LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel et les productions, que M. X... a confié la défense de ses intérêts à la SCP Arcole (l'avocat) dans un litige l'opposant à un établissement de crédit ; que l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre d'une demande de fixation de ses honoraires ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 640 et 680 du code de procédure civile, ensemble l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ;
Attendu que pour déclarer irrecevable le recours formé par M. X... contre la décision du bâtonnier fixant les honoraires de l'avocat, l'ordonnance affirme à juste titre que le délai imparti à cet effet ne court qu'à compter de la signification de cette décision par acte d'huissier de justice dès lors que l'avis de réception de la lettre recommandée du 24 février 2015 qui avait été adressée à M. X... a été retourné avec la mention "avisé non réclamé", puis retient qu'il résulte des pièces remises à l'audience par M. X... que la première signification de la décision du bâtonnier a été effectuée le 8 décembre 2015 "avec l'ordonnance du 27 mai 2015" du président du tribunal de grande instance ayant rendu exécutoire cette décision, ce dont elle déduit que le recours exercé par M. X... par lettre recommandée du 27 janvier 2016 est irrecevable ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, lorsque l'avis de réception de la lettre recommandée adressée pour assurer la notification de la décision du bâtonnier statuant en matière d'honoraires n'a pas été signé par le destinataire ou une personne munie d'un pouvoir à cet effet, le délai de recours d'un mois prévu par l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 ne commence à courir qu'à compter d'une signification de la décision du bâtonnier, laquelle ne se confond pas avec la signification de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance rendant exécutoire cette décision, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 122 du code de procédure civile ;
Attendu qu'en conséquence de l'irrecevabilité du recours qu'elle retient, l'ordonnance déclare confirmer la décision du bâtonnier du 24 février 2015 ;
Qu'en statuant ainsi, le premier président, qui a excédé ses pouvoirs en statuant au fond après avoir déclaré irrecevable le recours de M. X..., a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 27 avril 2016, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la SCP Arcole aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir déclaré irrecevable le recours de Monsieur X... contre une décision du bâtonnier fixant les honoraires de son avocat ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Thierry X... a exercé son recours par lettre recommandée du 27 janvier 2016 sur la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Tours du 24 février 2015 qui lui a été adressée le même jour par lettre recommandée avec accusé de réception retourné avec la mention "avisé non réclamé" ; qu'en cas de retour au secrétariat du bâtonnier d'une lettre de notification qui n'a pu être remise à son destinataire, le délai d'appel ne court, conformément à l'article 670-1 du code de procédure civile, qu'à compter de la signification de la décision du bâtonnier par acte d'huissier à la diligence de la partie intéressée ; que Maître Catherine C... indique qu'elle n'a pas procédé à la signification de la décision du bâtonnier après la réception de l'accusé de réception portant la mention "avisé non réclamé" ; que cependant il résulte des propres pièces remises par l'appelant à l'audience que la première signification a été effectuée le 8 décembre 2015 (lettre de Maîtres Olivier Z... et Julien A...) avec l'ordonnance du 27 mai 2015 par laquelle le président du tribunal de grande instance a accordé l'exécutoire à la décision du bâtonnier, laquelle signification a fait courir le délai d'un mois ; qu'en formant appel par lettre recommandée du 27 janvier 2016, Monsieur Thierry X... est irrecevable en sa demande ;
1°) ALORS QUE le délai de recours contre une décision ne court qu'à compter de sa notification ; que la signification du 8 décembre 2015 qui ne comporte selon l'huissier que 4 feuillets (dont son acte) ne laisse copie que de l'ordonnance du 27 mai 2015 par laquelle le président du tribunal de grande instance de Tours a accordé l'exécutoire à la décision du bâtonnier ; qu'en jugeant que, par cette signification, la signification, et donc la communication, de la décision du 24 février 2015 avait également été effectuée et que le délai de recours contre cette décision avait couru, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 640 du code de procédure civile, ensemble l'article 6§ 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen ;
2°) ALORS QU'un délai de recours ne court qu'à compter d'une notification indiquant de manière très apparente le délai de recours, ainsi que ses modalités ; que la signification du 8 décembre 2015 à la supposer porter sur la décision d'honoraires du 24 février 2015, ne comporte aucune mention sur les voies et délais de recours ouverts contre cette décision ; qu'en affirmant qu'elle avait fait courir le délai d'appel contre cette décision du 8 décembre 2015, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 680 du code de procédure civile, ensemble l'article 6§ 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen ;
3°) ALORS QUE l'acte de Maître Z... et A... du 8 décembre 2015 et la copie de l'acte signifié qui y est jointe mentionnent seulement la signification d'un titre exécutoire - la grosse de l'ordonnance du 27 mai 2015 par laquelle le président du tribunal de grande instance de Tours a accordé l'exécutoire à la décision du bâtonnier - et d'un commandement de payer ; qu'en affirmant qu'il ressort de cette lettre qu'une première signification de la décision d'honoraires du 24 février 2015 est intervenue le premier président de la cour d'appel a dénaturé cet acte et violé l'interdiction de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 4 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé l'ordonnance du 24 février 2015 après avoir déclaré irrecevable le recours de Monsieur X... pour être tardif ;
AUX MOTIFS QUE déjà cités au premier moyen ;
ALORS QU'une cour d'appel, qui décide que l'appel dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant au fond sur le jugement qui a fait l'objet de cet appel ; qu'en confirmant le jugement, alors qu'il déclare l'appel irrecevable comme ayant été formé hors délai, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 562 du Code de procédure civile.