LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu le paragraphe 2321 de la circulaire Pers 846 prise en application du statut des industries électriques et gazières, ensemble l'article L. 1333-2 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé le 3 janvier 2000 par la société ERDF, nouvellement dénommée ENEDIS, en qualité de technicien d'exploitation réseau ; qu'à la suite d'un incident survenu le 11 avril 2014, il a été convoqué à un entretien préalable à une sanction disciplinaire organisé le 30 avril 2014 ; qu'à l'issue de cet entretien, l'employeur a décidé d'engager une procédure disciplinaire et a saisi la commission secondaire du personnel (la CSP) en application des dispositions du statut des industries électriques et gazières ; que le salarié a été entendu le 5 juin 2014 par le rapporteur de cette commission ; que le 28 août 2014, l'employeur a notifié au salarié sa mise à la retraite d'office ; que cette sanction a été confirmée après recours ;
Attendu, selon le premier des textes susvisés, que, pour en assurer l' impartialité, ne doit prendre part ni aux débats, ni aux délibérations, en qualité de membre de la commission secondaire, toute personne ayant assisté l'intéressé au cours de sa comparution ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes tendant à dire que sa mise à retraite d'office s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de sommes, l'arrêt retient qu'aux termes des dispositions de l'article 2321 de la PERS 846, l'impossibilité de prendre part aux débats et aux délibérations en qualité de membre de la commission secondaire ne vise précisément que toute personne s'étant trouvée mêlée directement et à titre personnel aux faits motivant la comparution de l'agent devant la commission et toute personne ayant assisté l'intéressé au cours de sa comparution, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que M. A... a assisté le salarié au cours de sa comparution, le terme comparution, qui renvoie exclusivement au cas de la comparution devant la CSP, devant s'apprécier strictement ; qu'au regard des dispositions de la PERS 846 spécifiques à la procédure disciplinaire des agents des industries électriques et gazières, précises, dénuées de toute ambiguïté et d'application stricte, il apparaît que la procédure disciplinaire conventionnelle a été respectée et qu'aucune violation du principe d'impartialité n'est établie ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait été assisté les 30 avril et 5 juin 2014 lors de la première phase de la procédure disciplinaire par M. A..., représentant du personnel et membre de la CSP réunie le 26 juin 2014 pour émettre un avis sur la sanction disciplinaire, la cour d'appel a fait une fausse application et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société ENEDIS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société ENEDIS à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté M. Y... de ses demandes à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE la PERS qui régit la procédure disciplinaire applicable au personnel des industries électriques et gazières prévoit : - l'agent faisant l'objet d'une procédure disciplinaire est convoqué à un entretien préalable par l'employeur qui indique dans la convocation, l'objet de la procédure et, au cours de l'entretien au cours duquel l'agent peut se faire assister d'un agent statutaire représentant de l'organisation syndicale à laquelle il appartient ou de tout autre agent statutaire, le motif de la sanction envisagée ; - à l'issue de ce premier entretien, l'employeur peut mettre en oeuvre la consultation des conseils de discipline en adressant à la Commission Secondaire du Personnel (CSP) un rapport exposant de façon détaillée les faits reprochés avec toute pièce utile annexée ; un rapporteur membre de la CSP siégeant en matière disciplinaire est désigné par le président qui dirigera les débats ; le rapporteur procède à une instruction du dossier, en ayant le pouvoir d'entendre l'agent dans ses explications, qui peut se faire assister d'un agent statutaire représentant de l'organisation syndicale à laquelle il appartient ou de tout autre agent statutaire ; il rédige un exposé des faits et un résumé des pièces du dossier ; l'agent a la faculté de prendre connaissance des pièces du dossier et de l'exposé du rapporteur, et d'obtenir la copie de ces pièces ; - l'autorité compétente notifie à l'agent la date, l'heure et le lieu de sa comparution devant la CSP ; l'article 2321 prévoit que seuls peuvent y siéger, c'est-à-dire assister à la séance et prendre part aux débats et au délibéré, des représentants du personnel appartenant à un GF supérieur ou égal à celui de l'agent appelé à comparaître, que sa composition peut être modifiée en conséquence, la représentation paritaire étant maintenue en toute hypothèse, qui est indispensable chaque fois que la CSP examine un dossier disciplinaire de se conformer très strictement à ces règles et que : « pour en assurer l'impartialité, ne doit prendre part ni aux débats, ni aux délibérations, en qualité de membre de la commission secondaire : - tout agent qui s'est trouvé mêlé directement et à titre personnel aux faits motivant la comparution de l'agent incriminé devant cette commission, étant précisé qu'il s'agit essentiellement de l'agent ayant eu un rôle de coauteur ou de complice des faits reprochés ou en ayant été victime ; - toute personne ayant assisté l'intéressé au cours de sa comparution » ; - l'agent incriminé peut être accompagné d'un assistant devant la CSP et à l'issue des débats, il est statué hors la présence de l'agent incriminé, de son assistant ou de son mandataire ; la décision est prise sous forme de proposition motivée soit de sanction, soit de classement du dossier ; le procès-verbal de séance et les pièces du dossier sont transmises à l'autorité compétente habilitée à prendre la décision ; - l'autorité compétente adresse à l'agent une convocation indiquant la sanction envisagée et ses motifs compte tenu de l'avis de la commission compétente, lui précisant la date, l'heure et le lieu de l'entretien, et qu'elle peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel des établissements : au cours de cet entretien, l'autorité compétente rappelle les motifs de la sanction envisagée et recueille les observations de l'agent ; une lettre lui est notifiée contenant la décision motivée qui a été prise et la sanction des voies de recours sont ouvertes à l'agent ; L'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme affirme notamment le droit à un procès juste et équitable conduit par un tribunal indépendant et impartial. La commission secondaire du personnel, devant laquelle a comparu M. Frédéric Y... n'est un pas un tribunal au sens de ce texte, s'agissant d'un organe disciplinaire consultatif qui n'a pas le pouvoir d'infliger une sanction, lequel n'appartient qu'à l'employeur. Pour autant, la procédure décrite dans la PERS 846 est obligatoire et constitue , pour le salarié poursuivi, une garantie de fond, de sorte qu'un manquement aux règles édictées par ce document ou plus généralement aux obligations de loyauté et d'impartialité s'imposant à tout organisme chargé ne serait-ce que de formuler une proposition de sanction serait de nature à affecter la validité même du licenciement ; au termes des dispositions de l'article 2321 de la PERS 846 sus-citées, l'impossibilité de prendre part aux débats et aux délibérations en qualité de membre de la commission secondaire ne vise précisément que toute personne s'étant trouvée mêlée directement et à titre personnel aux faits motivant la comparution de l'agent devant la commission et toute personne ayant assisté l'intéressé au cours de sa comparution, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; en effet, il n'est pas établi, ni même allégué, d'une part que M. A... a assisté M. Frédéric Y... au cours de sa comparution, le terme comparution, qui renvoie exclusivement au cas de la comparution devant la CSP, devant s'apprécier strictement ; au regard des dispositions de la PERS 846 spécifiques à la procédure disciplinaire des agents des industries électriques et gazières, précises, dénuées de toute ambiguïté et d'application stricte, il apparaît que la procédure disciplinaire conventionnelle a été respectée et qu'aucune violation du principe d'impartialité n'est établie ;
1°) ALORS QUE lorsque la convention collective ou les statuts imposent à l'employeur des règles procédurales plus contraignantes que celles prévues par la loi, la violation de ces règles procédurales justifie l'annulation de la sanction disciplinaire ; qu'encourt notamment l'annulation, la sanction disciplinaire prononcée sans que l'organisme conventionnel ou statutaire ait été consulté ou ait rendu son avis selon une procédure régulière ; que la PERS 846 impose notamment que, pour en assurer l'impartialité, ne doit prendre part ni aux débats, ni aux délibérations, en qualité de membre de la commission secondaire, toute personne ayant assisté l'intéressé au cours de sa comparution ; qu'en l'espèce, il était établi, et du reste non contesté par la société ENEDIS, que M. A..., représentant du personnel qui a participé aux débats et pris part aux votes de la commission secondaire tenue le 26 juin 2014, avait assisté le salarié au cours de l'entretien préalable du 30 avril 2014 et également lors de son audition par le rapporteur le 5 juin 2014 ; qu'en retenant pourtant, pour affirmer que la procédure disciplinaire conventionnelle avait néanmoins été respectée et qu'aucune violation du principe d'impartialité n'était établie, que le terme « comparution » visée par la PERS devait s'appliquer strictement et ne concernait que la comparution devant la CSP, la cour d'appel a violé la circulaire PERS 846 et les articles L. 1235-1 et suivants et L. 1333-2 du code du travail ;
2°) ALORS subsidiairement QUE le principe d'impartialité, principe général du droit, s'oppose à ce que le membre d'une commission disciplinaire, qui a assisté le salarié lors de l'entretien préalable et lors de l'audition par le rapporteur, puisse participer au délibéré et prendre part au vote de l'organe disciplinaire ; qu'en l'espèce, il était établi, et du reste non contesté par la société ENEDIS, que M. A..., représentant du personnel ayant participé aux débats et pris part aux votes de la commission secondaire tenue le 26 juin 2014, avait assisté le salarié au cours de l'entretien préalable du 30 avril 2014 et lors de son audition par le rapporteur le 5 juin 2014 ; qu'en considérant néanmoins que la procédure disciplinaire conventionnelle avait été respectée et qu'aucune violation du principe d'impartialité n'était établie, la cour d'appel a violé le principe général d'impartialité.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, D'AVOIR débouté M. Y... de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE la procédure disciplinaire régie par l'article 6 du statut national du personnel des industries électriques et gazières et par la circulaire PERS 846 qui prévoit que : « les sanctions disciplinaires applicables aux agents statutaires suivant la gravité des fautes commises sont : 1° l'avertissement ; 2° le blâme notifié avec inscription au dossier ; 3° la mise à pied, limitée à 8 jours, avec privation de salaire ;4° la mise à pied, limitée à un mois, avec privation de salaire ;5° la rétrogradation d'un ou plusieurs échelons ou échelles ; 6° la mise à la retraite d'office » ; la sanction de mise à la retraite d'office consiste à faire cesser les fonctions de l'agent quel que soit son temps de présence dans les industries électriques et gazières, mais en maintenant ses droits à pension lorsque ceux-ci sont acquis ; la mise à la retraite d'office s'analyse en un licenciement pour faute grave ; la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ; si un doute subsiste, il profite au salarié ; il résulte des articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement ; aux termes de la lettre datée du 28 août 2014, l'employeur a notifié à M. Y... sa décision de le sanctionner par une mise à la retraite d'office, à la suite de l'avis émis par les membres de la CSP, pour les motifs suivants constitutifs d'une faute grave ; « lors de votre entretien préalable, vous avez reconnu avoir réalisé le 11 avril 2014 une prestation de raccordement d'un nouveau client, alors que vous étiez en dehors de votre temps de travail, sans autorisation ni ordre de travail de votre hiérarchie ; aux fins de réaliser cette prestation, vous avez utilisé le matériel de l'entreprise, véhicule de service et outils, et étiez vêtu des vêtements image de marque de l'entreprise ; vous avez soustrait du matériel de comptage pour effectuer cette prestation à l'insu d'ERDF ; malgré votre connaissance des règles électriques, en tant qu'agent habilité UTE C18-510, vous êtes intervenu sans demande et autorisation d'accès aux ouvrages en exploitation ; vous avez raccordé un ouvrage non conforme à la réglementation C14-100 en vigueur, situation de nature à porter atteinte à la sécurité des biens et des personnes ; vous en respectez pas les dispositions relatives eu cumul d'activités professionnelles en vigueur dans l'entreprise ; ces faits sont d'une part de nature à porter atteinte aux intérêts et à l'image de marque de l'entreprise et d'autre part constituent un manquement à votre obligation de loyauté inhérente à votre contrat de travail ; compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, cotre maintien dans l'entreprise s'avère impossible ; la mise à la retraite d'office pour faute grave prend donc effet à la date de remise en main propre de ce courrier soit le 28 août 2014 sans indemnité de préavis ni de licenciement (
) » ; à l'issue du recours exercé par M. Y..., l'employeur a maintenu en des termes identiques la sanction de mise à la retraite d'office suivant lettre du 9 janvier 2015 ; il ressort des pièces produites aux débats et notamment de la procédure disciplinaire que Electricité Réseau Distribution France (ERDF) aujourd'hui dénommée société Enedis reproche à M. Y..., alors qu'il se trouvait en position de repos (RTT), de s'être rendu le vendredi 11 avril 2014 au domicile d'un client ERDF, M. B..., situé [...] afin de procéder à un raccordement de son installation électrique au distributeur de l'immeuble, en dehors de toute procédure, ni autorisation, n'ayant reçu aucun bon de travail, en ayant soustrait les moyens et biens de la société (véhicule ERDF, tenue de travail ERDF, matériel de comptage ERDF), d'avoir exercé une activité d'auto-entrepreneur en électricité, en violation des dispositions en vigueur relatives au cumul d'activités, et d'avoir réalisé un raccordement non conforme à la réglementation en vigueur qui a contraint ERDF à procéder à une coupure d'alimentation pour raison de sécurité, la présence et l'intervention de M. Y... ayant été découvertes au domicile du client par deux agents ERDF missionnés pour intervenir chez M. B... le même jour ; M. Y... a reconnu au cours de la procédure disciplinaire et dans ses écritures produites à l'audience : - qu'il avait, alors qu'il était en position de repose (RTT), décidé d'intervenir en utilisant un véhicule, des équipements de protection individuelle, des vêtements siglés et un compteur appartenant à ERDF qu'il avait retiré sans autorisation, au domicile de M. B... afin de réaliser à son profit un raccordement de son installation électrique au distributeur de l'immeuble, en précisant qu'il n'avait pas eu l'intention de dissimuler son intervention, M. C..., chargé d'affaire pour le secteur et M. D..., chargé d'exploitation, en ayant été informés, et qu'il a seulement voulu rendre service à un client qui ne parvenait pas à obtenir des services d'ERDF son raccordement et était sans électricité depuis trois mois, qui lui avait été recommandé par un ami commun ; qu'en sus de son emploi chez ERDF, il exerçait une activité privée d'électricien en qualité d'auto-entrepreneur depuis 2009 et qu'il ne savait pas qu'il n'était pas autorisé à cumuler cette activité avec son emploi de technicien exploitation réseau soumis à des astreintes, en application de la PERS 92 et d'un accord professionnel de branche du 3 septembre 2010 ; il ressort par ailleurs des pièces produites aux débats et des débats que : - ERDF a indiqué à M. B..., par courriel du 25 février 2014 qu'il devait trouver un électricien privé qui puisse soumettre son projet de changement de distributeur d'étage auprès du service ERDF auquel appartient M. C... ; ce dernier lui a demandé par courriel du 26 février 2014 des photos du distributeur sur lequel il souhaitait se raccorder et les échanges se sont poursuivis jusqu'à l'émission par M. C... d'un ordre de travail (DEVET) le 11 avril 2014 ; - M. Marc E... a indiqué au rapporteur que le 11 avril 2014, ses deux techniciens, M. F... et M. G... l'avaient informé qu'ils devaient faire une coupure de la colonne montante du [...] et raccorder une dérivation individuelle suite aux travaux de l'électricien conformément à leur ordre de travail (DEVET) émise par le chargé d'affaire, M. C..., mais qu'arrivés sur place, la colonne était déjà coupée et une affiche pour informer de la coupure ERDF exploitation était présente ; un véhicule était stationné dans la rue et ils ont rencontré un technicien ERDF vêtu des « vêtements image de marque » ; celui-ci a affirmé que les travaux lui étaient dédiés, qu'il s'était arrangé avec le chargé d'affaires et que les techniciens de l'agence clientèle n'avaient plus à intervenir ; pendant ce temps, il a continué son chantier et raccordé le câble de dérivation dans le coffret Pascarel ; ils ont constaté la non-conformité aux prescriptions de la norme C14-100 (gaine bleue et point de fixation du câble) ; par suite, l'électricité de M. B... a dû être coupée dans l'attente que ce dernier réalise les travaux de mise en conformité ; M. Daniel C... précisant devant le rapporteur la procédure à suivre pour un raccordement privatif sur une colonne hors concession ERDF comme c'était le cas au [...] , a indiqué qu'à réception de la demande du client, une demande était faite à l'installateur, dont le projet était validé par ses soins et qu'il sollicitait si nécessaire une demande (DEVET) à l'agence clientèle ou à l'exploitation pour le raccordement de la dérivation ; en l'espèce il avait réalisé une DEVET pour l'agence clientèle aux fins de coupure au pied de colonne pour que l'installateur réalise le raccordement de la dérivation dans le Pascarel (distributeur d'étage) ; la procédure prévoit que lorsque l'installateur a terminé, les techniciens de l'agence clientèle interviennent pour poser le compteur, vérifier la conformité de la dérivation, vérifier les serrages, relever les références compteur et remettre en service la colonne montante ; il a indiqué que M. Y... lui avait proposé de tout faire lui-même (coupure et travaux), lui disant qu'il avait toutes les habilitations requises pour ce type d'intervention pour coupure à l'exploitant et que M. Y... lui avait répondu qu'il allait contacter directement l'exploitant ; il indique qu'il avait refusé et qu'il avait continué à respecter les procédures, en transmettant une demande d'intervention à l'agence clientèle pour coupure au pied de la colonne, pose du comptage et mise en service du client ; il précise ne pas connaître personnellement M. Y..., l'avoir eu deux fois au téléphone, la première fois quand celui-ci a déclaré s'occuper de l'affaire comme électricien du client et la seconde pour l'informer qu'il avait l'intention de tout réaliser, ce qu'il avait refusé et avait continué à respecter les procédures ; - M. Arnaud H..., précisant devant le rapporteur la procédure d'accès aux ouvrages, a indiqué que l'accès au réseau se fait via une demande systématique au chargé d'exploitation de la part du technicien pour accéder aux ouvrages, qui n'est autorisé que si le chargé d'exploitation est avisé en amont ou à défaut s'il estime que les critères nécessaires, sécurité, organisation et client sont réunis, qu'en amont, il y avait une phase de préparation réalisée par le demandeur des travaux (
), que dans le cadre de l'intervention sur la colonne hors concession du [...] , c'était à une entreprise prestataire de réaliser l'intervention technique, ERDF étant seulement l'exploitant de l'ouvrage, propriété du syndic ; - M. Frédéric Y... indique dans ses écritures avoir procédé le 11 avril 2014 au retrait du compteur électrique dans le magasin en vue de l'intervention privée qu'il allait réaliser le même jour chez M. B..., en signant lui-même le bon de travail, alors que M. H... indique que le bon de retrait doit être signé par le chargé d'exploitation ; - les travaux réalisés par M. Frédéric Y... au domicile de M. B... le 11 avril 2014 étaient affectés d'une non-conformité à la norme C 14-100 ainsi qu'il résulte du compte-rendu d'intervention des techniciens clientèle intervenus au domicile de M. B... le 11 avril 2014 et des procès-verbaux dressés par maître Jérôme I..., huissier de justice à la demande d'ERDF les 19 et 20 avril 2014, constatant que le câble de raccordement n'est pas sous goulotte et apparent et que le fourreau extérieur est trop petit et de couleur bleue alors qu'il devrait être de couleur gris ou noir, afin d'éviter la confusion avec les gaines habituellement utilisées pour l'eau, ce qui a nécessité une coupure d'électricité ; - l'autorisation du syndic de l'immeuble du [...] Paris, à ERDF d'autoriser des travaux sur la colonne montante, partie commune, est datée du 20 juin 2014, aucune autorisation antérieure n'étant produite aux débats ; - enfin, la PERS 92 , texte réglementaire imposant à tous les agents, dispose en son article 1 que « tout cumul d'un emploi EDF ou GDF avec une activité extérieure est interdit, sauf autorisation préalable expresse de la direction générale (
) et il est notamment interdit à un agent de tenir un commerce, d'être employé dans une autre entreprise, de faire des travaux à domicile, d'effectuer des expertises, etc. » ; par ailleurs, l'accord du 3 septembre 2010 relatif au cumul d'emplois ou d'activités dans la branche professionnelle des industries électriques et gazières prévoit que « Le salarié est tenu d'informer chacun de son ou de ses employeurs soumis au présent accord de ce qu'il cumule un emploi et/ou une activité (
).Le cumul d'activités ne dispense pas le salarié du respect de ses obligations contractuelles à l'égard de son ou de ses employeurs : le salarié est tenu, notamment, au respect de l'obligation de loyauté, inhérente à tout contrat de travail. Cette obligation a pour conséquence d'exclure, en particulier, l'exercice direct par le salarié d'une activité concurrente à celle d'un de ses employeurs ou sa participation à une telle activité. Doit, notamment, être considérée comme activité concurrente l'activité dont l'exercice est susceptible de créer, soit un avantage particulier au profit du nouvel employeur ou de la nouvelle entreprise, soit un préjudice à l'employeur initial. » ; M. H... a indiqué que M. Y... est informé comme tous les agents via les panneaux d'affichage direction de la liste des accords collectifs de l'entreprise et qu'il a assisté à une présentation portant sur l'éthique dans la relation de travail rappelant notamment l'obligation de loyauté lors d'une réunion de prise d'astreinte animée par le contremaître d'astreinte, M. J... le 19 décembre 2013, élément non contesté par M. Y... ; il n'est pas plus contesté que M. Y... a créé et a exercé une activité indépendante sous le statut d'auto-entrepreneur spécialisé dans « les travaux d'installation électrique » depuis près de cinq ans, le 2 novembre 2009, sans en avoir jamais informé son employeur ;
ET AUX MOTIFS QU'il résulte de toute ce qui précède que les griefs relatifs : - au raccordement d'un nouveau client sans autorisation, ni ordre de travail de sa hiérarchie en dehors de son temps de travail ; - à la soustraction des moyens et biens de ERDF afin de réaliser le raccordement litigieux (véhicule, tenue de travail et matériel de comptage) ; - au non-respect des dispositions en vigueur relatives au cumul d'activités ; - à l'intervention sans demande et autorisation d'accès aux ouvrages en exploitation ; - et au raccordement non conforme à la réglementation C14-100 en vigueur ; fondant la mesure sont établis ; M. Y... prétend que les griefs énoncés au soutien de la rupture des relations contractuelles ne sont pas sérieux au motif qu'il n'a fait l'objet d'aucun avertissement, ni rappel à l'ordre tout au long d'une relation contractuelle de plus de 14 ans, et que la sanction est disproportionnée par rapport aux faits reprochés ; à l'analyse des griefs retenus, il ressort cependant que : - M. Y... bénéficiait d'une ancienneté de 14 ans au sein de l'entreprise et qu'il occupait les fonctions de technicien d'exploitation réseau électricité depuis 4 ans ; M. Y... n'a jamais allégué ne pas connaître les procédures d'autorisation et d'intervention en vigueur au sein de l'entreprise ; le souhait de « rendre service à une connaissance » ne justifiait pas que M. Y... ne se conforme pas aux procédures d'autorisation et d'accès aux ouvrages en exploitation en vigueur et soustraie et utilise à des fins privées un véhicule, du matériel et un compteur ainsi que des vêtements siglés ERDF ; - M. Y... a de plus effectué une intervention d'ordre privé le 11 avril 2014 auprès d'un client d'ERDF en effectuant un raccordement non conforme à la réglementation C14-100 susceptible de générer un risque pour la sécurité des personnes et des biens, ayant contraint ERDF à une coupure de courant chez M. B... dans l'attente de la mise en conformité ; - M. Y... a enfin exercé une activité privée d'électricien depuis près de cinq ans depuis la date des faits, sans en avoir jamais informé son employeur, en violation de la réglementation en vigueur ; il résulte de tout ce qui précède que M. Y... a par ses agissements, commis un manquement de loyauté envers son employeur, d'une importance telle qu'il rend impossible son maintien dans l'entreprise ; par conséquent, en dépit des attestations produites par M. Y... sur ses mérites professionnels et les répercussions de cette procédure su sa vie privée, la faute grave est établie et la mise à la retraite d'office de M. Y... est justifiée au regard de la gravité des faits commis ; le jugement frappé d'appel sera donc infirmé en toutes ses dispositions ; M. Y... sera débouté de toutes ses demandes ;
1°) ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié pendant la période du préavis ; que la gravité de la faute s'apprécie, notamment, au regard de l'existence ou non de sanctions antérieures ; qu'en l'espèce, M. Y... invoquait, sans être contredit, le fait qu'il n'avait fait l'objet d'aucun avertissement ni rappel à l'ordre tout au long de la relation contractuelle d'une durée de 14 ans : qu' en se déterminant comme elle l'a fait, sans tenir compte à sa juste mesure de cet élément, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1234-1 du code du travail.
2°) ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié pendant la période du préavis ; que la gravité de la faute s'apprécie, notamment, au regard de l'ancienneté de l'agent ; qu'en l'espèce, en se déterminant comme il l'a fait, après avoir constaté que M. Y... bénéficiait d'une ancienneté de 14 ans au sein de l'entreprise et qu'il occupait les fonctions de technicien exploitation réseau électricité depuis 4 ans, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-1 du code du travail ;
3°) ALORS enfin QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que M. Y... avait produit devant la cour d'appel le procès-verbal de la commission secondaire du personnel en date du 30 juin 2015 concernant la situation d'un autre agent, M. K... (cf. productions), faisant apparaître que cet agent avait fait l'objet d'une condamnation devant le tribunal correctionnel à six mois d'emprisonnement avec sursis et avait été poursuivi devant la CSP pour avoir contribué à l'installation de cinq compteurs en dehors de son périmètre d'activité et de toute procédure, sans bénéficier d'ordre de travail pour cette intervention, du conseil nécessaire, d'avoir utilisé sans autorisation du matériel appartenant à l'entreprise, d'avoir mis en danger des personnes et des biens, d'avoir porté atteinte à l'image de l'entreprise et d'avoir porté atteinte à l'obligation de loyauté inhérente au contrat de travail, ce qui n'avait toutefois donné lieu qu'à un simple avertissement ; que M. Y... s'appuyait sur cette pièce déterminante pour invoquer l'absence de faute grave de sa part, compte tenu du caractère isolé des faits qui lui étaient reprochés, de son ancienneté et de son absence de sanction antérieure ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans analyser cette pièce déterminante produite par M. Y... au soutien de ses prétentions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 1353 du code civil (devenu article 1382).