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06/09/2018 | FRANCE | N°17-21400

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 06 septembre 2018, 17-21400


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 mai 2017), que la société La P..., propriétaire d'un lot en copropriété dans un lotissement, a édifié un immeuble, ainsi qu'un mur de soutènement et une pergola ; qu'un arrêt irrévocable du 9 janvier 2016 a ordonné la mise en conformité de la construction et la destruction des parties de l'immeuble ne respectant pas les dispositions du cahier des charges du lotissement et celle du mur de soutènemen

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 mai 2017), que la société La P..., propriétaire d'un lot en copropriété dans un lotissement, a édifié un immeuble, ainsi qu'un mur de soutènement et une pergola ; qu'un arrêt irrévocable du 9 janvier 2016 a ordonné la mise en conformité de la construction et la destruction des parties de l'immeuble ne respectant pas les dispositions du cahier des charges du lotissement et celle du mur de soutènement et de la pergola ; que la société La P... a formé un recours en révision contre cet arrêt ;

Attendu que la société La P... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son recours en révision ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui, dans le dispositif de son arrêt, a déclaré le recours en révision irrecevable, n'a pas statué sur le fond du litige ; que le moyen manque en fait ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société La P... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La P... à payer la somme de 2 000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Californie Favorite et la somme de 2 000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Rose Lawn ; rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société La P...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable le recours en révision formé par la SCA LA FAVORITE à l'encontre l'arrêt rendu le 9 janvier 2006 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Aux motifs que « l'article 595 du code de procédure civile dispose que le recours en révision n'est ouvert que pour l'une des causes limitativement énumérées, et notamment s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ou s'il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement ; il résulte de l'article 596 que le délai du recours est de deux mois courant à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque et de l'article 597 que toutes les parties au jugement attaqué doivent être appelées à l'instance par l'auteur du recours, à peine d'irrecevabilité ; à cet égard, il est de principe qu'en application des dispositions combinées de ces textes, l'auteur du recours en révision doit, à peine d'irrecevabilité, appeler, dans les deux mois de la découverte de la cause de révision, toutes les parties au jugement. La SCA la P... soutient qu'elle n'aura une connaissance certaine de la fraude des co-lotis dissimulant leurs propres violations au cahier des charges du lotissement Rose Lawn qu'à la remise du rapport d'expertise de M. F... et que s'agissant de la fausseté du rapport établi le 19 avril 2000 par cet expert, sur la base duquel a été rendu l'arrêt de la cour du 9 janvier 2006, seul l'établissement du rapport du cabinet Pierrot, qu'elle a mandaté à l'effet de reprendre l'ensemble des mesures topographiques et de dresser de nouveaux plans faisant figurer les zones non aedificandi et altius tollendi du cahier des charges, lui permettra de faire constater judiciairement le caractère erroné et manifestement faux des mesures topographiques du rapport d'expertise de M. F.... L'existence de prétendues violations du cahier des charges commises par les autres co-lotis, que la SCA la P... présente comme constitutive d'une fraude au sens du 1° de l'article 595, est cependant connue de celle-ci depuis, à tout le moins, l'assignation, qu'elle a faite délivrer devant le tribunal de grande instance de Grasse, par exploits des 1er, 2 et 4 août 2011 à l'encontre des trois syndicats des copropriétaires Rose Lawn, Anastasie et Californie Favorite, sur la base d'un rapport d'analyse de M. G... , architecte DPLG, en date du 15 février 2010, dont il ressort que : -sur le lot 1 (copropriété Anastasie), un troisième bâtiment a été édifié en dehors de la zone aedificandi et une agence immobilière est installée dans la copropriété en infraction du cahier des charges interdisant l'implantation de commerces ; -sur le lot 2 (copropriété Rose Lawn), les limites entre les lots 1 et 2 semblent avoir été modifiées en violation du cahier des charges et des modifications de surfaces, de volumes et d'aspect, violant les zones d'inconstructibilité définies par le cahier des charges, ont été apportées au bâtiment principal (véranda côté sud-ouest à rez-de-chaussée ; bassin d'agrément côté sud-est) ; -sur les lots 3 et 4 (copropriété Californie Favorite), un bâtiment à usage de stationnement a été récemment édifié, qui se trouve intégralement dans la zone non aedificandi, telle qu'elle ressort du plan annexé au modificatif du cahier des charges du 8 décembre 1952. Le rapport du cabinet ADEM Expertise du 20 juillet 2015, établi postérieurement à l'introduction du recours en révision, ne fait que reprendre, s'agissant des lots 3 et 4 (copropriété Californie Favorite), en les développant, les constatations de M. G... relativement à la construction d'un parking et d'une rampe d'accès au parking, outre une piscine, sur la zone non aedificandi, sauf que ce cabinet d'expertise relève que l'immeuble est construit à cheval sur les lots 3 et 4 et sur les zones non aedificandi de 5 m de large se trouvant de part et d'autre des lots, sans prendre en compte le plan annexé à l'arrêté préfectoral du 30 juillet 1953 autorisant l'ablotissement des lots 3 et 4, à l'origine du modificatif du cahier des charges déposé le 8 décembre 1952 au rang des minutes de Me H..., notaire. Il résulte de ce qui précède que la SCA la P... ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'aura une connaissance certaine des violations du cahier des charges reprochées aux autres co-lotis qu'une fois déposé le rapport d'expertise de M. F..., en sorte que le délai de deux mois d'exercice du recours en révision aurait été conservé et n'aurait donc pas encore couru, alors que sa connaissance des violations, qu'elle invoque comme constitutives d'une fraude, remonte, à tout le moins, au mois d'août 2011, date à laquelle elle a agi en justice contre les syndicats des copropriétaires Rose Lawn, Anastasie et Californie Favorite en vue d'obtenir la démolition des constructions prétendument irrégulières et qu'il n'est pas exigé que la fraude alléguée ait été judiciairement constatée, préalablement à l'exercice du recours. Au surplus, les autres parties à l'arrêt du 9 janvier 2006, qu'il s'agisse de M. M... Z..., de Me A..., de la SCP A... S... , de Me B..., de la SCP J... et de la société Mutuelles du Mans Assurances LARD, ont été appelées en cause par exploits des 13 mai, 26 et 31 octobre 2016, soit plus de deux mois après l'introduction du recours en juin 2015 ; la SCA la P... ne saurait invoquer l'existence d'une transaction intervenue avec l'architecte, les notaires et leur assureur pour prétendre que, cette transaction ayant autorité de chose jugée en dernier ressort à l' égard des intéressés, elle n'avait pas à les attraire dans le cadre du recours en révision, alors que l'éventuelle rétractation de l'arrêt du 9 janvier 2006 aurait eu nécessairement une incidence sur les droits et obligations des parties à la transaction (il est ainsi fait état d'une indemnité globale versée à la SCA la P... correspondant à la garantie à laquelle les MMA ont été condamnées par l'arrêt de la cour (...) et à la couverture de tous préjudices actuels et futurs et de toutes condamnations qui pourraient être prononcées aussi bien contre la SCA la P..., ses associés et ayants-droits, que contre MMA LARD et/ou ses assurés). Le recours en révision, en ce qu'il est fondé sur l'existence d'une fraude liée aux violations du cahier des charges du lotissement Rose Lawn par les autres co-lotis, l'a donc été hors délai et apparaît dès lors irrecevable en l'état ; en toute hypothèse, de telles violations, à supposer même qu'elles soient caractérisées, ne sauraient avoir pour effet de remettre en cause l'appréciation portée par la cour, dans son arrêt du 9 janvier 2006, relativement au respect par la SCA la P... des prescriptions du cahier des charges sur les zones non aedificandi et non altius tollendi, dont il a été déduit la condamnation de celle-ci à mettre son immeuble dénommé Villa Marion en conformité avec ces prescriptions. S'agissant du faux, que constituerait, en l'espèce, le rapport d'expertise de M. F... du 19 avril 2000, il est de principe qu'au sens du 3° de l'article 595, le faux, qui correspond à une ou des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement, doit avoir été établi préalablement au recours en révision ; tel n'est pas le cas du rapport d'expertise de M. F..., qui a été entériné par le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 26 novembre 2002 puis l'arrêt de la cour du 9 janvier 2006 ; pour autant, même dans cette hypothèse, le recours en révision n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée. En l'occurrence, le rapport d'analyse de M. G... du 15 février 2010 fait état des observations suivantes à propos du rapport d'expertise de M. F... ainsi argué de faux : (...) le cahier des charges du lotissement qui lui a servi de base pour son étude présente quelques côtes altimétriques permettant de déterminer les hauteurs autorisées par lot. Or, les points correspondants aux côtes retenues par l'expert judiciaire concernant la servitude altimétrique de vue sur le lot n° 5 de la SCA la P... sont tout à fait aléatoires car elles sont prises à une distance relativement conséquente de notre construction et ne sont appuyées sur aucune analyse de la configuration du sol de ce secteur. Si l'on examine de façon plus précise les côtes retenues par rapport au pendage du terrain actuel pour justifier la partie de superstructure à supprimer afin d'entrer dans le gabarit défini par la servitude non altius tollendi, nous nous apercevons que les pentes du terrain ne sont pas en concordance avec les côtes relevées. Il y a fort à parier que ce terrain a été à plusieurs reprises modifié et principalement par les lots en amont dont les constructions son antérieures à la réalisation de notre bâtiment. Une analyse précise géologique permettrait de restituer la réalité d'un terrain naturel de la période de construction de la P... et dans ces conditions les hauteurs retenues risquent de ne pas correspondre à la réalité du rapport de l'expert. En effet, le calcul des pentes tel que nous pouvons le faire actuellement par rapport à l'interprétation des côtes altimétriques donnée par l'expert et son sapiteur M. K... montre une incohérence au regard de la topographie actuelle du secteur. Or, force est de constater que les opérations d'expertise de M. F... ont été longues puisqu'elles ont duré près de 5 ans, de mars 1995 à avril 2000, ce qui laissait le temps à la SCA la P... de s'entourer de tous conseils techniques et de présenter tous dires et observations ; elle n'a pourtant pas remis en cause le relevé des constructions existantes effectué par M. K..., géomètre-expert, dont l'expert s'était adjoint le concours, et les plans établis par celui-ci (relevés en plan avec côtes du terrain naturel aujourd'hui, plan avec côtes du terrain naturel de 1952, relevés en coupe) et n'a pas davantage, lors de la procédure devant le tribunal puis la cour, d'avril 2000 à novembre 2005, contesté le respect de la servitude non altius tollendi prévue par le cahier des charges du lotissement à raison d'une modification, réelle ou supposée, du niveau du sol naturel intervenue depuis 1952 ; elle a donc été en mesure de faire valoir sa cause avant que la décision ait acquis force de chose jugée et ne saurait aujourd'hui, dans le cadre d'un recours en révision, se prévaloir de son inertie. Par ailleurs, à supposer même que les conclusions de M. F... sur le respect, par la construction édifiée sur le lot 5, de la servitude non altius tollendi reposent sur une appréciation erronée des côtes altimétriques du terrain naturel, le rapport de l'expert ne saurait être regardé comme un faux au sens du 3° de l'article 595 constituant une cause d'ouverture du recours en révision et il n'est pas allégué que les autres co-lotis du lotissement Rose Lawn aient fourni à l'expert, dans le cadre de ses opérations, de faux documents, qui auraient conduit celui-ci à une appréciation erronée des violations alléguées du cahier de charges ; le recours en révision, en ce qu'il est fondé sur l'existence d'un faux, que constituerait le rapport d'expertise du 19 avril 2000, n'est pas davantage recevable » ;

Alors que la cour d'appel qui décide qu'une demande dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en déclarant le recours en révision irrecevable pour avoir été intenté hors délai, tout en statuant sur le fond du litige en relevant que la fraude, à la supposer établie, n'était pas décisive, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 122 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-21400
Date de la décision : 06/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 06 sep. 2018, pourvoi n°17-21400


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.21400
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