1er mai 2008 selon le contrat de location produit, force était de constater :
- que sur le bail communiqué, la date de l'année de prise d'effet du contrat et celle de la signature du contrat avaient été surchargées ; que l'on voyait parfaitement que cette date était «2010» et non « 2008 » et qu'en conséquence, ce contrat avait été très grossièrement trafiqué ;
- que la preuve des travaux résés était soi-disant apportée par une facture établie le 5 décembre 2008 par la société X... et fils ; que toutefois, cette société était celle du frère de M. X... et que cette facture faisait référence à un décret du 2 octobre 2012 (précision en bas sur les indemnités forfaitaires) qui, a priori, ne pouvait être entré en vigueur en décembre 2008 ; qu'en conséquence, cette facture était un faux de complaisance (produit en justice) que le prévenu avait confirmé à l'audience qu'il y avait sur le terrain, non pas une habitation mais un chenil (dont la taille ne devait pas être suffisante pour être mentionné à l'acte de vente ou pour l'être en tant «qu'abri de jardin ») et avait indiqué, lors du premier contrôle, qu'il avait lui-même édifié cette habitation en 2010 pour la donner en location et ces déclarations spontanées paraissaient plus sincères et honnêtes que les preuves fabriquées par lui ou pour lui ; qu'en tout état de cause, il ne démontrait nullement que cette construction aurait été édifiée avant février 2009 ; qu'en revanche, comme l'ajustement relevé le tribunal, l'accusation démontre sans aucune contestation possible que ce bâtiment n'a été résé qu'en 2010 ; que l'exception de prescription sera donc écartée ;
2- Pour l'installation de deux mobil-homes et des caissons (ou algécos) ; qu'en première instance, le tribunal avait suivi l'accusation en retenant que l'infraction concernant une résidence mobile de loisirs qui conserve ses moyens de mobilité était une infraction continue qui perdure aussi longtemps que l'occupation du sol existe en s'appuyant notamment sur les écritures de l'avocat de M. X... selon lesquelles ces résidences mobiles de loisirs avaient été installées sur le terrain dès après l'acquisition de celui-ci, que l'une d'elle était d'ailleurs louée depuis 2008 et qu'elles avaient gardé leurs moyens de locomotion puisqu'il était affirmé qu'elles ne pouvaient être assimilées à des constructions soumises à obligation déclarative ; qu'en cause d'appel, il était désormais soutenu que les mobils homes étaient dépourvus de moyens de mobilité, que l'un des deux était déjà sur le terrain car cédé avec lui par les anciens propriétaires, les époux Z..., que la présence de ces annexes (mobil-homes et algécos) est établie par les avis d'imposition à la taxe foncière et à la taxe d'habitation, par les factures d'eau et d'EDF payées par M. X... ainsi que par le contrat de bail signé par M. B... F... qui occupait un mobil-home depuis le 1er janvier 2009 ; que pour l'année 2009 avaient été produits plusieurs avis d'imposition à la taxe foncière et à la taxe d'habitation ; qu'il ressortait toutefois de ces avis que seuls visaient la propriété de Puget sur Argens (numéro de commune 099) la taxe foncière d'un montant de 1 212 euros et la taxe d'habitation d'un montant de 162 euros ; que le détail de calcul de cette taxe d'habitation (locaux nombre 1 nature maison) montrait qu'un seul bâtiment avait été déclaré et imposé au titre de l'année 2009 ; que les autres avis d'imposition correspondaient à des propriétés situées sur la commune de Fréjus (numéro de commune 061), en particulier un appartement 639 avenue de Provence et un garage parking 1739 avenue du maréchal de Lattre de Tassigny ; qu'un avis de 2013 montrait que M. X... était également propriétaire d'un local donné en location, rue Marcel Pagnol à Fréjus ; que pour l'année 2010, M. X... avait sollicité une dispense de paiement de taxe foncière pour « deux habitations à 100% sinistrées » et était produite, en double exemplaire l'attestation de la mairie datée du 16 juin 2010 disant que sa famille avait été secourue et hébergée par la commune lors des intempéries du 15 12 juin 2010 ; que cette pièce démontrait tout au plus que la seconde habitation de 71 effectivement construite en 2010 avait également été endommagée mais n'établissait pas la présence ni de mobil-homes ni d'algécos sur le terrain ; qu'étaient produites une facture d'eau du 1er semestre 2008 établie à la précédente adresse de M. X... (lot le Jas Neuf à Puget sur Argens) d'un montant de 141,25 euros et la facture du 1er semestre 2009 pour le chemin des wagonnets d'un montant de 147,03 euros ; que si la facture du second semestre 2008 paraissait très faible, en revanche, les deux autres démontraient la constance de la consommation d'eau pour la famille sur un même semestre ; que les factures d'électricité émises en 2009 par deux distributeurs différents avec des modes de relevés différents des consommations ne permettaient pas d'établir qu'il y avait eu une consommation accrue d'électricité liée à l'arrivée d'éventuels locataires ; que par ailleurs, les logements individuels étaient censés avoir des compteurs d'eau et d'électricité séparés et M. X... avait fait constater par un huissier que tel était le cas, pour la seule seconde habitation, le 4 septembre 2013 ; que les factures d'électricité et d'eau produites n'établissaient donc qu'une seule chose : l'occupation des lieux par la famille X... ; qu'indépendamment du fait que dans ses écritures de première instance M. X... déclarait avoir installé les deux mobil-homes après l'acquisition de la propriété, il convenait d'écarter l'attestation établie par les anciens propriétaires pour certifier qu'un mobil home en bon état avait été laissé par eux sur le terrain, à disposition de l'acquéreur, cette attestation n'ayant aucune valeur probante, les pièces d'identité des attestants n'étant pas jointes à leur courrier dactylographié ; que l'état des lieux pour la location d'un algéco est établi au nom de M. A... (nom porté sur sa carte d'identité) et la date de ce document (1er janvier 2009) apparaît, comme sur les autres contrats, très nettement surchargée ; quant au contrat de bail, il avait été manifestement refait pour les besoins de la cause, et maladroitement et rapidement refait puisque, s'il est a priori établi le même jour que l'état des lieux, le nom du locataire est sensiblement différent de celui porté sur l'état des lieux puisqu'il est établi au nom de« M. B... C... » ; que force est de constater que la signature du locataire sur l'état des lieux n'a rien à voir avec celle (ni tremblante ni hésitante) apparaissant sur le contrat de bail : cette pièce appelait donc les plus grandes réserves ; que dans ce contexte, la facture du 30 novembre 2008 faisant état de la vente et du transport d'un algéco et d'un mobil-home à M. X... ne pouvait qu'être regardée avec prudence et circonspection, d'autant que la société Trans.Fer n'est qu'une société de fret et de messagerie ; qu'enfin, force est de constater que si le premier procès-verbal d'infraction du 7 février 2012 relevait la présence d'une nouvelle habitation de 71 mètres carrés et celle de deux mobil-homes sur le terrain, ce n'est que lors du second procès-verbal d'infraction du 23 octobre 2012 qu'était également relevée sur le terrain la présence de deux caissons de stockage servant à ranger des outils, avec le démarrage des travaux sur l'habitation de M. X... ; qu'aucun «élément objectif» n'était donc produit justifiant de la présence ni de deux mobil-homes dépourvus de moyens de locomotion et encore moins d'algécos sur le terrain avant février 2009, ne permettant pas ainsi de combattre les arguments contraires de l'accusation ; qu'en conséquence, l'exception de prescription sera écartée pour ces mobils-homes et algécos ;
3- Pour l'édification d'une clôture et d'un portail :
Les agents de la direction départementale des territoires et de la mer avaient constaté que le mur de clôture et le portail donnant accès à l'une des résidences mobiles de loisirs étaient en cours de travaux, ce que démontraient les photographies prises par eux ; que l'accusation, puis le tribunal, avaient estimé que ces éléments objectifs établissaient que la prescription n'était pas acquise ; que le prévenu soutenait qu'il apportait la preuve contraire grâce à l'attestation des époux Z..., un plan de bornage et une facture de travaux de janvier 2009 ; qu'il avait déjà été indiqué que l'attestation qui aurait été établie par les époux Z..., vendeurs de la propriété, n'avait aucune force probante en l'absence de pièce d'identité venant attester de la valeur de leur signature ; que le plan de bornage établi le 31 janvier 2017 confirmait les limites de la propriété mais n'apportait pas la preuve de l'année d'édification du mur et de la clôture ; qu'enfin, comme les autres factures et contrats, la facture du 15 janvier 2009 selon laquelle « Amoroso Construction » aurait remplacé le portail et enduit le mur de clôture existante : 20 m de long par 2 m de haut doit être regardée avec la plus grande circonspection :
- parce que (à supposer que cette entreprise existe) cette facture d'un montant de 4 300 euros aurait été payée en espèces, ce qui empêche de la contrôler et ce, alors que le paiement des artisans en espèces était interdit à l'époque au-delà de 3 000 euros,
- parce que ce professionnel ignorait que pour les travaux extérieurs, en particulier les travaux de pose de portail et travaux portant sur un mur de clôture d'une maison édifiée depuis plus de deux ans étaient soumis au taux réduit de TV A (5,5 % à l'époque) et non au taux normal,
- parce que l'enduit du mur n'est pas achevé mais néanmoins intégralement payé et que M. X... avait déclaré à l'audience (en contradiction avec cette pièce) qu'il avait lui-même procédé à l'enduit du mur et ne l'avait pas terminé, n'ayant pas eu assez de peinture ; que l'exception de prescription serait donc également écartée pour le mur de clôture et le portail ;

"1°) alors que les dispositions du code de procédure civile, à caractère réglementaire, relatives à l'obligation pour le témoin d'annexer un document officiel justifiant de son identité ne sont pas applicables devant la juridiction pénale, en raison du principe de la liberté de la preuve et du fait que la procédure pénale est du domaine de la loi ; qu'en écartant l'attestation établie par les anciens propriétaires certifiant qu'un mobil-home en bon état avait été laissé par eux sur le terrain, en raison de l'absence de pièces d'identité jointes à leur courrier dactylographié, la cour d'appel a méconnu le principe de liberté de la preuve ;

"2°) alors que même en procédure civile, les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prévues à peine de nullité ; qu'en écartant l'attestation établie par les anciens propriétaires en raison de l'absence de pièces d'identité jointes à leur courrier dactylographié, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3°) alors que la prescription triennale applicable aux délits en matière d'urbanisme court de la date d'achèvement des travaux ; qu'en refusant de reconnaître l'acquisition de la prescription concernant les deux mobil-homes au vu des factures d'électricité et d'eau produites attestant d'une consommation par des occupants dès 2008, en raison du fait qu'elles n'établissaient que l'occupation des lieux par la famille X... elle-même et non par des locataires, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale ;

"4°) alors que la prescription triennale applicable aux délits en matière d'urbanisme court de la date d'achèvement des travaux ; qu'en énonçant, quant à l'édification d'une clôture et d'un portail, que le plan de bornage établi le 31 janvier 2017 n'apportait pas la preuve de l'année d'édification du mur et de la clôture sans rechercher, comme elle y était invitée, si ce plan n'établissait pas que la clôture litigieuse était implantée, sur la parcelle voisine n'appartenant pas au prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que, pour écarter la prescription, la cour d'appel se fonde pour le bâtiment à usage d 'habitation de 71 m2 sur l'acte notarié du 24 juillet 2008, sur l'extrait cadastral annexé à l'acte de vente, et sur le bail d'habitation, pour l'installation de deux mobil homes et des caissons sur les avis d'imposition relatifs à la taxe foncière et à la taxe d'habitation, sur les factures d'eau et d'électricité, sur l'état des lieux du 1er janvier 1989 et écarte l'attestation des anciens propriétaires dénuée de valeur probante, pour l'édification d'une clôture et d'un portail, les juges retiennent notamment les constatations des agents de la direction départementale des territoires et de la mer en 2012 et les factures de travaux ;

Attendu qu'en statuant ainsi , la cour d'appel, qui a retenu un faisceau d'indices concordants pour justifier que la prescription n'était pas acquise pour les bâtiments et installations autres que l'habitation principale, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 160-1, L. 421-1, L. 480-1, L. 480-4, L. 480-5 du code de l'urbanisme, 121-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable des faits poursuivis ;

"aux motifs que la prévention couvrait la période «courant 2007 à courant 2012 » alors que M. X... était devenu propriétaire de la parcelle de terrain sur laquelle avaient été édifiées ou posées les constructions et installations litigieuses le 24 juillet 2008 ; qu'il convenait, en conséquence, de corriger cette période de prévention en la circonscrivant à la période ayant couru depuis le 24 juillet 2008 à courant 2012 et en tout cas le 23 octobre 2012 et donc d'entrer en voie de relaxe pour la période précédente ; que le 7 février 2012, un agent assermenté de la police municipale de la commune de Pugel sur Argens constatait, en présence et avec l'accord de M. X..., l'existence d'une nouvelle construction faisant 6,80m x 10,SOm, x 2,65m de haut, soit une superficie de 71,40 m2 ainsi que la présence de deux mobil-homes sur le terrain ; que le 23 octobre 2012, en présence de M. X... et avec son autorisation, un contrôleur assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer constatait sur ce terrain : -l'installation de deux caissons d'une emprise au sol cumulée de plus de 30 m2, -l'installation d'une résidence mobile de loisirs de plus de 30 m2 servant de logement à M. Patrick D..., -la construction sans autorisation d'une seconde maison d'une emprise au sol de plus de 71mètres carrés et à moins de 4 mètres de la limite séparative servant de logement à Mme Aïcha G... -l'installation d'une résidence mobile de loisirs d'une emprise au sol estimée à plus de 27 mètres carrés ainsi qu'un abri bois, en partie recouvert de canisses, d'une emprise au sol estimée à plus de 12 mètres carrés, le tout servant à un quatrième logement, -la création d'une ouverture de 3,30 mètres pour l'installation d'un portail donnant accès à cette résidence mobile de loisirs de 27mètres carrés, -l'édification en cours de murs de clôture dont la hauteur varie de 1,75 m à 2 m ; que les procès-verbaux en matière d'urbanisme font foi jusqu'à preuve du contraire, non rapportée en l'espèce ; que les constructions avaient été entreprises sans aucune autorisation ; que les résidences mobiles de loisirs avaient été installées, également sans autorisation et en dehors des emplacements autorisés pour ce type de résidences ; qu'enfin, le terrain se situait à l'époque en zone 1 N Ca du plan d'occupation des sols de la commune de Puget sur Argens, zone comprenant des terrains faisant l'objet d'une protection particulière en raison de la valeur agronomique des sols où étaient interdites toutes constructions de bâtiments d'habitation qui n'étaient pas destinés au logement d'exploitants agricoles ou du personnel attaché à l'exploitation, ces constructions devant de surcroît être implantées à au moins quatre mètres des limites séparatives ; que l'installation de résidences mobiles de loisirs y était strictement interdite comme la construction de murs de clôture, seuls étant autorisés les haies vives, des grilles ou des grillages pouvant être montés sur un mur bahut la hauteur de celui-ci ne devant pas dépasser 0,40 m et la hauteur totale de la clôture ne pouvant excéder 1,60m ; qu'enfin, le plan de prévention des risques naturels prévisibles interdisait pour cette zone classée en zone bleue, présentant un risque d'inondation (avéré puisque la famille a dû être secourue en juin 2010) l'installation de résidences mobiles de loisirs et la création de clôtures, en particulier l'édification de murs, ne permettant pas l'équilibre hydraulique ; que les infractions poursuivies étaient établies dans leur élément matériel comme dans leur élément intentionnel, étant rappelé que l'intention se déduit des constatations matérielles de l'infraction ; que force est de constater que lors de son acquisition, M. X... avait été parfaitement informé de la situation de la propriété et qu'il n'ignorait ni que la construction achetée par lui était illicite ni que son terrain était totalement inconstructible ; que sa mauvaise foi était donc particulièrement avérée ; qu'en conséquence, le jugement serait confirmé pour avoir retenu M. X... dans les liens de la prévention, sous réserve de ce que cette période de prévention ne coure qu'à compter du 24 juillet 2008 ;

" 1°) alors que le juge pénal doit répondre à tout chef de conclusions constituant un système de défense ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'une des résidences mobiles n'avait pas été enlevée par M. X..., la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;

" 2°) alors que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, concernant le mur de clôture, s'il n'avait pas été édifié sur la parcelle voisine n'appartenant pas au prévenu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que, pour déclarer M. X... coupable des faits reprochés, l'arrêt, après avoir analysé les procès verbaux de constatation des infractions des 7 février et 23 octobre 2012 , énonce notamment qu' en matière d'urbanisme, ils font foi jusqu'à preuve du contraire, non rapportée en l'espèce ; que les juges relèvent que les constructions ont été entreprises et les résidences mobiles de loisirs, dont l'une a été enlevée, ont été installées sans autorisation, sur un terrain se situant à l'époque dans une zone du plan d'occupation des sols de la commune de Puget-sur-Argens, comprenant des terrains faisant l'objet d'une protection particulière en raison de la valeur agronomique des sols où étaient interdites toutes constructions de bâtiments d'habitation qui n'étaient pas destinés au logement d'exploitants agricoles ou du personnel attaché à l'exploitation, que l'installation de résidences mobiles de loisirs y était strictement interdite comme la construction de murs de clôture, seuls étant autorisés les haies vives, des grilles ou des grillages pouvant être montés sur un mur bahut la hauteur de celui-ci comprise entre 0,40 m et 0,60m, qu'enfin, le plan de prévention des risques naturels prévisibles interdisait pour cette zone classée en zone bleue, présentant un risque d'inondation, l'installation de résidences mobiles de loisirs et la création de clôtures, en particulier l'édification de murs, ne permettant pas l'équilibre hydraulique ; que les juges en déduisent que les infractions poursuivies sont établies et qu'en tout état de cause, force est de constater que lors de son acquisition, M. X... avait été parfaitement informé de la situation de la propriété et qu'il n'ignorait ni que la construction achetée par lui était illicite ni que son terrain était totalement inconstructible, que sa mauvaise foi est donc particulièrement avérée ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits urbanistiques dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six novembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-84365
Date de la décision : 06/11/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19 juin 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 nov. 2018, pourvoi n°17-84365


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.84365
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