LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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M. Didier X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 17 mai 2017, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 5 000 euros d'amende dont 2 500 euros avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN, les observations de Me BROUCHOT, de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 111-10 du code de l'organisation judiciaire, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 593 du code de procédure pénale ;
"en ce qu'il résulte des pièces de la procédure que le jugement dont M. X... a relevé appel, a été rendu par la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Colmar au sein de laquelle figurait Mme Sylvie Y... tandis que l'arrêt attaqué a été rendu par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Colmar à laquelle appartenait son époux, M. le conseiller Y... ;
"alors que deux magistrats conjoints ne peuvent connaître d'une même cause" ;
Attendu qu'il résulte des mentions du jugement du 17 avril 2015 que Mme Y..., vice-présidente, était dans la composition du tribunal lors de la lecture de cette décision par le président et non lors de l'audience du 2 avril 2015 pour les débats et le délibéré ; qu'ainsi, ce magistrat n'a pas connu de la cause, objet de l'arrêt attaqué ;
Que le moyen, qui manque en fait, ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 256 et suivants et 1741 du code général des impôts, 50 de la loi n° 52-401 du14 avril 1952, 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de soustraction frauduleuse au paiement de la TVA pour le mois d'octobre 2009, l'a condamné à une amende de 5 000 euros dont 2 500 euros avec sursis et, statuant sur l'action civile, dit qu'il sera solidairement tenu au paiement de l'impôt dû par la société Continental biscuits à hauteur de 617 792 euros, qui correspond à la TVA de 2009 ;
"aux motifs qu'il résulte des éléments de la procédure, ce point n'étant d'ailleurs pas contesté par M. X..., qu'en 2009 la société Continental biscuits a cédé plusieurs éléments d'actifs à la société France Immobilier Finance, dont il était le gérant, pour soustraire ces éléments à la liquidation judiciaire imminente de Continental biscuits ; qu'aucune déclaration de TVA n'a été effectuée pour cette cession alors que la société France immobilier finance a tenté d'obtenir un remboursement de TVA, ce qui a été refusé par le fisc ;
"et aux motifs adoptés qu'en 2009, la société Continental biscuits a cédé plusieurs éléments d'actifs, dont la chaîne de production, à la société France immobilier finance (gérée par M. X... et détenue par sa mère à titre principal) afin de soustraire ces éléments de la liquidation judiciaire imminente de cette société ; que M. X... reconnaît le caractère fictif de cette vente, ayant agi sur les conseils de ses comptables et de son commissaire aux comptes, d'où l'absence de déclaration de la TVA relative à cette cession auprès du fisc pour un montant de 617 792 euros ; que le caractère fictif de cette cession était confirmée par le commissaire aux comptes ; qu'il sera rappelé que la société FIF a tenté d'obtenir un remboursement de TVA, ce qui a été refusé par le fisc ; que dans ces conditions, cette dernière infraction est parfaitement caractérisée dans la mesure où cette vente dont la vocation était un détournement d'actifs devait être déclarée fiscalement ; que ce manquement constitue un délit à la charge de M. X... ; que, sur l'action civile, il y a lieu de déclarer M. X... entièrement responsable du préjudice subi par la direction générale des finances publiques ; que la direction générale des finances publiques, partie civile, sollicite que M. X... soit déclaré solidairement tenu avec les sociétés Mondial biscuits en France à Cernay et Continental biscuits en Allemagne à Buhl au paiement des impôts fraudés ainsi qu'à celui des majorations et pénalités y afférentes ; qu'il convient de faire droit à cette demande à hauteur de 617 792 euros ;
"alors que dans son mémoire du 23 septembre 2016, tel que mentionné par la cour d'appel, M. X... avait, s'agissant de la cession d'actifs au profit de la société France immobilier finance, souligné que Me David Z..., mandataire liquidateur de la société Continental biscuits qui est venue comme étant le dernier propriétaire de la ligne de production, avait contesté la cession envisagée au profit de la société France immobilier finance, ce qui avait donné lieu à un jugement en date du 18 août 2011 prononçant la nullité de la cession passée entre la société Continental biscuits et la société France immobilier finance portant sur un montant de 3 769 792 euros dont 617 792 euros au titre de la TVA ; que doit être cassé l'arrêt qui a laissé ces conclusions sans réponse ;
Attendu que le prévenu ne saurait se faire un grief de l'absence de réponse par les juges d'appel à un courrier de son conseil, visé dans l'arrêt, dès lors que l'annulation invoquée de la cession d'actifs à la société FIF, dont le défaut de déclaration en 2009 est reproché, intervenue seulement en août 2011 à la demande du mandataire liquidateur de la société dirigée par le prévenu, ne faisant pas disparaître l'infraction, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à un tel argument non péremptoire ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.