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20/09/2018 | FRANCE | N°17-13629

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2018, 17-13629


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée le 10 mars 2004 en qualité d'assistante de gestion par l'association Minibus services (l'association), a été licenciée pour faute grave le 13 juillet 2012 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;


Attendu que pour rejeter la demande, à peine d'astreinte, de régularisation de la situation de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée le 10 mars 2004 en qualité d'assistante de gestion par l'association Minibus services (l'association), a été licenciée pour faute grave le 13 juillet 2012 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande, à peine d'astreinte, de régularisation de la situation de l'association vis-à-vis de la mutuelle, l'arrêt retient que la salariée ne produit aucune pièce justifiant d'une retenue injuste au titre de ses cotisations mutuelle ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'intéressée produisait le bulletin de salaire du mois de juillet 2012 mentionnant un prélèvement de 498,33 euros au titre de la prise en charge mutuelle, la cour d'appel, qui n'a pas examiné ce document, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme Y... de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à l'association Minibus services de régulariser sa situation au regard de la mutuelle, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, l'arrêt rendu le 26 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne l'association Minibus services aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Minibus services à payer à la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la salariée de sa demande tendant à voir l'association Minibus condamnée à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

Sur le harcèlement moral

Selon les dispositions de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droit et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L 1152-l à L 1152-3 et L 1153-l à L 1153-4 du code du travail, le salarié établit la matérialité des faits qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce Madame Z... se contente de prétendre que l'employeur a depuis qu'elle a bénéficié d'une formation modifié son comportement à son encontre, qu'il n'a pas répondu à sa lettre du 23 janvier 2012 dans laquelle elle fait état de harcèlement, que ces éléments sont justifiés par les attestations versées aux débats qui établissent « la réalité de la situation » et que le comportement de l'employeur a eu un impact médical sans invoquer toutefois aucun fait précis à l'appui de ses allégations de harcèlement moral.

Elle produit aux débats :

- une attestation émanant de Mme Catherine B..., Médecin du travail en date du 19 mars 2012, dont il résulte que la salariée lui a fait part de « problèmes liés à ses conditions de travail qui auraient débuté avec une période de formation et qui se seraient dégradés progressivement jusqu'à être qualifiés de -harcèlement- par la salariée pendant les derniers mois », sans faire état de constatations personnelles et d'un quelconque lien de causalité entre les dires de la salariée et son état d'inaptitude à tout poste,

- un courrier qu'elle a elle-même adressé à son employeur le 23 janvier 2012 suite à la note qu'il lui avait adressée concernant l'utilisation de la carte bleue et le retrait anormal en espèces de la somme de 150 euros pour procéder à une avance sur le salaire d'un chauffeur dans lequel elle nie avoir volé quoique ce soit « alors qu'on lui a remis le code secret de la carte bleue de l'association », reconnais « avoir retiré la somme de 150 euros pour la caisse de l'association car on a l'habitude d'avoir de l'argent liquide pour régler les taxes de la poste concernant « transpass » et aussi pour les courses et les frais de repas » , « avoir pris 75 euros de frais de repas de ma formation et l'avoir remis à Salah C... salarié de l'association, comme avance sur son salaire car il traverse une période assez difficile en ce moment ...

- des attestations établies par d'anciens salariés M. Salah C..., D..., E..., K..., L..., M... épouse F..., G..., N... qui attestent qu'elle était jointe en priorité, qu'elle gérait par téléphone le bon fonctionnement des dépannages, que les relations professionnelles avec elle étaient parfaites qui font référence à du « harcèlement » sans invoquer toutefois aucun fait précis : M. E... atteste ainsi que « Mme Z... a subi durant les deux années de sa formation de harcèlement moral et tous ses collègues étaient au courant », Mme G... parle quant à elle seulement « du stress qui régnait au bureau et qu'elle supportait malgré elle » ;

Il convient de constater par ailleurs que :

- ces attestations sont utilement combattues par les attestations communiquées par l'employeur et notamment celle de M. D... qui revient sur sa première déclaration « Je regrette d'avoir mis ma signature sur l'attestation précédente car ce n'est pas mon écriture. je voyais rarement Mme Z.... Je n'étais pas au courant »
et celle de Mme F... secrétaire de l'association qui déclare: « n'avoir jamais eu de problème de relation avec H... Elizabeth responsable de l'association, n'avoir jamais vu ni entendu parler de problèmes de relations ni harcèlement entre Mme H... et Mme Z... ».

Mme Z... n'apporte aucun élément justificatif du caractère prétendument « prémédité » du licenciement ni du fait que « l'employeur aurait voulu la licencier pour pouvoir octroyer un CDD à une autre salariée ».

Elle n'est pas fondée par ailleurs à prétendre que le licenciement aurait été engagé pendant la période de suspension de son contrat de travail dès lors qu'il résulte des pièces versées aux débats que la seule visite médicale ayant conclu à un avis d'inaptitude définitif avec mention « danger immédiat » est en date du 11 juillet 2012 soit 13 jours postérieurs à l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable avant mesure de licenciement du 28 juin 2012 ;

Il en résulte que Mme Z... n'établit pas l'existence de faits précis et concordants, matériellement établis et répétitifs, lesquels pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence de harcèlement moral.

Elle sera par conséquent déboutée de la demande présentée à ce titre par voie de confirmation de la décision entreprise,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE

Attendu que, des éléments produits à la barre, le Conseil n'a pas été convaincu de l'existence de comportements ou attitudes de l'association Minibus susceptibles d'être en infraction avec les articles L 1 152-1 à 4 et L 1154-l du code du travail.

Qu'en l'espèce, même si un malaise a été dénoncé dans le courrier que Mme Z... a adressé à l'association Minibus, le caractère répétitif n'est pas établi.

En conséquence, le conseil de céans déboute Mme Z... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice lié au harcèlement,

ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en vertu des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, du code du travail, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en énonçant qu'il résultait des éléments produits aux débats par Mme Z... que celle-ci n'établissait pas l'existence de faits précis et concordants, matériellement établis et répétitifs, lesquels pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence de harcèlement moral, sans examiner ni même faire référence aux documents médicaux produits par la salariée, à savoir l'attestation de la Médecine du Travail ayant émis un avis d'inaptitude définitive au poste de travail le 13 mars 2012 en raison de son état de santé dégradé avec un état de stress, troubles de l'humeur de la TA et du sommeil ainsi qu'une déstabilisation de son diabète, la lettre adressée par le Docteur I... au médecin du travail en date du 9 mars 2012 indiquant qu'il lui adressait Mme Z... laquelle se plaignait d'un stress au travail et l'attestation établie par le médecin du travail, le Docteur Catherine B... du 3 avril 2012 selon laquelle il avait laissé des messages à la directrice au sujet de Mme Z..., autant de documents médicaux qui étaient de nature à établir l'existence de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles précités.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la salariée de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à son ancien employeur de régulariser la situation de l'association Minibus services vis-à-vis de la mutuelle sur la base du solde de tout compte et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à défaut à ce que l'employeur soit condamné à lui verser 1 500 euros de ce chef,

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Z... ne produit aucune pièce justifiant d'une retenue injuste au titre de ses cotisations mutuelle. Elle n'est donc pas fondée à remettre en cause le jugement déféré de ce chef,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE

Attendu qu'il ressort du reçu pour solde de tout compte, un paiement du Brut pour Net et que la retenue pour cotisation de Mutuelle n'est pas avérée.

En conséquence, le conseil de céans déboute Mme Z... de ce chef de demande,

ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, en considérant, pour débouter Mme Z... de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à son ancien employeur de régulariser la situation de l'association Minibus services vis-à-vis de la mutuelle sur la base du solde de tout compte et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à défaut à ce que l'employeur soit condamné à lui verser 1 500 euros de ce chef, que Mme Z... ne produisait aucune pièce justifiant d'une retenue injuste au titre de ses cotisations mutuelle, cependant qu'elle produisait la lettre par laquelle elle avait confirmé à son employeur son accord pour continuer à bénéficier de la complémentaire santé et prévoyance pour une période plafonnée à 9 mois, le bulletin de paie du mois de juillet 2012 justifiant de la retenue sur son solde de tout compte d'une cotisation pour prise en charge par la mutuelle complémentaire à hauteur de 9 mois, le courrier de la mutuelle indiquant qu'elle n'y avait été affiliée que jusqu'au 13 juillet 2012, date de son licenciement, la lettre la relance qu'elle avait adressée à l'association Minibus services afin que la portabilité de cette mutuelle soit mise en place et le reçu pour solde de tout compte indiquant la portabilité des droits et la restitution du solde de cotisations trop perçues si Mme Z... retrouvait un emploi dans les 9 mois suivant son licenciement, la cour d'appel a violé les articles 9 et 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-13629
Date de la décision : 20/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 26 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 sep. 2018, pourvoi n°17-13629


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.13629
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