LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 07 avril 2017), que M. X... a été engagé en qualité de responsable comptabilité clients voix, le 1er septembre 2004 par la société Tiscali, aux droits de laquelle vient la société Certicall ; que son contrat de travail comportait une clause de mobilité géographique prévoyant que le lieu de travail pourra être modifié et transféré en tout autre lieu sur le territoire national ; qu'ayant refusé une mutation, l'employeur l'a licencié par lettre du 6 juillet 2011 ; qu'il a saisi le 20 mai 2014 la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, qu'une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ; qu'en jugeant licite la clause de mobilité stipulée au contrat de travail, qui visait l'ensemble du territoire national, et que le licenciement du salarié, fondé sur son refus de mutation, était justifié par une cause réelle et sérieuse, quand la clause de mobilité était nulle en raison de l'absence de définition précise de sa zone géographique d'application, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1221-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable (devenu 1103 du code civil) ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la clause de mobilité, définissait de façon précise sa zone géographique d'application et ne conférait pas à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle était licite ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en oeœuvre d'une clause de mobilité ne doit pas être déloyale ; que dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 13 et 14), le salarié faisait valoir que le nouveau lieu de travail à Paris, imposé par son employeur, était très loin de son domicile situé à Marseille et qu'il avait manifesté le souhait de pouvoir continuer à travailler à Marseille mais que la société , malgré sa taille et ses implantations, n'avait pas procédé à une recherche de reclassement sur un poste équivalent n'impliquant pas un tel bouleversement de ses conditions de vie ; qu'en jugeant que la clause de mobilité avait été mise en oeœuvre de façon loyale et justifiée, sans répondre à ces chefs pertinents des conclusions d'appel de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que la mise en oeuvre de la clause de mobilité doit être conforme à l'intérêt de l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer que le salarié ne justifiait par aucune pièce que son poste de travail ne devait pas être affecté par le transfert des activités comptables à Paris et qu'il devait être maintenu sur le site de Marseille , sans avoir recherché si la clause de mobilité avait été mise en oeuvre conformément à l'intérêt de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, devenu l'article 1103 du même code ;
3°/ que la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ne peut porter une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit fondamental du salarié à une vie personnelle et familiale ; qu'en disant fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement faisant suite au refus d'une mutation à plus de 700 kilomètres de son domicile en application d'une clause de mobilité couvrant le territoire national, aux seuls motifs que le salarié ne justifierait pas de l'emploi de son épouse en contrat à durée indéterminée, sans rechercher si du fait de l'éloignement du lieu de travail de son domicile et compte tenu de l'âge de ses enfants à l'époque des faits, soit 8 ans et 4 ans, l'employeur n'avait pas porté une atteinte disproportionnée au droit à une vie personnelle et familiale normale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8, alinéa 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 33 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, du préambule, partie I, n° 16 et de l'article 16 de la Charte sociale européenne et des articles L. 1121-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
4°/ qu'en affirmant que la société avait respecté un délai raisonnable pour mettre en oeœuvre la clause de mobilité, motifs pris de ce que le courrier du 6 mai 2011 avait indiqué que la prise de poste s'effectuerait le 20 juin 2011, quand le déménagement de Marseille à Paris ne pouvait être effectué dans un délai aussi restreint, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable, devenu l'article 1103 du même code ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le changement de lieu de travail, décidé dans l'intérêt légitime de l'entreprise, était intervenu de façon loyale en application de la clause prévue par le contrat de travail et que le salarié qui avait disposé d'un délai de prévenance raisonnable, ne justifiait pas que l'affectation refusée aurait porté une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale, la cour d'appel qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X... .
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté M. X... de ses demandes tendant à voir condamner la société Certicall au paiement de la somme de 45.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à voir constater l'illicéité la clause de mobilité stipulée au contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE le transfert à Paris de la majeure partie des tâches confiées au salarié, effectif à compter de mai et juin 2010, et les réclamations réitérées de M. X... quant à la fourniture de travail à compter de cette date jusqu'au mois de mai 2011 date à laquelle la société Certicall a mis en oeuvre la clause de mobilité, établissent que l'employeur a en effet manqué à son obligation contractuelle de fournir du travail au salarié pendant plusieurs mois ; que sur la clause de mobilité, Omar X... conclut au caractère illicite de la clause de mobilité contenue dans son contrat de travail, celle-ci ne répondant pas selon lui aux exigences de précision et de circonscriptions géographiques posées par le droit positif ; que l'article 4 de l'avenant au contrat de travail du 29 octobre 2007 contient une clause de mobilité libellée de la manière suivante : « Le lieu de travail est fixé à l'adresse suivante immeuble du Grand large, [...] . Toutefois il est expressément convenu et accepté que ce lieu de travail pourra être modifié et transféré en tout autre lieu sur le territoire national. Le collaborateur reconnaît expressément qu'il est soumis à une mobilité géographique et/ou fonctionnelle selon les dispositions de la convention collective » ; que pour être valable, une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ; qu'il est à bon droit soutenu par la société Certicall que la clause de mobilité géographique opposable au salarié est en l'espèce licite, répondant aux conditions précitées ; qu'il n'est pas rapporté la preuve contraire par un courrier de l'inspecteur du travail adressé à l'employeur le 18 juillet 2011, cette missive n'ayant pour objet que de rappeler à ce dernier d'une manière générale les conditions de validité des clauses de mobilité, et d'inciter l'employeur à examiner le contenu des clauses de mobilité figurant sur les contrats de travail des employés de l'entreprise Free à Marseille au regard de ces règles ; qu'il ne saurait être prononcé la nullité de la clause de mobilité ;
ALORS QU'une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et qu'elle ne peut conférer à l'employeur le pouvoir d'en étendre unilatéralement la portée ; qu'en jugeant licite la clause de mobilité stipulée au contrat de travail de M. X..., qui visait l'ensemble du territoire national, et que le licenciement du salarié, fondé sur son refus de mutation, était justifié par une cause réelle et sérieuse, quand la clause de mobilité était nulle en raison de l'absence de définition précise de sa zone géographique d'application, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1221-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail et l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable (devenu 1103 du code civil).
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté M. X... de ses demandes tendant à voir condamner la société Certicall au paiement de la somme de 45.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à voir constater la mise en oeuvre déloyale de la clause de mobilité par la société Certicall ;
AUX MOTIFS QUE la mise en oeuvre d'une clause de mobilité prévue au contrat de travail correspond à un simple changement des conditions de travail, et non à une modification du contrat de travail qui nécessiterait l'accord du salarié ; que la bonne foi contractuelle est présumée, de sorte qu'il n'appartient pas au juge de rechercher si la décision de l'employeur de modifier les conditions de travail d'un salarié est conforme à l'intérêt de l'entreprise ; qu'il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle ; qu'en l'espèce M. X... soutient que l'employeur a mis en oeuvre la clause de mobilité de manière injustifiée par les intérêts de l'entreprise et déloyale en ce qu'elle avait pour but sous-jacent le départ de l'entreprise de M. X... ; qu'une telle preuve n'est pas rapportée par les pièces produites aux débats ; que la cour constate en effet que : - l'affirmation du salarié selon laquelle l'employeur aurait cherché à le faire démissionner ne repose sur aucune pièce, alors la société Certicall apparaît avoir confirmé au contraire lors de l'entretien du 22 juin 2011, que « la place du salarié dans le service financier était à leur côté à Paris (propos rapportés par M. Z... délégué du personnel dans un compte rendu); notamment, une telle affirmation ne saurait être démontrée par la production d'un article de presse sur la politique des ressources humaines chez Free daté du 19 mai 2016 ; - que Omar X... ne justifie par aucune pièce ses allégations selon lesquelles son poste de travail ne devait pas être affecté par le transfert des activités comptables à Paris, et qu'il devait être maintenu sur le site de Marseille aux conditions de travail contractuellement fixées ; - que bien au contraire, il est constant que le salarié était informé depuis juin 2010 que la majeure partie des activités dont il avait la charge était transférée à Paris ; - que l'existence de la clause de mobilité dans son contrat de travail à laquelle il était tenu, n'était pas ignorée de Omar X... ; que le mail du 1er juillet 2010 rendant compte de l'entretien du 30 juin 2010 précise en effet : « Il est conscient que si l'entreprise le souhaite, elle peut faire jouer la clause de mobilité de son contrat de travail et donc tout à perdre. Il est ouvert à toute proposition. Egalement il dit attendre le retour de RF sur des éventuelles opportunités de pose sur site. Je lui réponds qu'il n'y en aura pas et qu'il est temps de réfléchir à un projet de formation pour rendre son employabilité dans la région optimale. Omar dispose à de jour d'un BTS de comptabilité et me répond qu'il souhaite ciller vers un DECF pour pouvoir travailler au sein d'un cabinet d'expertise comptable. Au vu de son expérience professionnelle, je lui parle de la possibilité d'une VAE. Il ne connaît pas et va se renseigner
Omar s'est engagé sur un premier retour vers la RH avant le 9 août .. » ; - que conscient des conséquences de celle-ci, il a dès le mois de juin 2010 exposé à son employeur qu'il refuserait cette mutation, arguant d'une situation familiale ne le permettant pas ; - que Omar X... ne produit aux débats aucun élément établissant que cette mutation portait une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle et familiale, le salarié ne justifiant notamment pas de l'emploi de son épouse en contrat à durée indéterminée ainsi qu'il en fait état ; - que la société CERTICALL n'apparaît pas avoir pris de quelconques engagements de renoncer à la mise en oeuvre de cette clause, n'ayant tout au plus qu'inciter son salarié à réfléchir à un projet de formation ; - que le salarié ayant lui-même déploré le fait que son poste de travail se trouvait vidé de sa substance, ne peut prétendre injustifiée la mise en oeuvre de la clause de mobilité, quand bien même celle-ci aurait été retardée de quelques mois, pour permettre au salarié d'étudier un projet de formation ; que s'il n'est pas contesté que l'employeur a mis en oeuvre cette clause au retour d'un congé maladie du salarié ( absent du 21 février 2011 au 1er mai 2011) , ce seul élément ne saurait caractériser un comportement déloyal de l'employeur, ce dernier rappelant à bon droit que M. X... avait connaissance depuis juin 2010 du transfert de la majeure partie de ses activités à Paris ; que la société Certicall objecte à bon droit avoir respecté un délai raisonnable pour mettre en oeuvre la clause de mobilité, le courrier du 6 mai 2011 indiquant que la prise de poste s'effectuera le 20 juin 2011 ; que la clause de mobilité ayant été mise en oeuvre de façon loyale et justifiée, Omar X... ne peut donc valablement soutenir que l'employeur était tenu envers lui d'une recherche de reclassement ; que le refus du salarié d'accepter un changement de ses conditions de travail constitue une faute contractuelle susceptible de justifier la mesure de licenciement prise à son encontre ; qu'en conséquence la cour infirme le jugement ayant déclaré le licenciement de Omar X... sans cause réelle et sérieuse et débouté le salarié de ces prétentions de ce chef ;
1°) ALORS QUE la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ne doit pas être déloyale ; que dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 13 et 14), M. X... faisait valoir que le nouveau lieu de travail à Paris, imposé par son employeur, était très loin de son domicile situé à Marseille et qu'il avait manifesté le souhait de pouvoir continuer à travailler à Marseille mais que la société Certicall, malgré sa taille et ses implantations, n'avait pas procédé à une recherche de reclassement sur un poste équivalent n'impliquant pas un tel bouleversement de ses conditions de vie ; qu'en jugeant que la clause de mobilité avait été mise en oeuvre de façon loyale et justifiée, sans répondre à ces chefs pertinents des conclusions d'appel de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la mise en oeuvre de la clause de mobilité doit être conforme à l'intérêt de l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer que M. X... ne justifiait par aucune pièce que son poste de travail ne devait pas être affecté par le transfert des activités comptables à Paris et qu'il devait être maintenu sur le site de Marseille , sans avoir recherché si la clause de mobilité avait été mise en oeuvre conformément à l'intérêt de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, devenu l'article 1103 du même code ;
3°) ALORS QUE la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ne peut porter une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit fondamental du salarié à une vie personnelle et familiale ; qu'en disant fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement de M. X... faisant suite au refus d'une mutation à plus de 700 kilomètres de son domicile en application d'une clause de mobilité couvrant le territoire national, aux seuls motifs que le salarié ne justifierait pas de l'emploi de son épouse en contrat à durée indéterminée, sans rechercher si du fait de l'éloignement du lieu de travail de son domicile et compte tenu de l'âge de ses enfants à l'époque des faits, soit 8 ans et 4 ans, l'employeur n'avait pas porté une atteinte disproportionnée au droit à une vie personnelle et familiale normale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8, alinéa 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 33 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, du préambule, partie I, n°16 et de l'article 16 de la Charte sociale européenne et des articles L. 1121-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
4°) ALORS QU'en affirmant que la société Certicall avait respecté un délai raisonnable pour mettre en oeuvre la clause de mobilité, motifs pris de ce que le courrier du 6 mai 2011 avait indiqué que la prise de poste s'effectuerait le 20 juin 2011, quand le déménagement de M. X... de Marseille à Paris ne pouvait être effectué dans un délai aussi restreint, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable, devenu l'article 1103 du même code.