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19/09/2018 | FRANCE | N°17-11618

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 septembre 2018, 17-11618


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 novembre 2016), que le protocole de fin de conflit, signé le 12 février 2010, en présence de l'inspecteur du travail intervenant comme médiateur, entre la société Unicrédit Spa et les délégués du personnel de la succursale française de la société, prévoyait le paiement d'un bonus de coopération destiné à rémunérer l'activité de ceux des salariés de la succursale devant coopérer avec les équipes envoyées par le siège italien p

our leur transmettre le savoir-faire français du service Export Manager ; que l'employe...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 novembre 2016), que le protocole de fin de conflit, signé le 12 février 2010, en présence de l'inspecteur du travail intervenant comme médiateur, entre la société Unicrédit Spa et les délégués du personnel de la succursale française de la société, prévoyait le paiement d'un bonus de coopération destiné à rémunérer l'activité de ceux des salariés de la succursale devant coopérer avec les équipes envoyées par le siège italien pour leur transmettre le savoir-faire français du service Export Manager ; que l'employeur ayant refusé de lui verser ce bonus lors de son congé de maternité, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de rappel de salaire et d'indemnité pour discrimination alors, selon le moyen :

1°/ qu'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée de ses demandes quand elle a pourtant constaté que la salariée n'a pas perçu le bonus de coopération à raison de son absence pour congé maternité, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail ;

2°/ qu'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée pour la raison que le bonus était expressément subordonné à la participation effective aux activités de transfert, critère de fixation et d'attribution objectifs, et que la salariée, de par son absence pour congé de maternité, n'avait pas exercé ces fonctions spécifiques, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail ;

3°/ qu'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée pour la raison que celle-ci a perçu durant son congé maternité 100 % de son salaire de base mensuel et n'a pas perçu le bonus uniquement pendant cette période de congé car elle n'en remplissait pas les conditions, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le bonus de coopération était expressément subordonné à la participation active et effective des salariés aux activités de transfert et de formation continue des équipes italiennes en France et que cette prime, répondant à des critères de fixation et d'attribution objectifs, mesurables et licites, était destinée à rémunérer l'activité spécifique d'accompagnement du transfert et à récompenser le service rendu à ce titre, la cour d'appel en a exactement déduit, eu égard aux dispositions de l'article 11 point 2 de la directive 92/85/CE du 19 octobre 1992 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, que ce bonus n'était pas dû à la salariée pendant son congé de maternité faute pour elle d'avoir exercé les fonctions spécifiques dans les conditions particulières prévues par le protocole de fin de conflit ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes de rappel de salaire et d'indemnité pour discrimination, d'avoir condamné la salariée aux dépens de première instance et d'appel et de l'avoir déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU'il ressort du protocole de fin de conflit établi en présence de l'inspecteur du travail intervenant comme médiateur le 12 février 2010 entre la société Unicrédit Spa et les représentants des salariés de la succursale française de la société que pour mettre fin au conflit social né dans l'entreprise à l'annonce de la fermeture de la succursale et du transfert de l'activité export manager à une filiale italienne plusieurs engagements ont été pris entre les salariés et la direction de la société ; que les salariés s'engageraient à reprendre le travail dès signature de l'accord, cette reprise de travail devant s'effectuer conformément aux modalités de reprise telle que prévue par la direction dans la note remise aux salariés de ce jour (article 1) ; que cet accord prévoyait un engagement de la part de l'employeur, à savoir un montant global de 5,4 millions d'euros au titre des indemnités de départ destinés aux 28 salariés de la succursale outre différentes mesures sociales d'accompagnement, la rémunération des jours de grève, l'application d'un calendrier inscrit dans la note d'information économique et financière et la remise d'une lettre d'information relative au traitement fiscal des indemnités de rupture ; qu'il était en outre spécifiquement prévu un bonus de coopération destiné à rémunérer l'activité de ceux des salariés de la succursale devant coopérer avec les équipes envoyées par le siège italien pour leur transmettre le savoir-faire français du service Export Manager ; qu'il était ainsi spécifiquement prévu: point 3 coopération dans le cadre du projet de transfert du produit Export Manager « Cette coopération se matérialisera par
une complète disponibilité de l'équipe actuelle à transférer les connaissances, expériences et le savoir-faire vers les collègues du siège » (page 4) et « un objectif de cette complexité nécessite la coopération de toute l'équipe actuellement dédiée au Service Export Manager qui comporte 19 personne (page 3 du protocole). « Compte tenu de l'engagement nécessité par cette coopération, cette dernière donnera lieu au versement à chaque salarié concerné d'un bonus égal à 100 % de son salaire mensuel fixe brut (apprécié à la date de signature des présentes), pour chaque mois d'activité fournie, sous réserve que l'engagement de coopération ait été expressément accepté dès le début du projet, et qu'il ait été maintenu pendant toute la durée de ce dernier. Dans ses conditions, il est prévu que le bonus sera payé à la fin de chaque période de quatre mois. La première période de quatre mois courra à compter de la date de début de la phase de coopération et s'achèvera à la fin du mois de juin 2010. S'agissant de la vérification de la condition de coopération (à savoir une coopération activité et continue), cette dernière sera assurée comme suit : - M. A... [directeur de la division Export Manager] prendra la responsabilité de cette vérification pour chaque membre de son équipe (Front et Back Office), et M. B... sera chargé de la coopération de M. A... ; - M. C... [responsable de la division informatique] prendra la responsabilité de cette vérification pour M. D... [assistant de la division informatique], et M. B... [responsable du projet de transfert Export Manager] sera chargé de vérifier la coopération de M. C... ; - pour ce qui concerne tous les autres services et ou personnes (comptabilité, audit, secrétariat de direction) cette tâche incombera à M. E... [directeur de la succursale], ou en son absence, M. F... A... » ; que comme le soutient à juste titre la société, il ressort clairement du protocole que le versement du bonus de coopération était soumis à une « coopération active et continue » et donc à une participation effective aux opérations de transfert (lesquelles nécessitaient la formation continue des équipes italiennes sur place à Paris) soumise à vérification pour l'attribution du bonus ; qu'à cet égard, la cour relève que dans la mesure où les parties n'ont pas eu recours à la saisine des délégués du personnel prévue par l'article 4 du protocole de fin de conflit en cas de difficulté d'interprétation, il convient de donner plein effet aux dispositions litigieuses claires et ne donnant pas lieu à difficulté d'interprétation, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande d'irrecevabilité des prétentions de la salariée formulée dans la note en délibéré de la société Unicrédit Spa en l'absence de sanction spécifiquement prévue par l'article 4 au défaut de saisine des délégués du personnel en cas de difficulté d'interprétation ; que Mme X... a bien perçu le bonus correspondant à la période du 1er mars au 15 mai 2010 pendant laquelle elle a participé activement à la période de coopération puis à son retour de congé maternité à compter du 2 décembre 2010 ; que la salariée réclame le bonus y compris pendant la période de son congé maternité entre le 15 mai et le 2 décembre 2010 ; mais que comme le soutient à juste titre la société, ce bonus de coopération était expressément subordonné à la participation active effective aux activités de transfert ; que cette prime répondant à des critères de fixation et d'attribution objectifs, mesurables (selon les prévisions du protocole) et licites et destinée à rémunérer l'activité spécifique d'accompagnement du transfert et à récompenser le service rendu à ce titre n'était donc pas due à la salariée pendant son absence pour maternité faute d'avoir exercé les fonctions spécifiques dans les conditions particulières prévues par le protocole de fin de conflit ; qu'aucune discrimination pour maternité ne peut être reprochée à l'employeur dans la mesure où il n'est pas contesté que la salariée n'a subi aucun diminution de sa rémunération pendant son congé maternité et a perçu 100 % du salaire mensuel de base prévu par les articles 51.1 et 51.2 de la convention collective de la banque ; que si elle n'a pas perçu le bonus ou prime spécifique prévu par le protocole sus-invoqué c'est qu'elle n'en remplissait pas les conditions expressément applicables pendant la durée limitée de mai à décembre 2010 ; que par suite, il convient d'infirmer le jugement et de dire que la salariée n'a pas été victime de discrimination et ne pouvait revendiquer le bénéfice du bonus entre le 15 mai et le 2 décembre 2010 prévu par le protocole de fin de conflit en sorte qu'il convient de la débouter de ses demandes de rappel de salaire et d'indemnité pour discrimination ;

1°) ALORS QU'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée de ses demandes quand elle a pourtant constaté que la salariée n'a pas perçu le bonus de coopération à raison de son absence pour congé maternité, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail ;

2°) ALORS QU'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée pour la raison que le bonus était expressément subordonné à la participation effective aux activités de transfert, critère de fixation et d'attribution objectifs, et que la salariée, de par son absence pour congé de maternité, n'avait pas exercé ces fonctions spécifiques, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail ;

3°) ALORS QU'une salariée ne peut, du seul fait de sa grossesse, subir une baisse de rémunération ou être exclue du versement d'une prime ou d'un bonus ; qu'en déboutant la salariée pour la raison que celle-ci a perçu durant son congé maternité 100% de son salaire de base mensuel et n'a pas perçu le bonus uniquement pendant cette période de congé car elle n'en remplissait pas les conditions, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé les articles L. 1132-1, L. 1142-1 et L. 1225-16 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-11618
Date de la décision : 19/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maternité - Congé de maternité - Rémunération - Primes - Bonus de coopération - Attribution - Conditions - Détermination - Portée

Un bonus de coopération, expressément subordonné à la participation active et effective des salariés à une activité, destiné à rémunérer une activité spécifique et à récompenser le service rendu à ce titre, n'est pas dû à la salariée pendant son congé de maternité faute pour elle d'avoir exercé les fonctions spécifiques dans les conditions particulières prévues


Références :

article 11, point 2, de la directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 sep. 2018, pourvoi n°17-11618, Bull. civ.Bull. 2018, V, n° 154.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, V, n° 154.

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.11618
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