LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 10, alinéa 3, de la loi du 6 juillet 1989 ;
Attendu qu'en cas de reconduction tacite, la durée du contrat reconduit est de trois ans pour les bailleurs personnes physiques, ainsi que pour les bailleurs définis à l'article 13, et de six ans pour les bailleurs personnes morales ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 31 mars 2017), que, le 31 décembre 1984, M. Georges X..., aux droits duquel se trouve M. Michel X..., a donné à bail un terrain bâti à M. Z... pour une durée de neuf ans ; que, le 12 novembre 2013, M. Michel X... lui a donné congé puis l'a assigné en expulsion ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt relève que le congé a été donné au visa de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 et retient que le bail, stipulé "renouvelable au gré du preneur à condition que ladite location soit payée régulièrement en fin d'année", s'est renouvelé pour la dernière fois le 1er janvier 2012 pour une nouvelle durée de neuf ans, de sorte qu'il arrivera à expiration le 31 décembre 2020 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de clause expresse et non équivoque fixant la durée de la tacite reconduction, le bail avait été reconduit pour une durée de trois ans, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Z... à payer à M. Michel X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. Michel X...
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a débouté M. X... de ses demandes d'expulsion et de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article R. 221-5 du Code de l'organisation judiciaire, "le tribunal d'instance connaît des actions tendant à l'expulsion des personnes qui occupent aux fins d'habitation des immeubles bâtis, sans droit ni titre » ; qu'en l'espèce, c'est à tort que le premier juge a considéré que le jugement du Tribunal d'Instance de Saint-Paul en date du 9 juillet 2013 avait l'autorité de la chose jugée entre les parties alors qu'il opposait, certes dans un cadre similaire, Monsieur Michel X... à un autre occupant de la parcelle, Monsieur C...B... ; que pour justifier son occupation, l'appelant verse pour seules pièces un jugement du Tribunal d'instance de Saint-Paul du 1er octobre 2002 et un courrier du 22 février 2013 de transmission d'un chèque de loyer via son conseil ; que le jugement du 1er octobre 2002 ne fait que valider les baux, dont celui de Monsieur Y... Z..., conclus par un seul des co-indivisaires, Monsieur X..., et débouter Monsieur Claude X... de ses demandes ; qu'il sera observé que c'est d'ailleurs Monsieur Michel X... lui-même qui produit (pièce n° 3) le bail du 31 décembre 1984 consenti pour une durée de neuf ans par Monsieur X... (aux droits duquel vient l'intimé) ; que Monsieur Michel X... a donné congé à Monsieur Y... Z... par acte d'huissier du 12 novembre 2013 pour le 15 mai 2014 "pour motif légitime et sérieux" (restructuration de l'immeuble, exécution de travaux de rénovation) ; que dans ce congé, fondé les dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 relative aux baux d'habitation de droit commun, il n'est fait aucune référence au bail du 31 décembre 1984, mais uniquement au jugement du 9 juillet 2013 dont il a été vu plus haut qu'il ne concernait que Monsieur C...B... et qu'il n'était nullement opposable à Monsieur Y... Z... ; que le bail dont se prévaut Monsieur Y... Z... porte sur une portion de terrain d'environ 1000 m2 située en bordure sud du chemin [...], "déjà bâtie par lui d'une maison en dur servant d'habitation et d'un garage" ; qu'il a été consenti pour une durée de neuf ans (et non six comme l'indique l'appelant) à compter du 1er janvier 1985 et est "renouvelable au gré du preneur à condition que ladite location soit payée régulièrement en fin d'année" ; qu'il s'est donc renouvelé pour la dernière fois le 1er janvier 2012 et pour une nouvelle durée de neuf ans, de sorte qu'il arrivera à expiration le 31 décembre 2020, ainsi que le soutient Monsieur Y... Z... ; qu'indépendamment de la nature de ce bail, dont les parties n'ont pas sollicité la qualification exacte, il convient de constater que Monsieur Michel X... ne pouvait pas donner congé à Monsieur Y... Z... pour le 15 mai 2014 par référence aux dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu'il conviendra donc d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de débouter Monsieur Michel X... de l'ensemble de ses demandes ;
ALORS QUE, premièrement, en l'absence de stipulation claire et précise dérogeant aux dispositions de l'article 10 de la loi du 6 juillet 1989, le bail d'habitation consenti par des personnes physiques est reconduit ou renouvelé pour une période de trois ans, peu important la durée du bail initial ; qu'en déduisant en l'espèce de la durée de neuf ans stipulée au bail initial que celui-ci avait été reconduit par périodes successives de neuf ans, quand le bail litigieux ne contenait aucune clause expresse ou non équivoque en ce sens, la cour d'appel a violé les articles 10 et 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, et subsidiairement, si, à l'expiration du bail, le preneur reste et est laissé en possession, le contrat de bail est tacitement reconduit pour une durée indéterminée ; qu'en cas de bail à durée indéterminée, le bailleur peut délivrer congé à tout moment, sous réserve de respecter un préavis suffisant ; qu'en décidant en l'espèce, en l'absence de toute clause fixant la durée du bail renouvelé, que chaque reconduction devait s'opérer pour la même durée de neuf ans que le bail initial, la cour d'appel a violé les articles 1736, 1738 et 1739 du code civil.