LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y... a été engagée en qualité d'assistante commerciale par la société Déco relief à compter du 25 juin 2001 ; que le 30 juin 2011, elle a été victime d'un malaise sur son lieu de travail, suivi d'une période d'arrêt-maladie, qui a été reconnu comme étant un accident du travail ; que le 28 juin 2012, elle a été admise au statut de travailleur handicapé jusqu'au 18 décembre 2016, date prévue pour le réexamen de sa situation ; que le 13 mai 2013, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur ; qu'après constatation de son inaptitude à son poste avec danger immédiat le 25 juin 2013 par le médecin du travail, elle a été licenciée pour inaptitude à tout poste dans l'entreprise par lettre du 26 juillet 2014 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 4 et 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour la débouter de ses demandes tendant à la condamnation de la société à lui verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour violation des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail, d'indemnité de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité légale de licenciement, l'arrêt retient que la salariée, qui demande à la cour, à titre subsidiaire, de dire que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse, n'invoque aucune irrégularité de fond susceptible de justifier sa demande ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la salariée faisait valoir dans ses écritures devant la cour d'appel d'une part que, s'agissant d'un licenciement faisant suite à un accident du travail, l'employeur ne justifiait pas de la consultation régulière des représentants du personnel, d'autre part qu'il avait manqué à son obligation loyale de reclassement, la cour d'appel a dénaturé les écritures de la salariée et a privé sa décision de motifs, en violation des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme Y... de sa demande tendant à ce qu'il soit retenu que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes pécuniaires en résultant, l'arrêt rendu le 26 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne la société Déco relief aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant à ce qu'il soit dit qu'elle a été victime de harcèlement moral et à ce que son contrat de travail soit résilié aux torts exclusifs de l'employeur et, par voie de conséquence, à ce que la société soit condamnée à lui verser des sommes à titre de dommages et intérêt en réparation du harcèlement moral et de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis, de congés payés y afférents et d'indemnité légale de licenciement ;
AUX MOTIFS QU'elle verse aux débats, à l'appui de ses allégations, une attestation établie par Madame B... et une lettre rédigée par monsieur C..., technico-commercial, salarié de la société du 16 février 2001 au 1er juillet 2011, à l'adresse du conseil de prud'hommes, le 1er juillet 2013, ainsi que des certificats médicaux établis à partir du mois de septembre 2013 ; que, toutefois, si la société déco relief ne conteste pas la réalité du malaise dont a été victime Madame Y... le 30 juin 2011, elle conteste la véracité de la déclaration faite par Madame B... laquelle a attesté « avoir été témoin, en juin 2011, d'une conversation entre Monsieur D... et Madame E... où il disait : "tu vas, voir je vais la faire craquer aujourd'hui" Matinée qui a été l'enfer pour Madame Y.... À mon retour de pose déjeuné Evelyne était déjà à son poste très pâle et angoissée à l'idée de voir passer la porte Monsieur D.... Elle s'est levée ne se sentant pas bien mais n'a pu s'exprimer et elle est tombée prise de tremblements et d'un violent mal de tête... » ; qu'il est justifié par les pièces du débat que Monsieur D... n'était pas présent dans l'entreprise le 30 juin 2011 et qu'il était en déplacement professionnel depuis le 26 juin 2011 jusqu'au 1er juillet 2011 inclus, dans le Rhône, ainsi que cela résulte des factures d'hôtel, du récapitulatif de son badge de circulation sur l'autoroute et de l'original de sa note de déjeuner, datée du 30 juin 2011, à 12h46, au restaurant "Michel Burnichon" à 69490 Saint loup ; que ce témoignage, qui n'est pas crédible, doit être écarté des débats ; que Monsieur C..., qui était le supérieur hiérarchique de Madame Y..., qui était son assistante commerciale, depuis son embauche en 2001, déclare que lorsqu'il l'appelait au téléphone elle était surveillée ainsi que lui-même, "que les clients qui appelaient directement aux bureaux entendaient crier au téléphone et posaient des questions sur ce qu'il se passait dans l'entreprise
Madame Y... était réduite à faire des rangement, nettoyage...", sans toutefois citer de faits précis et sans expliquer comment il a pu se passer de celle qui était son assistante commerciale dont les fonctions auraient, selon ce qu'il indique, sans toutefois préciser à partir de quelle période, été modifiées ; que le Docteur F... psychiatre, a adressé au médecin du travail, le 8 décembre 2011, une lettre aux termes de laquelle elle indique qu'elle suit, depuis le mois de septembre 2011, Madame Y... pour une dépression réactionnelle à une situation de souffrance au travail ; que l'extrait de son dossier médical de médecine du travail, versé aux débats par Madame Y..., révèle que, depuis le 17 avril 2002, elle se plaint de subir un harcèlement moral de la part des "mégalomanes" avec lesquels elles travaille, également de la part de sa famille, d'être victime de harcèlement sexuel et moral sur les salons, de ce que quatre personnes de l'entreprise font partie de la secte "église évangélique" et font du prosélytisme au travail et d'une manière générale, de son mal-être au travail ; qu'il y est également mentionné qu'en mars 2005 le médecin du travail lui avait conseillé de voir un psychiatre pour soigner "ce qui ressemblait à un état pré- dépressif" ; que l'ensemble des éléments de fait ainsi présentés par la salariée, non identifiés précisément et non identifiables, ne sont pas de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral de la part de son employeur ;
1° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en s'abstenant d'examiner l'attestation de Mme H... qui témoignait du malaise de l'exposante survenu sur son lieu de travail, de son état permanent de stress, du conflit existant avec son supérieur hiérarchique et du lien de causalité entre ces éléments ainsi que le rapport d'enquête de la CPAM qui relatait le même témoignage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2° ALORS QUE en cas de litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en refusant de constater que la salariée avait satisfait à son obligation probatoire en produisant la lettre de M. C... qui témoignait de ce qu'elle travaillait dans un climat « malsain », de ce qu'elle était surveillée et qu'on lui criait dessus, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3° ALORS QUE en cas de litige, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il n'est pas exigé que le salarié apporte des éléments laissant présumer un lien de causalité exclusif entre son état de santé et les faits qu'il dénonce ; qu'en refusant de constater que les éléments de fait versés aux débats par la salariée permettaient de laisser présumer que les agissements qu'elle dénonçait étaient susceptibles d'avoir altéré sa santé, quand elle produisait un certificat médical faisant mention de ce que son état dépressif était survenu en réaction à une situation de souffrance au travail et que le médecin du travail avait constaté dès mars 2005 un état pré-dépressif, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant à la condamnation de la société à lui verser des sommes à titre de dommages et intérêt pour violation des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail, d'indemnité de préavis, de congés payés y afférents, et d'indemnité légale de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE Madame Y... qui demande à la cour, à titre subsidiaire, de dire que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse n'invoque aucune irrégularité de fond susceptible de justifier sa demande ;
1° ALORS QUE l'inobservation par l'employeur de son obligation de consulter les délégués du personnel avant de licencier un salarié pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement ainsi que de son obligation de reclassement prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ; qu'en considérant que la salariée, qui faisait valoir, d'une part, que son licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement n'avait pas été précédé de l'avis des délégués du personnel et, d'autre part, que son employeur n'avait pas recherché son reclassement dans un autre emploi approprié à ses capacités (v. ses écritures, p. 17), n'avait soulevé aucune irrégularité de fond, la cour d'appel a dénaturé les écritures de la salariée en méconnaissance des exigences de l'ancien article 1134 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE la salariée faisait valoir, d'une part, que son licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement n'avait pas été précédé de l'avis des délégués du personnel et, d'autre part, que son employeur n'avait pas recherché son reclassement dans un autre emploi approprié à ses capacités (v. ses écritures, p. 17) ; qu'en s'abstenant de répondre à ces moyens, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3° ALORS QUE, en tout état de cause, le jugement doit être motivé et le juge ne peut statuer par simple affirmation ; qu'en s'abstenant de fournir de la moindre raison tant en fait qu'en droit, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4° ALORS QUE l'inobservation par l'employeur de son obligation de consulter les délégués du personnel avant de licencier un salarié pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement ainsi que de son obligation de reclassement de ce salarié prive le licenciement de cause réelle et sérieuse et constitue, par voie de conséquence, des irrégularités de fond ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du code du travail.