La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2018 | FRANCE | N°17-10492

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 septembre 2018, 17-10492


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 16 novembre 2016), que, par acte du 12 mai 1973, M. Y... a pris à bail rural une parcelle viticole qu'il exploitait depuis 1967 ; que Mme X... est devenue propriétaire d'une partie de celle-ci et en a repris l'exploitation en 2011 ; que le preneur a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en paiement de l'indemnité de sortie de ferme ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande ;
r>Mais attendu qu'ayant retenu, exactement, que le preneur ne peut, par une clause...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 16 novembre 2016), que, par acte du 12 mai 1973, M. Y... a pris à bail rural une parcelle viticole qu'il exploitait depuis 1967 ; que Mme X... est devenue propriétaire d'une partie de celle-ci et en a repris l'exploitation en 2011 ; que le preneur a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en paiement de l'indemnité de sortie de ferme ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande ;

Mais attendu qu'ayant retenu, exactement, que le preneur ne peut, par une clause stipulée dans le contrat, renoncer valablement à un droit à indemnisation résultant de plantations réalisées plusieurs années après la conclusion du bail et, souverainement, que les informations réunies par l'expert désigné en commun par les parties confirmaient l'amélioration du fonds par la transformation d'une vieille vigne en une parcelle viticole en état de production et permettaient d'évaluer le montant des travaux du preneur et la durée d'amortissement, la cour d'appel, qui n'avait à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes et qui n'a pas modifié l'objet du litige, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme Dominique X... à payer à M. Michel Y... la somme de 4 773 euros nette au titre de l'indemnité due au preneur sortant d'une parcelle de terre à vigne cadastrée section [...] , anciennement cadastrée [...] sur la commune de [...] (Aube) ;

Aux motifs que « M. Y... demande une indemnité de preneur sortant que lui refuse la bailleresse, en prétendant que la clause du bail excluant l'indemnisation du coût des plants de vignes et des installations piquets et fils de fer équivalait à la renonciation de son droit à indemnité de preneur sortant non acquis à cette date, rendant par conséquent la clause sans effet ; que Mme X... soutient pour sa part que M. Y..., qui avait l'obligation d'entretenir la vigne louée et non de la replanter, a renoncé à son droit d'indemnisation des plantations qu'il a effectuées à ses frais ; que le tribunal a débouté M. Y... considérant qu'il avait valablement renoncé à son droit d'indemnisation des plantations déjà réalisées au moment où il a pris cet engagement et qu'il ne pouvait demander une indemnité pour la replantation en 1982 des vignes de mauvaise qualité qu'il avait lui-même plantées en 1967 ; que selon l'article L. 411-69 du code rural, le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail ; que cette indemnité est calculée selon une méthode définie à l'article L. 411-71 du code précité qui dispose que l'indemnité, en ce qui concerne les plantations, est égale à l'ensemble des dépenses, y compris la valeur de la main d'oeuvre, évaluées à la date d'expiration du bail, qui auront été engagées par le preneur avant l'entrée en production des plantations, déduction faite d'un amortissement calculé à partir de cette date, sans qu'elle puisse excéder le montant de la plus-value apporté au fonds par ces plantations ; que, dans le bail de 1973 était inscrite une clause intitulée "indemnités aux preneurs sortants" ainsi rédigée : "Si les preneurs, par leur travail ont apporté, d'accord avec les bailleurs, des améliorations aux bien loués, ils auront droit à l'expiration du bail à une indemnité. Cette indemnité sera déterminée, à défaut d'accord amiable, par le tribunal paritaire cantonal des baux ruraux (section métayage). Pour le calcul de cette indemnité il ne pourra en aucun cas être tenu compte de la valeur des plants de vigne ni des installations piquets et fils de fer, et enfin de bail, les preneurs ne pourront arracher la vigne sans l'accord des bailleurs, lesquels auront le droit à cette époque d'imposer l'arrachage aux preneurs et aux frais de ceux-ci" ; que, contrairement à ce que soutiennent les parties et le tribunal, M. Y... n'a pas renoncé à son droit d'indemnité de preneur sortant, lequel droit est au contraire affirmé contractuellement ; que seul le montant de l'indemnité est affecté par cette clause laquelle interdit que l'indemnisation intègre les coûts des plants de vigne ni des installations piquets et fils de fer ; que, certes, on peut considérer que c'est une renonciation à un droit à partir du moment où il renonce à une partie de ses droits nés de l'amélioration faite par ces investissements ; que, cependant, il n'a pu valablement renoncer en 1973 à un droit non encore acquis puisque les plantations à l'origine du litige, selon l'expert datent de 1982 ; que, par ailleurs, contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal, M. Y... ne demande pas remboursement de ses coûts de plantations, ce qui relèverait de l'obligation du bailleur d'assurer la pérennité du vignoble, et serait étranger à l'article L. 411-69 du code rural, mais bien l'amélioration apportée au fonds par ses investissements et plantations à partir desquels un amortissement est déduit pour ne retenir que la plus-value finale ; qu'aussi, c'est par une dénaturation de la demande du preneur et des clauses contractuelles que le tribunal a, à tort, débouté M. Y..., et doit être infirmé en sa décision, dès lors que l'expert a pu considérer, nonobstant l'absence d'états des lieux d'entrée et de sortie, qu'il y avait nécessairement amélioration du fonds à partir du moment où M. Y... a loué une vieille vigne et qu'il a restitué une vigne en état de production ; que l'expert a chiffré l'indemnité à 4 773 euros en prenant en considération l'état de la vigne qu'il dit être dans un état moyen avec 15 % de manquants ; que, répondant aux dires de M. Y... sur l'amortissement de cette vigne sur 39 ans au lieu de 50 ans comme soutenu par le preneur, y compris dans ses écritures en appel, l'expert indique qu'il est impossible de prévoir l'obsolescence d'une vigne et que celle objet du litige pouvait, compte tenu de son état, espérer encore une production pendant dix années portant son amortissement à 39 ans ; que, faute d'autres éléments techniques permettant de contredire la durée d'amortissement fixée par l'expert, celle-ci sera admise ; que, par conséquent, une indemnité de 4 773,00 euros apparaît de nature à remplir M. Y... de ses droits tirés de l'article L. 411-69 du code rural » ;

Alors que 1°) les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et les parties peuvent renoncer à un droit acquis ; que les preneurs ont signé un bail du 12 mai 1973 précisant qu'ils « devront remplacer à leurs frais, les ceps qui viendraient à périr sauf au-delà de la sixième feuille » et « devront entretenir les installations de la vigne et les maintenir en bon état » et l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime prévoit que l'indemnité au preneur sortant en ce qui concerne les plantations prend en compte l'ensemble des dépenses, y compris la valeur de la main d'oeuvre ; qu'une fois ce contrat conclu, le preneur était ainsi devenu titulaire du droit à indemnisation à raison des plantations qu'il devait effectuer en exécution du contrat, droit auquel il pouvait donc renoncer concomitamment et partiellement en prévoyant, s'agissant des « indemnités aux preneurs sortants » au titre des « améliorations aux biens loués », que « pour le calcul de cette indemnité il ne pourra en aucun cas être tenu compte de la valeur des plants de vigne ni des installations piquets et fils de fer, et, en fin de bail, les preneurs ne pourront arracher la vigne sans l'accord des bailleurs, lesquels auront le droit à cette époque d'imposer l'arrachage aux preneurs et aux frais de ceux-ci » (p. 6) ; qu'en retenant que les preneurs n'avaient pu renoncer en 1973 à droit qui n'aurait pas acquis du fait des plantations effectuées en 1982, la cour d'appel a violé les dispositions l'article 1134 du code civil al. 1er devenu 1103 du même code ;

Alors que 2°) le juge ne peut dénaturer les termes du litige ; que M. Y... a demandé une indemnité en se fondant sur le montant moyen par hectare du coût total d'une plantation communiqué par le syndicat général des vignerons de Champagne, qu'il a proratisé en considération de la superficie de l'exploitation et de l'espérance de vie des plants ; qu'en retenant que M. Y... n'avait pas demandé l'indemnisation du coût des plantations qu'il avaient effectuées, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Alors que 3°) la bailleresse avait invoqué la circonstance que seuls les travaux non amortis pouvaient être réclamés au bailleur et que M. Y... s'était abstenu de produire le moindre élément comptable ; qu'en s'abstenant de procéder à la recherche à laquelle elle était ainsi invitée sur les éléments dont le preneur devait justifier pour le calcul de l'indemnité et qui faisaient totalement défaut, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 411-71 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10492
Date de la décision : 13/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 16 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 sep. 2018, pourvoi n°17-10492


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10492
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award