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20/09/2018 | FRANCE | N°17-10901

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2018, 17-10901


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 octobre 2016), que M. et Mme Y... sont propriétaires depuis 1998 d'un appartement dans l'immeuble en copropriété situé [...] ; qu'un conflit cristallisé sur les modalités de distribution de leur courrier les oppose depuis 2002 à Mme E..., engagée par le syndicat des copropriétaires au mois de juillet 1995 en qualité de gardienne de l'immeuble ; que le 19 août 2013, la société Progestra, syndic agissant au nom du syndicat des copropriét

aires, a fait assigner M. et Mme Y... devant le tribunal de grande instance ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 octobre 2016), que M. et Mme Y... sont propriétaires depuis 1998 d'un appartement dans l'immeuble en copropriété situé [...] ; qu'un conflit cristallisé sur les modalités de distribution de leur courrier les oppose depuis 2002 à Mme E..., engagée par le syndicat des copropriétaires au mois de juillet 1995 en qualité de gardienne de l'immeuble ; que le 19 août 2013, la société Progestra, syndic agissant au nom du syndicat des copropriétaires, a fait assigner M. et Mme Y... devant le tribunal de grande instance pour qu'ils soient condamnés à cesser des faits de harcèlement moral à l'encontre de la gardienne et à indemniser le préjudice causé aux autres copropriétaires par ces agissements ;

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de dire recevables les demandes du syndicat des copropriétaires, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'action du syndicat des copropriétaires irrecevable, sans réfuter les motifs par lesquels le premier juge a relevé qu'il n'était pas démontré en quoi les agissements reprochés aux époux Y... et collectivement affectés par les agissements allégués, le préjudice consistant au contraire en un préjudice personnel à Mme E..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en déclarant recevables les demandes formées devant elle par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de M. et Mme Y... sur le fondement des dispositions de l'article 1152-1 du code du travail, quand ce texte ouvre une action en responsabilité réservée à la victime des faits allégués de harcèlement moral qui a seule qualité à agir sur le fondement de ces dispositions légales, la cour d'appel a violé les articles 31 du code de procédure civile et L. 1152-1 du code du travail ;

3°/ subsidiairement que l'employeur répond, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, des agissements des seuls tiers ayant une autorité de droit ou de fait sur la victime désignée ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer recevables les demandes du syndicat des copropriétaires à l'encontre de M. et Mme Y..., que ces derniers exerçaient une autorité de fait sur Mme A... E... en leur qualité de copropriétaires membres du syndicat employeur, comme le démontreraient les directives écrites et orales qu'ils lui adressent relativement aux modalités de distribution de leur courrier, sans constater que M. et Mme Y... avaient exercé une telle autorité de fait pour le compte de l'employeur, la cour d'appel qui a statué par un motif inopérant, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1152-1 du code du travail et 31 du code de procédure civile ;

4°/ enfin et en tout état de cause, que l'employeur peut être exonéré de la responsabilité encourue sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail en rapportant la preuve qu'il a pris toutes les mesures à sa disposition pour remédier à la situation de harcèlement moral dénoncée ; que dès lors, en se bornant à retenir, pour écarter la fin de non recevoir soulevée devant elle par M. et Mme Y... tirée du défaut d'intérêt certain et actuel du syndicat à agir et déclarer recevables les demandes du syndicat des copropriétaires tendant à voir condamner M. et Mme Y... pour harcèlement moral sur la gardienne de l'immeuble, qu'en sa qualité d'employeur, le syndicat était tenu à une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses employés, la cour d'appel qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152-1 du code du travail, ensemble l'article 31 du code de procédure ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a fait ressortir que le syndicat des copropriétaires alléguait l'existence d'un trouble collectif causé par les agissements de M. et Mme Y... aux autres copropriétaires et qu'il agissait au titre de son obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de sa salariée en matière de harcèlement moral ;

Attendu, ensuite, qu'elle a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve, que M. et Mme Y... adressaient à la salariée de nombreuses directives écrites et orales relatives aux modalités de distribution du courrier, en sorte qu'ils exerçaient sur elle, au sein de la copropriété, une autorité de fait ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a caractérisé l'existence de l'intérêt à agir du syndicat des copropriétaires ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, est mal fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les autres moyens ci-après annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M.et Mme Y... et les condamne à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y... .

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit recevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] tendant à voir condamner M. et Mme Y... pour harcèlement moral sur la gardienne de l'immeuble, Mme A... E...,

Aux motifs, sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires, qu'au soutien de son appel, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] fait valoir qu'en sa qualité d'employeur de Mme A... E..., il est tenu d'une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de celle ci, notamment en matière de harcèlement moral ; qu'à cet égard, il doit répondre des agissements des personnes qui, de droit ou de fait, exercent une autorité sur ses salariés ; s'agissant de la recevabilité de sa demande de dommages intérêts pour préjudice moral, il ajoute que le conflit opposant M. et Mme Y... à Mme A... E... implique les copropriétaires collectivement, détériore le climat dans l'immeuble et déséquilibre la vie du syndicat ; que M. et Mme Y... répliquent que, dans le cadre des articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires ne peut agir que pour exercer des actions relatives à la conservation et à l'administration de l'immeuble, que seule la prétendue victime du harcèlement moral serait recevable à agir, qu'ils n'ont aucune autorité de fait sur la gardienne, que, de plus, le préjudice allégué est incertain et hypothétique ; que toutefois le syndicat des copropriétaires, tenu d'une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses employés, se doit de leur garantir des conditions de travail normales et décentes, de les préserver de toute atteinte à leur intégrité physique et mentale qui pourrait émaner de personnes ayant autorité sur eux : tel est le cas de M. et Mme Y... qui, en leur qualité de copropriétaires membres du syndicat employeur, exercent bien une autorité de fait sur Mme A... E... comme le démontrent les nombreuses directives écrites et orales qu'ils lui adressent relativement aux modalités de distribution du courrier ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit l'action du syndicat des copropriétaires irrecevable;

Alors, d'une part, qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'action du syndicat des copropriétaires irrecevable, sans réfuter les motifs par lesquels le premier juge a relevé qu'il n'était pas démontré en quoi les agissements reprochés aux époux Y... et collectivement affectés par les agissements allégués, le préjudice consistant au contraire en un préjudice personnel à Mme E..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 31 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, qu'en déclarant recevables les demandes formées devant elle par le Syndicat des copropriétaires à l'encontre de M. et Mme Y... sur le fondement des dispositions de l'article 1152-1 du code du travail, quand ce texte ouvre une action en responsabilité réservée à la victime des faits allégués de harcèlement moral qui a seule qualité à agir sur le fondement de ces dispositions légales, la cour d'appel a violé les articles 31 du code de procédure civile et L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, de troisième part et subsidiairement, que l'employeur répond, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, des agissements des seuls tiers ayant une autorité de droit ou de fait sur la victime désignée ; qu'en se bornant à affirmer, pour déclarer recevables les demandes du syndicat des copropriétaires à l'encontre de M. et Mme Y..., que ces derniers exerçaient une autorité de fait sur Mme A... E... en leur qualité de copropriétaires membres du syndicat employeur, comme le démontreraient les directives écrites et orales qu'ils lui adressent relativement aux modalités de distribution de leur courrier, sans constater que M. et Mme Y... avaient exercé une telle autorité de fait pour le compte de l'employeur, la cour d'appel qui a statué par un motif inopérant, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1152-1 du code du travail et 31 du code de procédure civile ;

Alors, enfin et en tout état de cause, que l'employeur peut être exonéré de la responsabilité encourue sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail en rapportant la preuve qu'il a pris toutes les mesures à sa disposition pour remédier à la situation de harcèlement moral dénoncée ; que dès lors, en se bornant à retenir, pour écarter la fin de non recevoir soulevée devant elle par M. et Mme Y... tirée du défaut d'intérêt certain et actuel du syndicat à agir et déclarer recevables les demandes du syndicat des copropriétaires tendant à voir condamner M. et Mme Y... pour harcèlement moral sur la gardienne de l'immeuble, qu'en sa qualité d'employeur, le syndicat était tenu à une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité de ses employés, la cour d'appel qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152-1 du code du travail, ensemble l'article 31 du code de procédure.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fait défense à M. et Mme Y... de poursuivre leurs agissements malicieux ou malveillants envers Mme A... E... à l'avenir, notamment de troubler son repos nocturne, de la dénigrer ou de critiquer son service, de lui donner des instructions orales ou écrites relativement aux modalités de distribution de leur courrier, qui sera placé, comme ceux de tous les autres copropriétaires sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic et d'avoir condamné M. et Mme Y... in solidum à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] la somme de 7.000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

Aux motifs, sur le fond, que selon l'article L. 1152-1 du code du travail, le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'il appert des très nombreuses attestations, pétitions, main courante, dépôts de plaintes, lettres du président du conseil syndical et du syndic, missives adressées par les époux Y... à la gardienne, Mme E..., que M. et Mme Y..., mécontents du service de celle ci à laquelle ils reprochent essentiellement de s'absenter pendant ses heures de permanence à la loge, lui ont demandé de garder leur courrier au lieu de le distribuer et lui ont fait interdiction de le placer sur ou sous le paillasson ou encore de le glisser sous leur porte comme pour les autres copropriétaires, et ce afin, de contrôler sa présence dans la loge aux heures de permanence à l'occasion du retrait de leur courrier'; que les rapports entre Mme F... Y... et Mme A... E... ont dégénéré à tel point qu'un conflit s'est enkysté autour de cette distribution de courrier, toutes tentatives d'apaisement à l'initiative du président du conseil syndical ou du syndic s'étant soldées par des échecs, notamment en ce qui concerne la pose d'une boîte à lettres personnelle pour les époux Y..., laquelle a été rapidement dégradée dans des conditions obscures ; M. et Mme Y... ont fait poser une barre de seuil sous leur porte pour empêcher la gardienne de glisser les lettres sous celle ci et refusent d'ouvrir quant elle sonne chez eux pour leur remettre leur courrier en mains propres ; que ce conflit s'est ensuite déplacé sur les parties communes, Mme F... Y..., qui estimait que les portes d'accès aux chambres de service du rez de chaussée à côté de la loge devaient rester fermées en permanence, ayant fait retirer par un serrurier les bloques portes en place, ce qui a provoqué des nuisances nocturnes pour la gardienne en raison des bruits d'ouverture et de fermeture de ces portes par les locataires de ces chambres, nuisances et troubles préjudiciables au repos de la gardienne ; que si nombre de griefs restent non démontrés ou non imputables avec certitude à Mme Y... (dégradations dans l'immeuble, vol de décorations du sapin de Noël placé dans le hall d'entrée, disparition d'un vélo d'enfant, jets de bouteilles dans les poubelles la nuit pour réveiller Mme A... E..., claquements inopinés de portes), il apparaît, en dépit de leurs dénégations contredites par des témoignages oculaires de copropriétaires (MM. B... et C... G...), que M. et Mme Y... se sont arrogé le droit de modifier les serrures de certaines portes, toujours dans l'intention de nuire à Mme A... E... et qu'ils abusent de leur qualité de copropriétaires pour adresser d'incessantes directives à la gardienne de l'immeuble alors que celle ci est sous la direction du syndic qui est seul habilité à contrôler et à critiquer son service, toutes réclamations ou revendications émanant de copropriétaires devant passer par son intermédiaire ; que les reproches articulés par M. et Mme Y... quant à l'attitude hostile de Mme A... E... envers leurs relations, invités et visiteurs, incidents relatés aux attestations délivrées par ces derniers, sont regrettables mais s'inscrivent dans le climat conflictuel émaillé de mesures de rétorsion ou représailles qui s'est instauré entre Mme Y... et Mme A... E..., dès lors que l'ensemble des copropriétaires, à l'exclusion des seuls époux Y..., se félicite du service de Mme A... E..., en fonctions dans l'immeuble depuis de très nombreuses années à la satisfaction de tous, ainsi qu'en atteste la lettre adressée par le conseil syndical à M. et Mme D. le 17 février 2004 : « Nous constatons une fois de plus que vous vous plaignez de la distribution du courrier par la gardienne, Mme A... E..., alors que le syndic et tous les copropriétaires se félicitent de ses services et de la bonne volonté qu'elle manifeste à tous égards. Les reproches non justifiés que vous lui faites fréquemment ont un effet détestable sur son équilibre et sur ses conditions de travail et s'apparentent à du harcèlement moral. Nous vous demandons en conséquence de mettre un terme à ce comportement conflictuel et d'entretenir des relations normales avec elle comme le font les autres copropriétaires de l'immeuble » ; que le harcèlement dénoncé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] est donc démontré et justifie, en réparation du trouble collectif subi par la copropriété du fait des agissements des époux Y... qui détériorent le climat de l'immeuble et les relations entre copropriétaires par le fait de la zizanie instaurée depuis plusieurs d'années autour de griefs dérisoires et malvenus, de condamner in solidum de ces derniers à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] la somme de 7.000 € de dommages intérêts ; qu'il sera fait défense à M. et Mme Y... de poursuivre leurs agissements malicieux ou malveillants envers Mme A... E... à l'avenir, notamment de troubler son repos nocturne, de la dénigrer ou de critiquer son service, de lui donner des instructions orales ou écrites relativement aux modalités de distribution de leur courrier, lequel sera distribué, comme ceux de tous les autres copropriétaires, sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic (arrêt attaqué, p. 4 à 5 §3 inclus) ;

Alors, d'une part, que les juges du fond ne peuvent se prononcer au seul visa des documents de la cause, sans analyser, même sommairement, sur se fondent ; qu'en se fondant, sans autre précision, sur les nombreuses attestations, pétitions, main courante, dépôts de plaintes, lettres du président du conseil syndical et du syndic, missives adressées par les M. et Mme Y... à la gardienne, pour retenir que les griefs de harcèlement de la gardienne allégués par le syndicat des copropriétaires étaient établis, et en relevant, par voie de simples affirmations, que c'est afin de contrôler sa présence dans la loge aux heures de permanence que M. et Mme Y... lui ont demandé de garder leur courrier au lieu de le distribuer et fait poser une barre de seuil sous leur porte qu'ils refusent d'ouvrir quand elle sonne chez eux pour empêcher la gardienne d'y glisser les lettres, toutes tentatives d'apaisement à l'initiative du président du conseil syndical ou du syndic s'étant soldées par des échecs, quand ces griefs et les documents de preuve versés à leur appui par le syndicat des copropriétaires étaient contestés par M. et Mme Y..., la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que les juges du fond ne peuvent statuer sans examiner tous les éléments doivent examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis ; qu'en relevant, par une simple affirmation, que le déblocage des portes du rez-de-chaussée avait provoqué des nuisances nocturnes et des troubles préjudiciables au repos de la gardienne en raison des bruits d'ouverture et de fermeture de ces portes par les locataires, sans examiner les clichés photographiques versés aux débats par M. et Mme Y... (pièce n° 14 et n° 40) montrant que ces portes qui n'étaient pas situées près de la loge étaient munies d'un "groom" permettant qu'elles se referment sans bruit, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, de troisième part, qu'en relevant que M. et Mme Y... s'étaient arrogé le droit de modifier les serrures de certaines portes, par une simple affirmation dans toujours dans l'intention de nuire à Mme E..., sans examiner le courrier du 7 janvier 2012 et le reçu annexé régulièrement versé aux débats (pièce n° 14) dans lequel M. Y... rappelait au président du conseil syndical qu'il lui avait remis, en son absence, entre les mains de sa fille lui en ayant accusé réception par écrit, les clés de la nouvelle serrure du local à bicyclettes le jour même du changement de sa serrure, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, de quatrième part, que les juges du fond ne peuvent se prononcer par voie de simple affirmation ; que pour retenir à l'encontre de M. et Mme Y... qu'il avaient abusé de leur qualité de copropriétaires, la cour d'appel qui leur a imputé, par une simple affirmation, le fait d'adresser d'incessantes directives à la gardienne, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, de cinquième part, qu'en toute hypothèse, en se bornant à affirmer que M. et Mme Y... adressaient d'incessantes directives à la gardienne, sans s'expliquer, ainsi qu'elle y était invitée, sur les termes courtois et respectueux, reproduits dans leurs conclusions d'appel, dans lesquels étaient rédigées la dizaine de missives adressée à la gardienne par les époux Y... sur une période de dix ans, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, enfin, qu'en se bornant à relever que l'ensemble des copropriétaires se félicitait du service de Mme A... Y..., en fonctions dans l'immeuble depuis de nombreuses années à la satisfaction de tous, pour affirmer que l'attitude hostile de Mme A... E... envers leurs relations, invités et visiteurs, incidents relatés aux attestations délivrées par M. et Mme Y... sont regrettables mais s'inscrivent dans le climat conflictuel émaillé de mesures de rétorsion ou représailles qui s'est instauré entre Mme Y... et Mme A... E..., sans rechercher si les faits d'hostilité imputés à Mme E... dont elle admet la réalité, n'établissaient pas l'existence d'un conflit individuel de nature à exclure l'imputation aux époux Y... d'un harcèlement moral, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fait défense à M. et Mme Y... de poursuivre leurs agissements malicieux ou malveillants envers Mme A... E... à l'avenir, notamment de troubler son repos nocturne, de la dénigrer ou de critiquer son service, de lui donner des instructions orales ou écrites relativement aux modalités de distribution de leur courrier, qui sera placé, comme ceux de tous les autres copropriétaires sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic ;

Aux motifs que le harcèlement dénoncé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] est donc démontré (...); qu'il sera fait défense à M. et Mme Y... de poursuivre leurs agissements malicieux ou malveillants envers Mme A... E... à l'avenir, notamment de troubler son repos nocturne, de la dénigrer ou de critiquer son service, de lui donner des instructions orales ou écrites relativement aux modalités de distribution de leur courrier, lequel sera distribué, comme ceux de tous les autres copropriétaires, sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic (arrêt attaqué, p. 5 § 2 et 3) ;

Alors, d'une part, qu'en statuant ainsi, sans réfuter les motifs par lesquels le jugement entrepris, dont M. et Mme Y... demandaient confirmation, avait retenu, pour écarter la demande du syndicat tendant à voir condamner sous astreinte M. et Mme Y... à cesser ces envois, que les envois de courriers enjoignant à Mme E... de garder leurs courriers ou celui de tiers ne saurait prospérer en ce que le simple fait pour les époux Y... de formuler une telle requête n'est pas en soi une violation du règlement de copropriété, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Alors, d'autre part, que le respect du règlement de copropriété qui fixe les règles relatives à l'administration des parties communes et détermine les conditions de jouissance des parties tant privatives que communes, s'impose au syndic comme au syndicat de copropriété ; qu'en retenant, par une simple affirmation, que le courrier destiné à M. et Mme Y... sera distribué, comme ceux de tous les autres copropriétaires, sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic, quand il lui appartenait d'interpréter, en raison de son imprécision sur le cas d'absence du copropriétaire, la clause du règlement de copropriété stipulant que le concierge devait remettre le courrier à leur destinataire « dans leur appartement ou logement », en recherchant l'intention des auteurs du règlement au regard des éléments invoqués par M. et Mme Y... tirés de la mission de "courrier porté" dont la gardienne était chargée par son contrat de travail et des usages de la profession exposés dans un article du journal "L'Echo des concierges" selon lesquels, dans l'accomplissement de cette mission, en cas d'absence du destinataire du courrier comme en cas de refus d'ouvrir la porte, le gardien ne doit pas glisser le courrier sous la porte mais qu'il doit le redescendre à la loge, la cour d'appel qui a omis de procéder à la recherche qui lui était demandée, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, de troisième part qu'à supposer que la cour d'appel ait entendu relever que cette modalité de distribution du courrier sur le paillasson était acceptée par tous les autres copropriétaires, quand un tel accord était dépourvu d'effet obligatoire, à défaut de décision prise par l'assemblée générale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Alors, enfin, et en tout état de cause, qu'en retenant que le courrier destiné à M. et Mme Y... sera distribué, comme ceux de tous les autres copropriétaires, sur leur paillasson, sauf instructions contraires du syndic, quand cette modalité de distribution du courrier ne donne plus à la gardienne ne donne plus à la gardienne d'immeuble la maîtrise du secret des correspondances que lui attribue sa mission dès lors que le courrier laissé sur le paillasson n'est plus sous son contrôle, la cour d'appel qui a méconnu le principe du secret des correspondances, a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. et Mme Y... à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] la somme de 7.000 € de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral,

Aux motifs que le harcèlement dénoncé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] est donc démontré et justifie, en réparation du trouble collectif subi par la copropriété du fait des agissements des époux Y... qui détériorent le climat de l'immeuble et les relations entre copropriétaires par le fait de la zizanie instaurée depuis plusieurs d'années autour de griefs dérisoires et malvenus, de condamner in solidum de ces derniers à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] la somme de 7.000 € de dommages intérêts (arrêt attaqué, p. 5 § 2) ;

Alors, d'une part, qu'en statuant ainsi, par des motifs qui font apparaître que le trouble collectif subi par la copropriété dont elle ordonne réparation du fait de l'instauration d'une zizanie qui détériore le climat de l'immeuble et les relations entre copropriétaires, ne présente pas de lien de causalité direct avec les agissements de harcèlement de la gardienne qu'elle impute à M. et Mme Y..., la cour d'appel la cour d'appel a violé l'article 1152-1 du code du travail ;

Alors, d'autre part, qu'en toute hypothèse, en s'abstenant de préciser sur quel fondement juridique elle imputait à M. et Mme Y... l'instauration fautive d'une zizanie détériorant le climat de l'immeuble et les relations des copropriétaires, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

Alors, enfin, qu'en tout état de cause, en condamnant M. et Mme Y... à réparer le préjudice moral invoqué par le syndicat des copropriétaires, sans préciser sur quels éléments de preuve elle se fondait pour affirmer que "la copropriété" avait subi un trouble collectif du fait de la zizanie instaurée et de la dégradation des relations entre copropriétaires du fait des agissements imputés aux époux Y... à l'égard de la gardienne de l'immeuble, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. et Mme Y... de l'ensemble de leurs demandes ;

Aux motifs propres, sur l'appel incident de M. et Mme Y..., que comme il a été dit, M. et Mme Y..., qui ne sont pas les employeurs de Mme A... E..., ne sont pas habilités à lui donner quelque directive que ce soit ; de ce fait, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit irrecevable leur demande tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [...] à donner instructions à Mme A... E... de conserver à la loge leur courrier s'ils en expriment la demande et dire qu'ils devront retirer leur courrier pendant les heures d'ouverture de la loge, prétention qui ne repose sur aucun fondement légal ou contractuel ;

Et aux motifs éventuellement adoptés que la demande des époux Y... visant à la condamnation du syndicat des copropriétaires à donner instruction à Mme E... de conserver leur courrier à la loge ne saurait non plus aboutir ; qu'en effet, s'agissant de la distribution du courrier, le règlement de copropriété prévoit que les tâches du concierge consistent notamment à "monter le matin et le soir le courrier et les menus objets qui lui seraient laissés par les copropriétaires et les remettre dans leur appartement ou logement" ; que les époux Y... ne peuvent donc exiger que par principe et systématiquement leur courrier soit conservé à la loge de la concierge ; que leur demande formée de ce chef sera donc rejetée (jugement entrepris, p. 4§3-4) ;

Alors, d'une part, qu'en affirmant, pour le confirmer, que le jugement entrepris a dit irrecevable la demande de M. et Mme Y... tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires à donner instructions à Mme E... sur les modalités de distribution de leur courrier, quand le jugement entrepris (p. 5 in limine et p. 4 §3)les avait débouté de leur demande au fond, la cour d'appel qui a dénaturé le jugement entrepris, a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Alors, d'autre part, que pour la même raison, la cour d'appel qui a confirmé, dans le dispositif de sa décision, le jugement entrepris du chef ayant débouté M. et Mme Y... de cette demande, tout en retenant dans ses motifs que cette demande était irrecevable, a affecté sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, de troisième part, qu'en toute hypothèse, en se bornant à relever, pour "écarter" leur demande tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires, en sa qualité d'employeur représenté par le syndic, à donner des instructions à la gardienne d'immeuble relativement à la distribution de leur courrier, que M. et Mme Y... en leur qualité de copropriétaires, n'étaient pas habilités à donner des directives à la gardienne, n'étant pas son employeur, la cour d'appel qui s'est prononcée par un motif inopérant, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 31 du décret du 17 mars 1967.

Alors, de quatrième part, qu'en se bornant à affirmer que la prétention de M. et Mme Y... tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à donner instructions à la gardienne de conserver à la loge leur courrier s'ils en expriment la demande et dire qu'ils devront retirer leur courrier pendant les heures d'ouverture de la loge, ne reposait sur aucun fondement contractuel, quand leur demande se fondait sur le règlement de copropriété qu'il lui appartenait d'interpréter la clause du règlement de copropriété stipulant que le concierge devait remettre le courrier à leur destinataire « dans leur appartement ou logement », en raison de son imprécision sur le cas d'absence du copropriétaire, au regard des éléments invoqués devant elle par M. et Mme Y... de nature à établir que le courrier devait être conservé à la loge, la cour d'appel qui a omis de procéder à la recherche qui lui était demandée, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Alors, de cinquième part, qu'en toute hypothèse, en se bornant à relever, par des motifs éventuellement adoptés du jugement entrepris qu'elle "confirme", que le règlement de copropriété prévoit que le concierge doit monter le courrier le matin et le soir ainsi que les menus objets qui lui seraient laissés par les copropriétaires et les remettre dans leur appartement ou logement, la cour d'appel qui n'a toujours pas recherché l'intention des rédacteurs du règlement de copropriété quant à la modalité de distribution du courrier en cas d'absence de son destinataire, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 8 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Alors enfin qu'en se bornant à affirmer que la prétention de M et Mme Y... ne reposait sur aucun fondement légal, sans s'expliquer, ainsi qu'elle y était invitée par les exposants (Conclusions d'appel incident, p. 12, in fine), sur la question de savoir si la modalité de distribution consistant à laisser le courrier sur le paillasson de ses destinataires, en cas d'absence, ne portait pas atteinte respect du secret des correspondances dont le concierge a la charge dans le cadre de sa mission de distribution du courrier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-10901
Date de la décision : 20/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 sep. 2018, pourvoi n°17-10901


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10901
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