La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2018 | FRANCE | N°17-14860

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juillet 2018, 17-14860


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 31 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Novacarb, qui exploite une usine de production de carbonate et de bicarbonate de sodium, a conclu le 5 mars 1998 avec les sociétés Compagnie française pour la cogénération thermique (la société Cogetherm) et Compagnie générale de chauffe (la société CGC), aux droits desquelles est venue la société Socoma, puis, aux droits de cette dernière, l

a société Dalkia France (la société Dalkia), un contrat de fourniture de vapeur, leque...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 31 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Novacarb, qui exploite une usine de production de carbonate et de bicarbonate de sodium, a conclu le 5 mars 1998 avec les sociétés Compagnie française pour la cogénération thermique (la société Cogetherm) et Compagnie générale de chauffe (la société CGC), aux droits desquelles est venue la société Socoma, puis, aux droits de cette dernière, la société Dalkia France (la société Dalkia), un contrat de fourniture de vapeur, lequel prévoyait la réalisation et l'exploitation par cette dernière d'une installation de production d'énergie thermique et électrique comprenant une centrale de cogénération ; que la société Novacarb a conclu avec les sociétés Cogetherm et CGC une convention de vente des lots de volume d'emprise nécessaire à l'édification de la centrale ; que le financement de celle-ci a été assuré par le GIE Veda 3 (le GIE) dont la société de Crédit à l'industrie française (la société Calif) et la société Socoma sont les membres ; que jusqu'à sa cession à la société Novacarb, la centrale était la propriété du GIE et était louée par la société Socoma, à charge pour elle de fournir en vapeur la société Novacarb ; que, le 27 juillet 2010, cette dernière a exercé l'option d'achat de l'installation auprès de la société Socoma avant de lui notifier certaines réserves, auxquelles la société Socoma a opposé l'absence de contestation de l'état et des performances de la centrale dans le délai prévu par une convention tripartite conclue entre le GIE, la société Socoma et la société Novacarb ; qu'estimant que la levée d'option avait valablement été effectuée et que le délai du droit à contestation était expiré, le GIE a adressé à la société Novacarb la facture de cession de la centrale ; que la société Novacarb et sa filiale, la société Novacogé, ont assigné les sociétés Calif et Dalkia en réparation du préjudice subi du fait de l'état de la centrale au jour de son acquisition ;

Attendu que pour dire cette demande irrecevable à l'encontre de la société Dalkia, l'arrêt retient que les sociétés Novacarb et Novacogé ne peuvent soutenir que la première était débitrice à l'égard de la société Novacarb d'une obligation de maintenance de la centrale en application du contrat de fourniture de vapeur ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'existence du droit invoqué n'est pas une condition de recevabilité de l'action mais de son succès, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare les sociétés Novacarb et Novacogé irrecevables à l'encontre de la société Dalkia France, l'arrêt rendu le 11 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;

Met hors de cause, sur sa demande, la société Calif, dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ;

Condamne la société Dalkia France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Novacarb et à la société Novacogé la somme globale de 3 000 euros et condamne les sociétés Novacarb et Novacogé à payer à la société Calif la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Novacarb et la société Novacogé

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré les demandes des SASU Novacarb et Novacogé irrecevables à l'encontre de la société Dalkia France ;

Aux motifs que les appelantes ne peuvent soutenir que la société Dalkia était débitrice à l'égard de Novacarb d'une obligation de maintenance de la centrale en application du contrat de fourniture de vapeur dont l'objet est la vente de vapeur, aucune disposition du contrat ne visant une telle obligation, qu'elle ne peut être déduite de l'article 1.5 du titre III de ce contrat qui a pour seul objet de prévoir les périodes d'arrêts pour la maintenance des chaudières et turbines, qu'aucune redevance au titre d'une obligation de maintenance n'est fixée par le titre VI du contrat consacré à la facturation de la vapeur, que l'inscription par Socoma dans ses comptes annuels d'une provision au titre du coût de maintenance de la centrale n'est pas plus susceptible d'être interprétée comme la preuve d'une telle obligation envers Novacarb, pas plus qu'elle ne saurait être déduite de l'obligation de remise de documents relatifs à la construction et maintenance de la centrale lors de la vente. Dès lors, le jugement déclarant les sociétés Novacarb et Novacogé irrecevables à agir à l'encontre de la société Calif sera confirmé, infirmé pour le surplus, les sociétés Novacarb et Novacogé étant irrecevables à agir à l'encontre des sociétés Calif et Dalkia ;

1. ALORS QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; qu'en retenant, pour déclarer les sociétés Novacarb et Novacogé irrecevables à l'encontre de la société Dalkia, qu'elles ne peuvent soutenir qu'elle était débitrice à l'égard de Novacarb d'une obligation de maintenance de la centrale en application du contrat de fourniture de vapeur, cependant que l'existence du droit invoqué n'est pas une condition de recevabilité de l'action mais de son succès, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile ;

2. ALORS D'AUTRE PART QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des contrats ; que le contrat de fourniture de vapeur du 5 mars 1998 stipule, à l'article 1 de son Titre 1, qu'il « a pour objet : - de définir les principes de fourniture de la valeur à Novacarb
; - de définir les principes de fourniture des utilités
; - de définir les droits et obligations des parties pendant la Phase préalable, la période de fourniture de vapeur, et en cas de résiliation du contrat » ; que la phase préalable est définie au titre II comme comprenant « la procédure d'instruction des autorisations administratives, de raccordement aux réseaux EDF-GDF, la négociation des contrats liés à la réalisation et à l'utilisation de la Centrale de Cogénération tels que contrat de construction, contrat d'achat des équipements, contrats de fourniture de gaz et de vente d'électricité, contrat de maintenance, cette liste n'étant pas limitative » et correspond à la période de conception, de construction et de mise en service de la centrale ; que le titre VIII organise la cessation des relations contractuelles des parties en ouvrant à la société Novacarb une option d'achat de la centrale dans les conditions qu'il précise ; qu'il en résulte que le contrat de fourniture de vapeur a pour objet de définir les obligations respectives des sociétés Novacarb et Socoma pour construire et exploiter une centrale de cogénération afin de répondre aux besoins en vapeur de Novacarb et éventuellement lui permettre de l'acquérir à son terme ; qu'en réduisant l'objet de ce contrat à la seule vente de vapeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du contrat de fourniture de vapeur et a violé l'article 1134 du code civil ;

3. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des contrats ; que l'article 1.1.2 du titre III du contrat de fourniture de vapeur (p. 18 in fine) stipule que « la Société (Socoma) programmera et réalisera la maintenance comme prévu à l'article 1.5 » ; qu'en affirmant cependant, pour déclarer irrecevable l'action de la société Novocarb à l'encontre de la société Dalkia, venant aux droits de la société Socoma, qu'aucune disposition du contrat ne vise une obligation de maintenance de la centrale par la société Socoma, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette clause et violé l'article 1134 du code civil ;

4. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis des contrats ; que le contrat de fourniture de vapeur prévoit, à son titre VI, que le prix de la vapeur produite est déterminé par application d'une formule dont l'une des composantes est la « redevance contractuelle d'exploitation et de maintenance d'hiver/d'été définie à l'article VI.2.2.1 (a) » (article 2.2.1 (a), p. 36 pour le prix en hiver ; article 2.3.1 (a), p. 40 pour le prix en été) ; que l'annexe VI.2.2.1 (a) fixe le montant de la redevance d'exploitation et de maintenance de la centrale, en distinguant entre l'hiver et l'été, et précise les modalités de sa révision annuelle ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable l'action de la société Novocarb à l'encontre de la société Dalkia, venant aux droits de la société Socoma, qu'aucune redevance au titre d'une obligation de maintenance n'est fixée par le titre VI du contrat consacré à la facturation de la vapeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des articles 2.2.1 (a), 2.3.1.(a) et de l'annexe VI.2.2.1 (a) du contrat de fourniture de vapeur et a violé l'article 1134 du code civil ;

5. ALORS QUE, subsidiairement, tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; que dans leurs conclusions d'appel (p. 36), les sociétés Novacarb et Novacogé faisaient valoir qu'en vertu de l'article 2.2 de la convention tripartite, elles bénéficiaient de toutes les garanties du bailleur (le GIE Veda 3) vis-à-vis de l'exploitant (Socoma devenue Dalkia) et notamment de celles figurant dans le contrat de location simple conclu entre le bailleur et l'exploitant, comprenant spécialement l'obligation de maintenir constamment en bon état d'entretien et de fonctionnement les biens loués et de faire effectuer à ses frais toutes réparations nécessaires ; qu'elles en déduisaient que l'application combinée du contrat de location simple et de la convention tripartit confirmait l'obligation de maintenance et d'entretien de la centrale incombant à Socoma, devenue Dalkia, et sa responsabilité envers la société Novacarb à cet égard ; qu'en déclarant irrecevables les sociétés Novacarb et Novacogé à l'encontre de la société Dalkia, sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-14860
Date de la décision : 10/07/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 11 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jui. 2018, pourvoi n°17-14860


Composition du Tribunal
Président : Mme Riffault-Silk (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.14860
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award