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20/09/2018 | FRANCE | N°17-10555

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2018, 17-10555


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance d'Angers, 6 janvier 2017), que par une résolution du 8 décembre 2016, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du Centre hospitalier universitaire d'Angers (CHU) a décidé de recourir à une mesure d'expertise afin d'examiner la réorganisation du service de chirurgie viscérale comportant notamment une redistribution des lits ; que le CHU et la présidente du CHSCT ont saisi le président du tribunal de g

rande instance d'Angers d'une demande d'annulation de cette délibérat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance d'Angers, 6 janvier 2017), que par une résolution du 8 décembre 2016, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du Centre hospitalier universitaire d'Angers (CHU) a décidé de recourir à une mesure d'expertise afin d'examiner la réorganisation du service de chirurgie viscérale comportant notamment une redistribution des lits ; que le CHU et la présidente du CHSCT ont saisi le président du tribunal de grande instance d'Angers d'une demande d'annulation de cette délibération ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le CHU d'Angers et la présidente de son CHSCT font grief à l'ordonnance de les débouter de leurs demandes d'annuler les deux résolutions du CHSCT de ce CHU du 8 décembre 2016 décidant, d'une part, de recourir à une expertise et, d'autre part, désignant le cabinet Technologia en qualité d'expert, alors selon le moyen :

1°/ que ne constitue pas un projet important justifiant la désignation d'un expert, le projet d'évolution d'un service conforme aux orientations du projet d'établissement précédemment adopté, susceptible d'améliorer les conditions de travail des personnels, n'impliquant aucune suppression d'emploi, aucun changement de métier ou d'attribution des agents du service, aucune modification du contenu de leurs activités ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions du CHU et de la présidente du CHSCT, si la réorganisation envisagée du service de chirurgie viscérale n'était pas la simple mise en oeuvre du volet social du projet d'établissement adopté par les instances dirigeantes de l'établissement en décembre 2013, sans apport nouveau et sans changement significatif dans le contenu des attributions des salariés, la juridiction de référé du tribunal de grande instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 4612-8-1 et L. 4614-12 du code du travail ;

2°/ que, le CHU et la présidente du CHSCT produisaient des mémoires et procès-verbaux de réunions des comités techniques et comités médicaux d'établissement faisant état des charges prévues pour chaque catégorie de personnels ; que le président du tribunal de grande instance ne pouvait affirmer que le CHU ne justifiait pas d'un chiffrage des charges conforme aux prévisions de l'article L. 4121-3 du code du travail sans procéder à l'examen de ces mémoires et procès-verbaux ; qu'en statuant comme elle l'a fait à défaut d'un tel examen, la juridiction de référé du tribunal de grande instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 4121-3 du code du travail, ensemble des articles L. 4612-8-1 et L. 4614-12 du même code ;

Mais attendu qu'ayant relevé, abstraction faite du motif erroné, mais surabondant, visé par la seconde branche du moyen, que le projet de réorganisation du service de chirurgie viscérale, qui affecte l'ensemble du service de par la création de l'hôpital de semaine et le redéploiement des agents toutes catégories confondues, est susceptible d'avoir une incidence, tant sur la charge de travail des agents et infirmières qui travailleront en continu dans les trois secteurs dédiés aux pathologies lourdes notamment en période « d'hôpital sous tension » et d'occupation des lits de réserve et ce nonobstant la rotation envisagée sur les quatre unités, que sur les conditions mêmes de travail des personnels résultant de la priorité donnée désormais à l'ambulatoire et sur la qualité des soins donnés aux patients et en matière d'hygiène, le président du tribunal de grande instance a pu en déduire l'existence d'un projet important au sens de l' article L. 4612-8-1 du code du travail, alors applicable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le CHU et la présidente du CHSCT font le même grief à l'ordonnance, alors, selon le moyen :

1°/ que la rémunération de l'expert du CHSCT étant assurée par le centre hospitalier qui est lui-même soumis à la réglementation des marchés publics, il en résulte que le choix de l'expert par le CHSCT est une décision qui doit respecter la réglementation sur les marchés publics issue de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et de son décret d'application n° 2016-360 du 25 mars 2016 ; qu'en jugeant que le CHSCT n'est pas soumis à cette réglementation pour le recours aux mesures d'expertise au motif qu'il n'exerce pas une mission d'intérêt général, sans tenir compte de sa dépendance à l'égard du pouvoir adjudicateur qui assure le financement de ladite mesure d'expertise, la juridiction de référé a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 10 2° de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;

2°/ que le CHSCT est une personne morale qui a pour objet, non d'assurer la seule protection des intérêts professionnels des salariés de l'entreprise, mais plus généralement de contribuer à la prévention de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure, de contribuer à l'amélioration des conditions de travail et à l'analyse des risques professionnels ; que cette institution participe ainsi à la préservation de la santé publique ; que le CHSCT est donc bien créé pour satisfaire des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel et commercial ; que, dès lors, le recours par un CHSCT à une mesure d'expertise financée par un pouvoir adjudicateur, est nécessairement soumis aux règles applicables aux marchés publics ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la juridiction de référé du tribunal de grande instance d'Angers a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 10 2° de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ainsi que des dispositions des articles L. 4612-1 à L. 4612-3 du code du travail ;

3°/ que les dispositions de l'article 10 2°de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 sont issues d'une transposition de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation de marchés publics ; que se pose une question relative à l'étendue du champ d'application de la réglementation des marchés publics telle que prévue par cette directive et, plus précisément, à son application au cas de recours à une mesure d'expertise décidée par un CHSCT constitué au sein d'une entreprise elle-même soumise à cette réglementation et appelée à financer la mesure sollicitée ; qu'il convient dès lors de renvoyer cette question à la Cour de justice de l'Union européenne aux fins d'interprétation de ladite directive et de surseoir à statuer jusqu'à la décision de la Cour ;

Mais attendu qu'eu égard à la mission du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail définie à l'article L. 4614-1 du code du travail de contribuer à la prévention et à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à disposition par une entreprise extérieure, le CHSCT ne relève pas des personnes morales de droit privé créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général au sens de l'article 10 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, quand bien même il exerce sa mission au sein d'une personne morale visée audit article ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le Centre hospitalier universitaire d'Angers aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour le Centre hospitalier universitaire d'Angers et Mme X..., ès qualités.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR débouté le CHU d'Angers et Mme X... de leurs demandes d'annuler les deux résolutions du Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail de ce CHU du 8 décembre 2016 décidant d'une part de recourir à une expertise et d'autre part désignant le cabinet Technologia en qualité d'expert, et d'AVOIR condamné le CHU d'Angers au paiement des frais et honoraires liés à la présente instance de l'avocat du CHSCT s'élevant à la somme de 7.957,20 euros, ainsi qu'aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QUE :
« -Sur la qualification du projet de réorganisation du service de chirurgie viscérale : qu'aux termes de l'article L 4614-12 - 2°) du code du travail, "le comité d'hygiène et sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé :
2°) en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité où les conditions de travail prévu à l'article L 4612-8-1 du même code... " ;
qu'il appartient au juge de vérifier si le projet de réorganisation constitue un projet important justifiant une mesure d'expertise; que le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers et madame Z... X..., présidente du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers, sollicitent de voir annuler les deux résolutions du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers du 8 décembre 2016 décidant d'une part de recourir à une expertise et d'autre part, désignant le cabinet TECHNOLOGIA en qualité d'expert, au motif que la réorganisation mise en place est de faible importance, qu'elle ne concerne qu'un faible nombre d'agents et qu'elle améliore significativement les conditions de travail de l'ensemble des agents concernés; que le comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers conteste cette appréciation rappelant notamment que désormais les patients légers seront regroupés dans un seul couloir secteur en hospitalisation de semaine et les patients lourds nécessitant attention et soins constants seront regroupés dans les trois autres secteurs au sein desquelles les agents, toutes qualifications confondues, devront exclusivement prendre en charge des pathologies lourdes, sans allégement en cours de service par la prise en charge des pathologies légères; qu'il rappelle la forte mobilisation des agents hospitaliers qui ont fait grève le 20 octobre 2016 pour alerter sur leur situation et sont intervenus pendant le déroulement du CTE le 20 octobre 2016 pour informer de leur situation; qu'il s'inquiète de l'absence de chiffrage des transferts de charges, obligation faite à l' employeur dans ce type de réorganisation; qu'en l'espèce, il s'évince de l'ensemble des éléments communiqués que la réorganisation du service de chirurgie viscérale prévoit notamment trois secteurs ou couloirs regroupant uniquement des patients lourds et un seul secteur ou couloir regroupant en hospitalisation de semaine les patients légers, cinq redéploiements de postes d'aides-soignantes avec le week-end une aide-soignante sur les deux obligatoirement présentes la nuit, affectée dans d'autres services pour faire du brancardage; que cette réorganisation qui affecte l'ensemble du service de par la création de l'hôpital de semaine et le redéploiement des agents toutes catégories confondues, est susceptible d' avoir une incidence,
-sur la charge de travail des agents et infirmières qui travailleront en continue dans les trois secteurs dédiés aux pathologies lourdes notamment en période " d'hôpital sous tension" et occupation des lits de réserve et ce nonobstant la rotation envisagée sur les quatre unités, - sur les conditions mêmes de travail des personnels résultant de la priorité donnée désormais à l'ambulatoire,
-sur la qualité des soins donnés aux patients et en matière d'hygiène ;
Qu'ainsi, le projet de réorganisation de chirurgie viscérale tel que présenté est un projet important susceptible d'avoir une incidence sur les conditions de santé, de sécurité ou de travail qui justifiait indéniablement la consultation du comité d' hygiène , de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers aux fins d' avis et de propositions, ce qui n' a été fait à aucun moment de l'élaboration de cette réorganisation; qu'en outre, le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers ne justifie aucunement avoir effectué un chiffrage des transferts de charges pour les différents salariés concernés ainsi qu' il lui incombait dans le cadre de la réorganisation envisagée conformément dispositions de l' article L 4121-3 du code du travail; que la réorganisation mise en oeuvre dans le service de chirurgie viscérale revêt un caractère important qui justifie le recours à la mesure d' expertise technique sollicitée par le comité d' hygiène , de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers pour apprécier les conséquences de la nouvelle organisation ; qu'en conséquence, le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers et madame Z...X..., présidente du comité d' hygiène , de sécurité et des conditions de travail du CHU d' Angers seront déboutés de leur demande d'annulation de la résolution du comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d' Angers du 8 décembre 2016 aux fins d'expertise » ;

1. ALORS QUE ne constitue pas un projet important justifiant la désignation d'un expert, le projet d'évolution d'un service conforme aux orientations du projet d'établissement précédemment adopté, susceptible d'améliorer les conditions de travail des personnels, n'impliquant aucune suppression d'emploi, aucun changement de métier ou d'attribution des agents du service, aucune modification du contenu de leurs activités ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions du CHU et de la présidente du CHSCT, si la réorganisation envisagée du service de chirurgie viscérale n'était pas la simple mise en oeuvre du volet social du projet d'établissement adopté par les instances dirigeantes de l'établissement en décembre 2013, sans apport nouveau et sans changement significatif dans le contenu des attributions des salariés, la juridiction de référé du tribunal de grande instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.4612-8-1 et L.4614-12 du code du travail ;

2. ALORS, AU SURPLUS, QUE, le CHU et la présidente du CHSCT produisaient des mémoires et procès-verbaux de réunions des comités techniques et comités médicaux d'établissement faisant état des charges prévues pour chaque catégorie de personnels ; que le président du tribunal de grande instance ne pouvait affirmer que le CHU ne justifiait pas d'un chiffrage des charges conforme aux prévisions de l'article L.4121-3 du code du travail sans procéder à l'examen de ces mémoires et procès-verbaux ; qu'en statuant comme elle l'a fait à défaut d'un tel examen, la juridiction de référé du tribunal de grande instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.4121-3 du Code du travail, ensemble des articles L.4612-8-1 et L.4614-12 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR débouté le CHU d'Angers et Mme X... de leurs demandes d'annuler les deux résolutions du Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail de ce CHU du 8 décembre 2016 décidant d'une part de recourir à une expertise et d'autre part désignant le cabinet Technologia en qualité d'expert, et d'AVOIR condamné le CHU d'Angers au paiement des frais et honoraires liés à la présente instance de l'avocat du CHSCT s'élevant à la somme de 7.957,20 euros, ainsi qu'aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QUE :
« -Sur la demande au titre de la qualité de pouvoir adjudicateur du comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers : que selon l'article 10 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015, " les pouvoirs adjudicateurs sont :
1° Les personnes morales de droit public ;
2° Les personnes morales de droit privé qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont :
a) Soit l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur :
b) Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur
c) Soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur ;
3° Les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique constitués par des pouvoirs adjudicateurs en vue de réaliser certaines activités en commun" ;
Qu'aux termes de l'article L.4612-1, modifié par loi n°2016-1088 du 8 août 2016 - art. 32 du code du travail, « Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission :
1° de contribuer à la prévention et à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ;
2° de contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ;
2° bis de contribuer à l'adaptation et à l'aménagement des postes de travail afin de faciliter l'accès des personnes handicapées à tous les emplois et de favoriser leur maintien dans l'emploi au cours de leur vie professionnelle ;
3° de veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières » ;
que le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers et madame Z...X..., présidente du comité d' hygiène , de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers sollicitent de voir dire qu'en sa qualité de pouvoir adjudicateur, le comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers est soumis à la réglementation des marchés publics pour le recours aux mesures d'expertise, et contestent en conséquence la désignation du cabinet TECHNOLOGIA en qualité d'expert sans respect des règles de publicité et de mise en concurrence issues du droit commun de la commande publique ; qu'ils rappellent en effet qu' en application des dispositions de l'article 10 2°) de l'ordonnance numéro 2015-899 du 23 juillet 2015 le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers a désormais la qualité de pouvoir adjudicateur puisqu'il dispose de la personnalité morale, ses missions ont pour but de satisfaire un besoin d'
intérêt général et il est placé dans un lien de dépendance étroit à l' égard de l'établissement public de santé; que le comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers conteste avoir la qualité de pouvoir adjudicateur et être soumis à la réglementation des marchés publics; qu'en l'espèce, le comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail a, en application des disposition de l'article L 4612-1 du code du travail, de manière générale la charge exclusive de la défense des intérêts "des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure "; que le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail n'a en aucune façon une mission d'intérêt général au sens de l'article 10- 2° de l' ordonnance du 23 juillet 2015 et ne peut pas plus avoir la qualité de pouvoir adjudicateur, sa mission se limitant à la protection des intérêts des salariés relevant de son périmètre géographique; qu'ainsi, les dispositions de l'ordonnance du 23 juillet 2015 ne sont pas applicables au comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d' Angers en l'absence de mission d' intérêt général à lui dévolu; qu'en conséquence, le comité d' hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers n'étant pas soumis à la réglementation des marchés publics pour le recours aux mesures d' expertise, la seconde délibération querellée pouvait être adoptée sans mise en oeuvre des règles relatives aux marchés publics; que le Centre Hospitalier Universitaire d'Angers et madame Z...X..., présidente du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers ne pourront qu'être déboutés de leur demande d'annulation de la seconde résolution du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du CHU d'Angers du 8 décembre 2016 désignant le cabinet TECHNOLOGIA en qualité d'expert » ;

1. ALORS QUE la rémunération de l'expert du CHSCT étant assurée par le centre hospitalier qui est lui-même soumis à la règlementation des marchés publics, il en résulte que le choix de l'expert par le CHSCT est une décision qui doit respecter la réglementation sur les marchés publics issue de l'ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 et de son décret d'application n°2016-360 du 25 mars 2016 ; qu'en jugeant que le CHSCT n'est pas soumis à cette règlementation pour le recours aux mesures d'expertise au motif qu'il n'exerce pas une mission d'intérêt général, sans tenir compte de sa dépendance à l'égard du pouvoir adjudicateur qui assure le financement de ladite mesure d'expertise, la juridiction de référé a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 10 2° de l'ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 ;

2. ALORS, DE SURCROIT, QUE le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de travail est une personne morale qui a pour objet, non d'assurer la seule protection des intérêts professionnels des salariés de l'entreprise, mais plus généralement de contribuer à la prévention de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure, de contribuer à l'amélioration des conditions de travail et à l'analyse des risques professionnels ; que cette institution participe ainsi à la préservation de la santé publique ; que le CHSCT est donc bien créé pour satisfaire des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel et commercial ; que, dès lors, le recours par un CHSCT à une mesure d'expertise financée par un pouvoir adjudicateur, est nécessairement soumis aux règles applicables aux marchés publics ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la juridiction de référé du tribunal de grande instance d'Angers a méconnu le sens et la portée des dispositions de l'article 10 2° de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ainsi que des dispositions des articles L.4612-1à L.4612-3 du code du travail ;

3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE les dispositions de l'article 10 2° de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 sont issues d'une transposition de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation de marchés publics ; que se pose une question relative à l'étendue du champ d'application de la réglementation des marchés publics telle que prévue par cette directive et, plus précisément, à son application au cas de recours à une mesure d'expertise décidée par un CHSCT constitué au sein d'une entreprise elle-même soumise à cette réglementation et appelée à financer la mesure sollicitée ; qu'il convient dès lors de renvoyer cette question à la Cour de Justice de l'Union européenne aux fins d'interprétation de ladite directive et de surseoir à statuer jusqu'à la décision de la Cour.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-10555
Date de la décision : 20/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Angers, 06 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 sep. 2018, pourvoi n°17-10555


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10555
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