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04/09/2018 | FRANCE | N°17-16537

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 septembre 2018, 17-16537


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. E... , X..., Y... et Z... (les associés fondateurs) ont, le 15 mai 2008, conclu, pour le compte de la société H3M Immo, en cours de formation, un contrat de franchise avec la société Foncia franchise (le franchiseur) pour une durée de sept ans, renouvelable par tacite reconduction, en vue de l'exercice des activités de transaction et de location immobilière sous l'enseigne Foncia, à l'exclusion des activités de gestion locative et de syndic ; que le 13 juin 2013, le

franchiseur a notifié à la société H3M Immo et aux associés fonda...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. E... , X..., Y... et Z... (les associés fondateurs) ont, le 15 mai 2008, conclu, pour le compte de la société H3M Immo, en cours de formation, un contrat de franchise avec la société Foncia franchise (le franchiseur) pour une durée de sept ans, renouvelable par tacite reconduction, en vue de l'exercice des activités de transaction et de location immobilière sous l'enseigne Foncia, à l'exclusion des activités de gestion locative et de syndic ; que le 13 juin 2013, le franchiseur a notifié à la société H3M Immo et aux associés fondateurs le non-renouvellement du contrat de franchise à son terme ; que s'estimant victimes d'un abus du droit de ne pas renouveler le contrat et d'une inexécution fautive de celui-ci, la société H3M Immo et ses associés fondateurs ont assigné en responsabilité la société Foncia franchise et la société Foncia groupe , société mère de la précédente exploitant un ensemble d'agences en succursales ;

Sur le premier moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches :

Attendu que les associés fondateurs et la société H3M Immo font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes indemnitaires formées contre les sociétés Foncia franchise et Foncia groupe au titre de l'inexécution fautive du contrat alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus de préciser et d'expliciter les éléments de preuve sur lesquels ils fondent leur décision ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société H3M Immo et ses cogérants n'étaient pas fondés à reprocher à la société Foncia franchise de ne pas avoir mis à jour son savoir-faire, l'arrêt retient que « le franchiseur apparaît avoir procédé à une actualisation régulière à destination de l'ensemble du réseau et partant, envers la société H3M Immo, grâce à la mise en place d'opérations de communication (voir cotes 30, 39 et 41 du dossier des sociétés Foncia), à la mise à disposition et à l'actualisation du dispositif Foncia Premium (voir cotes 24, 35 et 50), et encore à l'organisation de séminaires et de conventions du réseau (voir cotes 38, 45 et 48 et encore 79 à 82), outre la formation initiale du franchisé et de son personnel (voir cote 98) » ; qu'en statuant ainsi, sans préciser ni expliciter les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que les juges du fond sont tenus d'analyser au moins sommairement les pièces versées aux débats sur lesquelles ils se fondent ; qu'en se prononçant, par les mêmes motifs, au seul visa général des pièces versées aux débats par les sociétés Foncia, sans les analyser, même sommairement, la cour d'appel a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que le débiteur est condamné au paiement de dommages-intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que, dans leurs écritures d'appel, la société H3M Immo et ses gérants soulignaient que pour dénoncer l'inertie de la société Foncia franchise et les manquements du franchiseur, les franchisés Foncia s'étaient réunis en un collectif dénommé « Groupement des Franchisés Foncia » et avaient adressés aux instances dirigeantes des sociétés Foncia franchise et Foncia groupe de nombreux courriers et courriels de récriminations dénonçant les défaillances du franchiseur, les dysfonctionnements du réseau et le traitement discriminatoire dont ils étaient l'objet par rapport aux agences intégrées Foncia (notamment courriers des 27 février, 16 septembre, 27 septembre, 16 octobre et 2 novembre 2013), d'une part, et que ni la société Foncia franchise ni la société Foncia groupe n'avaient dénié apporter la moindre réponse à leurs demandes expresses, si ce n'est en notifiant le non-renouvellement de leur contrat de franchise à 43 franchisés, d'autre part ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement, pour rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires formées par la société franchisée et ses gérants à l'encontre des sociétés Foncia franchise et Foncia groupe , que la société H3M Immo n'établissait pas que la promesse d'accès aux métiers de la gestion locative faite par le franchiseur était certaine, qu'elle n'avait pas disposé d'un logiciel Totalimmo suffisamment performant, que le franchiseur avait manqué à son obligation d'assistance et de mise à jour de son savoir-faire, qu'il n'avait pas développé la synergie inter-agences et qu'il avait laissé s'instituer une discrimination entre les agences intégrées et les agences franchisées, sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé, s'il ne s'évinçait pas des nombreux courriers circonstanciés de dénonciation de manquements du franchiseur et de dysfonctionnement du réseau qui avait été adressés aux dirigeants des société Foncia franchise et Foncia groupe au nom des franchisés du réseau par le Groupement des franchisés Foncia, comme de l'absence de toute réponse du franchiseur à ces courriers, que ce dernier s'était rendu coupable de plusieurs manquements fautifs à l'égard de l'ensemble des membres du réseau de franchise, et donc en particulier à l'égard de la société H3M Immo, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en étayant chacune des constatations critiquées par la première branche par un renvoi à une ou plusieurs pièces, précisément identifiées, établissant qu'elles ont été analysées, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'en détailler le contenu, a statué par une décision suffisamment motivée ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve, que le franchisé procède par voie d'affirmations, sans justifier d'aucun manquement précis et concret dont il aurait souffert, cependant que la preuve contraire ressort de plusieurs éléments versés aux débats par le franchiseur, et relevé qu'un courriel de remerciements du 20 mars 2012 adressé par le franchisé établit la participation positive du franchiseur pour faciliter le développement de l'activité commerciale du franchisé, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la troisième branche, que ces constatations et appréciations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'obligation pour le juge ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que pour dire que la société Foncia franchise n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de ne pas renouveler le contrat de franchise, l'arrêt relève que les associés fondateurs et la société H3M Immo reprochent en réalité au franchiseur d'avoir, au cours de l'exécution du contrat litigieux, par une approche délibérément discriminatoire et en favorisant outrageusement l'activité des sociétés succursalistes, adopté, dès le début des relations contractuelles, un comportement déloyal ayant pris la forme de nombreux manquements contractuels, dont l'accumulation est révélatrice d'une intention de nuire, et retient qu'aucun des arguments avancés visant à établir la matérialité de fautes délibérées que la société Foncia franchise aurait, directement et personnellement, commises au préjudice de la société H3M Immo ne se trouve étayé de preuves suffisantes, précises, concrètes, sérieuses et convaincantes d'une volonté intentionnelle de porter atteinte à la liberté d'action de cette société franchisée, commerçant indépendant ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions d'appel, la société H3M Immo et les associés fondateurs soutenaient que la responsabilité contractuelle du franchiseur devait être engagée chaque fois que son attitude avait été dictée par la mauvaise foi, sans qu'il ne soit nécessaire de démontrer une quelconque intention de nuire de sa part, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il dit que la société Foncia franchise n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de ne pas renouveler le contrat de franchise de la société H3M Immo et rejette en conséquence les demandes indemnitaires formées à ce titre par MM. E... , X..., Y... et Z... et la société H3M Immo, l'arrêt rendu le 24 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les sociétés Foncia franchise et Foncia groupe aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société H3M Immo, MM. E... , X..., Y... et Z... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour MM. E... , X..., Y..., Z... et la société H3M Immo

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SARL H3M Immo, MM. H... E..., Johann X..., Yoni Y... et Sébastien Z... de leurs demandes indemnitaires dirigées contre la SAS Foncia Franchise et la SAS Foncia Groupe ;

Aux motifs que « la situation de tout franchisé est par nature précaire, en ce sens que le franchiseur a le droit de ne pas renouveler le contrat consenti sans avoir à motiver son refus, dès lors qu'il respecte de manière effective le délai de préavis contractuel et quoi qu'il en soit, un délai de préavis raisonnable, et en ce sens également que le franchisé indépendant n'a pas en fin de contrat, droit à une indemnité de clientèle. En l'espèce, le délai de préavis contractuel de 6 mois apparaît avoir été parfaitement respecté, la société Foncia franchise ayant en effet fait part de sa volonté de non-renouvellement plus de 24 mois avant le terme fixé. Il est par ailleurs, dans la nature d'un réseau de franchise, de permettre au franchiseur de multiplier les établissements de la marque et d'en établir un maillage serré, sans qu'il ait à en trouver le financement. Le contrat de franchise est encore, par essence, un contrat de collaboration et de coopération pour la réalisation d'un but commun, ce but ne pouvant être que la création, la fidélisation ainsi que le développement de la clientèle. Toute création, développement ou animation d'un réseau de franchise implique que le franchiseur s'engage ainsi à permettre la réussite commerciale de chaque franchisé tandis que, au-delà même des obligations spécifiées dans le contrat le liant à son partenaire, le franchiseur doit respecter et apporter les éléments inhérents à toute relation de cette nature et partant, une marque à titre d'enseigne, un savoir-faire ainsi qu'une assistance permanente. Cette obligation s'analyse cependant en une obligation de moyens. Le fait que la décision de non-renouvellement notifiée à la société H3M Immo ait été concomitante à celles intervenues à destination de nombre de membres du même réseau, ne saurait à lui seul, établir que la société Foncia franchise s'est employée à utiliser les capacités financières du franchisé à l'unique fin de développer le maillage du territoire et d'assurer la profitabilité de ses succursales au détriment de ce franchisé et qu'elle a ainsi exercé son activité de franchiseur de manière égoïste, sans rechercher le succès du réseau de franchise et partant, celui de l'agence exploitée par la société H3M Immo. En l'espèce, le franchisé reproche en réalité au franchiseur d'avoir au cours de l'exécution du contrat litigieux, par une approche délibérément discriminatoire et en favorisant outrageusement l'activité des sociétés succursalistes, adopté dès le début des relations contractuelles, un comportement déloyal ayant pris la forme de nombreux manquements contractuels dont l'accumulation est révélatrice d'une intention de nuire visant à l'empêcher de développer normalement son activité. Les parties appelantes n'apparaissent en effet pas, explicitement, solliciter la résiliation judiciaire du contrat de franchise pour fautes commises durant les relations contractuelles, la déloyauté imputée au franchiseur pour la période considérée n'étant d'évidence alléguée qu'au seul soutien, du grief d'un exercice abusif du droit de non-renouvellement du contrat de franchise litigieux ainsi qu'explicitement souligné en p. 49 des écritures des appelants. Une simple déloyauté contractuelle dans l'exécution du contrat, à supposer qu'elle soit établie, ne peut s'analyser de manière intrinsèque en une intention de nuire susceptible de faire dégénérer le droit de non-renouvellement d'un contrat de franchise en abus, sauf à ruiner toute portée à ce droit qui ne se concevrait alors que comme un droit soumis à la bonne exécution par le franchiseur, de ses obligations contractuelles. Quoi qu'il en soit, aucun des arguments avancés visant à établir la matérialité de fautes délibérées que la société Foncia franchise aurait, aux dires de ses adversaires, directement et personnellement, commises au préjudice de la société H3M Immo et de ses co-gérants et co-exploitants, ne se trouve en l'espèce étayé, de preuves suffisantes, précises, concrètes, sérieuses et convaincantes d'une volonté intentionnelle de porter atteinte à la liberté d'action de la société H3M Immo, commerçant indépendant. Les seuls éléments justifiés par cette dernière société et ses co-gérants se rapportent ainsi à des difficultés ponctuelles d'exécution du contrat ayant principalement trait à la synergie inter-agences, à l'absence de mise à jour du savoir-faire, à une relative inefficience du logiciel Totalimmo ou encore à l'absence d'assistance des franchisés et de promotion et d'animation du réseau de franchise. Ces éléments sont cependant trop épars pour correspondre ensemble à une stratégie délibérée de déloyauté avérée du franchiseur voire pour certains, totalement inopérants sur le plan probatoire. C'est ainsi que le fait pour les agences franchisées de ne pas figurer dans la rubrique « Vendre » alors qu'il est constant qu'elles sont par ailleurs référencées en tant que prospects sur le site Foncia n'est pas en soi une infraction au contrat de franchise litigieux, puisque ce dernier ne prévoit sur ce point aucune obligation précise à la charge du franchiseur laissant entière l'indépendance de l'entreprise franchisée de décider des modalités de sa communication externe. La société H3M Immo ne saurait être davantage suivie dans sa réclamation tendant à voir consacrer la faute du franchiseur à qui elle fait grief de ne pas lui avoir permis d'accéder au métier de la gestion locative alors qu'elle ne l'a pas choisi lors de la signature du contrat et qu'aucun élément ou circonstances du dossier n'établit que la promesse de cet accès était certaine. Aucun élément du dossier, nonobstant la présentation générale de la plaquette de présentation de l'enseigne Foncia remise au franchisé, ne permet de soutenir que la société Foncia franchise a entretenu ce dernier dans l'illusion que la demande d'autorisation de ce complément d'activité n'était qu'une formalité. Franchise ne rapporte pas davantage la preuve que faute d'avoir disposé d'un logiciel suffisamment performant intitulé Totalimmo, répondant aux exigences de l'enseigne pour l'exploitation de son agence, il est aujourd'hui fondé à imputer ainsi à faute du franchiseur, un manquement à son obligation d'assistance ou de mise à disposition du savoir-faire Foncia lui ayant occasionné un préjudice spécifique. Il est en effet constant que la société H3M Immo a signé un contrat de prestation de service informatique avec la société tierce Seiitra, éditeur du logiciel Totalimmo et filiale à 100 % de la société Foncia groupe tandis qu'elle ne justifie pas s'être plainte auprès de cette société tierce, durant l'exécution du contrat, de dysfonctionnements précis et de l'absence de solutions apportées. Les difficultés liées à la mise en oeuvre du logiciel Totalimmo, vecteur du savoir-faire du franchiseur, ne seront donc pas retenues, la société H3M ne prétendant en effet pas ne pas avoir bénéficié des données prévues par l'article 12 du contrat intitulé « informatique ». Au demeurant, il ressort de la pièce cotée A 32 transmise par les appelants eux-mêmes, que la société H3M Immo, a par courrier du 20 mars 2012, tenu à « remercier Foncia franchise pour les bonnes nouvelles (...) annoncées lors de la réunion régionale du 16 mars 2012 (...) » et souligné encore : « Nous tenons à vous féliciter pour les nouveaux challenges collaborateurs qui vont nous permettre d'améliorer notre management et de dynamiser notre équipe. ». Ces dernières circonstances établissent à tout le moins la preuve d'une participation positive du franchiseur pour faciliter le développement par le franchisé de son activité commerciale. La société H3M Immo ainsi que MM. H... D..., Johann X..., Yoni Y... et Sébastien Z... font aussi vainement reproche au franchiseur de ne pas avoir mis à jour son savoir-faire, en expliquant que celui-ci relevait de l'essence des relations contractuelles. Ils observent ne plus avoir reçu aucune note de référence au-delà de celle du 28 janvier 2011 et expliquent que cela ne peut qu'avoir pénalisé l'activité de l'agence alors que par ailleurs, le réseau a connu cinq changements de directeur de la franchise en seulement quelques années, circonstances ayant donné lieu à de nombreuses incohérences d'action. Ainsi que le souligne la partie adverse, le sérieux d'un réseau ne se mesure pas à la fréquence des mises à jour de son savoir-faire mais à la qualité de ce dernier et, quoi qu'il en soit, dans les circonstances de cette espèce, le franchiseur apparaît avoir procédé à une actualisation régulière à destination de l'ensemble du réseau et partant, envers la société H3M Immo grâce à la mise en place d'opérations de communication (voir cotes 30, 39 et 41 du dossier des sociétés Foncia), à la mise à disposition et à l'actualisation du dispositif Fonda Premium (voir cotes 24, 35 et 50), et encore à l'organisation de séminaires et de conventions du réseau –(voir cotes 38, 45 et 48 et encore 79 à 82), outre la formation initiale du franchisé et de son personnel (voir cote 98). La société Foncia franchise répond aussi par des documents idoines aux griefs avancés par ses adversaires au demeurant sans preuve concrète et justifie ainsi avoir développé la synergie inter-agences sans discrimination particulière entre l'agence franchisée et les agences intégrées du même territoire ne serait-ce que par la mise à disposition du logiciel Totalimmo tendant à permettre la mise en oeuvre de la synergie interagences. La société H3M Immo n'établit pas enfin que le franchiseur a enfreint ses obligations contractuelles en raison d'atteintes qui auraient été portées par des agences intégrées ou d'autres franchisées à son exclusivité territoriale. Le contrat litigieux accorde en effet à cette société une exclusivité territoriale d'enseigne limitée à la création ou à l'acquisition, pour la durée des relations contractuelles, de cabinets immobiliers sous l'enseigne Foncia par le franchiseur ou par des tiers au contrat mais ne limite aucune vente active ni passive de sorte que la société H3M Immo pouvait prendre des mandats en dehors de son territoire tandis que le franchiseur, comme les succursales sous enseigne Foncia, pouvaient réaliser sur le territoire de la société H3M Immo des ventes tant passives qu'actives. De ces points de vue, il n'est ni allégué ni établi, que des agences intégrées sous l'enseigne Foncia se sont implantées sur le territoire concédé lors de l'exécution des relations contractuelles avec la société H3M Immo. Rien ne permet de soutenir par ailleurs que le service My Foncia concerne le métier de transaction-location immobilière et non pas, uniquement, celui de la gestion locative et l'activité de syndic. Aucun élément du dossier ne permet encore de conclure que le changement fréquent de dirigeants à la tête du réseau de franchise a été source de non-efficience du réseau alors que la qualité professionnelle des dirigeants qui se sont succédés n'est par ailleurs pas remise en cause ni démontrée. Contrairement aux affirmations de ses adversaires, la société Foncia franchise ne s'est enfin pas précisément engagée sur le long terme à donner accès à la société H3M Immo aux autres métiers immobiliers de l'enseigne, tels la gestion immobilière et la copropriété, peu important de ce point de vue les énonciations très générales de la plaquette de présentation du réseau Foncia remis antérieurement à la signature du contrat. Il suit de tout ce qui précède que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a écarté tout abus de la société Foncia franchise dans l'exercice de son droit de non-renouvellement puisqu'aucune circonstance ou élément porté aux débats ne permet de considérer que la société Foncia franchise a réellement entretenu la société H3M Immo dans l'illusion que le renouvellement du contrat qui lui avait été consenti était acquis. Il ressort ainsi du contrat signé entre les parties que la clause 21 précise in fine : "le contrat se renouvellera par tacite reconduction par période de sept ans, sauf notification d'une volonté de résiliation par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, six mois au moins avant chaque terme. (...)." Aucun abus n'étant retenu contre le franchiseur, la demande formée contre la société Foncia groupe à qui il est reproché d'avoir facilité la commission par la société Foncia franchise , de fautes prétendument constitutives d'abus, devient sans objet et doit être écartée » ;

Alors, premièrement, que le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que pour débouter les exposants de leur demande fondée sur le refus abusif de renouvellement du contrat de franchise, l'arrêt attaqué retient « que le franchisé reproche en réalité au franchiseur d'avoir, au cours de l'exécution du contrat litigieux, par une approche délibérément discriminatoire et en favorisant outrageusement l'activité des sociétés succursalistes, adopté dès le début des relations contractuelles, un comportement déloyal ayant pris la forme de nombreux manquements contractuels dont l'accumulation est révélatrice d'une intention de nuire, ainsi que soutenu explicitement en page 55 de ses écritures » (arrêt p. 19, § 3); qu'en se fondant sur ces motifs, cependant qu'aux termes de leurs écritures (concl. p. 54, § 7 et 9), les exposants, loin d'alléguer d'une intention de nuire de leur franchiseur, faisaient expressément valoir que la démonstration d'une telle intention n'était pas nécessaire pour établir son comportement abusif, car déloyal, la cour d'appel les a dénaturées, a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Alors, deuxièmement, que le refus du franchiseur de renouveler un contrat de franchise parvenu à son terme peut, même si un délai de préavis suffisant a été respecté, revêtir un caractère abusif en raison des circonstances particulières qui l'ont accompagné ou précédé, dès lors que ces circonstances révèlent un comportement déloyal du franchiseur, quand bien même son intention ou sa volonté délibérée de nuire au franchisé ne serait pas démontrée; que pour débouter les exposants de leur demande fondée sur l'abus commis par le franchiseur dans l'exercice de son droit de ne pas renouveler le contrat, l'arrêt retient « qu'une simple déloyauté contractuelle dans l'exécution du contrat, à supposer qu'elle soit établie, ne peut ainsi s'analyser de manière intrinsèque en une intention de nuire susceptible de faire dégénérer le droit de non-renouvellement du contrat de franchise en abus sauf, à ruiner toute portée à ce droit qui ne se concevrait alors que comme un droit soumis à la bonne exécution par le franchiseur de ses obligations contractuelles » (arrêt p. 19, § 4), avant d'ajouter « qu'aucun des arguments avancés visant à établir la matérialité de fautes délibérées que la société Foncia franchise aurait, aux dires de ses adversaires, directement et personnellement, commises au préjudice de la société H3M Immobilier et de ses co-gérants et co-exploitants ne se trouve en l'espèce étayé de preuves suffisantes, précises, concrètes, sérieuses et convaincantes, d'une volonté intentionnelle de porter atteinte à la liberté d'action de cette société franchisée, commerçant indépendant » (arrêt p. 20, § 1) ; qu'en statuant ainsi, par des motifs radicalement inopérants et impropres à exclure la déloyauté dont le franchiseur aurait pu faire montre dans l'exercice de son droit au non renouvellement du contrat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1240 du code civil ;

Alors, troisièmement, que les juges du fond sont tenus de préciser et d'expliciter les éléments de preuve sur lesquels ils fondent leur décision ; qu'en l'espèce, pour considérer que la SARL H3M Immo et ses co-gérants n'étaient pas fondés à reprocher à la SAS Foncia Franchise de ne pas avoir mis à jour son savoir-faire, l'arrêt retient que « le franchiseur apparaît avoir procédé à une actualisation régulière à destination de l'ensemble du réseau et partant, envers la société H3M Immo, grâce à la mise en place d'opérations de communication (voir cotes 30, 39 et 41 du dossier des sociétés Foncia), à la mise à disposition et à l'actualisation du dispositif Fonda Premium (voir cotes 24, 35 et 50), et encore à l'organisation de séminaires et de conventions du réseau (voir cotes 38, 45 et 48 et encore 79 à 82), outre la formation initiale du franchisé et de son personnel (voir cote 98) » (arrêt p. 21, § 2) ; qu'en statuant ainsi, sans préciser ni expliciter les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors, quatrièmement, que les juges du fond sont tenus d'analyser au moins sommairement les pièces versées aux débats sur lesquelles ils se fondent ; qu'en se prononçant, par les mêmes motifs, au seul visa général des pièces versées aux débats par les sociétés Foncia, sans les analyser, même sommairement, la cour d'appel a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

Alors, cinquièmement, que le débiteur est condamné au paiement de dommages-intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ; que dans leurs écritures d'appel, la société H3M Immo et ses gérants soulignaient que pour dénoncer l'inertie de la société Foncia franchise et les manquements du franchiseur, les franchisés Foncia s'étaient réunis en un collectif dénommé « Groupement des Franchisés Foncia » et avaient adressés aux instances dirigeantes des sociétés Foncia franchise et Foncia groupe de nombreux courriers et courriels de récriminations dénonçant les défaillances du franchiseur, les dysfonctionnements du réseau et le traitement discriminatoire dont ils étaient l'objet par rapport aux agences intégrées Foncia (notamment courriers des 27 février, 16 septembre, 27 septembre, 16 octobre et 2 novembre 2013), d'une part, et que ni la société Foncia franchise , ni la société Foncia groupe n'avaient dénié apporter la moindre réponse à leurs demandes expresses, si ce n'est en notifiant le non-renouvellement de leur contrat de franchise à 43 franchisés, d'autre part ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement, pour rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires formées par la société franchisée et ses gérants à l'encontre des sociétés Foncia franchise et Foncia groupe , que la société H3M Immo n'établissait pas que la promesse d'accès aux métiers de la gestion locative faite par le franchiseur était certaine, qu'elle n'avait pas disposé d'un logiciel Totalimmo suffisamment performant, que le franchiseur avait manqué à son obligation d'assistance et de mise à jour de son savoir-faire, qu'il n'avait pas développé la synergie inter-agences et qu'il avait laissé s'instituer une discrimination entre les agences intégrées et les agences franchisées, sans rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé, s'il ne s'évinçait pas des nombreux courriers circonstanciés de dénonciation de manquements du franchiseur et de dysfonctionnement du réseau qui avait été adressés aux dirigeants des société Foncia franchise et Foncia groupe au nom des franchisés du réseau par le Groupement des franchisés Foncia, comme de l'absence de toute réponse du franchiseur à ces courriers, que ce dernier s'était rendu coupable de plusieurs manquements fautifs à l'égard de l'ensemble des membres du réseau de franchise, et donc en particulier à l'égard de la société H3M Immo, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SARL H3M Immo, MM. H... D... , Johann X..., Yoni Y... et Sébastien Z... de leur demande tendant à voir dire que la clause de non-réaffiliation insérée à l'article 23 du contrat de franchise signé le 15 mai 2008 est sans effet et sans portée ;

Aux motifs que « la clause de non-réaffiliation stipulée à l'article 23 du contrat de franchise litigieux s'énonce comme suit : « Pendant une année à compter du retrait, de toutes les spécificités du concept Fonda, Franchise et le foncié ne pourront directement ou indirectement s'affilier, adhérer ou participer d'une manière quelconque à un groupement ayant une activité proche ou similaire à celle de Foncia pour exploiter ladite activité dans les locaux faisant l'objet des présentes stipulations contractuelles ». La société Foncia franchise reproche aux premiers juges d'avoir décidé de la nullité de cette clause sans en expliciter réellement les motifs, alors que cette réclamation se heurte aux règles de prescription récemment modifiées par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 puisque formée au-delà du délai de 5 ans à compter de la date de signature du contrat. Elle ajoute que, quoi qu'il en soit, la validité de cette clause, qui se borne à restreindre la liberté d'affiliation à un autre réseau et qui n'équivaut pas à une clause de non-concurrence, ne peut dépendre d'un événement postérieur à la formation du contrat et est dans les circonstances de cette espèce parfaitement limitée tant dans le temps que dans l'espace. La clause litigieuse apparaît limitée à un an ainsi qu'aux locaux dans lesquels la société H3M Immo exerce ses activités pendant l'exécution du contrat de franchise, soit [...] , adresse mentionnée à l'article 7 « lieu d'implantation » du dit contrat. Une clause de cette nature ne peut être justifiée que par la protection des avantages concurrentiels offerts par le réseau et est censée protéger celui-ci, notamment contre la divulgation d'un savoir-faire ou de (sic) des droits de propriété industrielle appartenant au réseau, ou encore préserver l'image de marque du réseau. En l'espèce, outre que la demande formée par le franchiseur et ses cogérants n'est pas nécessairement une demande de nullité au sens technique du terme, l'application de cette clause, qui répond aux conditions de validité nécessaires, reste légitime puisque, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le réseau qu'elle vise à protéger concerne non seulement les équipes franchisées, mais également les succursales et cabinets indépendants à l'enseigne, si bien que l'application combinée des articles « Secret » et 23 « Effet de l'extinction du contrat » du contrat litigieux est d'évidence insuffisante à garantir la protection recherchée. Le jugement entrepris sera donc sur ce point réformé » ;

Alors, d'une part, qu'une clause de non réaffiliation n'est licite que lorsqu'elle est nécessaire à la protection des intérêts légitimes de son bénéficiaire ; qu'en se bornant à relever qu'en dépit de la volonté de la société Foncia franchise de se désengager de la franchise au bénéfice de l'exploitation directe par des agences intégrées, l'application de la clause de non-réaffiliation stipulée au contrat de franchise demeurait « légitime », sous prétexte que le réseau qu'elle visait à protéger concernait « non seulement les équipes franchisées, mais également les succursales et cabinets indépendants à l'enseigne » et que la mise en oeuvre combinée des articles 17 et 23 du contrat, le premier imposant une obligation au secret, le second régissant les effets de son extinction, était « d'évidence insuffisante à garantir la protection recherchée », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le savoir-faire de la société Foncia franchise était à ce point secret, substantiel et identifié que sa protection rendait nécessaire la clause de non-réaffiliation stipulée au contrat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 420-1 du code de commerce ;

Alors, d'autre part, et en tout état de cause, qu'à supposer qu'elle soit justifiée par l'intérêt légitime de son bénéficiaire, une clause de non réaffiliation n'est licite qu'à la condition d'être proportionnée à cet intérêt ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer valable la clause de non-réaffiliation stipulée au contrat litigieux et son application « légitime », que cette clause visait à protéger « non seulement les équipes franchisées, mais également les succursales et cabinets indépendants à l'enseigne » et que la mise en oeuvre combinée des articles 17 et 23 du contrat, le premier imposant une obligation au secret, le second régissant les effets de son extinction, était « d'évidence insuffisante à garantir la protection recherchée », sans préciser ou expliquer en quoi la clause de non-réaffiliation était proportionnée aux intérêts légitimes de la société Foncia franchise , la cour d'appel a une nouvelle fois privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 420-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-16537
Date de la décision : 04/09/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 24 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 sep. 2018, pourvoi n°17-16537


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.16537
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