La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/05/2018 | FRANCE | N°17-13399

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 mai 2018, 17-13399


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 janvier 2017), que M. Y..., engagé le 18 avril 2011 en qualité de responsable recherche et développement par la société Littlebigweb, ayant pour nom commercial Cupofcom-Perfobusiness et exerçant une activité de studio de production web, a été licencié pour motif économique le 12 octobre 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur la seconde branche du premier moyen et le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision

spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de na...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 janvier 2017), que M. Y..., engagé le 18 avril 2011 en qualité de responsable recherche et développement par la société Littlebigweb, ayant pour nom commercial Cupofcom-Perfobusiness et exerçant une activité de studio de production web, a été licencié pour motif économique le 12 octobre 2012 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur la seconde branche du premier moyen et le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement déféré en ce qu'il avait jugé bien-fondé son licenciement pour motif économique et l'avait débouté en conséquence de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement abusif, alors selon le moyen qu'il résulte de la combinaison des articles L.1233-3 et L.1233-16 du code du travail, que la lettre notifiant au salarié un licenciement économique doit mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ; que le salarié démontrait que la lettre de licenciement du 18 octobre 2012 ne mentionnait pas l'incidence sur l'emploi du salarié puisqu'il y était seulement indiqué que l'employeur entendait mettre un terme à son contrat de travail ; qu'en reconnaissant que « le terme de suppression du poste de M. Y... ne figure pas explicitement dans le courrier », tout en décidant que « la SAS Littlebigweb a dûment exposé que, dans le cadre de la réorganisation, l'activité dont était chargé M. Y... était supprimée ce qui entraînait la suppression de son emploi », la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L.1233-3 et L.1233-16 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que la lettre de licenciement mentionnait que le salarié avait été recruté, dans le cadre d'une création de poste, afin de proposer un plan global de développement et d'ajustement de la structure que la société n'était plus en mesure de financer et exposait ainsi que, dans le cadre de sa réorganisation, l'activité dont était chargé l'intéressé était supprimée, ce dont se déduisait la suppression de son emploi, a pu décider que la lettre de licenciement répondait aux exigences légales de motivation prévues par les articles L. 1233-3 et L.1233-16 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait jugé bien fondé le licenciement pour motif économique de Monsieur Mario Y..., et de l'avoir débouté en conséquence de sa demande en paiement de dommages et intérêts sur ce fondement,

Aux motifs propres qu'en l'espèce, selon les termes de la lettre notifiée le 18 octobre 2012 à Monsieur Y..., la SAS LittlebigWEG a ainsi justifié le licenciement pour motif économique de son salarié : «... Rappelons que vous avez été engagé le 18avril2011 en qualité de Cadre Responsable Retamp;D par la société LittlebigWEB et ce, afin de proposer un plan global de scénario de développement et d'ajustement de notre structure, en intégrant les moyens et ressources humaines, financières, délais nécessaires et matériels, permettant d'intégrer des process internes et externes, du contrôle et du suivi sur nos différents projets de travaux réalisés pour nos clients. Il s'agissait alors d'une création de poste. Or, notre société continue à rencontrer depuis le début de l'année 2012 d'importantes difficultés économiques, ainsi :

- au cours du dernier exercice allant du 1er avril 2011 au 31 mars 2012, la perte est de - 133k€,
- au cours de cet exercice allant du 1er avril 2012 au 31 mars 2013, les pertes sont les suivantes :

** -300 k€ lors du 1er trimestre de cet exercice,
** s'agissant du 2ème trimestre la perte est estimée à -66 k€, sachant que nous estimons nos pertes enfin d'exercice à -400 k€,
Soit un total de 366 k€ de pertes sur 5 mois lors de l'exercice en cours. ...
C'est pourquoi nous sommes conduits à procéder à votre licenciement pour motif économique ».

Sur la réalité du motif économique et ses conséquences sur le poste du salarié : qu'il résulte de l'application des dispositions de l'article L. 1233-3 du Code du travail, que les difficultés économiques, qui ne font l'objet d'aucune définition précise, doivent être distinguées des fluctuations normales du marché; que dès lors, ni la réalisation d'un chiffre d'affaires moindre, ni la baisse des bénéfices ne suffit à établir la réalité de difficultés économiques ; qu'il en résulte que le licenciement économique n'est pas fondé si l'employeur a organisé lui-même sa propre insolvabilité ou ses difficultés financières ; que le cas échéant, la suppression d'emploi doit être la conséquence directe d'un des motifs allégués par l'article L. 1233-3 précité et il appartient au juge de vérifier l'effectivité de la suppression d'emploi alléguée par l'employeur ; que la SAS LittlebigWEG expose que ses difficultés financières qui ne résultent d'aucune faute de gestion, ne lui ont pas permis de conserver le poste créé avec le recrutement de Monsieur Y... et que, contrairement aux allégations de ce dernier, la société a rencontré une véritable dégradation de ses résultats entre son embauche, en avril 2011, et son licenciement notifié en octobre 2012 ; que Monsieur Y... conteste l'argumentation développée et considère que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; qu'il expose que la lettre de licenciement ne contient l'indication ni de la cause économique en ce qu'elle ne fait pas état, notamment, de difficultés économiques, de mutations technologiques, de la nécessité d'une réorganisation de l'entreprise ou d'une cessation d'activité, ni de son incidence sur son emploi ; qu'il précise que les difficultés économiques s'apprécient à la date de la notification du licenciement et que la SAS LittlebigWEG ne peut se référer à celles qui existaient au moment de l'embauche et qui ont perduré ; que selon lui, le faible délai qui s'est écoulé entre le recrutement et le licenciement démontre que l'employeur a fait preuve d'une légèreté blâmable car il connaissait la situation obérée de l'entreprise lors de son engagement ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments comptables versés aux débats que, contrairement à ce qu'allègue l'appelant, la SAS LittlebigWEG connaissait une baisse de son chiffre d'affaires à la fin du 1er trimestre 2011, dernier trimestre de l'exercice allant du 1er avril 2010 au 31 mars 2011, mais n'affichait pas de perte et que, dans le cadre de son pouvoir de direction, l'employeur a créé le poste sur lequel a été recruté Monsieur Y... pour tenter de redresser l'activité de son entreprise ; qu'en agissant ainsi, la SAS LittlebigWEG d'aucune légèreté blâmable, d'autant que la pérennité de l'entreprise n'était pas compromise et que des réponses plus adaptées aux besoins de la clientèle pouvaient objectivement être efficients ; que compte-tenu de la perte du chiffre d'affaires, telle que démontrée au moment du licenciement, la SAS LittlebigWEG était légitime, ainsi qu'elle le mentionne dans la lettre de licenciement précitée, à réorganiser l'entreprise en supprimant l'activité de Retamp;D ; qu'au surplus, si le terme de suppression du poste de Monsieur Y... ne figure pas explicitement dans le courrier, en indiquant que le salarié avait été recruté, dans le cadre d'une création de poste, afin de proposer un plan global de développement et d'ajustement de la structure qu'elle n'était plus en mesure de financer et que, compte-tenu de l'effectif de la société et de sa situation économique, elle n'était pas en mesure de lui proposer un poste de reclassement, la SAS LittlebigWEG a dûment exposé que, dans le cadre de sa réorganisation, l'activité dont été chargé Monsieur Y... était supprimé ce qui entraînait la suppression de son emploi ; que au vu des éléments précités, il apparaît que les difficultés économiques alléguées sont établies de même que leurs conséquences sur l'emploi de Monsieur Y... et que la lettre de licenciement qui lui a été notifiée répond aux prescriptions légales ;
Sur le respect de l'obligation de reclassement : que selon l'article L.1233-4 du Code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ; que de plus, les offres de reclassement proposées au salarié doivent être personnalisées, écrites et précises ; qu'il ressort de l'application de ce texte que l'employeur est tenu à une obligation de loyauté qui lui impose de ne proposer un emploi de catégorie inférieure qu'à défaut de possibilité de reclassement dans un emploi de même catégorie que celle correspondant à sa qualification ; qu'il s'avère que Monsieur Y... n'est pas fondé à soutenir que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement alors que le registre du personnel établit qu'elle ne disposait d'aucun emploi disponible au moment du licenciement, même de catégorie inférieure ; qu'au surplus, la SAS LittlebigWEG n'appartenant pas à un groupe, et contrairement à ce qu'allègue Monsieur Y..., elle n'était tenue à aucune obligation de rechercher un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, notamment chez les clients ou les fournisseurs ; que enfin, s'agissant du non-respect de l'ordre des licenciements allégués, il résulte de l'application de l'article L. 1233-5 du Code du travail que les critères d'ordre de licenciement s'apprécient par catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié dont l'emploi est supprimé, cette catégorie concernant l'ensemble des salariés qui exercent dans l'entreprise des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ; qu'en l'espèce, la SAS LittlebigWEG comptait 14 salariés au moment du licenciement de Monsieur Y... qui, en sa qualité de cadre responsable Recherche et Développement était le seul de sa catégorie et avait une formation qui n'était pas commune aux autres cadres de l'entreprise ; que Monsieur Y... étant le seul concerné par la suppression d'emploi, la SAS LittlebigWEB n'avait pas à établir de critères d'ordre de licenciement ; que le licenciement pour motif économique de Monsieur Y... est donc fondé et justifié ; qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur Y... au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Et aux motifs réputés adoptés que la société LITTLEBIGWEB rencontrait de grandes difficultés économiques, difficultés reconnues par Monsieur Y... lors de l'entretien du 11 septembre 2012, et qui se sont traduites par une perte de 133.000,00 € sur l'exercice courant du 1er avril 2011 au 31 mars 2012 et une perte de 300.000,00 € sur la période du 1er avril 2012 - 30 juin 2012, ces pertes nécessitant une réorganisation de la société ; que la société LITTLEBIGWEB n'avait aucun poste vacant dans la catégorie de l'intéressé ni dans une catégorie inférieure, l'effectif de la société n'étant que de 14 salariés, la société a respecté l'article L 1233-4 du Code du Travail ; que le poste de Monsieur Y... a été supprimé ; qu'en application de l'article L 1233-3 du Code du Travail, il sera dit que le licenciement de Monsieur Y... est fondé sur un motif économique, l'intéressé sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

Alors, de première part, qu'il résulte de la combinaison des articles L.1233-3 et L.1233-16 du Code du travail, que la lettre notifiant au salarié un licenciement économique doit mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ; que le salarié démontrait que la lettre de licenciement du 18 octobre 2012 ne mentionnait pas l'incidence sur l'emploi du salarié puisqu'il y était seulement indiqué que l'employeur entendait mettre un terme à son contrat de travail ; qu'en reconnaissant que « le terme de suppression du poste de Monsieur Y... ne figure pas explicitement dans le courrier », tout en décidant que « la SAS LittlebigWEB a dûment exposé que, dans le cadre de la réorganisation, l'activité dont était chargé Monsieur Y... était supprimée ce qui entraînait la suppression de son emploi », la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L.1233-3 et L.1233-16 du Code du travail;

Alors, de seconde part, qu'il résulte de l'article L.1233-4 du Code du travail que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie ; que le reclassement externe présente un intérêt lorsque l'entreprise ne dispose pas de poste disponible ou lorsque le salarié est intéressé par une activité extérieure à l'entreprise qui l'emploie ; que précisément, en l'espèce, Monsieur Y... déplorait la carence de son employeur qui n'avait procédé à aucune recherche de reclassement externe ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer, sans justifier sa décision, que « contrairement à ce qu'allègue Monsieur Y..., [la société] n'était tenue à aucune obligation de rechercher le reclassement à l'extérieur de l'entreprise, notamment chez les clients ou les fournisseurs », la Cour d'appel a violé l'article L.1233-4 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, d'avoir dit que la SAS LITTLEBIGWEB avait manqué à son obligation en ne soumettant pas Monsieur Mario Y... à la visite d'embauche, et de l'avoir pourtant débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts sur ce fondement,

Aux motifs que la SAS LittlebigWEG a manqué à son obligation en ne soumettant pas Monsieur Y... à la visite médicale d'embauche ; que toutefois, faute pour celui-ci de démontrer que cette carence lui a occasionné un préjudice, sa demande de dommages et intérêts est rejetée et le jugement déféré est infirmé en ce qu'il a condamné la SAS LittlebigWEG à lui payer à ce titre la somme de 1.500 € ;

Alors qu'il résulte de l'article R.4624-10 du Code du travail que tout travailleur bénéficie d'une visite d'information et de prévention, réalisée par l'un des professionnels de santé mentionnés au premier alinéa de l'article L.4624-1 dans un délai qui n'excède pas trois mois à compter de la prise effective du poste de travail ; qu'en s'abstenant de faire bénéficier son salarié d'une telle visite, l'employeur commet une faute susceptible de causer au salarié un préjudice qui doit nécessairement être réparé ; qu'en décidant que le salarié devait démontrer que cette carence lui avait occasionné un préjudice, la Cour d'appel a violé l'article R.4624-10 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-13399
Date de la décision : 24/05/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 mai. 2018, pourvoi n°17-13399


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.13399
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award