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04/11/2015 | FRANCE | N°15/01189

France | France, Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 04 novembre 2015, 15/01189


COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2015
ARRET No 736
R. G : 15/01189

Association A. E. C. B.

C/
X...
Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 11 mars 2015 rendu par le Conseil de Prud'hommes de THOUARS.
DEMANDERESSE AU CONTREDIT :
Association A. E. C. B. 4 rue du Docteur Brillaud 79300 BRESSUIRE

Représentée par Me Estelle GODARD, avocat au barreau d'ANGERS
DEFENDEUR AU CONTREDIT :
Monsieur Marc X... ... 79300 BRESSUIRE

Comparant en personne

COMPOSITION DE LA COUR :
>L'affaire a été débattue le 23 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Eric VEYSSIE...

COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2015
ARRET No 736
R. G : 15/01189

Association A. E. C. B.

C/
X...
Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 11 mars 2015 rendu par le Conseil de Prud'hommes de THOUARS.
DEMANDERESSE AU CONTREDIT :
Association A. E. C. B. 4 rue du Docteur Brillaud 79300 BRESSUIRE

Représentée par Me Estelle GODARD, avocat au barreau d'ANGERS
DEFENDEUR AU CONTREDIT :
Monsieur Marc X... ... 79300 BRESSUIRE

Comparant en personne

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Eric VEYSSIERE, Président Madame Catherine KAMIANECKI, Conseiller Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Christine PERNEY

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE
-Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits-procédure-prétentions des parties

L'association de l'enseignement catholique de Bressuire (AECB) a pour activité la gestion d'établissements scolaires catholiques à Bressuire sous le régime d'un contrat d'association avec l'Etat.

Monsieur Marc X... a été engagé le 6 octobre 2010 par le rectorat de Poitiers pour être employé en qualité de professeur d'arts appliqués au sein du Lycée St Joseph géré par l'AECB.
Par requête du 9 mars 2011, M. X... a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires. Par jugement du 16 octobre 2013, le tribunal a débouté l'intéressé.
M. X... a saisi, le 1er septembre 2014, le conseil de prud'hommes de Thouars de demandes de rappel de salaires et de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la publication d'un article de presse et d'une mention infamante dans un document public.
Par jugement du 11 mars 2015, le conseil a rejeté l'exception d'incompétence d'attribution soulevée par l'AECB et s'est déclaré compétent pour examiner le fond du litige au motif que les heures d'enseignement effectuées par M. X... étaient commandées par le Lycée dans le cadre d'un contrat de droit privé.
L'AECB a formé un contredit à l'encontre de cette décision.
Dans son mémoire du 23 mars 2015, l'AECB demande à la cour de réformer le jugement, de déclarer le conseil de prud'hommes de Thouars incompétent au profit du tribunal administratif de Poitiers et de condamner M. X... au paiement d'une somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses écritures enregistrées au greffe le 3 août 2015 et reprises oralement à l'audience, M. X... conclut à la confirmation du jugement.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont déposées et reprises oralement à l'audience.

Motifs de la décision

L'AECB fait valoir que, en vertu du contrat d'association la liant à l'Etat, les enseignants des établissements sous contrat sont des agents publics recrutés et rémunérés par l'Etat et relèvent, à ce titre, des juridictions administratives s'agissant des litiges avec leur employeur. Or, M. X... qui a été recruté et installé par le Rectorat n'a souscrit aucun contrat de travail avec l'AECB de sorte que le conseil de prud'hommes ne peut connaître des demandes faites par celui-ci au titre de ses heures d'enseignement et ce d'autant plus que l'engagement conclu avec le rectorat comporte une clause d'attribution exclusive de compétence au tribunal administratif.

M. X... considère que dés lors que les heures supplémentaires ont été demandées par le chef d'établissement et à sa seule initiative, elles sont réputées avoir été exécutées dans le cadre d'un contrat de droit privé d'où il suit que le conseil de prud'hommes est compétent pour en connaître.
Aux termes de l'article L 442-5 du code de l'éducation, les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré peuvent demander à passer avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public, s'ils répondent à un besoin scolaire reconnu qui doit être apprécié en fonction des principes énoncés aux articles L. 141-2, L. 151-1 et L. 442-1.
Le contrat d'association peut porter sur une partie ou sur la totalité des classes de l'établissement. Dans les classes faisant l'objet du contrat, l'enseignement est dispensé selon les règles et programmes de l'enseignement public. Il est confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l'Etat par contrat. Ces derniers, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, dans le cadre de l'organisation arrêtée par le chef d'établissement, dans le respect du caractère propre de l'établissement et de la liberté de conscience des maîtres.
Nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement, les personnels enseignants mentionnés à l'alinéa précédent sont, pour l'application des articles L. 2141-11, L. 2312-8, L. 2322-6, L. 4611-1 à L. 4611-4 et L. 4611-6 du code du travail, pris en compte dans le calcul des effectifs de l'établissement, tel que prévu à l'article L. 1111-2 du même code. Ils sont électeurs et éligibles pour les élections des délégués du personnel et les élections au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et au comité d'entreprise. Ils bénéficient de ces institutions dans les conditions prévues par le code du travail. Les rémunérations versées par l'Etat à ces personnels sont prises en compte pour le calcul de la masse salariale brute, tel que prévu aux articles L. 2325-12 et L. 2325-43 du même code, et la détermination du rapport entre la contribution aux institutions sociales et le montant global des salaires, mentionné à l'article L. 2323-86 du même code.
Il résulte de ces dispositions déclarées conformes à la constitution par une décision du conseil constitutionnel du 14 juin 2013 statuant sur une question prioritaire de constitutionnalité que les maîtres de l'enseignement privé sous contrat bénéficient du statut d'agent public faisant obstacle à l'existence d'un contrat de travail de droit privé.
Selon les énonciations du jugement du tribunal administratif, M. X... n'a effectué aucune heure supplémentaire rémunérée par l'Etat au titre des obligations de service imposées par les programmes et règlements d'examen et le litige relatif à l'existence d'éventuelles heures supplémentaires résulte de l'annualisation du temps de travail des enseignants au sein du lycée St Joseph. Or, ainsi que le relève le juge administratif, l'article 1er du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique interdit de soumettre les enseignants à un temps de travail annualisé ce dont il se déduit que les heures supplémentaires alléguées par M. X... ont été demandées par le chef d'établissement au delà des obligations de service et sans autorisation de l'autorité académique.
Contrairement aux affirmations de M. X..., le fait d'accomplir des heures supplémentaires à la demande du chef d'établissement en dehors de l'autorisation académique n'implique pas qu'il soit lié à l'établissement par un contrat de travail de droit privé dés lors qu'il est constant que ces heures ont été réalisées en tant qu'enseignant et donc, sous le statut d'agent public.
Si, en application de l'article L 1411-2 du code du travail, le conseil de prud'hommes peut régler les différends et litiges des personnels des services publics, lorsqu'ils sont employés dans des conditions de droit privé, il ne peut, en revanche, en vertu du principe de la séparation des ordres de juridictions, connaître d'un litige relatif au temps de travail d'un agent public comme c'est le cas en l'espèce.
La référence à une décision du tribunal des conflits citée par M. X... est inopérante dans la mesure où d'une part, à la différence du cas évoqué par cette juridiction, la décision du chef d'établissement tendant à obtenir l'exécution d'heures supplémentaires n'est pas détachable de la mission de service public exercée par l'établissement et d'autre part, la solution du litige ne dépend pas de l'interprétation d'une clause de droit privé.
La demande de M. X... formée devant la juridiction prud'homale portant sur l'aménagement du temps de travail de celui-ci dans ses seules fonctions d'enseignant, il s'ensuit que la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige, étant observé que M. X... avait, lors de la saisine initiale du tribunal administratif, dirigé son action contre l'Etat et non contre le Lycée St Joseph, partie concernée en l'espèce.
Le contredit, sera, en conséquence, déclaré bien fondé, l'incompétence du conseil de prud'hommes sera prononcée et M. X... sera renvoyé à mieux se pourvoir conformément aux dispositions de l'article 96 du code de procédure civile.
M. X..., partie perdante, supportera les dépens de première instance et d'appel.
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Déclare le contredit recevable et bien fondé ;

Dit que le conseil de prud'hommes de Thouars est incompétent pour connaître des demandes formées par M. X... contre l'association de l'enseignement catholique de Bressuire ;
Renvoie M. X... à mieux se pourvoir ;
Rejette la demande de l'association de l'enseignement catholique de Bressuire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. X... aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Poitiers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/01189
Date de la décision : 04/11/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.poitiers;arret;2015-11-04;15.01189 ?
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