La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2018 | FRANCE | N°17-15078

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 mai 2018, 17-15078


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles L. 131-1 et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Groupement d'achats des centres Leclerc (société GALEC) et la Société d'importation Leclerc (société SIPLEC), qui avaient commercialisé un article textile portant atteinte a

ux droits d'auteur de la société Dubos, ont, par jugement en date du 13 juin 2013, été...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles L. 131-1 et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Groupement d'achats des centres Leclerc (société GALEC) et la Société d'importation Leclerc (société SIPLEC), qui avaient commercialisé un article textile portant atteinte aux droits d'auteur de la société Dubos, ont, par jugement en date du 13 juin 2013, été condamnées à verser à celle-ci une certaine somme à titre de dommages-intérêts et à lui remettre le stock d‘articles contrefaisants dans un délai de dix jours à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé ce délai ; que la société Dubos a sollicité la liquidation de l'astreinte ;

Attendu que, pour condamner in solidum les sociétés GALEC et SIPLEC à payer à la société Dubos la somme de 2 925 000 euros à ce titre, l'arrêt retient que le jugement du 13 juin 2013 leur imposait d'identifier et de rappeler les marchandises qu'elles avaient revendues aux magasins de l'enseigne Leclerc et qu'il leur incombait de justifier de leurs diligences à cet égard ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'astreinte n'avait pas été prononcée pour garantir l'exécution de telles mesures, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Dubos AS aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société d'importation Leclerc, la société coopérative Groupements d'achats des centres Leclerc

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement et condamné in solidum la société SIPLEC et la société GALEC à payer à la société Dubos l'astreinte liquidée à la somme de 2.925.000 €,

AUX MOTIFS QUE pour voir infirmé le j, les sociétés GALEC et SIPLEC relèvent que les magasins exploitant l'enseigne Leclerc sont juridiquement indépendants de leur personne morale et de leurs activités, limitées, pour la première d'entre elles ; au référencement des marchandises, et pour la seconde, à l'importation, au contrôle puis la revente des marchandises ; qu'elles soutiennent ainsi que le jugement du 13 juin 2013 n'a pu ordonner la remise du stock de marchandises contrefaisantes sur un autre fondement que celui de l'article L. 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, et que cette décision leur était impossible à exécuter, alors qu'elles n'étaient plus propriétaires du stock de ces marchandises détenues par les magasins de l'enseigne Leclerc ; mais que l'article L. 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle dispose qu'en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les objets réalisés ou fabriqués portant atteinte à ces droits, soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée ; qu'après avoir déclaré la société GALEC et la société SIPLEC responsables de contrefaçon des droits d'auteur, la première, pour avoir référencé les produits contrefaisants sous sa marque Envog, la seconde, pour les avoir importés puis revendus aux magasins de l'enseigne Leclerc, et décidé de la remise du stock contrefaisant à la société Dubos, le jugement du 13 juin 2013 a, en vertu des articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, régulièrement fait peser sur les société GALEC et la société SIPLEC la responsabilité d'identifier et de rappeler les marchandises qu'elles ont commercialisées auprès des magasins de l'enseigne Leclerc et sur lesquelles ceux-ci ne pouvaient opposer aucun droit de propriété ; qu'il en résulte que le moyen manque en droit, et que la société Dubos est recevable à invoquer les manquements des sociétés GALEC et SIPLEC dans la charge de la preuve qu'elles supportaient de l'exécution des mesures utiles, d'une part, à l'identification des marchandises contrefaisantes restées en stock dans les magasins de l'enseigne Leclerc, et d'autre part, à la restitution de ces marchandises ; qu'enfin, les sociétés GALEC et SIPLEC disposaient du pouvoir de mettre en cause les sociétés Levallois exploitation et Altinbasak Tekstil afin d'opposer à la demande de la société Dubos, leur propre carence dans l'exécution de la mesure ; qu'ainsi que cela est retenu ci-dessus, le moyen tiré de l'indépendance des magasins est mal fondé ; que les simples affirmations des sociétés GALEC et SIPEC ne suppléent pas la preuve à laquelle elles étaient tenues de réclamer aux magasins de l'enseigne Leclerc la restitution des marchandises qui ne pouvaient plus être commercialisées, dont elles ne pouvaient ignorer la localisation, alors qu'elles avaient pu les dénombrer dès le 24 novembre 2011 et qu'elles avaient les moyens de localiser leur lieu de stockage, a minima, d'après la factures des marchandises qu'elles étaient tenues de conserver ; que c'est par erreur, que les premiers juges ont retenu, pour modérer la liquidation de l'astreinte, que les sociétés GALEC et SIPEC avaient adressé aux magasins de l'enseigne un avis de retrait en exécution du jugement le 5 août 2013, alors que cet avis a été diffusé le 5 août 2010 compte tenu de la suspicion de contrefaçon, de sorte qu'antérieur au jugement du 13 juin 2013, il ne saurait justifier une quelconque modération ; que par ces motifs, le montant de l'astreinte provisoire ne peut être modulé, ni d'après le comportement des sociétés GALEC et SIPEC, ni par des difficultés rencontrées pour l'exécuter ou par une cause étrangère, et tandis qu'enfin, les sociétés GALEC et SIPEC n'allèguent aucune circonstance de nature à remédier au manquement à l'inexécution de cette astreinte provisoire, il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement et de liquider à la somme de 2 925 000 euros le montant de l'astreinte qui a couru depuis le 4 juillet 2013 et de condamner les sociétés GALEC et SIPEC à la verser à la société Dubos ;

1° ALORS QUE dans son jugement du 13 juin 2013, le tribunal de grande instance de Nanterre avait seulement ordonné aux sociétés GALEC et SIPLEC, de remettre à la société Dubos « le stock contrefaisant » dans un délai de dix jours à compter de la signification du présent jugement, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé ce délai ; qu'en affirmant que ce jugement avait fait peser sur les sociétés SIPLEC et GALEC la responsabilité d'identifier et de rappeler les marchandises revendues aux magasins de l'enseigne E. Leclerc, et qu'elles devaient donc justifier qu'elles avaient accompli des mesures utiles en vue de l'identification de ces marchandises restées en stock dans les magasins de l'enseigne E. Leclerc et leur restitution, cependant qu'aucune de ces obligations ne figurait au dispositif ou même dans les motifs de ce jugement, et que l'astreinte n'avait pas été prononcée pour garantir l'exécution de telles mesures, la cour d'appel a violé l'article 1351 devenu 1355 du code civil, ensemble les articles L. 131-1 et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

2° ALORS QUE si le juge peut, après avoir condamné une personne physique ou morale pour contrefaçon, ordonner à celle-ci, à la demande de la partie lésée, que les marchandises contrefaisantes soient rappelées des circuits commerciaux ou écartées de ces circuits, puis détruites ou remises à la partie lésée, et assortir cette décision d'une astreinte, cette condamnation doit résulter d'une mention expresse au dispositif de sa décision ; que dans son jugement du 13 juin 2013, le tribunal de grande instance de Nanterre n'a pas ordonné que les marchandises contrefaites soient rappelées des circuits commerciaux, ni dit que devraient être remis à la société Dubos le stock des marchandises revendus aux magasins de l'enseigne E. Leclerc ; qu'en affirmant néanmoins que les sociétés SIPLEC et GALEC étaient tenues d'effectuer ce rappel et cette remise et qu'à défaut de justifier de l'accomplissement de ces mesures-là l'astreinte devait être liquidée, la cour d'appel a violé l'article L. 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, ensemble l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

3° ALORS, subsidiairement, QUE si le juge peut, après avoir condamné une personne physique ou morale pour contrefaçon, ordonner à celle-ci, à la demande de la partie lésée, que les marchandises contrefaisantes soient rappelées des circuits commerciaux ou écartées de ces circuits, puis détruites ou remises à la partie lésée, et assortir cette décision d'une astreinte, cette mesure ne doit pas porter atteinte aux droits des tiers ; qu'en affirmant que les sociétés SIPLEC et GALEC devaient, pour exécuter l'injonction assortie de l'astreinte, identifier les marchandises contrefaisantes restées en stock dans les magasins de l'enseigne Leclerc, sur lesquelles ceux-ci ne pouvaient opposer leur droit de propriété, et les remettre à la société Dubos, alors même que les exploitants de ces magasins n'étaient pas parties au jugement du 13 juin 2013, à l'exception de la société Levallois Exploitation, la cour d'appel a violé l'article L. 331-1-4 du code de la propriété intellectuelle, tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, ensemble l'article 1351 devenu 1355 du code civil ;

4° ALORS, subsidiairement, QU‘il n'y a pas lieu à liquidation de l'astreinte en cas d'impossibilité d'exécuter l'injonction qui en est assortie ; que les sociétés SIPLEC et GALEC faisaient valoir que les marchandises avaient été revendues en août 2009 aux sociétés coopératives régionales, lesquelles les avaient ensuite revendues aux différents magasins de l'enseigne E. Leclerc, que tous ces magasins étaient juridiquement indépendants, et qu'elles n'avaient aucun moyen de les contraindre à exécuter le jugement du 13 juin 2013 auxquels ils n'étaient pas parties ; qu'en affirmant, pour écarter toute impossibilité d'exécution, que ces magasins ne pouvaient opposer leur droit de propriété, sans rechercher, comme elle y était invitée si, au contraire, ils ne pouvaient pas se prévaloir de leur droit eu égard à leur indépendance vis-à-vis des sociétés SIPLEC et GALEC et au caractère inopposable à leur égard du jugement auquel ils n'étaient pas parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

5° ALORS, plus subsidiairement, QUE le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte des difficultés rencontrées par le débiteur à exécuter l'injonction qui lui est faite ; que les sociétés SIPLEC et GALEC faisaient valoir que les marchandises avaient été revendues en août 2009 aux sociétés coopératives régionales, lesquelles les avaient ensuite revendues aux différents magasins de l'enseigne E.Leclerc, que tous ces magasins étaient juridiquement indépendants, et qu'elles n'avaient aucun moyen de les contraindre à exécuter le jugement du 13 juin 2013 auxquels ils n'étaient pas parties ; qu'en refusant toute modération de l'astreinte sans rechercher si les difficultés liées à la localisation des marchandises et à la nécessité de convaincre leurs propriétaires de les remettre à la société Dubos n'étaient pas au moins de nature à caractériser des difficultés d'exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
::

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné in solidum la société SIPLEC et la société GALEC à payer à la société Dubos l'astreinte liquidée à la somme de 2.925.000 €,

AUX MOTIFS QU‘il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement et de liquider à la somme de 2 925 000 euros le montant de l'astreinte qui a couru depuis le 4 juillet 2013 et de condamner les sociétés GALEC et SIPEC à la verser à la société Dubos ;

ALORS QUE deux débiteurs condamnés à une même obligation de faire ne peuvent être tenus solidairement au paiement du montant de l'astreinte liquidée ; qu'en condamnant les sociétés SIPLEC et GALEC, in solidum, à verser à la société Dubos une somme de 2.925.000 € au titre de la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel a violé les articles L. 131-1, L. 131-2 et L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 1200 et 1202 du code civil, devenus 1310 et 1313.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-15078
Date de la décision : 16/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 07 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 mai. 2018, pourvoi n°17-15078


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.15078
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award