LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Huguette X..., veuve Y..., M. Jean C..., Mme Annie Y..., Mme Christine Y..., épouse Z..., et Mme Nadine Y..., épouse A..., (les consorts Y...) font grief à l'arrêt attaqué ([...], 21 février 2017) de fixer à une certaine somme l'indemnité qui leur est due à la suite de l'expropriation, au profit de la société publique locale Territoire 25 (la SPL), de parcelles leur appartenant ;
Mais attendu, d'une part, que le principe selon lequel nul ne peut se constituer une preuve à lui-même n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques, telle l'intention dolosive ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que les parcelles avaient toujours été classées en zone naturelle non immédiatement constructible puisque son urbanisation était subordonnée à la modification ou à la révision du document d'urbanisme, de sorte que leur classement en zone 2 AU h par le plan local d'urbanisme n'avait entraîné aucune perte de constructibilité ni aucune dévalorisation par rapport à leur classement antérieur en zone 1 NA du plan d'occupation des sols, constaté que le classement de la zone correspondait à sa vocation et à son état naturels, à savoir des terrains à usage de jardins familiaux et d'activités maraîchères et horticoles, et retenu que le projet de la commune de [...], qui s'inscrivait nécessairement dans la durée, avait été dicté par des considérations d'intérêt général tenant, dans un premier temps, à la création d'une voie d'accès à grande circulation au centre-ville par l'Est, à laquelle avait été finalement préférée l'installation d'une voie de tramway et, dans un second temps, à la nécessité de répondre à une demande de logements de plus en plus pressante en anticipant la disparition progressive des exploitations agricoles du quartier dans une perspective de développement durable, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties et qui n'a pas statué au regard de l'usage futur des terrains, a souverainement déduit, de ces seuls motifs, que la preuve de l'intention dolosive de l'expropriante n'était pas établie et a légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Huguette X..., veuve Y..., M. Jean C..., Mme Annie Y..., Mme Christine Y..., épouse Z..., et Mme Nadine Y..., épouse A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour Mme Huguette X..., veuve Y..., M. Jean C..., Mme Annie Y..., Mme Christine Y..., épouse Z..., et Mme Nadine Y..., épouse A... .
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé les dispositions du jugement du 14 août 2015 du juge de l'expropriation pour le département du Doubs fixant les indemnités principales et de remploi dues par la SPL Territoire 25 aux consorts X... Y... au titre de l'expropriation des parcelles leur appartenant en indivis sur le territoire de [...] ;
AUX MOTIFS QUE « sur le moyen tiré d'une intention dolosive », « les consorts X... /Y... font grief à la ville de [...], qui au demeurant n'est pas partie en la cause dès lors que la SPL Territoire 25 a bénéficié d'une concession d'aménagement, d'avoir bloqué les terrains par une succession de droits de préemption en les rendant inconstructibles et en paupérisant le quartier prétexte pris de projets qui n'ont jamais vu le jour ; qu'ils excipent enfin d'une atteinte à leur droit au logement au motif qu'une restriction de jouissance de leur bien leur a interdit d'être propriétaires d'un logement sur les parcelles en cause ; qu'il résulte toutefois des pièces communiquées que les trois parcelles objets du présent litige ont toujours été inconstructibles, de sorte que l'approbation du PLU le 5 juillet 2007, qui a classé la zone en 2AUh (zone à urbaniser à vocation habitat) n'a entraîné aucune perte de constructibilité ni aucune dévalorisation des parcelles en cause, comme tentent de le soutenir les appelants ; qu'avant l'approbation de ce document, les parcelles étaient en effet classées en zone 1NA, donc non constructibles puisque constituant une zone naturelle à vocation agricole ; que le classement de la zone correspond à sa vocation et son état naturels, à savoir des terrains non bâtis en l'état de jardins familiaux et d'activités maraîchères et horticoles ; que le projet de la Ville de [...] sur la zone considérée a été dicté par des considérations d'intérêt général, à savoir dans un premier temps la création d'une voie d'accès à grande circulation au centre-ville par l'est, à laquelle a finalement été privilégié l'installation d'une voie de tram permettant un acheminement maîtrisé de la population depuis l'entrée de ville jusqu'au centre puis, dans un deuxième temps, par la nécessité de répondre à une demande de logement de plus en plus pressante par l'anticipation de la disparition progressive des exploitations agricoles du quartier dans une perspective de développement durable ; que de tels projets, qui doivent être anticipés, s'inscrivent nécessairement dans la durée ; que l'urbanisation de la zone a donc toujours été subordonnée à une procédure de modification ou une révision du document d'urbanisme ; qu'en effet les allégations des expropriés selon lesquelles les terrains seraient d'ores et déjà constructibles pour bénéficier d'un accès aisé aux réseaux, sont contredites par les documents produits par l'intimée et notamment le rapport de présentation du PLU, l'étude d'impact intégrée au dossier de déclaration d'utilité publique des [...] et la délibération du conseil municipal du 21 janvier 2013 approuvant le programme des équipements publics du quartier des [...] pour un montant prévisionnel de 27.806.000 € HT ; qu'il y apparaît clairement une incapacité des viabilités et équipements existant en périphérie de la zone à supporter l'intégralité de son urbanisation, le niveau d'équipement (eau potable, assainissement, électricité, gaz, télécommunications) étant qualifié de faible » ;
ALORS QUE 1°) l'intention dolosive n'implique pas, pour que cette dernière soit reconnue, une identité entre l'auteur du plan local d'urbanisme et l'expropriant ; que cette identité est d'autant moins nécessaire que l'expropriant s'avère non seulement le mandataire de l'auteur du plan local d'urbanisme, mais encore le concessionnaire chargé d'achever les opérations d'expropriation commencées par l'auteur du plan local d'urbanisme ; qu'aussi bien, en énonçant, pour exclure toute intention dolosive, que la « ville de [...], qui au demeurant n'est pas partie en la cause dès lors que la SPL Territoire 25 a bénéficié d'une concession d'aménagement », la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 322-2 et L. 322-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
ALORS QUE 2°) selon la rédaction alors en vigueur de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme, pour les plans d'occupation des sols avant la création des plans locaux d'urbanisme par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, d'une part, les zones NA étaient des « zones d'urbanisation future », avec les mêmes sous classement, 1NA, 2NA, les zones 1NA pouvaient obtenir des permis de construire pour une construction « compatible(s) un aménagement cohérent de la zone », et d'autre part, la « zone naturelle à vocation agricole » était classées sous la nomenclature NC ; qu'en énonçant, pour exclure toute intention dolosive de la part de l'expropriant, que « les parcelles étaient en effet classées en zone 1NA, donc non constructibles puisque constituant une zone naturelle à vocation agricole », la cour d'appel a violé l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur ;
ALORS QUE 3°) la notion de propriété privée ne se limite pas à la matérialité physique d'un bien immobilier, mais s'étend à la jouissance de ce bien ; qu'aucune des pièces produites par l'expropriant ne justifiait la demande de logements et une opération sur une durée d'une cinquantaine d'années ayant entraîné, une baisse de la valeur des terrains de 90 % ; qu'en retenant, pour écarter toute intention dolosive, l'existence d'une demande de logements de plus en plus pressante alors qu'aucune étude n'était produite, sans tenir aucun compte de la durée excessive d'indisponibilité des terrains des expropriés notamment sur une période supérieure à 14 ans, entrainant nécessairement une dévalorisation de ces terrains, la cour d'appel a violé l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE 4°) nul ne peut se constituer de preuve à soi-même ; qu'ainsi, une collectivité territoriale ne peut pas justifier la réalité des faits à partir de ses documents, notamment ceux qui sont établis justement pour servir de justificatifs à l'opération d'urbanisme qui sous-tend le procès ; qu'en se fondant exclusivement, pour écarter toute intention dolosive, sur le rapport de présentation du plan local d'urbanisme de la ville de [...], l'étude d'impact intégrée au dossier de déclaration d'utilité publique de l'opération de la zone d'aménagement concerté des [...] et la délibération du conseil municipal du 21 janvier 2013 approuvant le programme des équipements publics du quartier, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
ALORS QUE 5°) la valeur du terrain exproprié s'apprécie à la date de première instance, sans tenir compte au profit ou au préjudice de l'exproprié de l'usage futur des terrains par l'expropriant ; qu'en retenant néanmoins, pour débouter les expropriés de leur appel, « qu'il y apparaît clairement une incapacité des viabilités et équipements existants en périphérie de la zone à supporter l'intégralité de son urbanisation », c'est-à-dire le projet de l'expropriant, la cour d'appel a violé l'article L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE 6°) le dol peut être prouvé par tout moyen, par tout montage juridique permettant, ou pouvant permettre, le maintien ou la dévalorisation des biens d'un exproprié ; qu'il ne se limite pas à l'hypothèse d'un changement de classement des terrains au plan local d'urbanisme avant le lancement de la procédure d'expropriation ;
qu'en retenant que l'approbation du plan local d'urbanisme de 2007 n'a entraîné aucune perte de constructibilité ni aucune dévalorisation des parcelles en cause sur la base des seuls documents émanant de la collectivité territoriale expropriante sans rechercher, comme elle y était invitée, si les expropriés n'avaient pas fait valoir, dans leurs conclusions, un ensemble de preuves concordantes d'une manoeuvre dolosive de la part de cette collectivité, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 322-2 et L. 322-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé les dispositions du jugement du 14 août 2015 du juge de l'expropriation pour le département du Doubs fixant les indemnités principales et de remploi dues par la SPL Territoire 25 aux consorts X... Y... au titre de l'expropriation des parcelles leur appartenant en indivis sur le territoire de [...] ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande de renvoi devant le tribunal administratif », « en vertu de l'article L. 13-8, devenu L. 311-8 du code de l'expropriation, déclaré conforme à la Constitution par une décision du Conseil constitutionnel du 28 septembre 2012, "lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité, le juge fixe, indépendamment de ces contestations et difficultés, autant d'indemnités alternatives qu'il y a d'hypothèses envisageables et renvoie les parties à se pourvoir devant qui de droit" ; que le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre de cette question de droit (QPC n° 2012-275), a précisé que le juge de l'expropriation qui avait toujours la possibilité, au besoin, de fixer l'indemnité de manière alternative, devait par principe renvoyer les parties à se pourvoir devant le juge compétent ; qu'en toute hypothèse, les décisions contestées ont fait l'objet d'une procédure contradictoire, et en particulier l'ordonnance d'expropriation ; que le Conseil a également rappelé que le même juge pouvait être à nouveau saisi par les parties dans l'hypothèse où la décision du juge compétent au fond ne correspondait pas à ce qu'il avait prévu, au moment où il fixait l'indemnité revenant à la personne expropriée ; qu'il résulte de ce qui précède ainsi que des motifs relatifs au grief de dol précédemment examiné, que dès lors que la question soulevée par les appelants n'apparaît pas suffisamment sérieuse en l'état des pièces communiquées à la Cour, il n'y a pas lieu de fixer une indemnité alternative comme le permet le texte précité ; que les trois parcelles expropriées sont situées en zone 2AUh par le PLU de la ville de [...], approuvé le 5 juillet 2007 ; que si ce classement n'apparaît pas incompatible en soi avec la réalisation d'un projet d'aménagement et de développement durable sous forme d'éco-quartier destiné à un programme d'habitat diversifié, qui constitue le fondement de l'expropriation des consorts X... /Y..., il est cependant loisible aux parties appelantes de se pouvoir devant la juridiction compétente pour juger de la légalité du PLU, qu'elles contestent » ;
ALORS QUE 1°) la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant qu'« il est (
) loisible aux parties appelantes de se pouvoir devant la juridiction compétente pour juger de la légalité du PLU, qu'elles contestent », tout en refusant de « renvoyer au tribunal administratif de Besançon la question de la légalité du plan local d'urbanisme en tant qu'il a classé les parcelles expropriées et l'ensemble du secteur en zone 2AU-H », cependant que les expropriés ne peuvent saisir la juridiction compétente pour juger de la légalité du plan local d'urbanisme et soulever notamment l'erreur manifeste d'appréciation que dans l'hypothèse où le juge de l'expropriation renvoie les parties à se pourvoir devant qui de droit, en l'espèce la juridiction administrative qui ne peut pas être saisi par les expropriés au-delà du délai de deux mois de droit commun, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°) l'intention dolosive au sens du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique procède d'une logique juridique différente du contrôle de légalité du plan local d'urbanisme, notamment l'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en se fondant sur les « motifs relatifs au grief de dol précédemment examiné » pour refuser de renvoyer les expropriés devant la juridiction administrative en vue de contrôler l'erreur manifeste d'appréciation du plan local d'urbanisme et dénier le caractère suffisamment sérieux de la question soulevée par les expropriés, la cour d'appel a violé l'article L. 311-8 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé les dispositions du jugement du 14 août 2015 du juge de l'expropriation pour le département du Doubs fixant les indemnités principales et de remploi dues par la SPL Territoire 25 aux consorts X... Y... au titre de l'expropriation des parcelles leur appartenant en indivis sur le territoire de [...] ;
AUX MOTIFS QU'« en vertu de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation, "la qualification de terrains à bâtir est réservée aux terrains qui, un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L. 1 ou, dans le cas prévu à l'article L. 122-4, un an avant la déclaration d'utilité publique, sont, quelle que soit leur utilisation, à la fois : 1° Situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d'occupation des sols, un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, ou bien, en l'absence d'un tel document, situés dans une partie actuellement urbanisée d'une commune ; 2° Effectivement desservis par une voie d'accès, un réseau électrique, un réseau d'eau potable et, dans la mesure où les règles relatives à l'urbanisme et à la santé publique l'exigent pour construire sur ces terrains, un réseau d'assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains. Lorsqu'il s'agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d'occupation des sols, un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou par une carte communale, comme devant faire l'objet d'une opération d'aménagement d'ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée au regard de l'ensemble de la zone. Les terrains qui, à la date de référence indiquée au premier alinéa, ne répondent pas à ces conditions sont évalués en fonction de leur seul usage effectif, conformément à l'article L.322-2" ; que les appelants soutiennent que les constructions sur la parcelle en cause sont possibles, que leur classement en zone 2AUh n'écarte pas, par principe, leur constructibilité et que les réseaux sont à proximité immédiate et suffisants pour permettre l'implantation d'immeubles à usage d'habitation individuels ; qu'il doit être souligné à ce titre que, par simple application de l'article L.322-3 susvisé, lorsque les terrains expropriés sont situés dans une zone désignée par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé comme devant faire l'objet d'une opération d'ensemble, la dimension de ces réseaux doit s'apprécier au regard de l'ensemble de la zone ; qu'en l'espèce la desserte tant routière qu'en réseaux est insuffisante comme en atteste le coût de viabilisation et d'équipements publics précédemment rappelé ; qu'en outre les conditions du texte précité, qui sont d'une part matérielle (desserte effective par l'ensemble des voies et réseaux, voies d'accès, réseau électrique, réseau d'eau potable, réseau d'assainissement) et d'autre part juridique puisqu'attachée au document d'urbanisme opposable, sont cumulatives ; que les trois parcelles des consorts X... /Y... n'étant pas situées dans un secteur désigné comme constructible par le PLU de la Ville de [...] approuvé le 5 juillet 2007, puisque classées en 2AUh, elles ne peuvent ni être qualifiées de terrain à bâtir, ni évaluées comme telles » ;
ALORS QUE 1°) le 2° de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique précise que, lorsque les terrains expropriés sont situés dans une zone désignée par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé comme devant faire l'objet d'une opération d'ensemble, la dimension de ces réseaux doit s'apprécier au regard de l'ensemble de la zone ; qu'en excluant la qualification de terrains à bâtir s'agissant des parcelles des expropriés sans vérifier sur le plan local d'urbanisme approuvé en 2007 l'existence d'une « opération d'ensemble », d'autant que la zone d'aménagement concerté des [...] n'a été créée qu'en juin 2011, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
ALORS QUE 2°) en se fondant, pour déterminer la valeur des parcelles des expropriés qui ont été aptes à accueillir des maisons individuelles, sur les dispositions de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique qui tiennent compte de l'usage futur des parcelles expropriées, à raison de leur location dans le périmètre d'une zone d'aménagement concerté d'une surface d'environ 23 hectares, avec un programme prévisionnel de constructions d'environ 1050 logements, la cour d'appel a violé l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE 3°) et en tout état de cause, le principe de l'égalité des armes, tel qu'il résulte du droit à un procès équitable, interdit qu'une partie au procès soit placée dans une situation plus avantageuse que celle occupée par son adversaire ; qu'en se fondant, pour déterminer la valeur des parcelles des expropriés qui ont été aptes à accueillir des maisons individuelles, sur les dispositions de l'article L. 322-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique qui avantagent l'expropriant en tenant compte de l'usage futur des parcelles expropriées, la cour d'appel a violé le principe d'égalité des armes entre l'exproprié et l'expropriant, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé les dispositions du jugement du 14 août 2015 du juge de l'expropriation pour le département du Doubs fixant les indemnités principales et de remploi dues par la SPL Territoire 25 aux consorts X... Y... au titre de l'expropriation des parcelles leur appartenant en indivis sur le territoire de [...] ;
AUX MOTIFS QUE « sur la valorisation des parcelles expropriées », « le prix des terrains, en application de l'article L.322-2 du code de l'expropriation, doit être estimé à la date de la décision de première instance en fonction de leurs caractéristiques à la date de référence du 5 juillet 2007 ; qu'il est rappelé que le juge ne peut prendre en compte une valorisation future ou une utilisation future du bien et notamment la situation privilégiée susceptible de résulter de l'aménagement futur de la zone ; qu'il a été justement relevé par le premier juge que la pression foncière de la zone due à la proximité du centre-ville, facteur d'une situation privilégiée, ne modifie pas la qualification des parcelles concernées et ne le dispense pas de se référer au prix des transactions effectives portant sur des biens comparables ; qu'aucune référence n'est produite concernant d'éventuelles transactions entre personnes privées portant sur des terrains comparables » ;
ALORS QUE les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation ; qu'en retenant, pour débouter les expropriés de leurs demandes, que, s'agissant des parcelles 2AU « à urbaniser », seul devait être pris en considération l'usage effectif du bien à la date de référence, en l'espèce un usage agricole, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la notion de terrain privilégié n'avait pas lieu de s'appliquer à ces terrains qui ont déjà perdu leur caractère naturel ou agricole et qui se situent en zone d'urbanisation, bien que ne pouvant recevoir la qualification de terrain à bâtir, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 321-1 et L. 322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé les dispositions du jugement du 14 août 2015 du juge de l'expropriation pour le département du Doubs fixant les indemnités principales et de remploi dues par la SPL Territoire 25 aux consorts X... Y... au titre de l'expropriation des parcelles leur appartenant en indivis sur le territoire de [...] ;
AUX MOTIFS QUE « sur la valorisation des parcelles expropriées », « c'est également par des motifs circonstanciés que la Cour adopte que le premier juge, prenant en compte le caractère non constructible des terrains dont s'agit ainsi que des nombreux éléments comparatifs communiqués par la SPL Territoire 25 résultant soit de cessions amiables soit de décisions judiciaires tant du juge de l'expropriation de [...] que des Cours d'appel de Besançon et Dijon, intervenues à l'égard de propriétaires de terrains de même nature situés dans le périmètre de la déclaration d'utilité publique entre 2011 et 2015 mais également d'autres transactions intervenues sur des terrains classés 2AUh dans d'autres quartiers de la ville de [...], a fixé l'indemnité principale en fonction d'une valeur unitaire de 8 €/m2, correspondant au prix habituellement pratiqué pour tous les terrains de la zone, et intégrant leur situation privilégiée, après avoir relevé que les éléments de comparaison proposés par l'appelante, ne concernaient pas des terrains de même zonage puisque situés en zone U ou des terrains à bâtir » ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « les cessions amiables ainsi que les jugements définitifs rendus par la juridiction de ce siège et dont il ressort un prix unitaire de 8 € le m2 pour des terrains et emprises comparables aux parcelles expropriées puisque situées à proximité immédiate et dans le même zonage que celles-ci constituent des termes de comparaison pertinents dont il convient de tenir compte, étant par ailleurs précisé que ces accords ne peuvent être discrédités au seul motif qu'ils sont intervenus dans un contexte d'expropriation et avec de multiples propriétaires à l'égard desquels il ne peut être pris pour postulat qu'ils auraient été moins enclins ou moins aptes que les consorts X.../Y... à défendeur leurs droits » ;
ALORS QUE 1°) les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à affirmer, par adoption des motifs du premier juge, que les références proposées par les expropriés ne concernaient pas des terrains de même zonage puisque « situés en zone U ou des terrains à bâtir », cependant qu'au soutien de leurs prétentions d'appel, les expropriés invoquaient notamment trois acquisitions par la ville de [...], huit actes de vente reflets du marché libre, cinq ventes en terrain inconstructible agricole ou naturelle à des prix compris entre 15 et 75 euros, sept ventes en zone « à urbaniser », ainsi que douze ventes à proximité directe, ainsi qu'un antécédent d'expropriation des mêmes expropriés (cf. not. conclusions récapitulatives n° 2, pp. 30-34, §§. 207 à 232), la cour d'appel qui n'a manifestement pas examiné tous les éléments de preuve qui lui étaient fournis, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°) en fondant le montant des indemnités d'expropriation sur l'unique critère du classement des terrains expropriés dans le zonage 2AUh, sans examiner d'autres critères, tout en reconnaissant qu'il n'existe pas « de transaction entre personnes privées portant sur des terrains comparables », dans la mesure où ce zonage a été réservé par la ville de [...] pour ses opérations d'urbanisme, la cour d'appel a violé l'article 1er du Premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
ALORS QUE 3°) et en tout état de cause, le principe de l'égalité des armes, tel qu'il résulte du droit à un procès équitable, interdit qu'une partie au procès soit placée dans une situation plus avantageuse que celle occupée par son adversaire ; qu'en retenant, pour déterminer le montant des indemnités d'expropriation, un seul et unique critère tiré du classement des terrains expropriés dans le zonage 2AUh, ce qui avantage nécessairement l'expropriant aux détriments des expropriés puisque ce zonage a été réservé par la ville de [...] pour ses opérations d'urbanisme, sans examiner d'autres critères, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.