LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'en février 2015, M. X... a confié à M. Y..., avocat exerçant au sein de la société Avocats business conseils, la défense de ses intérêts en cause d'appel dans une action en réduction du prix d'un bien qu'il avait acquis ; que le 10 juin 2016, M. X... a saisi le bâtonnier de l'ordre pour contester les honoraires perçus par M. Y... et solliciter la restitution des sommes indûment perçues ; que par décision du 10 février 2017, le bâtonnier a fixé les honoraires dus par M. X... ; que la société Avocats business conseils a formé un recours contre cette décision ;
Attendu que, pour fixer le montant des honoraires de la société Avocats business conseils à la somme de 5 760 euros TTC, outre 176,32 euros au titre des taxes, droits de plaidoirie et contributions équivalentes, l'ordonnance énonce qu'il n'appartient pas au juge de réduire le principe et le montant des honoraires dès lors qu'ils ont été acceptés par le client après service rendu, et ce même s'ils n'ont pas été précédés d'une convention ; que M. X... a réglé sans contestation toutes les factures émises pour provision d'honoraires, les règlements ayant été suivis du service rendu ; qu'il ne peut postérieurement, alors que son dossier ne semble pas pouvoir aboutir favorablement sauf à lancer de nouveaux actes, contester le montant et le principe des provisions versées ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il avait relevé que les règlements avaient précédé le service rendu, le premier président, qui était tenu de fixer le montant des honoraires de diligences, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare recevable le recours formé par M. Y..., l'ordonnance rendue le 16 mai 2017, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'ordonnance de taxe infirmative attaquée d'avoir constaté que les prestations demandées à Me Y... ont été entièrement exécutées et fixé, en conséquence, le montant des honoraires de la SCP Avocats Business Conseils à la somme de 4800 euros HT, soit la somme de 5760 euros TTC, ayant déjà été intégralement réglée, à laquelle il convient d'ajouter les taxes, droits de plaidoirie et contributions équivalentes au droit de plaidoirie soit 176.32 euros ;
AUX MOTIFS QU'il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de rédaction d'actes juridiques et de plaidoiries sont fixés librement entre le conseil et son client, que ces honoraires sont fixés en fonction des usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences effectuées ; que le 17 mars 2012, M X... a fait l'acquisition d'un tractopelle à chenille, auprès de M B..., matériel d'occasion vendu sans garantie, en l'état pour un montant de 5.000 euros ; que dès le 9 mai 2012, M X... a informé M B... par lettre recommandée de l'existence de vices cachés et a sollicité une réduction du prix à hauteur de 3.000 euros ; qu'aucune solution amiable ne pouvant être trouvée, M X... a confié son dossier à Me C..., avocat au barreau de BLOIS ; que M X... a engagé une action en réduction de prix de vente ; que son avocat lui a conseillé d'engager une action en référé afin d'obtenir une mesure d'expertise ; qu'une première assignation a été délivrée à M B... afin de se présenter à l'audience de référé devant M le Président du Tribunal de commerce de BOURGES ; que par ordonnance du 21 mai 2013, cette juridiction s'est déclarée incompétente au profit du Tribunal d'Instance de BOURGES ; que l'affaire a été appelée et a fait l'objet de plusieurs renvois successifs jusqu'à radiation pour défaut de diligences le 21 février 2014 ; que l'affaire a été réinscrite au rôle, pour un appel le 27 ,juin 2014 ; que par jugement en date du 22 août 2014, le Tribunal d'instance de Bourges a dit que la clause de non garantie insérée dans l'attestation de vente du 17 mars 2012 n'était pas valide et a ordonné avant dire droit une mesure d'expertise ; que M B... a interjeté appel contre la décision ; que Me C... a fait appel à Me Y... pour postuler dans ce dossier devant la cour d'appel, sollicitant le montant des honoraires nécessaires tout en se réservant la rédaction des écritures ; que Me Y... a émis une facture le 25 novembre 2014, correspondant à sa provision pour ses honoraires de postulation devant la cour d'appel soit plus de 3 heures, pour un montant de 1140 euros TTC outre 6.84 euros de droit de plaidoirie, et 150 euros en application de la taxe de l'article 1635 bis du CGI., soit un total de 1296,84 euros, payé par chèque par M X... ; que le rapport d'expertise a été déposé le 19 janvier 2015, retenant la bonne foi de M B... ; que début février 2015, Me C... a décidé de se décharger de ce dossier pour convenance personnelle ; que M X... a décidé de confier la poursuite de la procédure toujours pendante en appel à Me Y... ; que par message en date du 10 février 2015, Me Y... fait savoir à M X... que sa mission devenant totalement différente, il doit procéder à l'étude du dossier, et sollicite une provision de 2200 euros (11 heures) HT outre 13 euros de droit de plaidoirie, le versement de la provision devant intervenir avant toute diligence ; que Me Y... a émis une facture n° 20150828 euros correspondant à une provision pour étude des conclusions adverses et rédaction de conclusions en réponse, soit plus de trois heures pour un montant de 900 euros TTC, réglée par chèque ; que Me Y... a adressé à M X... son projet de conclusions en réponse le 29 juin 2015 ; qu'il faut noter que dans son courrier du 29 juin 2015, Me Y... rappelle à M X... le montant de ses honoraires sur la base horaire de 200 euros TTC ne pouvant établir de forfait compte tenu du caractère conflictuel du litige empêchant tout calendrier, mais estimant à 900 euros les honoraires pour préparation et audience, et 400 euros les honoraires pour mise en oeuvre d'exécution forcée ; qu'après accord du client ce sont deux jeux de conclusions au soutien des intérêts de M X..., qui ont été déposées à la cour d'appel de Bourges avec bordereau de pièces, demandant la confirmation du jugement initial et sollicitant 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que Me Y... a adressé les facturations de ses honoraires - facture n° 20151100 euros correspondant à une provision pour préparation d'audience et temps d'audience soit (4 h 30) plus 6.48 euros de droit de plaidoirie soit 1086, 48 euros TTC réglée par chèque le 3 septembre 2015 ; que par arrêt en date du 22 octobre 2015, la cour d'appel de Bourges a confirmé la décision attaquée et a condamné M B... à verser une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens. M B... par l'intermédiaire de son avocat s'est engagé à verser en quatre mensualités la somme de 1500 euros et de 13 euros au titre du droit de plaidoirie ; qu'il n'appartient pas au juge de réduire le principe et le montant des honoraires dès lors qu'ils ont été acceptés par le client après service rendu, et ce même s'ils n'ont pas été précédés d'une convention ; qu'en l'espèce, Me Y... dès le début des échanges avec Me C... puis M X... a indiqué son taux de base horaire de 200 euros HT correspondant compte tenu de sa notoriété, de son expérience de la procédure d'appel et des diligences à accomplir à un taux habituellement pratiqué par la profession ; que sa première facture correspond aux honoraires de postulation et a été réglée par provision pour un service fait et non contestable ; que par la suite chaque appel de provision était accompagné d'une facture précisant exactement les actes concernés dans le cadre de la procédure d'appel, précisant le temps estimé sur la base horaire annoncée dés le début de la postulation ; que les provisions ont été payés par M X... à réception des factures. Ce n'est que postérieurement que M X... estime avoir fait face à une tarification excessive ; que la difficulté pour M X... est de distinguer l'intervention de M Y... en qualité d'avocat postulant devenu en février 2015 avocat plaidant, ce qui a entraîné des provisions complémentaires pour l'étude du dossier. Me Y... ne peut déduire de ses honoraires ceux déjà versés à Me C..., qui relèvent des comptes entre Me C... et son client ; qu'à l'examen des pièces on constate que les diligences ont permis à M X... d'obtenir la confirmation de l'ordonnance attaquée rejetant un moyen de droit soulevé par M B... à savoir l'application d'une clause de non garanti ; que toutefois, cette décision ne met pas fin au litige, la solution du litige ne pouvant aboutir qu'en poursuivant la procédure devant le tribunal d'instance pour voir trancher le fond sur la base du rapport d'expertise ; que pour ce faire de nouveaux actes de rédaction et d'assistance sont nécessaires, et alors même que les conclusions du rapport d'expertise ne sont pas favorables à M X... ; que par courrier en date du 13 novembre 2015, Me Y... confirme à son client qu'il va procéder à la signification de l'arrêt, mais lui expose qu'il sera difficile d'obtenir une décision favorable au fond compte tenu du rapport d'expertise retenant la bonne foi de M B... ; qu'il propose toutefois une procédure en résolution de vente et titre subsidiaire une demande de nouvelle expertise ; qu'il joint à son courrier une convention d'honoraires à régulariser par le client pour poursuivre la procédure en application de la nouvelle loi MACRON sur les professions réglementées ; que la convention d'honoraire prévoit une mission de conseil, d'assistance et de représentation facturée sur la base horaire de 220 euros HT, avec versement d'une provision préalable à toute diligence de 1.200 euros HT ; que M X... a refusé de signer cette convention et de régler les provisions demandées estimant avoir déjà réglé des sommes importantes ne correspondant pas aux prestations réalisées, et contestant les honoraires déjà versés ; que M X... a réglé sans contestations toutes les factures émises pour provision d'honoraires, les règlements ayant été suivis du service rendu ; qu'il ne peut postérieurement, alors que son dossier ne semble pas pouvoir aboutir favorablement sauf à lancer de nouveaux actes et de nouveaux contester le montant et le principe des provisions versées afin que celles-ci suffisent au paiement des honoraires de Ici poursuite de la procédure au fond ; qu'il convient de condamner la partie qui succombe, soit M X... aux entiers dépens de la présente procédure ;
1°) ALORS QU' en l'absence de convention d'honoraires ou de paiement après service rendu, le simple règlement des sommes réclamées par l'avocat ne fait pas obstacle à la fixation des honoraires exigibles conformément aux dispositions de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 et, le cas échéant, à la restitution des sommes excédant le montant ainsi déterminé ; qu'en affirmant qu'il n'appartient pas au juge de réduire le principe et le montant des honoraires dès lors qu'ils ont été acceptés par le client après service rendu, tout en constatant que « chaque appel de provision était accompagné d'une facture précisant exactement les actes concernés dans le cadre de la procédure d'appel, précisant le temps estimé sur la base horaire annoncée » ou encore que « M X... a réglé sans contestations toutes les factures émises pour provision d'honoraires, les règlements ayant été suivis du service rendu », ce dont il résulte que chaque règlement de Maître Y... par Monsieur X... devait nécessairement intervenir préalablement à toute diligence et non après service rendu, ce qui ne permettait pas au client d'accepter le montant des honoraires réclamés en parfaite connaissance de cause et autorisait celui-ci à solliciter une réduction des honoraires ainsi versés, le premier président de la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé, dans sa rédaction antérieure applicable en la cause, ensemble l'article L 441-3 du Code de commerce ;
2°) ALORS QUE dans son message du 10 février 2015 expressément visé par l'ordonnance attaquée, Monsieur Y... a demandé à Monsieur X... de le « couvrir d'une provision d'un montant de 2.200 euros HT, soit au total 2653 euros TTC » avec droit de plaidoirie, avant de préciser que « dés réception (du ) règlement (il lui) ferait parvenir la facture correspondante » ; que dès lors, en affirmant que « les provisions ont été payées par M X... à réception des factures (
), que chaque appel de provision était accompagné d'une facture précisant exactement les actes concernés dans le cadre de la procédure d'appel » ou encore que « M X... a réglé sans contestations toutes les factures émises pour provision d'honoraires », quand il résulte au contraire du courriel susvisé que la facture mentionnant les diligences couvertes par le demande de provision ne devait être adressée à Monsieur X... qu'après son règlement effectif, le premier président de la cour d'appel a violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.