LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 décembre 2016), que, par acte notarié du 7 août 2003, M. et Mme X... ont souscrit auprès de la société Banque populaire provençale et corse, devenue Banque populaire Méditerranée (la banque) un contrat de prêt immobilier d'un montant de 190 561 euros, remboursable en deux cent quarante échéances mensuelles de 1 205,68 euros ; qu'à la suite de la défaillance des emprunteurs à compter du 24 juin 2011, la banque leur a délivré un commandement de payer valant saisie immobilière en date du 8 août 2014, puis, le 17 novembre suivant, les a assignés devant le juge de l'exécution ; que les emprunteurs ont soulevé la prescription de l'action en recouvrement de la créance ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, alors, selon le moyen :
1°/ que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ; qu'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix entre prononcer l'exigibilité de la créance et majorer le taux des intérêts des échéances tout en retenant qu'aucune disposition contractuelle n'imposait à la banque de faire application de la déchéance du terme dès la date du premier impayé, la cour d'appel a statué par contradiction de motifs et a méconnu les exigences des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix entre prononcer l'exigibilité de la créance et majorer le taux des intérêts des échéances sans répondre aux conclusions de M. X... faisant valoir qu'en l'absence de majoration du taux d'intérêts, il en résultait nécessairement que la déchéance du terme était survenue, la cour d'appel a méconnu les exigences des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ; qu'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix, dès le premier incident de paiement, de prononcer l'exigibilité de la créance ou de majorer le taux des intérêts des échéances quand elle retenait que la déchéance du terme avait été « rendue effective par le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 8 août 2014 » sans justifier pourquoi la déchéance du terme n'avait pas été provoquée dès le premier incident de paiement, en l'absence de majoration du taux d'intérêts, pour écarter la prescription biennale de l'action de la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 137-2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l'espèce ;
Mais attendu que, selon l'article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, et qu'en vertu de l'article 2233 du code civil, à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ;
Attendu que l'arrêt relève que l'article 3 du prêt stipule que "si bon semble à la banque, toutes les sommes restant dues au titre du prêt en principal, majorées des intérêts échus et non payés deviennent immédiatement exigibles, sans sommation ni mise en demeure préalable et malgré toutes offres ou consignations ultérieures" et que "si la banque n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, elle peut majorer de trois points le taux indiqué dans les conditions particulières, jusqu'à ce que l'emprunteur ait repris le cours normal des échéances contractuelles" ; que, sans se contredire ni être tenue de répondre à un moyen que ses constatations rendaient inopérant, la cour d'appel en a exactement déduit qu'aucune disposition contractuelle n'imposait à la banque de faire application de la déchéance du terme dès la date du premier impayé et que, la déchéance du terme ayant été rendue effective par le commandement de payer du 8 août 2014, la prescription biennale de l'action en paiement de la banque devait être écartée pour les montants relatifs au capital restant dû et aux mensualités échues à compter du mois de septembre 2012 ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Banque populaire Méditerranée la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en recouvrement de la créance ;
AUX MOTIFS QU'« il résulte de l'article L. 137-2 du code de la consommation, ensemble les articles 2224 et 2233 du code civil, qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.
Si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
En l'espèce, il résulte de l'offre de prêt que "si bon semble à la banque, toutes les sommes restant dues au titre du prêt en principal, majorées des intérêts échus et non payés deviennent immédiatement exigibles, sans sommation ni mise en demeure préalable et malgré toutes offres ou consignations ultérieures" et encore que "si la banque n'exige pas le remboursement immédiat du capital restant dû, elle peut majorer de trois points le taux indiqué dans les conditions particulières, jusqu'à ce que l'emprunteur ait repris le cours normal des échéances contractuelles".
Il résulte de ces dispositions expresses, que la banque n'est pas tenue de mettre en demeure le débiteur, cette clause n'étant pas empreinte d'équivoque, le non-paiement d'une seule échéance à sa bonne date constituant le premier des cas énoncés d'exigibilité de la créance en son intégralité.
Il est constant que le premier incident de payement non régularisé est intervenu le 1er juillet 2011 de sorte que sont atteintes par la prescription les échéances impayées entre le 1er juillet 2011 et le 8 août 2012 ce que la banque ne conteste pas.
La banque produit un décompte de la créance à la date du 28 octobre 2103 (pièce 4 appelante) détaillant le montant des échéances impayées et le montant du capital restant dû dont il résulte qu'elle a, dès cette date, manifesté auprès de l'emprunteur sa volonté de mettre en oeuvre les dispositions relatives à la déchéance du terme rendue effective par le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 8 août 2014 reprenant le décompte précédent.
Aucune disposition contractuelle n'impose à la banque de faire application de la déchéance du terme dès la date du premier impayé, l'emprunteur ne pouvant imposer unilatéralement au prêteur une telle date après défaut de payement dès lors qu'il a déclaré avoir un parfaite connaissance par la lecture faite par le notaire des conditions générales du prêt ainsi que par l'acceptation faite aux termes de l'offre de prêt qui a été remise à l'emprunteur (article 3 de l'offre de prêt et page 14 de l'acte notarié), aux seules fins de faire remonter dans le temps le point de départ de la prescription de sorte qu'est vain le moyen du caractère potestatif de l'exigibilité du capital restant dû.
Ainsi, la banque a contractuellement le choix entre prononcer l'exigibilité de la créance et majorer le taux des intérêts des échéances jusqu'à ce que l'emprunteur ait repris le cours normal des échéances contractuelles, (article 3 de l'offre de prêt), de sorte que le moyen tendant à interpréter le contrat en ce que la déchéance du terme intervient "dès le premier incident de payement" revenant à dénaturer le contrat, est écarté.
La banque justifiant d'une disposition expresse et non équivoque la dispensant de mettre en demeure le débiteur préalablement à la déchéance du terme, il s'ensuit que le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 8 août 2914 n'est pas atteint par la prescription biennale pour les montants correspondant au capital restant dû et les mensualités à compter de septembre 2012.
Le jugement dont appel est infirmé » ;
1°/ ALORS QUE l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ; qu'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix entre prononcer l'exigibilité de la créance et majorer le taux des intérêts des échéances tout en retenant qu'aucune disposition contractuelle n'imposait à la banque de faire application de la déchéance du terme dès la date du premier impayé, la cour d'appel a statué par contradiction de motifs et a méconnu les exigences des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QU'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix entre prononcer l'exigibilité de la créance et majorer le taux des intérêts des échéances sans répondre aux conclusions de M. Philippe X... faisant valoir qu'en l'absence de majoration du taux d'intérêts, il en résultait nécessairement que la déchéance du terme était survenue, la cour d'appel a méconnu les exigences des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QUE l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ; qu'en énonçant que la banque avait contractuellement le choix, dès le premier incident de paiement, de prononcer l'exigibilité de la créance ou de majorer le taux des intérêts des échéances quand elle retenait que la déchéance du terme avait été « rendue effective par le commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 8 août 2014 » sans justifier pourquoi la déchéance du terme n'avait pas été provoquée dès le premier incident de paiement, en l'absence de majoration du taux d'intérêts, pour écarter la prescription biennale de l'action de la BPPC, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 137-2 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l'espèce.