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07/06/2018 | FRANCE | N°16-22444

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 juin 2018, 16-22444


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, le 4 novembre 2015), que M. Y..., à la suite de son licenciement, s'est inscrit le 1er octobre 2008 comme demandeur d'emploi auprès des services de Pôle emploi ; que par courriers du 18 mai et du 28 juin 2012, ces derniers l'ont mis en demeure de reverser, au titre de la répétition de l'indu, des sommes pour les périodes du 1er mai au 31 décembre 2009 et du 1er janvier au 14 décembre 2010 ; que par lettre du 1er mai 2012, M. Y... a sollicitÃ

© une remise gracieuse qui lui a été refusée ;

Attendu que Pôle emploi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, le 4 novembre 2015), que M. Y..., à la suite de son licenciement, s'est inscrit le 1er octobre 2008 comme demandeur d'emploi auprès des services de Pôle emploi ; que par courriers du 18 mai et du 28 juin 2012, ces derniers l'ont mis en demeure de reverser, au titre de la répétition de l'indu, des sommes pour les périodes du 1er mai au 31 décembre 2009 et du 1er janvier au 14 décembre 2010 ; que par lettre du 1er mai 2012, M. Y... a sollicité une remise gracieuse qui lui a été refusée ;

Attendu que Pôle emploi fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable, comme étant prescrite, son action visant à obtenir le remboursement des allocations indûment servies antérieurement au 19 août 2010, alors, selon le moyen :

1°/ que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription, peu important que le créancier n'ait pas mentionné les voies et délais de recours dans sa mise en demeure précédant la demande de remise de dette ; qu'il ressort des termes du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... avait sollicité de Pôle emploi une remise gracieuse de dette qu'il se trouvait dans l'incapacité totale de rembourser, après avoir reçu de Pôle emploi, le 18 mai 2012 et le 28 juin 2012, deux courriers le mettant en demeure de rembourser les sommes indûment perçues ; qu'en affirmant que le courrier du 1er mai 2012 ne constituait pas une reconnaissance de dette interruptive de prescription dès lors que Pôle emploi, dans ses deux lettres de mise en demeure des 10 et 24 avril 2012, ne fait pas référence à l'existence d'une voie de recours contre la demande en répétition de l'indu, elle-même formée par Pôle emploi, quand le courrier du 1er mai 2012 vaut reconnaissance par M. Y... de l'existence de la dette interruptive de la prescription, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations ; qu'ainsi, elle a violé les articles 1134 et 2240 du code civil ;

2°/ que Pôle emploi, institution nationale publique gestionnaire du régime d'assurance chômage, est investi du pouvoir propre d'interrompre le service de l'allocation d'assurance chômage en cas d'extinction du droit à l'allocation et d'agir en répétition des sommes indûment versées à un allocataire ; qu'il s'ensuit que Pôle emploi est dispensé de mentionner les voies et délais de recours lorsqu'il met en demeure un allocataire de lui restituer des allocations indûment versées ; qu'en exigeant de Pôle emploi qu'il mentionne l'existence d'une voie de recours contre la demande en répétition de l'indu lorsqu'il met en demeure un allocataire de restituer ce qui lui a été indûment versé, la cour d'appel a violé les articles 1235 et 1376 du code civil, ensemble l'article 2240 du même code ;

3°/ que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription ; qu'il ressort des termes du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... avait expressément sollicité de Pôle emploi une remise gracieuse de dette qu'il se trouvait dans l'incapacité totale de rembourser, après avoir reçu de Pôle emploi, le 18 mai 2012 et le 28 juin 2012, deux courriers le mettant en demeure de rembourser les sommes indûment payées ; qu'en affirmant que les termes de ce courrier ne pouvaient s'analyser comme la reconnaissance sans équivoque de la dette dont ni la référence ni le montant ne sont mentionnés par M. Y... dans son courrier, quand M. Y... avait nécessairement eu connaissance de l'existence et du montant de l'indu par deux courriers des 10 et 24 avril 2012, antérieurement à l'envoi de la demande de remise gracieuse, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2240 du code civil ;

4°/ qu'il résulte des termes clairs et précis du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... a expressément sollicité une remise gracieuse de dette après avoir exposé les raisons familiales et professionnelles qui le mettaient dans l'incapacité de rembourser les allocations indûment versées sans émettre aucune réserve ; qu'en affirmant que M. Y... avait émis des réserves sur les motifs de la demande en répétition de l'indu dans son courrier du 1er mai 2012, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1134 du code civil ;

5°/ que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription, peu important qu'il conteste la dette par la suite ; qu'en affirmant, pour dénier tout effet interruptif à la demande de remise gracieuse envoyée par courrier du 1er mai 2012, que M. Y... a ensuite contesté la dette par courrier du 29 mai 2012, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation des articles 2240 et 1134 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant relevé que la teneur du premier courrier du 1er mai 2012 de l'allocataire était induite par l'alternative offerte par Pôle emploi dans ses deux courriers entre la remise gracieuse ou l'échelonnement de la dette, qu'il contenait des réserves sur les motifs de la demande en répétition de l'indu, a pu retenir que ce courrier ne pouvait s'analyser comme la reconnaissance claire et non équivoque de la dette et en a déduit à bon droit qu'il n'était pas interruptif du délai de prescription ; que le moyen, inopérant en ce qu'il critique des motifs surabondants dans sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Pôle emploi aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Pôle emploi à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour Pôle emploi

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable, comme étant prescrite, l'action que POLE EMPLOI POITOU CHARENTES avait formée afin d'obtenir le remboursement des allocations indûment servies antérieurement au 19 août 2010 ;

AUX MOTIFS QUE M. Y... oppose à Pôle Emploi Poitou Charentes une fin de non recevoir tirée de la prescription au motif que l'assignation en paiement a été délivrée le 20 août 2013 et qu'en conséquence, les demandes en paiement antérieures au 19 août 2010 sont prescrites ; qu'il conteste le moyen de Pôle Emploi Poitou Charentes selon lequel son courrier de demande de remise gracieuse du 1er mai 2012 aurait interrompu la prescription car valant reconnaissance de dette ; qu'en application de l'article 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ; que, dans tous les cas, la reconnaissance doit être claire ; que l'aveu contenu dans l'acte écrit ne doit prêter à aucune discussion ; qu'en l'espèce, le courrier du 1er mai 2012 adressé à Pôle Emploi Poitou Charentes par M. Y... est une simple réponse au deux lettres de mise en demeure des 10 et 24 avril 2012 de cet organisme qui n'envisageaient que deux hypothèses de discussion : la remise gracieuse ou l'échelonnement de la dette sans qu'il soit fait référence à l'existence d'une voie de recours contre la demande en répétition de l'indu, elle-même, formée par Pôle Emploi Poitou Charentes ; que le fait que M. Y... sollicite dans cette correspondance une remise en gracieuse est, en conséquence, induit par la teneur de la lettre de la mise en demeure et ne peut s'analyser comme la reconnaissance sans équivoque de la dette dont ni la référence, ni le montant ne sont mentionnés par M. Y... dans son courrier dans lequel sont, de surcroît, émises des réserves sur les motifs de la demande en répétition de l'indu que l'intéressé, a, au demeurant, expressément contestée par courrier du 29 mai 2012, ce dont il se déduit que le courrier du 1er mai ne constitue pas une reconnaissance de dette au sens de l'article 2240 du code civil et n'interrompt pas la prescription ; qu'en application de l'article L 5422-5 du code du travail, l'action en remboursement de l'allocation d'assurance indûment versée aux travailleurs volontairement privés d'emploi se prescrit par trois ans ; que ces délais courent à compter du jour de versement de ces sommes ; qu'en l'espèce, Pôle Emploi Poitou Charentes a versé à M. Y... des allocations d'assurance entre le 1er mai et le 31 décembre 2009, puis, du 1er janvier au 31 décembre 2010 ; que l'assignation en paiement de ces sommes ayant été délivrée le 20 août 2013, il résulte de ce qui précède que l'action en recouvrement de l'éventuel trop perçu est prescrite pour les versements antérieurs au 19 août 2010 ;

1. ALORS QUE la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription, peu important que le créancier n'ait pas mentionné les voies et délais de recours dans sa mise en demeure précédant la demande de remise de dette ; qu'il ressort des termes du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... avait sollicité de POLE EMPLOI une remise gracieuse de dette qu'il se trouvait dans l'incapacité totale de rembourser, après avoir reçu de POLE EMPLOI, le 18 mai 2012 et le 28 juin 2012, deux courriers le mettant en demeure de rembourser les sommes indûment perçues ; qu'en affirmant que le courrier du 1er mai 2012 ne constituait pas une reconnaissance de dette interruptive de prescription dès lors que POLE EMPLOI, dans ses deux lettres de mise en demeure des 10 et 24 avril 2012, ne fait pas référence à l'existence d'une voie de recours contre la demande en répétition de l'indu, elle-même formée par POLE EMPLOI POITOU CHARENTES, quand le courrier du 1er mai 2012 vaut reconnaissance par M. Y... de l'existence de la dette interruptive de la prescription, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations ; qu'ainsi, elle a violé les articles 1134 et 2240 du code civil ;

2. ALORS QUE POLE EMPLOI, institution nationale publique gestionnaire du régime d'assurance chômage, est investi du pouvoir propre d'interrompre le service de l'allocation d'assurance chômage en cas d'extinction du droit à l'allocation et d'agir en répétition des sommes indûment versées à un allocataire ; qu'il s'ensuit que POLE EMPLOI est dispensé de mentionner les voies et délais de recours lorsqu'il met en demeure un allocataire de lui restituer des allocations indûment versées ; qu'en exigeant de POLE EMPLOI qu'il mentionne l'existence d'une voie de recours contre la demande en répétition de l'indu lorsqu'il met en demeure un allocataire de restituer ce qui lui a été indûment versé, la cour d'appel a violé les articles 1235 et 1376 du code civil, ensemble l'article 2240 du même code ;

3. ALORS QUE la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription ; qu'il ressort des termes du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... avait expressément sollicité de POLE EMPLOI une remise gracieuse de dette qu'il se trouvait dans l'incapacité totale de rembourser, après avoir reçu de POLE EMPLOI, le 18 mai 2012 et le 28 juin 2012, deux courriers le mettant en demeure de rembourser les sommes indûment payées ; qu'en affirmant que les termes de ce courrier ne pouvaient s'analyser comme la reconnaissance sans équivoque de la dette dont ni la référence ni le montant ne sont mentionnés par M. Y... dans son courrier, quand M. Y... avait nécessairement eu connaissance de l'existence et du montant de l'indu par deux courriers des 10 et 24 avril 2012, antérieurement à l'envoi de la demande de remise gracieuse, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2240 du code civil ;

4. ALORS QU'il résulte des termes clairs et précis du courrier du 1er mai 2012 que M. Y... a expressément sollicité une remise gracieuse de dette après avoir exposé les raisons familiales et professionnelles qui le mettaient dans l'incapacité de rembourser les allocations indûment versées sans émettre aucune réserve ; qu'en affirmant que M. Y... avait émis des réserves sur les motifs de la demande en répétition de l'indu dans son courrier du 1er mai 2012, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1134 du code civil ;

5. ALORS QUE la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; que la lettre aux termes de laquelle un débiteur sollicite la remise de sa dette vaut reconnaissance de celle-ci et interrompt la prescription, peu important qu'il conteste la dette par la suite ; qu'en affirmant, pour dénier tout effet interruptif à la demande de remise gracieuse envoyée par courrier du 1er mai 2012, que M. Y... a ensuite contesté la dette par courrier du 29 mai 2012, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation des articles 2240 et 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22444
Date de la décision : 07/06/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 04 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 jui. 2018, pourvoi n°16-22444


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22444
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