LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 avril 2016), que, le 4 mai 2011, l'administration fiscale a notifié à M. X... une proposition de rectification de l'impôt de solidarité sur la fortune auquel il était assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010, en réintégrant dans l'assiette taxable les avances sur bénéfice qui lui avaient été consenties par la société civile professionnelle de notaires (la société) dont il est associé ; qu'après mise en recouvrement du supplément d'imposition en résultant et rejet partiel de sa réclamation amiable, M. X..., estimant que les avances litigieuses constituaient des dettes personnelles envers la société, comme telles déductibles de l'assiette taxable, a saisi le tribunal de grande instance afin d'être déchargé de ce supplément d'imposition ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de décharge de ses impositions et pénalités et de les déclarer fondées alors, selon le moyen :
1°/ que les avances sur bénéfices consenties au cours d'une année par une société au porteur de parts de son capital constituent, tant qu'une décision de répartition des bénéfices n'est pas intervenue, des dettes de l'associé vis-à-vis de la société, pouvant être déduites de l'assiette de l'ISF dû par le bénéficiaire des versements quel que soit leur mode de comptabilisation ; qu'en décidant que les sommes versées à M. X... à titre d'avances sur bénéfices n'étaient pas déductibles de l'assiette de l'ISF dû par le contribuable au titre des années 2008, 2009 et 2010, aux motifs inopérants que les comptes courants d'associé ne présentaient un excèdent de prélèvement qu'au titre de l'année 2008 et que ces avances avaient été comptabilisées au titre des capitaux propres, la cour d'appel a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts ;
2°/ qu'en jugeant que les avances sur bénéfices consenties au 1er janvier de l'année par une société au porteur de parts de son capital constituent des dettes contractées dans l'intérêt des dites parts sociales, pour en déduire que les sommes versées à M. X... à titre d'avance sur sa part de bénéfices ne pouvaient être déduites de la base de son ISF au titre des années en litige, cependant que des dettes correspondant à des sommes dues à la société, et qui n'ont pas accru ou maintenu la valeur des parts ou leur existence, ne peuvent constituer des dettes contractées dans l'intérêt des dites parts sociales, la cour d'appel a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts ;
3°/ qu'en tout état de cause, toute dette au 1er janvier d'un associé vis-à-vis de la société dont il est associé, qui n'a pas été contractée dans l'intérêt d'un bien professionnel, peut être déduite de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, peu important son mode de comptabilisation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté au titre de l'exercice 2008 un excédent de prélèvement d'un montant de 4724,32 euros ; qu'en jugeant que cette somme ne constituait pas une dette déductible de l'assiette de l'ISF dû par M. X..., par des motifs inopérants tirés notamment de ce qu'il ne s'agirait pas d'un compte courant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts ;
Mais attendu que selon les articles 885 D et 768 du code général des impôts, seules les dettes personnelles et certaines peuvent être déduites de l'assiette de l'impôt sur la fortune; que l'arrêt constate que le compte de capital de M. X... au bilan de la société dont il était associé était, à la date du fait générateur des impositions litigieuses, créditeur au 31 décembre 2007 et au 31 décembre 2009, mais débiteur de 4724,32 euros au 31 décembre 2008 ; qu'il constate encore que les prélèvements mensuels effectués au titre des avances sur bénéfices ont été comptabilisés annuellement au passif du bilan au titre des capitaux propres de la société; qu'il relève, par motifs adoptés, que M. X... n'a pas prétendu les avoir remboursés ou devoir les rembourser, quand bien même ils auraient été excessifs; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que les prélèvements mensuels effectués au titre des avances sur bénéfices ne constituaient pas des avances en compte courant et s'analysaient en des avances sur dividendes qui avaient été approuvées par la société, et abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la deuxième branche, la cour d'appel a exactement déduit que les sommes perçues par M. X... ne constituaient pas des dettes personnelles déductibles de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à ce que soit prononcée la décharge tant en principal qu'au titre des pénalités des impositions mises à sa charge au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune pour les années 2008, 2009 et 2010 et d'avoir déclaré fondées ces impositions ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le 4 mai 2011, la Direction générale des finances publiques a adressé à M. Emile X... une proposition de rectification relative à l'impôt de solidarité sur la fortune pour les années 2008, 2009 et 2010 ; qu'après admission partielle des observations du contribuable, en date du 27 juillet 2011, l'administration a émis des avis de recouvrement, le 31 mai 2012 ; que M. Emile X... a formé une réclamation, le 23 avril 2013 qui a fait l'objet d'une admission partielle, par décision du 26 septembre 2013 ; qu'il réclame la décharge des impositions et des pénalités liées à l'exclusion, au passif de la déclaration, des avances sur bénéfices consenties par la société civile professionnelle notariale dont il est membre ; que, selon l'article 885 D du code général des impôts, l'impôt de solidarité sur la fortune est assis sur les bases d'imposition déclarées selon les mêmes règles et sous les mêmes sanctions que les droits de mutation par décès ; que l'article 768 du même code édicte que pour la liquidation des droits de mutation par décès, les dettes à la charge du défunt sont déduites, lorsque leur existence au jour de l'ouverture de la succession est dûment justifiée par tout mode de preuve compatible avec la procédure écrite ; que l'article 885 R précise que l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune est constituée par la valeur nette au 1er janvier de l'année, de l'ensemble des biens, droits et valeurs imposables, appartenant au contribuable ; que cette règle permet ainsi la déduction de l'actif brut, de ses dettes personnelles, ayant un caractère certain au 1er janvier de l'année considérée ; que M. X... estime que le principe d'unicité du patrimoine n'interdit pas de considérer les prélèvements effectuées par un associé comme constituant une dette à l'égard d'une société civile professionnelle qui est une personne morale titulaire d'un patrimoine propre distinct de celui de chaque associé ; mais que cette analyse ne s'applique qu'au compte courant du débiteur, sous réserve de sa licéité et qu'elle ne soit pas considéré comme portant atteinte au patrimoine de la société ; que les pièces comptables versées aux débats révèlent que le solde du compte courant de M. Emile X... est toujours fixé à zéro, à l'ouverture comme à la clôture des exercices 2007, 2008 et 2009 ; que le détail des opérations fait apparaître, au débit, des prélèvements mensuels, compensés par des affectations sur quote-part de résultat provisoire, portées au crédit ; qu'il ne faut pas s'attacher à une situation débitrice intermédiaire, mais au solde du compte au premier jour de l'exercice ; que le compte de capital de l'appelant au sein de la société est, à la date du fait générateur des impositions litigieuses, créditeur au 31 décembre 2007 et au 31 décembre 2009 et débiteur de 4 724,32 euros au 31 décembre 2008 ; mais que M. Emile X... indique dans ses propres écritures que les prélèvements litigieux ne sont pas des prélèvements sur les capitaux de la société civile professionnelle ; que les avances sur bénéfices consenties au 1er janvier de l'année par la société au porteur de parts de son capital constituent des dettes contractées dans l'intérêt desdites parts sociales considérées comme des biens professionnels exonérés d'ISF ; que ces dettes doivent s'imputer par priorités sur la valeur de ses parts sociales ; qu'en l'espèce il n'est relevé un excédent de prélèvement sur capitaux propres d'un montant de 4 724,32 euros qu'au titre de l'exercice 2008 ; qu'il ne s'agit cependant pas d'un compte courant ; que cette analyse est confirmée par le fait que les prélèvements mensuels au titre des avances sur bénéfice sont comptabilisés annuellement par la SCP au titre « des capitaux propres » au passif du bilan ; que les avances sur bénéfices ne peuvent donc être intégrées dans le passif déductible du porteur de parts de la société civile professionnelle ; que l'existence d'une dette personnelle à caractère certain à la date du fait générateur des impositions litigieuses susceptibles d'entraîner une déduction sur le montant de l'actif brut du patrimoine du contribuable n'est pas rapportée ; que dans ces conditions, il ne peut être fait doit à la demande de décharge, tant au principal que pour les pénalités, formée par M. Emile X... ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE ces dettes, qui doivent être prouvées, doivent être à la charge personnelle du contribuable ; qu'en matière d'ISF peuvent être déduits de l'actif taxable notamment les comptes courants débiteurs au 1er janvier ; qu'en l'espèce M. Emile X... a déduit pour les années 2008, 2009 et 2010 des sommes qui sont en réalité non pas des comptes courants, mais des prélèvements sur les capitaux propres de la société de notaires comptabilisées au compte de capital du passif du bilan comme le démontre la production des extraits de comptes des associés produits par M. Emile X... ; que la qualification de compte courant qu'il retient ne lie pas l'administration ; que les prélèvements dont il est fait état sont en réalité des prélèvements sur des capitaux de la SCP, qu'il ne constituent pas des dettes personnelles du notaire envers la société, déductibles de son actif taxable de l'ISF ; que, d'ailleurs, M. Emile X... ne prétend pas devoir les rembourser ou les avoir à un moment quelconque remboursées ; qu'ainsi les prélèvements en cause ont en définitive constitués un actif taxable ; que le compte d'associé de M. Emile X... était bien à zéro à la clôture des exercices concernés ; qu'il ne peut dès lors déduire du passif de son ISF les sommes de 528 958 euros en 2008, 504 297 euros en 2009, 352 089 euros en 2010 ; que c'est à bon droit que la Direction générale des finances publiques a procédé au rappel d'ISF au titre des années 2008 à 2010 ; que dès lors il y a lieu de rejeter la réclamation de M. Emile X... ;
1°) ALORS QUE les avances sur bénéfices consenties au cours d'une année par une société au porteur de parts de son capital constituent, tant qu'une décision de répartition des bénéfices n'est pas intervenue, des dettes de l'associé vis-à-vis de la société, pouvant être déduites de l'assiette de l'ISF dû par le bénéficiaire des versements quel que soit leur mode de comptabilisation ; qu'en décidant que les sommes versées à M. X... à titre d'avances sur bénéfices n'étaient pas déductibles de l'assiette de l'ISF dû par le contribuable au titre des années 2008, 2009 et 2010, aux motifs inopérants que les comptes courants d'associé ne présentaient un excèdent de prélèvement qu'au titre de l'année 2008 et que ces avances avaient été comptabilisées au titre des capitaux propres, la cour d'appel a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts ;
2°) ALORS QU'en jugeant que les avances sur bénéfices consenties au 1er janvier de l'année par une société au porteur de parts de son capital constituent des dettes contractées dans l'intérêt desdites parts sociales, pour en déduire que les sommes versées à M. X... à titre d'avance sur sa part de bénéfices ne pouvaient être déduites de la base de son ISF au titre des années en litige, cependant que des dettes correspondant à des sommes dues à la société, et qui n'ont pas accru ou maintenu la valeur des parts ou leur existence, ne peuvent constituer des dettes contractées dans l'intérêt desdites parts sociales, la cour d'appel a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts ;
3°) ALORS QUE, en tout état de cause, toute dette au 1er janvier d'un associé vis-à-vis de la société dont il est associé, qui n'a pas été contractée dans l'intérêt d'un bien professionnel, peut être déduite de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune, peu important son mode de comptabilisation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté au titre de l'exercice 2008 un excédent de prélèvement d'un montant de 4724,32 euros ; qu'en jugeant que cette somme ne constituait pas une dette déductible de l'assiette de l'ISF dû par M. X..., par des motifs inopérants tirés notamment de ce qu'il ne s'agirait pas d'un compte courant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 885 A, 885 D, 885 E et 768 du code général des impôts.