LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. Y... et de Mme X... ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la fixation d'une indemnité au titre de l'occupation par M. Y... de l'immeuble indivis, alors, selon le moyen, que s'il a désigné un notaire lors de l'audience de conciliation pour élaborer un projet de liquidation de régime matrimonial et de formation des lots à partager et si celui-ci contient des informations suffisantes, le juge aux affaires familiales a le pouvoir, en cas de désaccord persistant, de fixer l'indemnité d'occupation à l'occasion du prononcé du divorce ; qu'en considérant, pour rejeter la demande de Mme X... tendant au paiement d'une indemnité d'occupation relativement à l'immeuble situé à La Ferté, que le rapport d'expertise ne comportait aucun élément permettant de trancher le désaccord existant entre les parties, quand il lui appartenait de trancher ce désaccord, l'expert ayant fourni les éléments pour déterminer le montant de l'indemnité éventuellement due par M. Y..., la cour d'appel a violé les articles 255 et 267 du code civil ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation du contenu du projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager dressé par le notaire en application de l'article 255, 10°, du code civil que la cour d'appel, statuant comme juge du divorce, conformément à l'article 267 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 26 mai 2004, a décidé que ce projet ne comportait pas les informations suffisantes lui permettant de se prononcer sur l'existence d'une occupation privative de l'immeuble indivis contestée par M. Y... ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour allouer à M. Y... une prestation compensatoire d'un certain montant, l'arrêt retient que les époux sont mariés sous le régime de la communauté légale et que l'actif de la communauté a vocation à être partagé par moitié entre eux ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les parties s'accordaient, dans leurs conclusions d'appel, sur le fait que, selon un contrat de mariage du 6 septembre 1993, elles avaient adopté le régime de la séparation de biens, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme X... à payer à M. Y... une prestation compensatoire en capital de 40 000 euros, l'arrêt rendu le 18 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Mme X... à payer à M. Y... une prestation compensatoire en capital de 40.000 € ;
AUX MOTIFS QUE, sur la prestation compensatoire, M. Y... est âgé de 57 ans pour être né le [...] et Mme Sabine X... de 52 ans pour être née le [...] ; que le mariage, célébré le [...] , a duré 23 ans dont 13 ans de vie commune depuis sa célébration jusqu'à l'ordonnance de non-conciliation rendue le 22 octobre 2007 ; que trois enfants sont issus de cette union : Quentin et Nicolas nés le [...] et Z...née le [...] ; que M. Y... justifie, suivant un certificat médical délivré le 30 juillet 2015 par le Docteur B..., avoir subi un infarctus du myocarde inférieur en 1993, avoir été revascularisé en 1997 par un triple pontage coronarien et que son état est actuellement asymptomatique avec toutefois hyperexcitabilité ventriculaire faisant l'objet d'un traitement médicamenteux ; que Mme X... justifie, suivant les certificats médicaux versés aux débats, notamment celui délivré le 28 octobre 2010 par le Docteur C..., qu'elle souffre d'une polyarthrite psoriasique, invalidante, douloureuse par poussées et entraînant des déformations articulaires ayant justifié une cure de boutonnière du pouce droit le 3 décembre 2010 ; que M. Y..., qui exerçait la profession de steward, est retraité ; qu'il perçoit, suivant son avis d'imposition sur les revenus de l'année 2015, une retraite de 1.566 € par mois et une pension d'invalidité de 1.000 € par mois, soit des revenus mensuels de 2.566 € ; qu'il supporte, outre les dépenses de la vie courante, des charges fixes de 1.112,51 € par mois, comprenant des mensualités de prêts à la consommation et de prêts personnels d'un montant total de 646,76 € qui ne sont pas appelés à perdurer ; qu'il partage ses charges avec sa compagne dont les ressources ne sont pas précisées ; qu'il règle une contribution à l'entretien et à l'éducation de ses enfants de 630 € par mois ; que Mme X... ne prouve pas que son époux perçoit d'autres revenus que ceux qu'il déclare, celle-ci se contentant de procéder sur ce point par voie de simples affirmations ; que Mme X..., qui est employée en qualité de chef de cabine par la société Air France, a perçu en 2016, suivant son bulletin de paie du mois de décembre 2016, un revenu mensuel moyen imposable de 1.889 €, hors indemnités versées par la CPAM pendant la durée de ses arrêts de travail pour maladie dont elle n'a pas justifié ; que dans sa déclaration sur l'honneur, elle évalue ses revenus pour l'année 2016 à la somme totale de 40.546 €, soit 3.378,83 € par mois, indemnités versées par la CPAM comprises ; qu'elle évalue ses charges fixes, outre les charges de la vie commune, à la somme de 781,88 € par mois incluant les mensualités d'un prêt immobilier de 280,80 € qui n'est pas appelé à perdurer ; qu'elle assume la charge des trois enfants communs pour lesquels elle perçoit une contribution à leur entretien et leur éducation de 630 € par mois ; que les époux Y... sont mariés sous le régime de la communauté légale ; que l'actif de la communauté à partager a vocation à être partagé par moitié entre les époux ; qu'il sera simplement précisé sur ce point qu'aux termes de son rapport déposé le 22 juin 2012, Maître D... a évalué les droits de chacun des époux dans la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, compte tenu de leurs créances respectives, à la somme de 725.776,20 € pour Mme X... et à celle de 56.623,80 € pour M. Y... ; que toutefois, M. Y... conteste formellement cette évaluation ; qu'aux termes de sa déclaration sur l'honneur établie le 28 février 2017, M. Y... a déclaré uniquement posséder en propre l'immeuble situé [...] ; que cependant, cet immeuble dépend de la communauté à partager ainsi qu'il résulte du rapport d'expertise ; qu'aux termes de sa déclaration sur l'honneur établie le 13 mars 2017, Mme X... a déclaré posséder, sans préciser s'il s'agissait de biens propres ou communs, le patrimoine suivant : -un compte épargne de 1.573 €, -un plan épargne logement de 31.093,35 €, -468 parts de la société Charles Burger dont la valeur n'est pas précisée ; que Mme X... ne conteste pas que M. Y... a pris son congé parental du 1er mai 1995 au 1er mars 1996, puis du 8 août 2000 au 11 novembre 2002, pour s'occuper de l'éducation des enfants ainsi que celui-ci l'affirme ; que Mme X... justifie que ses droits à pension de retraite au régime complémentaire de la Caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile s'élevait à la somme totale de brute de 2.580,52 € au 31 décembre 2016 ; que toutefois, celle-ci n'a pas justifié de ses droits à pension de retraite du régime général ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le divorce va créer une disparité dans les conditions de vie respectives des époux au préjudice de M. Y... ; que cette disparité sera justement réparée par l'allocation d'une prestation compensatoire en capital de 40.000 € (v. arrêt, p. 6 à 8) ;
1°) ALORS QUE les juges ne sauraient méconnaître les termes du litige tels que fixés par les parties dans leurs écritures ; qu'en retenant, pour condamner Mme X... à payer à M. Y... une prestation compensatoire en capital de 40.000 €, que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté légale, quand il ressortait de leurs écritures respectives qu'ils étaient mariés sous le régime de la séparation de biens, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE pour apprécier la disparité créée par la rupture du lien conjugal dans les situations respectives des parties, les juges ne peuvent tenir compte de la part de communauté devant revenir à chaque époux ; qu'au demeurant, en retenant, pour condamner Mme X... à payer à M. Y... une prestation compensatoire en capital de 40.000 €, que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté légale, que l'actif de la communauté à partager avait vocation à être partagé par moitié entre les époux et que, dans son rapport, le notaire liquidateur avait évalué les droits de chacun des époux dans la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux à certaines sommes, quand elle ne pouvait en tout état de cause tenir compte de la part de communauté devant revenir à chaque époux, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
3°) ALORS QUE pour apprécier la disparité créée par la rupture du lien conjugal dans les situations respectives des parties, les juges doivent prendre en considération la situation de concubinage de l'un des époux ; qu'en ajoutant, pour condamner Mme X... à payer à M. Y... une prestation compensatoire en capital de 40.000 €, que M. Y... partageait ses charges avec sa compagne dont les ressources n'étaient toutefois pas précisées, quand il lui appartenait de prendre en considération les ressources de la compagne de M. Y... pour déterminer l'incidence de la situation de concubinage de l'intéressé sur l'appréciation de la disparité que la rupture du mariage était susceptible de créer dans les conditions de vie respectives des époux, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Mme X... tendant au paiement d'une indemnité d'occupation au titre de l'immeuble situé à La Ferté ;
AUX MOTIFS QUE, sur la fixation de l'indemnité d'occupation due par M. Y... pour l'occupation privative du bien immobilier situé à La Ferté, M. Y... conteste formellement avoir occupé privativement le bien immobilier situé à La Ferté ainsi que le soutient Mme X... et être ainsi redevable d'une indemnité pour occupation ; que le rapport d'expertise ne comporte aucun élément permettant de trancher le désaccord existant entre les parties sur ce point, l'expert ayant précisé dans son rapport que ce désaccord constituait une question de fait devant être soumise au juge des affaires familiales ; que le jugement entrepris, qui a débouté Mme X... de sa demande formée à ce titre, doit être confirmé (v. arrêt, p. 5) ;
ALORS QUE s'il a désigné un notaire lors de l'audience de conciliation pour élaborer un projet de liquidation de régime matrimonial et de formation des lots à partager et si celui-ci contient des informations suffisantes, le juge aux affaires familiales a le pouvoir, en cas de désaccord persistant, de fixer l'indemnité d'occupation à l'occasion du prononcé du divorce ; qu'en considérant, pour rejeter la demande de Mme X... tendant au paiement d'une indemnité d'occupation relativement à l'immeuble situé à La Ferté, que le rapport d'expertise ne comportait aucun élément permettant de trancher le désaccord existant entre les parties, quand il lui appartenait de trancher ce désaccord, l'expert ayant fourni les éléments pour déterminer le montant de l'indemnité éventuellement due par M. Y..., la cour d'appel a violé les articles 255 et 267 du code civil.