LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 29 mars 2017), que la société Lodel, locataire de locaux à usage commercial appartenant à la société PMP, s'est vu refuser par celle-ci l'autorisation de céder son droit au bail à la société Subway ; qu'un jugement du 28 août 2013 a prononcé sa liquidation judiciaire ; que Mme X..., désignée en qualité de mandataire liquidateur, a assigné la société PMP en réparation du préjudice causé ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient qu'il résulte d'une correspondance du 27 février 2014, portant la mention "officielle", adressée par l'avocat de la société Lodel à l'avocat de la société PMP, que ce dernier lui avait adressé une lettre, le 12 décembre 2013, non produite, faisant état du refus d'agrément ;
Qu'en statuant ainsi, en se fondant, à titre de preuve, sur la lettre du 12 décembre 2013, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si celle-ci présentait un caractère officiel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient encore que le bailleur a refusé son agrément pour un motif légitime ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du mandataire liquidateur de la société Lodel soutenant qu'à tout le moins la réponse tardive du bailleur à la demande d'agrément avait fait perdre à la société une chance de trouver un autre cessionnaire, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société PMP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société PMP et la condamne à payer à Mme X..., prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Lodel, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X..., ès qualités,
Me X..., ès qualités, FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes indemnitaires formées contre la société PMP,
AUX MOTIFS QUE selon l'article XVII 2° du bail commercial signé par les parties, la cession isolée du droit au bail est autorisée pour l'exercice d'une activité donnant vocation au bénéfice du statut des baux commerciaux et à l'exception d'une activité déjà présente au sein du centre commercial ; que toutefois cette cession ne pourra intervenir qu'avec l'agrément préalable du bailleur qui devra être donné par écrit ; que d'une part, Me X..., ès-qualités, soutient, en page 10 de ses dernières écritures qu'une première demande d'agrément a été adressée à la SCI PMP le 7 juin 2013, puis mentionne en page 11 la date du 3 juin ; qu'étant relevé qu'aucune correspondance en date du 7 juin n'est versée aux débats, il doit être constaté que le courrier en date du 3 juin 2013 produit a été adressé par un avocat au gérant de la SNC Lodel ; que cette correspondance fait état d'une proposition de l'un de ses clients pour la cession du droit du bail pour un montant de 80.000 € ; qu'il est versé par ailleurs aux débats un courrier, en date du 10 juin 2013 envoyé par la SNC Lodel à la SCI PMP, faisant état de difficultés financières et de la décision de céder le droit au bail, tout en demandant de communiquer les coordonnées à toutes les personnes susceptibles d'être intéressées par la reprise des locaux et en précisant que les suites du projet de cession seront portées à sa connaissance ; que dès lors, Me X..., ès-qualités, ne rapporte la preuve de l'envoi du courrier du 3 juin 2013 à la SCI PMP ; que d'autre part, Me X..., ès-qualités, fait valoir qu'en juin 2013, la société Subway ayant formalisé une offre de reprise du bail à hauteur de 150.000 € afin d'y exercer une activité de restauration rapide, elle a été adressée à la SCI PMP qui n'a pas répondu ; que l'appelante soutient que son silence caractérise un abus de droit et qu'au surplus son refus d'agrément n'est pas fondé sur un motif légitime ; qu'il est justifié de l'envoi à la SCI PMP, par télécopie, d'une correspondance en date du 28 juin 2013 relative au projet de cession du bail à la société Subway ; que le 20 septembre 2013, la société Subway a réitéré son offre pour un montant de 50.000 € auprès du mandataire liquidateur ; mais, qu'il résulte d'une correspondance, portant la mention officielle, en date du 27 février 2014 adressée par l'avocat de la SNC Lodel à l'avocat de la SCI PMP que ce dernier lui avait adressé un courrier en date du 12 décembre 2013, non produit, faisant état du refus d'agrément ; que de plus, l'enseigne Subway commercialise des sandwiches et salades réalisés à la demande et sous les yeux des clients ; qu'or, la SCI PMP établit que dans le centre commercial est exploitée une boulangerie-pâtisserie ayant la même activité en ce qu'elle propose de la restauration rapide du lundi au samedi, avec différents menus ; que dès lors, le refus opposé par la SCI PMP était légitime ; qu'ainsi aucune faute n'étant retenue à l'encontre de la SCI PMP, il n'y a pas lieu d'examiner le préjudice invoqué par la SNC Lodel ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris ;
1°) ALORS QUE les correspondances échangées entre avocats sont couvertes par le secret professionnel, de sorte que le juge ne peut fonder sa décision sur les éléments de telles correspondances, même non produites aux débats ; qu'en se fondant, pour retenir que la société PMP avait répondu, par la négative, à la demande d'agrément d'un cessionnaire du bail par la société Lodel, et ainsi la débouter de ses demandes indemnitaires, sur une correspondance du 12 décembre 2013, non produite, dans laquelle l'avocat de la société PMP aurait indiqué à celui de la société Lodel que l'agrément était refusé, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la lettre du 12 décembre 2013 n'était pas une correspondance confidentielle entre avocats qui ne pouvait s'analyser en une réponse du bailleur à la demande d'agrément et sur laquelle le juge ne pouvait donc pas se fonder, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et 1717 du code civil ;
2°) ALORS QU'en tout état de cause, Me X..., ès qualités, recherchait, à titre principal, la responsabilité du bailleur à raison de son absence de réponse, ou à tout le moins de sa réponse tardive, à la demande d'agrément, qui avait fait perdre à la société Lodel une chance de trouver un autre cessionnaire ; qu'en se bornant à retenir, pour la débouter de ses demandes indemnitaires, que le refus d'agrément opposé par la société PMP était légitime, sans répondre au moyen tiré de la tardiveté de la réponse de cette société, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE, plus subsidiairement, le preneur a le droit de céder son bail à un autre, si cette faculté ne lui a pas été interdite ; qu'en se bornant à relever, pour dire légitime le refus d'agrément, que la société PMP établissait que dans la centre commercial était exploitée une boulangerie-pâtisserie ayant la même activité de restauration rapide que le cessionnaire proposé par la société Lodel, sans rechercher, comme elle y était invitée si cet établissement était déjà implanté lors de la demande d'agrément formulée en juin 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et 1717 du code civil.