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10/07/2018 | FRANCE | N°16-23694

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juillet 2018, 16-23694


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par Mme X... que sur le pourvoi incident provoqué relevé par la société X... compagnie commerciale et viticole champenoise ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société holding Groupe X..., devenue GT Louvre (la société Groupe X... ), a, en 2002, apporté l'activité champagne à une filiale, la SAS X... compagnie commerciale et viticole champenoise ; que celle-ci était titulaire de la marque dénominative française "X..." n° 1 42

6 350, déposée par la SA X... le 16 janvier 1968 et régulièrement renouvelée, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par Mme X... que sur le pourvoi incident provoqué relevé par la société X... compagnie commerciale et viticole champenoise ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société holding Groupe X..., devenue GT Louvre (la société Groupe X... ), a, en 2002, apporté l'activité champagne à une filiale, la SAS X... compagnie commerciale et viticole champenoise ; que celle-ci était titulaire de la marque dénominative française "X..." n° 1 426 350, déposée par la SA X... le 16 janvier 1968 et régulièrement renouvelée, pour désigner des produits en classes 32 et 33, en particulier les "vins de provenance française à savoir Champagne" ; que la cession de la société Groupe X... ayant été décidée, Mme B... X... (Mme X...), actionnaire de cette société, a, le 19 juillet 2005, donné mandat à son père, M. X..., de la représenter dans la cession de ses parts sociales, avec faculté de substitution, dont celui-ci a usé au profit de Mme F... X... et M. A... ; que l'acte de cession de titres signé le 21 juillet 2005 réglementait, en son article 10-4, les conditions de coexistence des droits respectifs de la famille X..., de l'acquéreur, de la société Groupe X..., ainsi que de ses filiales, sur le nom de famille "X..." ; qu'à cet égard, l'article 10-4-2 stipulait que "La Famille X... s'engage irrévocablement au profit de l'Acheteur, de la société Groupe.. X... ainsi que de ses Filiales à ne pas, dans quelque partie du monde que ce soit, directement ou indirectement, faire quelque usage du nom "X...", que ce soit à titre de marque de commerce ou de service, de nom commercial, de nom de domaine ou autre, pour désigner et/ou promouvoir tout produit ou service en concurrence avec tout ou partie de l'Activité et/ou avec tout ou partie des produits ou services dérivant des opérations de l'Activité" ; que la SAS X... compagnie commerciale et viticole champenoise a été revendue en 2006 à une société, créée à cet effet avec la même dénomination (la société X... CCVC) ; que Mme X..., qui avait, entre le 1er février 1986 et la date de son licenciement intervenu le 21 décembre 2006, effectué sa carrière au sein de la société Groupe X... puis de la société X... compagnie commerciale et viticole champenoise, a, le 14 février 2008, déposé la marque verbale française "B... X...", enregistrée sous le n° [...], pour désigner les produits des classes 21, 29, 30, 32, 33, dont le champagne ; que pour permettre la distribution du champagne commercialisé sous cette marque, elle a créé la société BM et VT, immatriculée le 24 juin 2008 ; qu'elle a, en outre, réservé, le 4 mai 2007, le nom de domaine "www...", qui héberge le site internet de la société BM et VT, ainsi qu'assurant une redirection vers ce dernier, les noms de domaine "www... com", le 3 mai 2007, "www...", le 26 mai 2008, "www...", le 4 mai 2007, "www...", le 26 mai 2008, "www...", le 13 mai 2008 et "www...", le 19 mai 2008 ; qu'invoquant l'utilisation commerciale du nom "X..." pour la vente et la promotion du champagne "B... X" et la mise en oeuvre d'une communication systématiquement axée sur le nom de famille "X..." et sur l'image de la marque "X...", la société X... CCVC, après mises en demeure restées vaines, a assigné Mme X... et la société BM et VT, sur le fondement des articles L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle et 1134, 1145 et 1382 du code civil, dans leur rédaction alors applicable, pour violation des stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005, atteinte à la marque renommée "X..." n° 1 426 350, concurrence déloyale et parasitisme ; que la société BM et VT ayant été mise en liquidation judiciaire, la société X... CCVC a appelé en intervention forcée son mandataire liquidateur, la Selafa MJA, prise en la personne de Mme C... ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la société X... CCVC au titre de sa responsabilité contractuelle et de se prononcer sur les demandes de cette société alors, selon le moyen, que constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen du fond du droit, la prétention de l'adversaire ; que l'argumentation tirée de la règle de la relativité des contrats opposée par Mme X... en réponse à une prétention fondée sur l'application d'une stipulation contractuelle, appuyée sur l'analyse de la portée des obligations, constitue une défense au fond et non une prétention, de sorte qu'en décidant qu'elle n'avait pas à se prononcer sur "l'argument de l'intimée selon lequel l'appelante qui n'est ni l'acheteur, ni le Groupe X..., ni une filiale du Groupe X..., existant au moment où la convention de cession de parts sociales a été signée, ne pouvait se prévaloir de "droits ou de recours de quelque nature que ce soit en vertu ou en raison de ce contrat" pour cette raison qu'elle n'était pas reprise dans le dispositif de ses conclusions quand il ne s'agissait que d'un moyen de défense, la cour d'appel a violé les articles 71, 122 et 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, dans ses écritures, Mme X... faisait valoir que la société X... CCVC, qui n'était ni l'acheteur, ni le Groupe X..., ni une filiale du Groupe X..., existant au moment où la convention de cession de parts sociales avait été signée, ne pouvait se prévaloir de "droits ou de recours de quelque nature que ce soit en vertu ou en raison de ce contrat" et, à ce titre, ne pouvait introduire la présente action, la cour d'appel a pu en déduire que ces développements s'analysaient en une fin de non-recevoir dont, faute pour celle-ci d'avoir été reprise dans le dispositif desdites conclusions, elle n'était pas saisie ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal :

Vu les articles 1987, 1988 et 1989 du code civil ;

Attendu que le mandat conçu en termes généraux n'embrasse que les actes d'administration et, s'il s'agit d'aliéner ou hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être exprès ; que le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est porté dans son mandat ;

Attendu que pour condamner Mme X... pour avoir enfreint l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 en employant, à des fins commerciales, le nom "X..." pour la vente et la promotion du champagne "B... X...", sous la forme des noms de domaine litigieux, l'arrêt retient que le dernier paragraphe de cet article est une clause de garantie d'éviction du fait personnel du vendeur, qu'il résulte des termes mêmes du mandat que Mme X... a donné expressément pouvoir à son père, avec faculté de substitution, de procéder à la cession de ses titres, en son nom et pour son compte, ainsi que de souscrire à tout engagement ou garantie et signer tout acte en son nom pour réaliser cette cession, et que, s'agissant du sous-mandat, Mme F... X... et M. A... avaient, ensemble ou séparément, pouvoir de signer tout acte ou convention, et plus généralement de faire le nécessaire en vue de la cession des titres ou consécutivement à celle-ci ; qu'il en déduit que l'article 10-4-2 de la convention de cession est opposable à Mme X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le mandat de vente, qui autorisait, en termes généraux, le mandataire à souscrire à tout engagement ou garantie n'emportait pas le pouvoir, pour celui-ci, de consentir une interdiction ou une limitation de l'usage, par son mandant, de son nom de famille, constitutives d'actes de disposition, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident, qui est recevable :

Vu l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'interprété à la lumière de l'article 5, § 2, de la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988, devenu l'article 5, § 2, de la directive n° 2008/95/CE du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;

Attendu que, selon ce texte, la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services identiques, similaires ou non à ceux désignés dans l'enregistrement, engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière ; que le profit indûment tiré de la renommée de la marque, qui est la conséquence d'un certain degré de similitude entre les signes en présence en raison duquel, sans les confondre, le public établit un lien entre les signes, doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que lorsque le titulaire de la marque renommée est parvenu à démontrer qu'il a été indûment tiré profit du caractère distinctif ou de la renommée de celle-ci, il appartient au tiers ayant fait usage d'un signe similaire à la marque renommée d'établir que l'usage d'un tel signe a un juste motif ;

Attendu que pour rejeter les demandes de la société X... CCVC au titre de l'atteinte à la marque renommée, l'arrêt, après avoir relevé que la renommée de la marque "X..." n° 1 426 350 désignant, en particulier, du vin de Champagne, n'était pas contestée et considéré que le consommateur normalement avisé était conduit à établir un lien entre les propos imputés à Mme X..., incriminés comme usages, et la marque invoquée, retient que Mme X... ne tire indûment aucun profit de la renommée de ladite marque ni ne porte préjudice à sa valeur distinctive ou à sa renommée en rappelant son origine familiale, que son nom suffit à identifier, son parcours professionnel ou son expérience passée, même agrémentés de photographies ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'existence éventuelle d'un juste motif à l'usage du signe n'entre pas en compte dans l'appréciation du profit indûment tiré de la renommée de la marque, mais doit être appréciée séparément, une fois l'atteinte caractérisée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, de ce pourvoi :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société X... CCVC au titre du parasitisme, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré en quoi l'adoption d'une dénomination sociale et d'un nom commercial en tant que tels traduiraient à eux seuls les efforts et les investissements, notamment promotionnels, de cette société ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans prendre en considération le prestige et la notoriété acquise, non contestés, de la dénomination sociale et du nom commercial de la société X... CCVC, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche, du même pourvoi :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation prononcée sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, de ce pourvoi entraîne la cassation, par voie de conséquence, de l'arrêt en ce qu'il rejette les demandes formées au titre du parasitisme en se fondant sur le rejet de la demande au titre de l'atteinte à la marque renommée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme X... pour avoir employé à des fins commerciales le nom "X..." pour la vente et la promotion du champagne "B... X..." sous la forme des noms de domaine "www... com", "www...fr", "www...", "www...", "www..." et "www...", en violation des stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005, rejette les demandes de la société X... CCVC au titre de l'atteinte à la marque renommée "X..." n° [...] et au titre du parasitisme, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 1er juillet 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu le 12 février 2015 entre les parties par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir opposée par Madame B... X... ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article 954 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et sur les dernières conclusions déposées ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de Madame B... X... contenue dans ses dernières écritures et tendant à voir déclarer irrecevable l'action de la société X... relative à l'atteinte à la marque renommée sur le fondement du principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, qui constituent selon l'intimée elle-même une fin de non-recevoir, laquelle est contenue dans les motifs de ses dernières écritures mais non reprise au dispositif de ces mêmes écritures ;

ALORS QUE la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; que, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, Madame B... X..., intimée au principal, a demandé à la Cour d'appel de « débouter X... de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et prétentions », de sorte qu'elle concluait au débouté de l'appelante en ce que celle-ci demandait la confirmation du jugement qui avait écarté la fin de non-recevoir fondée sur le non cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle et qu'ainsi l'intimée saisissait valablement la cour d'appel de la fin de non-recevoir qu'elle n'a refusé d'examiner qu'en violation de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement rendu le 12 février 2015 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la E... X... au titre de la responsabilité contractuelle de Madame B... X... et, statuant à nouveau dans cette limite, dit qu'en employant à des fins commerciales, le nom X... pour la vente et la promotion du champagne B... X... , sous la forme des noms de domaine www... , www... , www... , www... , www..., et www... , Madame B... X... a enfreint les stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 et, en conséquence, ordonne à Madame B... X... :
- De renoncer aux noms de domaine B... X... et [...],
- De cesser tout usage pour la commercialisation ou la promotion de vins de champagne, des noms de domaine [...] , et [...] , et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt,
Et condamné Madame B... X... à verser à la société X... la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article 954 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et sur les dernières conclusions déposées ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur l'argument de l'intimée selon lequel l'appelante qui n'est ni l'acheteur, ni le groupe X..., ni une filiale du D... X... , existant au moment où la convention de cession de parts sociales a été signée, ne pourrait se prévaloir de "droits ou de recours de quelque nature que ce soit en vertu ou en raison de ce contrat" et, à ce titre, ne pouvait introduire la présente action (page 35 de ses dernières écritures) qui s'analyse également en une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile ;

ALORS QUE constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen du fond du droit, la prétention de l'adversaire ; que l'argumentation tirée de la règle de la relativité des contrats opposée par l'intimée en réponse à une prétention fondée sur l'application d'une stipulation contractuelle, appuyée sur l'analyse de la portée des obligations, constitue une défense au fond et non une prétention, de sorte qu'en décidant qu'elle n'avait pas à se prononcer sur « l'argument de l'intimée selon lequel l'appelante qui n'est ni l'acheteur, ni le D... X... , ni une filiale du D... X... , existant au moment où la convention de cession de parts sociales a été signée, ne pouvait se prévaloir de "droits ou de recours de quelque nature que ce soit en vertu ou en raison de ce contrat" » pour cette raison qu'elle n'était pas reprise dans le dispositif de ses conclusions quand il ne s'agissait que d'un moyen de défense, la cour d'appel a violé les articles 71, 122 et 954, alinéa 2, du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement rendu le 12 février 2015 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la E... X... au titre de la responsabilité contractuelle de Madame B... X... et, statuant à nouveau dans cette limite, dit qu'en employant à des fins commerciales, le nom X... pour la vente et la promotion du champagne B... X... , sous la forme des noms de domaine www... , www.[... ], www [...], www[...], www[...], et www[...], Madame B... X... a enfreint les stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 et, en conséquence, ordonne à Madame B... X... :
- De renoncer aux noms de domaine [...] et [...]
- De cesser tout usage pour la commercialisation ou la promotion de vins de champagne, des noms de domaine [...], [...] , [...] et [...], et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt,
Et condamné Madame B... X... à verser à la société X... la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS QUE, sur la violation de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005, par acte sous seing privé en date du 19 juillet 2005, Madame B... X... a donné mandat à son père, Monsieur X... , de la représenter lors de la cession de ses titres non pactés en ces termes : "Je fais suite à la décision prise par le groupe CNP et les membres de la famille X... partie au pacte d'actionnaires relatif à D... X... en date du 25 juin 2002 et à ses avenants (le « Pacte d'Actionnaires») de céder conjointement leurs Titres D... X... soumis aux stipulations du Pacte d'Actionnaires, et de faire procéder à l'examen des manifestations d'intérêts reçues à cet égard dans le cadre d'un processus de cession de contrôle maîtrisé mené en concertation avec le D... X... et les sociétés de son groupe, processus auquel s'est joint (e) la société FFP. Je comprends qu'une cession de mes Titres D... X... non soumis aux stipulations du Pacte d'Actionnaire (les « Titres Non Pactés ») dans le cadre de ce processus serait de nature à favoriser le succès de l'opération. J'ai dans ces conditions, le plaisir de vous confirmer mon engagement d'aliéner dans le cadre du processus en cours, concomitamment à la Cession des Titres Pactés des Membres de la Famille X... et du groupe CNP et des Titres de FFP, mes Titres Non Pactés, pour autant que cette Cession soit réalisée moyennant une contrepartie au moins égale à la contrepartie reçue par les Membres de la Famille X... et le groupe CNP à raison de la Cession de leurs Titres Pactés, et aux termes d'un contrat de cession qui serait signé au plus tard le 31 décembre 2005. Je donne par les présentes tous pouvoirs, avec faculté de substitution, à Monsieur X..., né le [...] , demeurant [...] , à l'effet de : me représenter pour les besoins de l'exécution de la Cession de mes Titres Non Pactés ; signer en mon nom et pour mon compte tout acte, convention, avenant, ordre de mouvement, pièce ou document relatif ou nécessaire à la Cession de mes Titres Non Pactés, donner ou recevoir dans ce cadre en mon nom et pour mon compte tout engagement de garantie, et plus généralement faire le nécessaire selon ce qu'il jugera utile ou approprié et accomplir toute formalité en vue de la réalisation de la Cession de mes Titres Non Pactés ou consécutivement à celle-ci" ; que par acte en date du 21 juillet 2005, Monsieur X... a usé de la faculté de substitution qui lui a été concédée, au profit de Madame Anne-Claire X... et de Monsieur Jean A... en ces termes : "Conformément aux pouvoirs qui m'ont été conférés avec faculté de substitution par les membres de la famille X... appartenant à la branche familiale Claude X..., parties ou non au pacte d'actionnaires relative à la société D... X... conclu le 25 juin 2002 et ses avenants (le « Pacte d'Actionnaires ») à l'effet de :
1. les représenter pour les besoins de l'exécution du processus de Cession de leurs Titres Pactés et/ou, le cas échéant, non Pactés ;
2. signer en leur nom et pour leur compte tout acte, convention, pièce, document ou avenant (au Pacte d'Actionnaires ou à toute autre convention) relatif à la Cession de leurs Titres Pactés et/ou, le cas échéant, non Pactés, et plus généralement faire le nécessaire selon ce que je jugerai utile ou approprié et accomplir toute formalité en vue de la réalisation de la Cession de leurs Titres Pactés et/ou, le cas échéant, non Pactés, ou consécutivement à celle-ci,
Donne tous pouvoirs à Monsieur Jean A... et à Madame Anne-Claire X... à l'effet d'exercer, ensemble ou séparément, les pouvoirs visés ci-dessus, en ce compris faire le nécessaire selon ce qu'ils jugeront utile ou approprié et accomplir toute formalité en vue de la réalisation de la Cession des Titres Pactés et/ou, le cas échéant, non Pactés, détenus par les membres de la famille X... appartenant à la branche familiale Claude X..., et me représenter personnellement aux mêmes fins" ;
Qu'en vertu du pouvoir qui lui a été donné, Madame Anne-Claire X... a signé, le 21 juillet 2005, une convention de cession de titres conclue entre d'une part, la famille X... , la société de droit belge Fibel-par et la SA société Foncière Financière et de Participation et d'autre part, la société de droit Luxembourgeois Sof Europeean Hotel Co-Invest Holding, cette dernière s'est vue céder le contrôle de la société groupe X... ; que l'article 10-4-2 de cette convention stipule que "La Famille X... s'engage irrévocablement au profit de l'Acheteur, de la société D... X... ainsi que de ses Filiales à ne pas, dans quelque partie du monde que ce soit, directement ou indirectement, faire quelque usage du nom « X... », que ce soit à titre de marque de commerce ou de service, de nom commercial, de nom de domaine ou autre, pour désigner et/ou promouvoir tout produit ou service en concurrence avec tout ou partie de l'Activité et/ou avec tout ou partie des produits ou services dérivant des opérations de l'Activité" ; que la société X... reproche à Madame B... X... d'avoir enfreint ces dispositions en employant systématiquement, à des fins commerciales, le nom X... pour la vente et la promotion du champagne B... X... , sous la forme de noms de domaine contenant ce nom et, dans certains cas, le mot champagne, dans ses déclarations reproduites sur le site Internet B... X... et dans la presse ; que pour s'opposer à ces demandes, Madame B... X... fait valoir en substance que le mandat donné à son père Monsieur X... est un mandat conscrit et limité de vendre ses titres non pactés, de manière concomitante à ceux de la famille X... qui ne lui permettait pas de prendre un engagement tel que celui prévu par l'article 10-4-2 de la convention et lui interdisant d'utiliser son nom pour les activités de champagne concurrentes à X..., ce qu'atteste d'ailleurs Monsieur Claude X..., que tout mandat apparent est exclu par l'existence même du mandat spécial qui ne peut concerner que la réalisation de la cession des titres non pactés ou consécutivement à celle-ci selon les termes mêmes de la convention, que cet engagement s'apparente à une clause de non-concurrence et est incompatible avec les principes de liberté de concurrence et porte atteinte au principe de protection de la liberté individuelle, et subsidiairement que ni elle ni la société BM et VT n'utilisent le patronyme "X..." comme marque, nom commercial, ou nom de domaine, ni encore pour promouvoir la vente du champagne B... X... , de sorte qu'il n'existe pas d'infraction à l'article 10-4-2 de la convention de cession de parts sociales précitées ; que ceci exposé, il résulte des termes mêmes de l'acte sous seing privé du 19 juillet 2005, que Madame B... X... a donné expressément pouvoir à son père Claude X..., avec faculté de substitution, de procéder à la cession de ses titres en son nom et pour son compte, ainsi que de souscrire à toute engagement ou garantie et signer tout acte en son nom pour réaliser cette cession ; que le dernier paragraphe de l'article 10-4-2 de la convention de cession de parts sociales, figurant sous le titre "ENGAGEMENTS" est une clause de garantie d'éviction du fait personnel du vendeur, limitée à cet effet, soumise en tant que telle aux dispositions des articles 1603 et 1625 du code civil, et constitue une des obligations principales du cédant ayant conditionné à la formation du contrat, parfaitement opposable à Madame B... X... ; qu'à cet égard, l'attestation que lui a délivrée son père, Monsieur Claude X..., le 12 janvier 2016, soit après deux années de procédure et six années d'échanges entre les parties, au demeurant non conforme aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile, et dont la pertinence est contestée par l'appelante, n'est pas de nature à remettre en cause la teneur du mandat susvisé, étant relevé que ni Monsieur Claude X... ni Madame B... X... ne tirent de conséquence juridique du défaut de pouvoir allégué sur la validité de la cession intervenue et dont notamment Madame B... X... a tiré profit ; que s'agissant du sous-mandat, Madame Anne-Claire X... et Monsieur Jean A... avaient bien, aux termes de l'acte du 21 juillet 2005, ensemble ou séparément, pouvoir de signer tout acte ou convention, et plus généralement de faire le nécessaire en vue de la cession des titres pactés ou non consécutivement à celle-ci ; que par ailleurs, les dispositions de l'article L. 420-1 du code de commerce n'ont pas vocation à s'appliquer dès lors que la cession de titres du 21 juillet 2005 avait pour effet la cession totale de production et de commercialisation des vins de champagne exercée par la société X... et la libre jouissance des droits cédés ; qu'enfin il a été dit que les stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession s'analysent en une garantie d'éviction, qui n'est pas limitée dans le temps et non pas en une clause de non-concurrence, laquelle est prévue par ailleurs par l'article 10-5 de la même convention sous le titre "NON CONCURRENCE/AUTRES ENGAGEMENTS" ; qu'il n'y a pas plus atteinte à la liberté individuelle de Madame B... X... dès lors que l'engagement a été librement souscrit ; qu'il résulte de ces énonciations que l'article 10-4-2 de la convention de cession des titres est parfaitement licite et opposable à Madame B... X... en sa qualité de cédante des titres du D... X... ; qu'il convient dès lors d'examiner la réalité des manquements allégués ; que l'appelante reproche aux intimées d'avoir mis à la disposition de la société BM et VT le nom X..., en association avec le mot champagne, sous la forme de noms de domaine que Madame B... X... a réservé, pour commercialiser le champagne B... T et, d'avoir associé le nom X... à la vente et à la promotion du champagne B... T, tant sur le site internet dédié à la vente du champagne, que dans le cadre de ses déclarations à la presse liées à la promotion du champagne B... T ; que les intimées contestent l'usage du patronyme X... comme marque, nom commercial ou nom de domaine, ou encore pour promouvoir la vente du champagne B... T et soutiennent que l'usage de son nom patronymique comme tel, dans la vie des affaires, ne peut être reproché à Madame X... ; qu'enfin il n'y a aucun risque de confusion ou d'association avec l'entreprise de l'appelante dès lors que le prénom B... est systématiquement associé au patronyme X... ; que ceci exposé, il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 10 avril 2014 que les noms de domaine www.[...], www.[...], www.[...], www.[...], www[...], et www[...], tous réservés par Madame B... X... aux dates sus-indiquées, redirigent vers le site internet B... T exploité par la société BM et VT avant la mise en liquidation judiciaire de cette dernière ; que cet usage à titre de nom de domaine du nom X... pour promouvoir un site internet consacré au champagne B... X... constitue une violation de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 ; que, sur les mesures réparatrices il y a lieu de faire droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans les termes ci-après définis au dispositif, et ce sous astreinte compte tenu de la résistance avérée de Madame B... X... ; que la violation des stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 de par la réservation par cette dernière des noms de domaine susvisés sera réparée par l'octroi à la société appelante de la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

ALORS D'UNE PART QUE l'incorporation du nom patronymique dans une dénomination sociale ou son dépôt à titre de marque ne prive pas les membres de la famille portant le même patronyme de son usage y compris pour l'exercice d'une activité commerciale concurrente ; qu'ainsi, la garantie d'éviction du fait personnel du vendeur n'entraîne de plein droit pour celui-ci, s'agissant de la cession des actions d'une société, aucune interdiction ou limitation de l'usage de son nom patronymique, celui-ci fut-il incorporé dans la dénomination sociale de la société dont le capital est cédé ou désignerait-il les produits ou services commercialisés par cette société, s'il n'y a expressément consenti ; qu'en retenant dès lors que l'article 10-4-2 de la convention de cession du 21 juillet 2005, stipulant une limitation pour B... X... d'user de son patronyme, s'analysait comme une clause de garantie d'éviction du fait personnel du vendeur d'actions constitutive de l'une de ses obligations principales soumises aux articles 1603 et 1625 du code civil, la cour d'appel a violé lesdits textes par fausse application ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'incorporation du nom patronymique dans une dénomination sociale ou son dépôt à titre de marque ne prive pas les membres de la famille portant le même patronyme de son usage y compris pour l'exercice d'une activité commerciale concurrente ; qu'ainsi, la garantie d'éviction du fait personnel du vendeur n'entraîne de plein droit pour celui-ci, s'agissant de la cession des actions d'une société, aucune interdiction ou limitation de l'usage de son nom patronymique, celui-ci fut-il incorporé dans la dénomination sociale de la société dont le capital est cédé ou désignerait-il les produits ou services commercialisés par cette société, s'il n'y a expressément consenti ; d'où il suit que le mandat de vente conçu en termes généraux n'emporte pas le pouvoir pour le mandataire de consentir une interdiction ou une limitation de l'usage par son mandant de son nom patronymique constitutives d'actes de disposition ; que la cour d'appel constate que Madame B... X... avait donné à Monsieur X... une procuration rédigée en termes généraux pour la vente de ses titres non pactés (arrêt, p. 7), ce dont il résultait qu'elle n'emportait pas le pouvoir de consentir un abandon partiel de son droit d'usage sur son nom patronymique qu'elle avait conservé et qu'en déclarant opposable à Madame B... X... l'article 10-4-2 de la cession du 21 juillet 2005, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1987, 1988 et 1989 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement rendu le 12 février 2015 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la E... X... au titre de la responsabilité contractuelle de Madame B... X... et, statuant à nouveau dans cette limite, dit qu'en employant à des fins commerciales, le nom X... pour la vente et la promotion du champagne B... X... , sous la forme des noms de domaine wwW[...] www[...], www [...], www[...], www[...], et www[...] Madame B... X... a enfreint les stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 et, en conséquence, ordonne à Madame B... X... :
- De renoncer aux noms de domaine [...] et virginie-X...-champagne.com,
- De cesser tout usage pour la commercialisation ou la promotion de vins de champagne, des noms de domaine virginie-taittinger.fr, virginietaittinger.fr, virginie-taittinger.com et virginietaittinger.com, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt,
Et condamné Madame B... X... à verser à la société X... la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

AUX MOTIFS QUE l'appelante reproche aux intimées d'avoir mis à la disposition de la société BM et VT le nom X..., en association avec le mot champagne, sous la forme de noms de domaine que Madame B... X... a réservé, pour commercialiser le champagne B... T et, d'avoir associé le nom X... à la vente et à la promotion du champagne B... T, tant sur le site internet dédié à la vente du champagne, que dans le cadre de ses déclarations à la presse liées à la promotion du champagne B... T ; que les intimées contestent l'usage du patronyme X... comme marque, nom commercial ou nom de domaine, ou encore pour promouvoir la vente du champagne B... T et soutiennent que l'usage de son nom patronymique comme tel, dans la vie des affaires, ne peut être reproché à Madame X... ; qu'enfin il n'y a aucun risque de confusion ou d'association avec l'entreprise de l'appelante dès lors que le prénom B... est systématiquement associé au patronyme X... ; que ceci exposé, il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 10 avril 2014 que les noms de domaine www [...],wwW[...], www[...], www[...], www[...], et www [...], tous réservés par Madame B... X... aux dates sus-indiquées, redirigent vers le site internet B... X... exploité par la société BM et VT avant la mise en liquidation judiciaire de cette dernière ; que cet usage à titre de nom de domaine du nom X... pour promouvoir un site internet consacré au champagne B... X... constitue une violation de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 ; que, sur les mesures réparatrices, il y a lieu de faire droit à la mesure d'interdiction sollicitée dans les termes ci-après définis au dispositif, et ce sous astreinte compte tenu de la résistance avérée de Madame B... X... ; que la violation des stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 de par la réservation par cette dernière des noms de domaine susvisés sera réparée par l'octroi à la société appelante de la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

ALORS D'UNE PART QUE l'article 10-4-2 de de la cession du 21 juillet 2005 stipulait l'interdiction de faire usage du nom « X... » ; que la cour d'appel constate que Madame B... X... avait réservé les noms de domaine complexes comportant tous son prénom www.virginie-taittinger.com, www.virginie-taittinger.fr, www.virginietaittinger.com, www.virginietaittinger.fr, www.virginie-taittinger-champagne.com, et www.virginie-taittinger-champagne.fr, ce dont il résultait une absence de contravention audit contrat et qu'en décidant le contraire la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS D'AUTRE PART et, en toute hypothèse QU'une faute contractuelle n'implique pas nécessairement par elle-même l'existence d'un dommage en relation de cause à effet avec cette faute, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'existence d'un dommage subi par la société X... en relation avec la violation de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titre du 21 juillet 2005 a violé l'article 1147 du code civil. Moyens produits au pourvoi incident provoqué par la SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la société X... compagnie commerciale et viticole champenoise.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, rejetant toutes autres demandes, rejeté les demandes de la société X... tendant à voir juger qu'indépendamment de l'usage du nom « X... » sous forme de nom de domaine, B... X... a également enfreint les stipulations de l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 en employant systématiquement à des fins commerciales le nom « X... » pour la promotion et la vente du champagne B... T dans ses déclarations reproduites sur le site internet B... T et dans la presse et à ce qu'il soit interdit à Mme B... X... toute exploitation commerciale directe ou indirecte du nom X..., sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, pour toute activité liée au champagne ainsi qu'aux vins ;

AUX MOTIFS QUE « que l'article 10-4-2 de la convention de cession stipule que « la famille X... s'engage irrévocablement au profit de l'Acheteur, de la société D... X... ainsi que de ses filiales à ne pas, dans quelque partie du monde que ce soit, directement ou indirectement, faire quelque usage du nom « X... », ce que ce soit à titre de marque de commerce ou de service, de nom commercial, de nom de domaine ou autre, pour désigner et/ou promouvoir tout produit ou service en concurrence avec tout ou partie de l'activité et/ou avec tout ou partie des produits ou services dérivant des opérations de l'activité » ; que l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres est parfaitement licite et opposable à Madame B... X... en sa qualité de cédante des titres du groupe X... ; qu'il convient dès lors d'examiner la réalité des manquements allégués ; que l'appelante reproche aux intimées d'avoir mis à la disposition de la société BM et VT le nom X..., en association avec le mot champagne, sous la forme de noms de domaine que Madame B... X... a réservé, pour commercialiser le champagne B... T, et d'avoir associé le nom X... à la vente et à la promotion du champagne B... T, tant sur le site internet dédié à la vente du champagne, que dans le cadre de ses déclarations à la presse liées à la promotion du champagne B... T ; que les intimées contestent l'usage du patronyme X... comme marque, nom commercial ou nom de domaine, ou encore pour promouvoir la vente du champagne B... T et soutiennent que l'usage de son nom patronymique comme tel, dans la vie des affaires, ne peut être reproché à Madame X... ; enfin qu'il n'y a aucun risque de confusion ou d'association avec l'entreprise de l'appelante dès lors que le prénom B... est systématiquement associé au patronyme X... ; ceci exposé, qu'il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 10 avril 2014 que les noms de domaine www [...], www[...], www[...], www[...](lire.fr), www[...] et www [...], tous réservés par Madame B... X... aux dates sus-indiquées, redirigent vers le site Internet B... X... exploité par la société BM et VT avant la mise en liquidation judiciaire de cette dernière ; que cet usage à titre de noms de domaine du nom X... pour promouvoir un site Internet consacré au champagne B... X... constitue une violation de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 ; par ailleurs qu'il résulte des procès-verbaux de constat d'huissier des 28 et 29 avril 2010 ainsi que 21 mars 2014, que le site internet B... T comporte les huit rubriques suivantes : « Accueil », « Champagne », « B... X... », « Modes de livraison », « Questions usuelles contact », « Mon compte », « Les prix et commandes » ; que le fait que la sous-rubrique « B... X... » à la rubrique « Champagne » comporte ces phrases : « J'ai choisi pour moi cette cuvée avec exigence. Je lui ai donné mon nom », phrase certes également reprise sur les contre-étiquettes du champagne mais qui ne se trouvent pas sur le site internet incriminé, et « Cuvée faite avec exigence. Champagne de caractère aux bulles fines. Je lui ai donné mon nom », ne caractérise aucun usage du nom X... pour désigner ou promouvoir du champagne tel que prévu par la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 précitée ; que le grief ne peut donc prospérer ; que de la même manière Madame B... X... n'est pas à l'initiative des articles de presse incriminés, et le fait que le journaliste relève la phrase déjà citée sur les étiquettes des bouteilles ou que Madame X... lui ait indiqué « Mon nom rassure » ne caractérise pas plus un usage du nom X... pour désigner ou promouvoir du champagne tel que prévu par la convention du 21 juillet 2005 précitée » ;

1°/ ALORS QUE l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres du 21 juillet 2005 interdisait à la famille X... de « directement ou indirectement, faire quelque usage du nom "X...", que ce soit à titre de marque de commerce ou de service, de nom commercial, de nom de domaine ou autre, pour désigner et/ou promouvoir tout produit ou service en concurrence avec tout ou partie de l'Activité » liée au champagne ou au vin; que la Cour d'appel a elle-même constaté en l'espèce que le site internet B... X... , qui avait vocation à permettre la vente et la promotion du champagne B... T, comportait les rubriques « B... X... » et « Champagne » ; qu'en retenant néanmoins que Mme B... X... n'avait pas manqué à ses obligations contractuelles au travers du site internet dédié à la promotion et à la commercialisation de son champagne, cependant que la constatation, faite par l'arrêt, de l'association du nom X... à un site internet dédié à la vente de champagne suffisait à caractériser la violation de l'article 10-4-2 de la convention du 21 juillet 2005, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ ALORS QUE, la Cour d'appel a expressément constaté que le site Internet dédié au champagne B... T indiquait que celle-ci avait donné son nom à un champagne ; qu'en retenant néanmoins qu'une telle association du nom de B... X... au champagne B... T ne constituait pas un usage au moins indirect du nom X... prohibé par l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ ALORS QUE la Cour d'appel a elle-même constaté que Madame B... X... utilisait son nom dans des articles de presse, faisant la promotion de son champagne B... T, en indiquant expressément que son nom rassurait sa clientèle ; qu'en retenant néanmoins qu'une telle association du nom X... au champagne B... T dans des déclarations de type promotionnel faites à la presse ne constituait pas un usage du nom X... prohibé par l'article 10-4-2 de la convention de cession de titres, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de la E... X... au titre de l'atteinte à la marque de renommée.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur l'atteinte à la marque X... n° 1 426 350 : que l'appelante reproche aux intimées d'avoir porté atteinte à ses droits sur la marque de renommée "X..." n° 1 426 350 en en faisant une exploitation injustifiée au sens de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle ; qu'elle reproche en particulier aux intimées d'avoir fait de multiples références directes et explicites au champagne de marque X... en tant que tel dans les déclarations de madame B... X... à la presse déjà évoquées et sur le site internet B... T déjà incriminé, et précise que la démarche de cette dernière consiste principalement à citer la société X... et le champagne X... pour tirer profit de leur réputation ; que les intimées font valoir qu'il n'est pas démontré que l'évocation par Madame X... de son travail chez X... est de nature à porter préjudice à l'appelante ni qu'elle constitue une exploitation injustifiée de la marque opposée ; que ceci exposé selon l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle "la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière ; que les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables à la reproduction ou l'imitation d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle précitée ; qu'en l'espèce, la renommée de la marque X... n°1 426 350 qui désigne en particulier "des vins de provenance française à savoir Champagne" n'est pas contestée et est en tout état de cause établie par les pièces produites en ce sens par l'appelante (notamment ses pièces n° 12, 14, 15 et 24) ; qu'il est constant qu'il appartient au titulaire de la marque renommée de rapporter la preuve que l'atteinte à la marque est constituée ; qu'à cet égard il suffit qu'un lien puisse être établi par le public entre la marque de renommée et l'usage allégué alors même qu'il ne les confond pas, dès lors que cet usage porte préjudice au caractère distinctif de la marque ou à sa renommée ou encore qu'il soit indûment tiré profit de son caractère distinctif ou de sa renommée ; qu'en l'espèce, s'il peut être admis que les formules incriminées par l'appelante, soit celles issues de ses pièces numérotées 24 à 28 et 37 à 51 et telles qu'expressément reprises dans ses dernières écritures, conduisent le consommateur normalement avisé à établir un lien entre la marque opposée et les usages réalisés, en revanche madame B... X... ne tire indûment aucun profit de la renommée de la marque ni ne porte préjudice à sa valeur distinctive ou à sa renommée en rappelant son origine familiale, que son nom suffit à identifier comme l'indique le tribunal, ou son parcours professionnel ou encore son expérience passée, même agrémentés de photographies ; que l'atteinte à la marque renommée X... n°1 426 350 n'est donc pas constituée et le jugement qui a rejeté ce chef de demande doit en conséquence être confirmé ».

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur l'atteinte à la marque de renommée X..., la renommée de la marque X... est constante. qu'en application de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle, la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière ; qu'ainsi que l'a jugé la CJUE interprétant l'article 5 § 2 "Droits conférés par la marque" de la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 devenue à droit constant la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 dans un arrêt Intel Corporation/CPM United Kingdom du 27 novembre 2008, les atteintes à une marque de renommée résident dans le préjudice porté au caractère distinctif de la marque , dans le préjudice porté à la renommée de cette marque et dans le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de celle-ci marque, un seul de ces trois types d'atteinte suffisant à la mise en oeuvre de la protection mais une atteinte effective à la marque étant nécessaire ; que par ailleurs, conformément à l'article L 713-6 du code de la propriété intellectuelle, l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme : a) Dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est soit antérieure à l'enregistrement, soit le fait d'un tiers de bonne foi employant son nom patronymique ; b) référence nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, à condition qu'il n'y ait pas de confusion dans leur origine ; c) indication géographique définie à l'article L 721-2, sauf lorsque la marque, compte tenu de sa renommée, de sa notoriété et de la durée de son usage, est à l'origine exclusive de la réputation ou de la connaissance par le consommateur du produit pour lequel une indication géographique est demandée ; que toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l'enregistrement peut demander qu'elle soit limitée ou interdite ; qu'il est constant que Madame B... X... a, jusqu'à son licenciement sans cause réelle et sérieuse du 21 décembre 2006, effectué sa carrière au sein de la X... en qualité d'attachée de direction puis comme directrice de la communication et du marketing, directrice du bureau de Paris et directrice du service et produits associés et enfin comme directrice des relations extérieures de la société X.... Aux termes du dossier de presse qu'elle produit, elle était effectivement présentée par les médias français durant cette carrière, comme l'ambassadrice des champagnes "X..." ; qu'au regard de ses compétences professionnelles, exclusivement développées au sein de l'entreprise familiale pour assurer la promotion de son champagne, il est logique que Madame X..., qui n'est d'ailleurs pas à l'initiative de la rupture de son contrat de travail, assure sa reconversion dans le domaine du champagne. Par ailleurs, il n'est en soi pas fautif, pour développer son activité, qu'elle rappelle lors de ses interviews son origine familiale que son nom suffit à identifier et son parcours professionnel ni qu'elle évoque le champagne X... qu'elle a servi pendant plus de 20 ans pour le distinguer du produit qu'elle commercialise. Sauf à la priver de la possibilité d'user de son nom de famille et d'exercer une activité dans le seul domaine qu'elle connaît, aucune mauvaise foi ne peut être imputée à Madame B... X... et à la société qu'elle a fondée ; qu'en outre, il ressort des procès-verbaux de constat des 28 et 29 avril 2010 et du 21 mars 2014 réalisés sur le site internet www.virginie-t.com et des différents extraits d'articles de presse produits que Madame B... X..., qui n'est pas responsable des associations spontanément opérées par les journalistes, n'évoque le nom X... qu'à titre de nom de famille ou pour souligner, à travers le rappel de son histoire familiale et de son parcours professionnel, son expérience, son savoir-faire et ses compétences acquises en matière de champagne. Elle distingue systématiquement le produit dont elle assure la promotion et la vente du champagne vendu sous la marque X... dont elle ne cesse de vanter l'excellence et qui ne peut de ce fait pâtir ni d'un risque d'association avec le champagne "B... T" ni d'une dépréciation quelconque. Enfin, Madame B... X... , tant sur le site internet marchand www.virginie-t.com que dans les noms de domaines de redirection qu'elle a réservés et dans ses déclarations à la presse, utilise systématiquement ensemble son nom de famille et son prénom pour identifier les produits commercialisés par sa société. Aussi, aucun consommateur français de vins de champagne normalement attentif et raisonnablement informé et avisé ne peut confondre les produits prestigieux vendus sous la marque X... et le champagne nouvellement produit "B... T" exclusivement vendu en ligne sur le site marchand www.virginie-t.com ; et que s'il est certain que le nom de famille de Madame B... X... est un atout dans le lancement de son champagne et la dispense en partie des investissements incombant à un concurrent inconnu, cet avantage trouve sa cause exclusive dans sa naissance et ses activités passées et non dans la captation de la renommée de la marque X... ou des investissements opérés pour la valoriser ; que dès lors, faute pour la E... X... de justifier d'une atteinte à sa marque, ses demandes seront rejetées ».

1°/ ALORS QUE le titulaire d'une marque renommée est en droit d'interdire l'usage d'un signe identique ou similaire pour des produits ou services identiques, similaires ou différents qui, sans juste motif, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ; que le profit indûment tiré de la renommée de la marque, qui est la conséquence d'un certain degré de similitude entre les signes en présence en raison duquel, sans les confondre, le public établit un lien entre les signes, doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que parmi ces facteurs figurent notamment l'intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de similitude entre les signes ainsi qu'entre les produits ou services en cause ; que l'existence éventuelle d'un juste motif à l'usage du signe n'entre pas en compte dans l'appréciation du profit indûment tiré de la renommée de la marque ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que si elles conduisent le consommateur normalement avisé à établir un lien entre la marque X... et les usages réalisés, les références faites par B... X... au champagne de marque X... pour promouvoir du champagne commercialisé sous la marque B... T ne tirent pas en revanche indûment profit de la renommés de la marque X... dès lors qu'il s'agit pour B... X... de rappeler « son origine familiale, que son nom suffit à identifier (
) ou son parcours professionnel ou encore son expérience passée, même agrémentés de photographies », que Mme B... X... ne saurait être privée de la possibilité d'user de son nom de famille dans le domaine d'activité qu'elle connait et que « si le nom de famille de B... X... est un atout pour le lancement de son champagne et la dispense en partie des investissements incombant à un concurrent inconnu, cet avantage trouve sa cause exclusive dans sa naissance et ses activités passées et non dans la captation de la renommée de la marque X... » ; qu'en jugeant ainsi que les usages incriminés de la marque X... ne tiraient pas indûment profit de la renommée de cette marque dès lors qu'ils reposaient, selon elle, sur de justes motifs tenant au nom de B... X... et à ses origines familiales ainsi qu'à son parcours professionnel, la cour d'appel a méconnu le principe d'appréciation globale du profit indûment tiré de la renommée d'une marque en violation de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle tel qu'il doit s'interpréter à la lumière de l'article 5 § 2 de la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législatives des Etats membres sur les marques devenu l'article 5 § 2 de la directive n° 2008/95 du 22 octobre 2008, codifiant à droit constant la directive 89/104.

2°/ ALORS EN OUTRE QUE si le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage dans la vie des affaires de son nom, c'est à la condition que cet usage soit fait conformément aux « usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale » entendus en substance comme l'expression d'une obligation de loyauté à l'égard des intérêts légitimes du titulaire de la marque ; que l'usage de la marque n'est pas conforme aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale lorsqu'il affecte la valeur de la marque en tirant indûment profit de son caractère distinctif ou de sa renommée ; qu'en l'espèce, pour juger que les références faites par B... X... au champagne de marque X... pour promouvoir du champagne commercialisé sous la marque « B... T » ne tire pas indûment profit de la renommée de la marque X... désignant également du champagne, la cour d'appel a retenu qu'il n'est pas en soi fautif que, pour développer son activité dans le domaine du champagne, B... X... rappelle son origine familiale que son nom suffit à identifier et que s'il est certain que son nom de famille est « un atout dans le lancement de son champagne et la dispense en partie des investissements incombant à un concurrent inconnu, cet avantage trouve sa cause exclusive dans sa naissance et ses activités passées et non dans la captation de la renommée de la marque X... » ; qu'en retenant ainsi que le fait que Mme B... X... fasse usage de son nom pour promouvoir du champagne excluait tout profit indûment tiré par elle de la marque renommée éponyme et partant toute atteinte à cette marque quand Mme B... X... n'était en droit de faire usage de son nom dans la vie des affaires qu'à la condition que cet usage soit loyal au regard des intérêts légitimes de la société X... , titulaire de la marque renommée X..., ce qui implique que cet usage ne tire pas indûment profit de la renommée de cette marque, la cour d'appel a méconnu les conditions dans lesquelles les droits attachés à une marque peuvent être limités en violation de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle tel qu'il doit s'interpréter au regard des articles 5 § 2 et 6 § 1 de la directive n° 2008/95 du 22 octobre 2008, codifiant à droit constant la directive 89/104.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la E... X... au titre de la concurrence déloyale et parasitaire.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur les atteintes à la dénomination sociale et au nom commercial de la société X... : que tout en invoquant une faute de la part des intimées (page 85 § 4 des dernières conclusions), l'appelante indique expressément dans ses dernières écritures leur imputer uniquement à ce titre des agissements parasitaires de par l'usage non autorisé de sa dénomination sociale et de son nom commercial, et ce à l'exclusion de tout acte de concurrence déloyale : qu'elle fait ainsi valoir qu'il résulte des pièces versées aux débats déjà évoquées (pièces n°24 à 28 et 37 à 51 constituées des procès-verbaux de constat d'huissiers des 28 et 29 avril 2010 et du 21 mars 2014 dressés sur le site B... T et des articles de presse déjà cités), que les intimées, tant sur le site Internet du champagne B... T qu'à l'occasion des déclarations de madame B... X... à la presse, ont fait systématiquement référence à sa dénomination sociale et à son nom commercial notamment sous la forme " la Maison X..."
ou encore "l'entreprise familiale" dans le cadre de la promotion du champagne B... T et ce, dans le but manifeste d'associer indûment ce champagne au prestige de la société X..., ce qui constituerait donc des actes de parasitisme à son encontre consistant à profiter de ses efforts et de ses investissements ; qu'il n'est, toutefois, pas démontré en quoi l'adoption d'une dénomination sociale et d'un nom commercial en tant que tels traduiraient à eux seuls les efforts et les investissements, notamment promotionnels, de la société X... ; que sous couvert d'une demande en parasitisme que l'appelante ne caractérise pas autrement, cette dernière ne saurait invoquer des atteintes à sa dénomination sociale et à son nom commercial au demeurant non démontrées, dès lors qu'il a été dit que le champagne B... T n'est pas indûment associé au champagne commercialisé par la société X... sous la dénomination sociale et le nom commercial éponymes, et qu'aucune faute de ou des intimées n'est en tout état de cause établie au préjudice de l'appelante de ce chef ; que ces demandes seront donc également rejetées ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la concurrence déloyale et parasitaire : En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute pour la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée. Le parasitisme, qui s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution .est toutefois indifférente au risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel. Les raisons qui conduisent au rejet des demandes de la SAS X... au titre de l'atteinte à sa marque de renommée commandent celui de ses prétentions au titre de la concurrence déloyale et parasitaire, les références faites par Madame B... X... au nom commercial et à la dénomination sociale de la demanderesse qui sont constitués du seul nom X... , étant justifiée par des circonstances, strictement identiques. Par ailleurs, la SAS E... ne justifie pas du principe et de la mesure du préjudice qu'elle allègue ».

1°/ ALORS QUE le parasitisme consiste pour un opérateur économique à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis ; que constitue un acte fautif de parasitisme le fait pour un opérateur économique de tirer profit du prestige et de la notoriété attachée à la dénomination sociale et au nom commercial d'un autre opérateur pour promouvoir ses propres produits ; qu'en retenant en l'espèce, pour dénier toute atteinte à la dénomination sociale et au nom commercial de la société X... , « qu'il n'est pas démontré en quoi l'adoption d'une dénomination sociale et d'un nom commercial en tant que tel traduiraient à eux seuls les efforts et les investissements notamment promotionnels de la société X... » sans s'attacher au prestige et à la notoriété non contestés de la dénomination sociale et du nom commercial de la société X..., la cour d'appel a statué par des motifs inopérants en violation de l'article 1382 du code civil ;

2°/ ALORS EN OUTRE QUE, la cour d'appel ayant considéré que toute atteinte à la dénomination et au nom commercial de la société X... devait être écartée pour les mêmes raisons que celles conduisant au rejet de ses demandes pour atteinte à sa marque renommée, la cassation à intervenir sur le deuxième moyen du pourvoi incident contestant le rejet de ces dernières demandes entrainera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du chef de l'arrêt rejetant les demandes de la société SAS X... CCVC pour atteinte à sa dénomination sociale et à son nom commercial ;

3°/ ALORS QUE, un comportement parasitaire génère nécessairement un préjudice fût-il seulement moral ; qu'en retenant pour débouter la société X... de ses demandes pour concurrence parasitaire à raison de l'atteinte portée à son nom commercial et à sa dénomination sociale qu'elle ne justifierait pas du principe et de la mesure de son préjudice, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-23694
Date de la décision : 10/07/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROPRIETE INDUSTRIELLE - Marques - Protection - Marque renommée ou notoire - Conditions - Profit indûment tiré de la renommée de la marque - Appréciation - Existence d'un juste motif à l'usage d'un signe - Absence d'influence

PROPRIETE INDUSTRIELLE - Marques - Protection - Marque renommée ou notoire - Conditions - Profit indûment tiré de la renommée de la marque - Sanction - Exclusion - Cas - Juste motif à l'usage d'un signe - Appréciation - Moment

L'existence d'un juste motif à l'usage d'un signe n'entre pas en compte dans l'appréciation du profit indûment tiré de la renommée de la marque, mais doit être appréciée séparément une fois l'atteinte caractérisée


Références :

Sur le numéro 1 : articles 1987, 1988 et 1989 du code civil.
Sur le numéro 2 : article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'interprété à la lumière de l'article 5, § 2, de la directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, devenu l'article 5, § 2, de la directive n° 2008/95/CE du Parlement eu
Sur le numéro 2 : ropéen et du Conseil du 22 octobre 2008.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 juillet 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jui. 2018, pourvoi n°16-23694, Bull. civ.Bull. 2018, IV, n° 87.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, IV, n° 87.

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.23694
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