LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 23 février 2017), qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2010 à 2012, la caisse de mutualité sociale agricole de Picardie (la CMSA) a notifié à la société EEMVL (la société), le 27 novembre 2013, un redressement suivi, le 30 décembre 2013, d'une mise en demeure ; que la société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le moyen unique pris, en sa première branche :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à l'annulation de la procédure de contrôle et de la mise en demeure, alors, selon le moyen, que la procédure de contrôle par les agents de la MSA doit respecter le principe de la contradiction ; qu'ayant constaté que l'entreprise redressée avait présenté par lettre du 19 décembre 2013 des observations documentées et que la CMSA avait notifié une mise en demeure le 30 décembre 2013 sans y répondre, en rejetant le moyen d'annulation du redressement aux motifs inopérants que les dispositions de l'article D. 724-9 du code rural et de la pêche maritime ne prévoient pas que lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle soit tenu de répondre aux observations ; la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble ces dispositions ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article D. 724-9, devenu R. 724-9, du code rural et de la pêche maritime, applicable au litige, que la procédure de contrôle d'une caisse de mutualité sociale agricole est régulière dès lors qu'il est constaté que celle-ci a communiqué à la personne contrôlée, en l'invitant à y répondre dans un délai de trente jours, ses observations, et que le recouvrement des prestations indues, des cotisations, des pénalités et majorations de retard est intervenu au terme de ce délai ;
Et attendu que l'arrêt relève, d'une part, que la lettre d'observations a été reçue le 28 novembre 2013 par la société qui y a répondu, d'autre part, que la mise en demeure lui a été adressée le 30 décembre 2013, de sorte que le délai de l'article D. 724-9 du code rural et de la pêche maritime a été respecté ;
Que par ce seul motif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du même moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société EEVML aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société EEVML et la condamne à payer à la caisse de mutualité sociale agricole de Picardie la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société EEVML.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société E.E.V.M.L. de sa demande principale d'annulation de la procédure de contrôle réalisée le 23 septembre 2013 dans ses locaux et d'annulation de la mise en demeure du 30 décembre 2013 ; de l'avoir déboutée de sa demande subsidiaire de cantonnement du redressement à la somme de 13 063 € ou, plus subsidiairement, à la somme de 37 630 € ; et de l'avoir condamnée au paiement à la MSA de Picardie de la somme de 55 220,60 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'à la suite d'un contrôle effectué par les services de la MSA et portant sur les cotisations sur salaires pour la période du 1er trimestre 2010 au 4e trimestre 2012, la société EEVML a reçu notification le 31 décembre 2013 d'une mise en demeure tendant à la régularisation de cotisations sur salaires d'un montant total de 55 220,60 euros ; que la société EEVML est une entreprise paysagiste qui emploie une vingtaine de salariés ; qu'il n'est pas contesté que la convention collective applicable est la convention collective nationale des entreprises de paysage ; que contestant la procédure de redressement ainsi que le bien-fondé de celui-ci, la société EEVML a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais qui, statuant par jugement du 16 avril 2015, dont appel, l'a déboutée de son recours ; que, sur la régularité des opérations de contrôle, l'article D 724-7 du code rural et de la pêche maritime, en vigueur au moment du contrôle litigieux, prévoyait que tout contrôle effectué en application de l'article L 724-11 devait être précédé de l'envoi d'un avis adressé par lettre recommandée avec accusé de réception à l'employeur, au chef d'exploitation ou au titulaire d'allocation de vieillesse agricole ou de pension de retraite intéressé ; que les articles D 724-7, D 724-9, dans leur version applicable au litige, précisaient les modalités du principe du respect du contradictoire lors du contrôle ; que la caisse de la MSA établit qu'en application de l'article D 724-7 du code rural et de la pêche maritime un avis de passage a été délivré le 9 août 2013 à la société EEVML et que par courrier du 19 septembre 2013, la société a confirmé le rendez-vous visé sur l'avis de passage soit le 24 septembre 2013 ; que les dispositions prévues par l'article D 724-7 du code rural et de la pêche maritime ont bien été respectées ; que selon l'article D 724-9 du même code dans sa version applicable à l'espèce à l'issue du contrôle, la caisse de mutualité sociale agricole adresse au moyen d'une lettre recommandée avec avis de réception aux personnes contrôlées un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle et, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature et du mode de calcul des redressements d'assiette et de taux envisagés, ou du montant des prestations à reverser, tels que connus à cette date ; que les agents mentionnés à l'article L 724-7 peuvent également remettre en mains propres, contre récépissé, en lieu et place de la caisse et en informant celle-ci, le document prévu à l'alinéa précédent, qu'ils datent et signent ; que le récépissé est signé par la personne contrôlée ; que celle-ci dispose d'un délai de trente jours pour faire part de sa réponse à ces observations à la caisse de mutualité sociale agricole ; que le recouvrement des prestations indues, des cotisations, des pénalités et des majorations de retard ne peut intervenir qu'au terme du délai prévu à l'alinéa précédent ; que la lettre d'observations prévue à l'article D 724-9 constitue une formalité substantielle en ce qu'elle est destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle et la sauvegarde des droits de la défense ; qu'en l'espèce, la caisse a adressé par lettre recommandée avec avis de réception à la société EEVML le 27 novembre 2013 un document rappelant l'objet du contrôle et mentionnant les documents consultés, la période vérifiée, la date de fin de contrôle ainsi que les observations constatées et un tableau récapitulatif détaillé du montant du redressement de cotisations ; que l'avis de réception a été signé le 28 novembre 2013 par la société ; que si l'appelant considère que son droit de réponse a été nié en ce que d'une part ses observations n'ont pas donné lieu à réponse dans le délai imparti et, d'autre part, la mise en demeure est intervenue sans tenir compte de celle-ci, les dispositions de l'article D 724-9 susvisé ne prévoient pas que lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle soit tenu de répondre aux observations ; qu'en l'espèce, la mise en demeure datée du 30 décembre 2013, dont l'avis de réception a été signé le 31 décembre 2013, est intervenu au-delà du délai de trente jours ; que la caisse a par conséquent respecté les dispositions de l'article D 724-9 du code rural et de la pêche maritime et, par confirmation du jugement entrepris, il n'y a pas lieu de déclarer méconnu le principe du contradictoire ; que, sur le redressement, il résulte de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail sont soumises à cotisations, à l'exception des indemnités compensatrices de frais professionnels dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel ; que l'alinéa 1 de l'article L 741-10 du code rural et de la pêche maritime dispose qu'entrent dans l'assiette pour le calcul des cotisations dues au titre des assurances sociales agricoles les rémunérations au sens des dispositions de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, sous les seules réserves mentionnées dans la présente section ; que l'arrêté du 17 juin 2003 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations sociales agricoles a modifié les conditions et limites dans lesquelles les remboursements pour frais professionnels sont exclus de l'assiette des cotisations et contributions sociales ; qu'en son article 2 il dispose que l'indemnisation des frais professionnels s'effectue :
- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé ; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents (
) ;
- soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaires conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9 ;
que l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, applicable en l'espèce prévoit que le grand déplacement vise deux situations distinctes :
- celui qui ne permet pas aux salariés de regagner leur domicile ;
- celui qui les éloigne de plus de 100 km et de moins de 150 km du siège, de l'agence ou du dépôt ;
qu'en l'espèce, il résulte des éléments produits que la société a indiqué indemniser les déplacements de ses salariés sur une assiette forfaitaire en précisant que si cette assiette est inférieure aux frais réellement engagés, elle complète ce forfait par une indemnité qu'elle appelle grands déplacements ; qu'il ressort des éléments produits par la société que l'indemnité de grand déplacement n'est pas utilisée conformément à son objet et qu'en outre seuls 54 déplacements sur 279 remplissent la condition relative à l'éloignement de plus de 100 km et de moins de 150 km du siège ; que la société ne conteste pas utilement ces éléments en ce que ses observations portent essentiellement sur les petits déplacements ; que l'article 6 de la convention collective applicable prévoit que le salarié qui se rend sur les chantiers par les moyens de transport mis à sa disposition par l'entreprise au siège ou dans l'un de ses dépôts est indemnisé dans les conditions suivantes :
« Dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit :
- dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3MG
- dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4MG
- dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG
- dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG ;
Le MG applicable est celui en vigueur au 1er janvier de l'année en cours » ; qu'à titre subsidiaire, la société sollicite que le montant du redressement soit limité à la somme de 13 063 euros ou plus subsidiairement encore à la somme de 37 630 euros aux motifs qu'elle n'a pas imputé uniquement des indemnités de grands déplacements à ses salariés et qu'elle différencie bien dans ses décomptes les déplacements en fonction du rayon dans lequel ils sont opérés ou ont opéré et leur applique le barème de MG réglementaire en application de l'article 6 de la convention collective des entreprises du paysage ; que si à hauteur de cour des justificatifs sont produits, ils ne permettent cependant pas de prouver l'identité de l'ensemble des bénéficiaires (les trajets de M. Y... n'étant ainsi pas repris sur toutes les périodes citées à titre d'exemple par la MSA) et l'objet des dépenses en ce qu'il n'est pas justifié de la réalité des chantiers effectués ; qu'il n'est pas davantage apporté d'explications sur la manière dont ils ont été renseignés alors qu'ils ont été établis par la société elle-même, de sorte qu'aucun contrôle a posteriori n'est possible ; qu'en conséquence, par confirmation du jugement entrepris, la société sera condamnée à payer à la MSA la somme de 55 220,60 euros ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE, sur la demande principale, il résulte de l'article L 242-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale que les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail sont soumises à cotisations, à l'exception des indemnités compensatrices de frais professionnels, incluant les frais de déplacement, dont l'indemnisation est fixée par l'arrêté interministériel du 17 juin 2003, qui prévoit que « l'indemnisation des frais professionnels s'effectue :
- soit sous la forme du remboursement des dépenses réellement engagées par le travailleur salarié ou assimilé ; l'employeur est tenu de produire les justificatifs y afférents (
) ;
- soit sur la base d'allocations forfaitaires ; l'employeur est autorisé à déduire leurs montants dans les limites fixées par le présent arrêté, sous réserve de l'utilisation effective de ces allocations forfaitaire conformément à leur objet. Cette condition est réputée remplie lorsque les allocations sont inférieures ou égales aux montants fixés par le présent arrêté aux articles 3, 4, 5, 8 et 9 ;
qu'en l'espèce, la SARL EEVML indique avoir indemnisé ses salariés sur la base d'allocations forfaitaires ; qu'ainsi, sa demande doit être examinée à l'un des textes spéciaux déterminant le montant de ces allocations ; que, sur les indemnités de petits déplacements, aux termes de l'article 6 c) de la convention collective nationale des entreprises du paysage du 10 octobre 2008, « dans la limite du temps normal de trajet visé au a) ci-dessus, le salarié est globalement indemnisé de ses frais de panier et de déplacement par le biais d'une indemnité pour petit déplacement fixée comme suit :
- dans un rayon de 0 à 5 km du siège ou du dépôt jusqu'au chantier 3MG
- dans un rayon de plus de 5 km jusqu'à 20 km 4MG
- dans un rayon de plus de 20 km jusqu'à 30 km 5 MG
- dans un rayon de 30 km jusqu'à 50 km 6 MG ;
Le MG applicable est celui en vigueur au 1er janvier de l'année en cours » ;
que, sur les indemnités de grands déplacements, l'article 5 de l'arrêté ministériel du 17 juin 2003 prévoit le versement d'une indemnité lorsque le salarié est en déplacement professionnel et empêché de regagner sa résidence habituelle, c'est-à-dire lorsque la distance séparant le lieu de résidence du lieu de déplacement est au moins égale à 50 km (trajet aller) et que les transports en commun ne permettent pas de parcourir cette distance dans un temps inférieur à 1 h 30 (trajet aller) ; que le salarié est également considéré en grand déplacement lorsqu'il est empêché de regagner son domicile en fin de journée pour des circonstances de fait ; que l'article 7 de la convention collective du 10 octobre 2008 précise que dans la limite du temps normal de trajet, défini comme celui ne permettant pas aux salariés de regagner leur domicile ou celui qui les éloigne de plus de 100 km et de moins de 150 km du siège, de l'agence ou du dépôt, les salariés perçoivent une contrepartie sous forme de repos, soit sous forme financière, égale à au moins 6,5 fois le minimum garanti en vigueur au 1er janvier de l'année en cours ; qu'en l'espèce, la demanderesse produit plusieurs tableaux d'estimation des MG pour la période litigieuse ainsi que des factures d'hôtel et de restaurant afférentes aux grands déplacements ; que toutefois, ces documents, dont une partie a été établie par la demanderesse, ne peuvent constituer des justificatifs établissant la nature professionnelle du déplacement et le nombre de kilomètres effectués par ses salariés ; que dès lors, la SARL EEVML ne démontre pas que les sommes versées correspondent à des frais professionnels non soumis à cotisations ; qu'il convient donc de rejeter sa demande ;
1°) ALORS QUE la procédure de contrôle par les agents de la mutualité sociale agricole doit respecter le principe de la contradiction ; qu'ayant constaté que l'entreprise redressée avait présenté par lettre du 19 décembre 2013 des observations documentées et que la MSA avait notifié une mise en demeure le 30 décembre 2013 sans y répondre, en rejetant le moyen d'annulation du redressement aux motifs inopérants que les dispositions de l'article D 724-9 du code rural et de la pêche maritime ne prévoient pas que lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle soit tenu de répondre aux observations ; la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble ces dispositions ;
2°) ALORS EN TOUT CAS QU'en exigeant la justification de chaque déplacement des salariés, cependant que de leur caractère forfaitaire, il se déduisait que leur déductibilité résultait de leur nature professionnelle, présumée et du reste non remise en cause, la cour d'appel a violé l'article L 741-10 du code rural et de la pêche maritime et sur renvoi l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 2 de l'arrêté du 17 juin 2003 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations sociales agricoles et les articles 6 et 7 de la convention collective des entreprises de paysage du 10 octobre 2008.