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06/09/2018 | FRANCE | N°17-20812

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 06 septembre 2018, 17-20812


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 mai 2017), que M. et Mme X..., propriétaires d'une parcelle se trouvant comprise en emplacement réservé pour la réalisation d'un équipement public au plan local d'urbanisme de la commune de [...], ont mis en demeure cette commune de procéder à l'acquisition de la parcelle en application des articles L. 123-17 et L. 230-1 et suivants du code de l'urbanisme ; qu'aucun accord n'étant intervenu sur le prix, M. et Mme X... ont saisi le juge de l'expropriation qui,

par jugement du 26 avril 2016, a ordonné le transfert de propriét...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 mai 2017), que M. et Mme X..., propriétaires d'une parcelle se trouvant comprise en emplacement réservé pour la réalisation d'un équipement public au plan local d'urbanisme de la commune de [...], ont mis en demeure cette commune de procéder à l'acquisition de la parcelle en application des articles L. 123-17 et L. 230-1 et suivants du code de l'urbanisme ; qu'aucun accord n'étant intervenu sur le prix, M. et Mme X... ont saisi le juge de l'expropriation qui, par jugement du 26 avril 2016, a ordonné le transfert de propriété de la parcelle au profit de la commune et fixé son prix ; que l'emplacement réservé a été supprimé le 2 juin 2016 lors de l'approbation de la modification simplifiée du PLU par la communauté de communes ;

Sur le premier et le troisième moyens, ci-après annexés :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu que la commune fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action de M. et Mme X... ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la suppression de l'emplacement réservé était postérieure au jugement de première instance, date à laquelle doit être appréciée la qualification de bien réservé, la cour d'appel en a exactement déduit que l'exercice du droit de délaissement demeurait recevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la commune de [...] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la commune de [...] et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. et Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la commune de [...].

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la commune de [...] de sa demande d'annulation du jugement rendu le 26 avril 2016 par le juge de l'expropriation et, en conséquence, déclaré Monsieur et Madame X... recevables en leur action au titre du droit de délaissement, ordonné le transfert de propriété de la parcelle [...] au profit de la commune et fixé à la somme de 318.900 euros l'indemnité totale de dépossession qui sera due par la commune aux époux X...,

AUX MOTIFS QUE : « Sur la demande d'annulation du jugement entrepris. Pour solliciter l'annulation du jugement entrepris sur le fondement des articles 16 du code de procédure civile et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, la commune reproche au premier juge de ne pas avoir fait droit à sa demande de renvoi de l'audience du mercredi 22 mars 2016 alors que : - les époux X... avaient conclu le 18 mars 2016 et le 21 mars 2016 en accompagnant à chaque fois leurs mémoires de nouvelles pièces (pièces 21 à 25) ; - le renvoi avait été sollicité par courrier du 21 mars 2016 afin de pouvoir répliquer à ces mémoires et pour analyser ces nouvelles pièces ; - en raison du refus de cette demande de renvoi, la commune a été privée de la possibilité de : * répliquer à l'expertise du cabinet Norexim (pièce n°22) et à l'estimation du cabinet Courel (pièce n°24), * verser aux débats le certificat d'urbanisme montrant que c'est l'existence de la cavité souterraine qui a conduit les époux B... à renoncer à l'achat et qui conduit aujourd'hui les époux X... à contraindre la commune à acquérir leur parcelle, * verser aux débats les documents d'urbanisme démontrant que les époux X... ont réalisé des travaux non conformes ; * verser aux débats les déclarations d'achèvement de travaux déposées par les époux X... et de démontrer ainsi que le délit de construction sans permis n'est pas prescrit ; que toutefois, il convient en premier lieu de souligner que la commune avait sollicité le renvoi dès le 18 mars 2016 pour un motif totalement étranger à ceux exposés ci-dessus: elle estimait en effet opportun que l'audience soit renvoyée à une date ultérieure dans le souci d'une bonne administration de la justice en attendant que la procédure de modification du plan local d'urbanisme qu'elle avait engagée visant à supprimer l'emplacement réservé puisse aboutir, ce afin que soit constatée l'irrecevabilité des demandes des époux X..., l'exercice du droit de délaissement étant conditionné par l'existence de cet emplacement réservé à la date où le juge statue ; qu'il est à noter à cet égard que la commune avait manifesté dès le 7 novembre 2013 par un courrier adressé aux époux X... qu'elle procéderait à la mise en oeuvre de la procédure de modification simplifiée du PLU devant aboutir à la suppression de l'emplacement réservé sur leur propriété, mais qu'elle a attendu que ces derniers saisissent le juge de l'expropriation en janvier 2006 pour mettre en oeuvre cette procédure administrative, qui n'avait pu aboutir lorsque le premier juge a statué ; qu'en second lieu, il n'apparaît pas que la commune ait été empêchée, du fait du refus de sa demande de renvoi de l'audience en première instance, de répliquer aux derniers mémoires et pièces des époux X... puisque : - les époux X... ont saisi le juge de l'expropriation et notifié leur mémoire à la commune les 6 et 7 janvier 2016, comprenant leurs demandes indemnitaires ; - la commune a déposé son mémoire au greffe le 11 février 2016, dans lequel elle demandait au premier juge de déclarer l'action des époux X... sans objet ou subsidiairement mal fondée dès lors que l'emplacement réservé avait été selon elle supprimé du PLU, sans qu'aucun moyen ni demande relatifs au montant des indemnités sollicitées n'y soient développés ; - l'ordonnance du juge de l'expropriation fixant la date commune de visite des lieux et de l'audience au 22 mars 2016 a été notifiée à la commune le 25 février 2016 ; - les époux X... ont notifié de nouvelles conclusions déposées au greffe le 4 mars 2016 en réplique au moyen de procédure soulevé par la commune ; - le commissaire du gouvernement a déposé ses conclusions au greffe le 10 mars 2016, contestant le montant des indemnités sollicitées, et les a notifiées dans le même temps aux parties ; - la commune a notifié un nouveau mémoire en réplique aux époux X... le 17 mars 2016 dans laquelle elle introduisait une nouvelle demande subsidiaire de sursis à statuer et soulevait un nouveau moyen au fond tiré de l'illégalité des constructions faites sur la parcelle litigieuse, sans davantage conclure sur le montant des indemnités ; - les époux X... ont répliqué à leur tour dans leurs mémoires des 18 et 21 mars 2016 pour répondre à ce nouveau moyen et aux conclusions du commissaire du gouvernement relatives au montant des indemnités ; qu'au vu de ces éléments, la cour considère que les époux X..., sauf à ce que le principe du contradictoire ne soit pas respecté, devaient pouvoir répliquer tant au commissaire du gouvernement qu'au nouveau moyen invoqué par la commune quelques jours avant l'audience ; que par ailleurs, les pièces produites les 18 et 21 mars 2016 par les époux X..., s'agissant des pièces n° 21 à 24, concernent l'évaluation des biens immobiliers litigieux en réplique non à la commune, qui en première instance comme en cause d'appel n'a jamais conclu sur le montant des indemnités, mais au commissaire du gouvernement, qui n'a pas invoqué en première instance une atteinte au principe du contradictoire de ce chef ; qu'il n'est pas explicité par la commune en quoi la pièce 25, qui constitue une lettre adressée le 7 novembre 2013 par elle-même aux époux X..., aurait nécessité une réplique, étant observé que la commune aurait eu la possibilité, si elle avait pu invoquer un motif utile, de conclure au rejet de cette pièce, ce qu'elle s'est abstenue de faire ; qu'enfin, il appartenait à la commune de communiquer en temps utile les pièces qu'elle entendait invoquer à l'appui de ses moyens, telles que le certificat d'urbanisme par elle adressé au notaire suit au projet de vente des époux X..., les documents d'urbanisme démontrant que les époux X... avaient réalisé des travaux non conformes ou encore les déclarations d'achèvement de travaux déposées par les époux X... de nature à démontrer que le délit de construction sans permis n'est pas prescrit ; qu'ainsi, la cour constate que le rejet par le premier juge de la demande de renvoi n'a nullement porté atteinte au respect du principe du contradictoire et que cette demande de renvoi n'était en réalité motivée que par l'espoir de la commune de voir aboutir la procédure de modification simplifiée du PLU avant que le juge de l'expropriation ne puisse statuer sur la demande des époux X... ; que la commune sera en conséquence déboutée de sa demande de nullité du jugement entrepris » ;

ALORS QUE le respect effectif du contradictoire et des droits procéduraux des parties constitue une cause de report de l'audience formulée par une partie ; qu'en l'espèce, à l'appui de sa demande d'annulation du jugement du 26 avril 2016, la commune de [...] faisait valoir que le juge de l'expropriation aurait dû faire droit à sa demande de report de l'audience du 22 mars 2016, dès lors que le plan local d'urbanisme était en cours de modification depuis le 25 février 2016 afin de supprimer l'emplacement réservé grevant la parcelle des époux X... et que cette procédure, portée à la connaissance des époux X... en novembre 2013, n'avait pas pu être mise en oeuvre préalablement, en raison des élections municipales de mars 2014 puis du transfert de la compétence de gestion du plan local d'urbanisme, initialement détenue par la commune, à la communauté de commune de la région d'Yvetot à compter de l'année 2015 ; qu'en refusant d'annuler le jugement sans rechercher si les circonstances ainsi invoquées par la commune ne justifiaient pas que, pour respecter le principe du contradictoire et l'effectivité des droits procéduraux de la commune, l'audience soit reportée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la commune de [...] de sa demande d'annulation du jugement rendu le 26 avril 2016 par le juge de l'expropriation et, en conséquence, déclaré Monsieur et Madame X... recevables en leur action au titre du droit de délaissement, ordonné le transfert de propriété de la parcelle [...] au profit de la commune et fixé à la somme de 318.900 euros l'indemnité totale de dépossession qui sera due par la commune aux époux X... ;

AUX MOTIFS QUE : « pour conclure à l'irrecevabilité de l'action des époux X..., la commune fait falloir qu'un emplacement qualifié de réservé peut être affranchi de la réserve avant l'intervention de la décision du juge de l'expropriation saisi d'un délaissement par le propriétaire, qu'en conséquence le transfert de propriété d'une parcellaire réservée et délaissée ne peut être prononcé si la réserve n'existe plus à la date de la décision judiciaire et que la délibération par laquelle une commune approuve la modification simplifiée de son PLU a pour effet d'interrompre la procédure de délaissement initiée par les propriétaires. Toutefois, il résulte des pièces produites et de l'historique de la procédure de modification simplifiée du PLU engagée à la suite de la délibération de la commune du 26 janvier 2016 que cette modification n'a été approuvée par la communauté de communes de la région d'Yvetot (CCRY), seule compétente, que le 2 juin 2016, alors que le premier juge avait déjà statué par décision du 26 avril 2016 et avait transféré la propriété de la parcellaire litigieuse à la commune. Ce moyen d'irrecevabilité sera en conséquence écarté » ;

Alors que si les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, en revanche, les conditions de mise en oeuvre de la procédure de délaissement doivent toujours être réunies au jour où la cour d'appel, saisie d'un recours contre le jugement d'expropriation, statue ; qu'en l'espèce, la cour a constaté que l'emplacement réservé ouvrant le droit de délaissement aux époux X..., avait été supprimé le 2 juin 2016, de sorte qu'il ne grevait plus le terrain des époux X... au jour où la cour a statué par arrêt du 10 mai 2017 ; qu'en ne constatant toutefois pas que l'action en délaissement était irrecevable ou privée d'objet, la cour d'appel a violé les articles L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et 561 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la commune de [...] de sa demande d'annulation du jugement rendu le 26 avril 2016 par le juge de l'expropriation et, en conséquence, déclaré Monsieur et Madame X... recevables en leur action au titre du droit de délaissement, ordonné le transfert de propriété de la parcelle [...] au profit de la commune et fixé à la somme de 318.900 euros l'indemnité totale de dépossession qui sera due par la commune aux époux X...,

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la demande d'annulation du jugement entrepris. Pour solliciter l'annulation du jugement entrepris sur le fondement des articles 16 du code de procédure civile et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, la commune reproche au premier juge de ne pas avoir fait droit à sa demande de renvoi de l'audience du mercredi 22 mars 2016 alors que : - les époux X... avaient conclu le 18 mars 2016 et le 21 mars 2016 en accompagnant à chaque fois leurs mémoires de nouvelles pièces (pièces 21 à 25) ; - le renvoi avait été sollicité par courrier du 21 mars 2016 afin de pouvoir répliquer à ces mémoires et pour analyser ces nouvelles pièces ; - en raison du refus de cette demande de renvoi, la commune a été privée de la possibilité de : * répliquer à l'expertise du cabinet Norexim (pièce n°22) et à l'estimation du cabinet Courel (pièce n°24), * verser aux débats le certificat d'urbanisme montrant que c'est l'existence de la cavité souterraine qui a conduit les époux B... à renoncer à l'achat et qui conduit aujourd'hui les époux X... à contraindre la commune à acquérir leur parcelle, * verser aux débats les documents d'urbanisme démontrant que les époux X... ont réalisé des travaux non conformes ; * verser aux débats les déclarations d'achèvement de travaux déposées par les époux X... et de démontrer ainsi que le délit de construction sans permis n'est pas prescrit ; que toutefois, il convient en premier lieu de souligner que la commune avait sollicité le renvoi dès le 18 mars 2016 pour un motif totalement étranger à ceux exposés ci-dessus: elle estimait en effet opportun que l'audience soit renvoyée à une date ultérieure dans le souci d'une bonne administration de la justice en attendant que la procédure de modification du plan local d'urbanisme qu'elle avait engagée visant à supprimer l'emplacement réservé puisse aboutir, ce afin que soit constatée l'irrecevabilité des demandes des époux X..., l'exercice du droit de délaissement étant conditionné par l'existence de cet emplacement réservé à la date où le juge statue ; qu'il est à noter à cet égard que la commune avait manifesté dès le 7 novembre 2013 par un courrier adressé aux époux X... qu'elle procéderait à la mise en oeuvre de la procédure de modification simplifiée du PLU devant aboutir à la suppression de l'emplacement réservé sur leur propriété, mais qu'elle a attendu que ces derniers saisissent le juge de l'expropriation en janvier 2006 pour mettre en oeuvre cette procédure administrative, qui n'avait pu aboutir lorsque le premier juge a statué ; qu'en second lieu, il n'apparaît pas que la commune ait été empêchée, du fait du refus de sa demande de renvoi de l'audience en première instance, de répliquer aux derniers mémoires et pièces des époux X... puisque : - les époux X... ont saisi le juge de l'expropriation et notifié leur mémoire à la commune les 6 et 7 janvier 2016, comprenant leurs demandes indemnitaires ; - la commune a déposé son mémoire au greffe le 11 février 2016, dans lequel elle demandait au premier juge de déclarer l'action des époux X... sans objet ou subsidiairement mal fondée dès lors que l'emplacement réservé avait été selon elle supprimé du PLU, sans qu'aucun moyen ni demande relatifs au montant des indemnités sollicitées n'y soient développés ; - l'ordonnance du juge de l'expropriation fixant la date commune de visite des lieux et de l'audience au 22 mars 2016 a été notifiée à la commune le 25 février 2016 ; - les époux X... ont notifié de nouvelles conclusions déposées au greffe le 4 mars 2016 en réplique au moyen de procédure soulevé par la commune ; - le commissaire du gouvernement a déposé ses conclusions au greffe le 10 mars 2016, contestant le montant des indemnités sollicitées, et les a notifiées dans le même temps aux parties ; - la commune a notifié un nouveau mémoire en réplique aux époux X... le 17 mars 2016 dans laquelle elle introduisait une nouvelle demande subsidiaire de sursis à statuer et soulevait un nouveau moyen au fond tiré de l'illégalité des constructions faites sur la parcelle litigieuse, sans davantage conclure sur le montant des indemnités ; - les époux X... ont répliqué à leur tour dans leurs mémoires des 18 et 21 mars 2016 pour répondre à ce nouveau moyen et aux conclusions du commissaire du gouvernement relatives au montant des indemnités ; qu'au vu de ces éléments, la cour considère que les époux X..., sauf à ce que le principe du contradictoire ne soit pas respecté, devaient pouvoir répliquer tant au commissaire du gouvernement qu'au nouveau moyen invoqué par la commune quelques jours avant l'audience ; que par ailleurs, les pièces produites les 18 et 21 mars 2016 par les époux X..., s'agissant des pièces n° 21 à 24, concernent l'évaluation des biens immobiliers litigieux en réplique non à la commune, qui en première instance comme en cause d'appel n'a jamais conclu sur le montant des indemnités, mais au commissaire du gouvernement, qui n'a pas invoqué en première instance une atteinte au principe du contradictoire de ce chef ; qu'il n'est pas explicité par la commune en quoi la pièce 25, qui constitue une lettre adressée le 7 novembre 2013 par elle-même aux époux X..., aurait nécessité une réplique, étant observé que la commune aurait eu la possibilité, si elle avait pu invoquer un motif utile, de conclure au rejet de cette pièce, ce qu'elle s'est abstenue de faire ; qu'enfin, il appartenait à la commune de communiquer en temps utile les pièces qu'elle entendait invoquer à l'appui de ses moyens, telles que le certificat d'urbanisme par elle adressé au notaire suit au projet de vente des époux X..., les documents d'urbanisme démontrant que les époux X... avaient réalisé des travaux non conformes ou encore les déclarations d'achèvement de travaux déposées par les époux X... de nature à démontrer que le délit de construction sans permis n'est pas prescrit ; qu'ainsi, la cour constate que le rejet par le premier juge de la demande de renvoi n'a nullement porté atteinte au respect du principe du contradictoire et que cette demande de renvoi n'était en réalité motivée que par l'espoir de la commune de voir aboutir la procédure de modification simplifiée du PLU avant que le juge de l'expropriation ne puisse statuer sur la demande des époux X... ; que la commune sera en conséquence déboutée de sa demande de nullité du jugement entrepris ; (
) ; Sur l'évaluation du prix. Il résulte de l'article L. 230-3 du code de l'urbanisme que : - le juge de l'expropriation fixe le prix de l'immeuble, comprenant l'indemnité de réemploi, comme en matière d'expropriation, sans qu'il soit tenu compte des dispositions qui ont justifié le droit de délaissement ; - la date de référence prévue à l'article L. 322-2 du code de l'expropriation, à laquelle les biens doivent être estimés selon leur usage effectif, est " celle à laquelle est devenue opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public le plan local d'urbanisme ou l'approuvant, le révisant ou le modifiant et délimitant la zone dans laquelle est situé le terrain" ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que le PLU de la commune de [...] a été publié le 14 juin 2013, jour qui sera retenu comme date de référence ; que la commune ne conteste pas à titre subsidiaire le montant des indemnités retenues par le premier juge ; que sur leur appel incident de ce chef, les époux X... font valoir qu'ils ont signé une promesse de vente le 9 février 2013 au prix de 450 000 euros et que le prix de 1515 €/m² proposé par le commissaire du gouvernement est très inférieur au prix du marché, de même que le prix de 1700 €/m² retenu par le premier juge ; qu'ils produisent à cet égard : - une attestation notariale de 2012 faisant ressortir un prix au mètre carré d'environ 2000 €, leur propriété y étant évaluée entre 400 000 € et 450 000 € ; - une évaluation réalisée en 2014 par Norexim retenant un prix de 1700 €/m² ; - un document extrait d'un site internet Dimki dont il résulte un prix de 2960 €/m² ; - une estimation du prix de leur propriété entre 360 000 € et 380 000 € établie par le cabinet immobilier Courel en 2014 ; que toutefois, l'évaluation notariale de 2012 comme celle du cabinet Courel de 2014 ne reposent sur aucun élément de comparaison mais sur la simple appréciation de leurs auteurs respectifs ; que le document Dimki évalue le prix moyen du m² pour les maisons à 1604 € et non à 2960 €, prix retenu pour les appartements ; que seule l'évaluation faite par Norexim cite des mutations d'immeubles de rapport faisant apparaître des éléments de comparaison, ce à des prix très variables, mais pour une moyenne de 1700 €/m² ; que ce prix moyen retenu par le premier juge apparaît ainsi justifié » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Fixation du prix : En ce qui concerne la valeur vénale de l'ensemble immobilier, sur le marché local récent, une cession du même type de biens, soit un immeuble de rapport mixte à Yvetot, indique un prix au mètre carré de 1515 €, en octobre 2014 ; que la comparaison doit exclure les immeubles d'habitation, non mixtes, comme le sont les termes proposés par les demandeurs ; que compte tenu du bon entretien général des lieux visités, du jardin existant à l'arrière (sur la parcelle de 6 ares 98 centiares, de l'existence d'un chalet-abri de jardin, de l'actualisation de valeur, et de l'évaluation expertale Norexim « par comparaison » en juillet 2014, le prix de 1 700 € le mètre carré peut être retenu, sur 170 m² de surface utile (excluant donc les 20 m² du chalet-studio), soit une indemnité principale de 289 000 € ; que s'y ajoute l'indemnité de remploi, calculée comme le propose Madame le commissaire du gouvernement, soit 29 900 € (20 % jusqu'à 5000 €, 15 % entre 5001 € et 15 000 €, 10 % sur 274 000 €) ; que l'indemnité totale de dépossession due aux époux X... au titre de leur droit de délaissement, s'élèvent en conséquence à 318 900 € » ; qu'il sera ici rappelé que les propriétaires ne sont pas recevables à solliciter les indemnités d'éviction aux lieu et place de leurs locataires, lesquels ne feront peut-être pas l'objet d'éviction au surplus » ;

ALORS QUE le juge d'appel de l'expropriation doit évaluer la valeur vénale du bien délaissé au jour de la décision de première instance ; que s'il doit tenir compte de l'usage effectif du bien à la date de référence, en revanche, il doit prendre en considération tous les éléments antérieurs au jugement d'expropriation et pouvant influer sur la valeur vénale du bien à cette date ; qu'en l'espèce, pour confirmer le montant de l'indemnité principale du bien fixée par le juge de l'expropriation à la somme de 289.000 €, la cour s'est bornée à adopter les motifs des premiers juges qui s'étaient fondés sur le « bon entretien général des lieux ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses propres constatations que le terrain était situé dans le périmètre de risques naturels liés à la présence d'une cavité souterraine (v. arrêt, p. 7) et qu'il lui incombait de tenir compte de cette circonstance existant au jour du jugement de première instance et entraînant nécessairement une diminution de la valeur vénale du bien, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-20812
Date de la décision : 06/09/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 10 mai 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 06 sep. 2018, pourvoi n°17-20812


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.20812
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