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26/09/2018 | FRANCE | N°17-20028

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 septembre 2018, 17-20028


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 4 avril 2017), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 6 octobre 2015, pourvoi n° 14-10.216) et les productions, qu'en suite d'un protocole du 11 juillet 2007, par lequel le groupe immobilier Bremont, composé notamment de la société B3M, devenue Ardissa, de la société Le Damier, ultérieurement absorbée par la société Ardissa, et de la société civile de construction vente immobilière Les Neuf

Journaux, s'engageait à acquérir les parts sociales de la société Prodim immo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 4 avril 2017), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 6 octobre 2015, pourvoi n° 14-10.216) et les productions, qu'en suite d'un protocole du 11 juillet 2007, par lequel le groupe immobilier Bremont, composé notamment de la société B3M, devenue Ardissa, de la société Le Damier, ultérieurement absorbée par la société Ardissa, et de la société civile de construction vente immobilière Les Neuf Journaux, s'engageait à acquérir les parts sociales de la société Prodim immobilier, détenues par la société Prodim, et de la régularisation de l'acte de cession, M. Y... a conclu avec la société B3M, tant en son nom personnel qu'en qualité de gérant de la société C... Y... immobilier (la société BTI) et de la société Prodim, une garantie de passif et d'actif comportant une « garantie spécifique », par laquelle la société Prodim garantissait le maintien des honoraires dus à la société Prodim immobilier ; que les sociétés Prodim immobilier et Ardissa ont demandé la condamnation de la société Prodim à leur payer des sommes correspondant, respectivement, aux honoraires garantis et aux conséquences du défaut de paiement des sommes dues au titre de la garantie spécifique ; que l'arrêt, en ce qu'il avait fait droit à la demande de la société Prodim immobilier, ayant été cassé au motif que la garantie à première demande avait été souscrite au profit de la société Ardissa et non de la société Prodim immobilier, cette dernière et la société A... X... , intervenue volontairement à l'instance en qualité de liquidateur de la société Prodim immobilier, ont, devant la cour d'appel de renvoi, au soutien de leur demande de condamnation de la société Prodim à payer une indemnité au titre des honoraires non perçus sur le fondement de l'article 1382 du code civil, invoqué le fait que le non-respect par la société Prodim de son engagement à l'égard de la société Ardissa avait causé à la société Prodim immobilier un préjudice dont elle était fondée à demander réparation ;

Attendu que la société Prodim fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la société Prodim immobilier des dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'elles ne nuisent point aux tiers et ne leur profitent que dans les cas prévus par la loi ; que le tiers à un contrat n'est donc pas fondé à en réclamer l'exécution et ne peut se prévaloir d'un manquement contractuel qu'en démontrant que ce manquement constitue une faute délictuelle à son égard ; qu'en l'espèce, en retenant, pour condamner la société Prodim à verser à la société Prodim immobilier la somme de 742 001,74 euros, correspondant aux honoraires non perçus garantis, que la société Prodim n'avait pas respecté son engagement de garantie à l'égard de la société Ardissa, sans constater que le manquement contractuel imputé à la société Prodim constituait une faute délictuelle à l'égard de la société Prodim immobilier, la cour d'appel a violé l'article 1382 ensemble l'article 1165 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ qu'en admettant même qu'un tiers puisse se prévaloir d'un manquement contractuel pour agir en responsabilité délictuelle contre un contractant encore faut-il que son action tende à obtenir la réparation d'un préjudice et non à la mise en oeuvre d'une garantie de paiement contractuelle ; qu'en permettant à la société Prodim immobilier, par le biais de son liquidateur, d'obtenir à titre de dommages-intérêts une somme de 742 001,74 euros correspondant au montant des honoraires garantis non perçus, la cour d'appel a violé l'article 1382 ensemble l'article 1165 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ qu'en admettant même qu'un tiers puisse se prévaloir d'un manquement contractuel pour agir en responsabilité délictuelle contre un contractant, encore faut-il qu'il établisse un manquement contractuel ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour constater un tel manquement, que la société Prodim n'avait pas exécuté son engagement de garantie après avoir été mise en demeure par la société Ardissa, quand de tels motifs sont pourtant impropres à caractériser une inexécution de la convention de garantie imputable à la société Prodim, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que l'article 2.7 de la convention de garantie d'actif et de passif, relatif à la "garantie spécifique liée aux accords de commercialisation conclus au bénéfice de la société Prodim immobilier" stipulait que "M. C... Y... , en qualité de gérant du garant (la société Prodim) s'engageait à indemniser la société (Prodim immobilier) de l'intégralité des conséquences financières liées à la non-perception par (celle-ci) des honoraires", que "cette indemnisation sera(it) égale au montant total des honoraires contractuels qui auraient dû être perçus par la société Prodim immobilier soit 6,5 % sous déduction des 2,5 % revenant à la société C... Y... immobilier" et que "cette indemnisation sera(it) immédiatement due par la société Prodim et à première demande du bénéficiaire" (la société Ardissa), l'arrêt relève que la société B3M, visant expressément la garantie en son article 2.7, a réclamé le paiement sans délai de la somme de 805 000 euros HT, qu'elle avait comptabilisée, et qu'il n'a été donné aucune suite à cette réclamation ; qu'il retient que le fait dommageable ouvrant, pour la société Prodim immobilier, droit à réparation est le manquement de la société Prodim à l'engagement contractuel qu'elle avait pris à l'égard de la société B3M, devenue Ardissa, de garantir à première demande le paiement d'une indemnisation destinée à réparer les conséquences financières liées à la non-perception par la société Prodim immobilier des honoraires de commercialisation qui lui étaient dus, cette indemnisation devant être égale au montant total des honoraires contractuels qui auraient dû être perçus par cette dernière sous déduction des 2,5 % revenant à la société BTI ; qu'en l'état de ces motifs, justifiant légalement sa décision, et dont il résulte que le refus, par la société Prodim, d'exécuter la garantie à première demande stipulée au profit de la société Ardissa, avait causé à la société Prodim immobilier un préjudice constitué par la perte des honoraires qui lui étaient garantis, la cour d'appel a retenu à bon droit la responsabilité délictuelle de la première envers la troisième ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Prodim aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Prodim immobilier, la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Prodim

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société PRODIM à verser à la société PRODIM IMMOBILIER, représentée par la SCP A... X... es qualité de mandataire liquidateur, la somme de 742 001,74 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2009 à titre de dommages-intérêts ;

Aux motifs que :

« Sur le fond

Attendu que la société Prodim soutient que la faute ayant privé la société Prodim immobilier des honoraires de commercialisation qu'elle évoque est imputable à la seule société Ardissa, anciennement B3M, qui n'a pas su en demander le paiement ;

Mais attendu que cette assertion est démentie par les lettres susvisées du 12 février 2009 par lesquelles la société B3M, visant expressément la Garantie en son article 2.7, a réclamé paiement sans délai de la somme qu'elle avait comptabilisée de 805 000 euros HT ;

Que c'est, notamment, parce qu'aucune suite n'avait été donnée à cette réclamation, que les procédures sus-mentionnées ont pris place ;

Attendu que la société Prodim immobilier détaille ainsi le montant de la somme réclamée :
- Le Rheu - SCCV Passiflore : 73 000 euros,
- Rennes - Zac de Beauregard - SCCV Rose Garden : 204 000 euros,
- Chantepie - Sainte Mélaine (Central park) - SCCV Mélanie : 465 001,74 euros,
total : 742 001,74 euros ;

Que ces trois opérations immobilières apparaissent, avec six autres, sur l'annexe 3 du Protocole (pièce n° 2 de la scp X...) et sur l'une des annexes à la convention de collaboration (pièce n° 3 de la scp X...) énumérant les activités de vente de biens immobiliers neufs en cours et à venir de la société Prodim immobilier ;

Que la scp X... ès qualités produit les trois mandats de vente conclus par la société Prodim immobilier sans exclusivité avec la SCCV Passiflore (pièce n° 4 de la scp X...), et avec exclusivité avec la SCCV Mélanie et la SCCV Rose Garden (pièces n° 5 et 6 de la scp X...) rappelant chacune la rémunération de la société Prodim immobilier fixée à 6,5 % HT du prix de vente TTC ;

Qu'elle verse encore un tableau chiffré de chacune des opérations immobilières et des honoraires de commercialisation restant à payer au 2 mars 2009 (pièce n° 9 de la scp X...) qui correspondent aux sommes aujourd'hui sollicitées à titre d'indemnité ;

Et attendu que la société Prodim, qui discute le principe même de la demande en paiement de la société Prodim immobilier, n'en conteste, en revanche, pas sérieusement le montant, étant ici observé que le tribunal de commerce, dans son jugement du 30 juin 2009, confirmé sur ce point en appel, l'avait condamnée avec la société BTI à communiquer à la société B3M les contrats de réservation sur chaque programme immobilier listé dans le protocole du 11 juillet 2017 ;

Qu'il n'est pas douteux que si les sommes réclamées aujourd'hui par la société Prodim immobilier, d'un montant, au demeurant, inférieur à la somme de 805 000 euros initialement demandée, avaient excédé les honoraires de commercialisation qui auraient réellement dû lui revenir, la société Prodim n'aurait pas manqué de produire les pièces établissant le caractère erroné de leur évaluation ;

Que la société Prodim sera condamnée à verser à la société Prodim immobilier représentée par la scp X... la somme de 742 001,74 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 février 2009 à titre de dommages et intérêts ».

Alors, d'une part, que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; qu'elles ne nuisent point aux tiers et ne leur profitent que dans les cas prévus par la loi ; que le tiers à un contrat n'est donc pas fondé à en réclamer l'exécution et ne peut se prévaloir d'un manquement contractuel qu'en démontrant que ce manquement constitue une faute délictuelle à son égard ; qu'en l'espèce, en retenant, pour condamner la société PRODIM à verser à la société PRODIM IMMOBILIER la somme de 742 001,74 euros, correspondant aux honoraires non perçus garantis, que la société PRODIM n'avait pas respecté son engagement de garantie à l'égard de la société ARDISSA, sans constater que le manquement contractuel imputé à la société PRODIM constituait une faute délictuelle à l'égard de la société PRODIM IMMOBILIER, la Cour d'appel a violé l'article 1382 ensemble l'article 1165 du Code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Alors, d'autre part, subsidiairement, qu'en admettant même qu'un tiers puisse se prévaloir d'un manquement contractuel pour agir en responsabilité délictuelle contre un contractant encore faut-il que son action tende à obtenir la réparation d'un préjudice et non à la mise en oeuvre d'une garantie de paiement contractuelle ; qu'en permettant à la société PRODIM IMMOBILIER, par le biais de son liquidateur, d'obtenir à titre de dommages-intérêts une somme de 742 001,74 euros correspondant au montant des honoraires garantis non perçus, la Cour d'appel a violé l'article 1382 ensemble l'article 1165 du Code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Alors, enfin, subsidiairement qu'en admettant même qu'un tiers puisse se prévaloir d'un manquement contractuel pour agir en responsabilité délictuelle contre un contractant encore faut-il qu'il établisse un manquement contractuel ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever, pour constater un tel manquement, que la société PRODIM n'avait pas exécuté son engagement de garantie après avoir été mise en demeure par la société ARDISSA, quand de tels motifs sont pourtant impropres à caractériser une inexécution de la convention de garantie imputable à la société PRODIM, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-20028
Date de la décision : 26/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 04 avril 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 sep. 2018, pourvoi n°17-20028


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP L. Poulet-Odent, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.20028
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