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16/05/2018 | FRANCE | N°17-15008

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 mai 2018, 17-15008


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société First FFC fournitures ingrédients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité (la société First FFC), qui a pour activité la vente de produits alimentaires surgelés, dispose d'une chambre froide dans ses locaux, dont la maintenance et l'entretien sont confiés à la soc

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société First FFC fournitures ingrédients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité (la société First FFC), qui a pour activité la vente de produits alimentaires surgelés, dispose d'une chambre froide dans ses locaux, dont la maintenance et l'entretien sont confiés à la société Service de maintenance et d'installation en froid commercial et industriel (la société SMIFCI) ; que chacune d'elles est assurée par la société Axa France ; que, le jeudi 27 janvier 2011, la société SMIFCI est intervenue à la suite du déclenchement de l'alarme de la chambre froide ; que, le lundi 31 janvier 2011 au matin, la société First FFC s'est aperçue que la température de cette chambre froide était de -1,5° C au lieu de -16° C, ce qui a conduit à la perte des marchandises qui y étaient entreposées ; qu'elle a assigné la société SMIFCI et la société Axa France, cette dernière en sa qualité d'assureur de chacune des deux sociétés, aux fins d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'indemnisation de la société First FFC formée contre la société SMIFCI et la société Axa France prise en sa qualité d'assureur de cette dernière, l'arrêt retient que la société First FFC n'avait pas réagi le 28 janvier 2011 alors qu'un voyant lumineux et le déclenchement de l'alarme établissaient que la chambre froide était en défaut, que la carence de la société First FFC dans le contrôle des températures et son absence de réaction dans la journée du 28 janvier 2011 ont empêché toute intervention en temps utile pour mettre fin à l'élévation de la température et d'empêcher ainsi la survenance du dommage ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société SMIFCI avait quitté les lieux à la suite de son intervention sans s'assurer de la reprise de production du froid, de sorte que le comportement de la société First FFC n'était pas la cause exclusive du préjudice résultant du relèvement de la température de la chambre froide, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société Service de maintenance et d'installation en froid commercial et industriel et la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne, in solidum, à payer à la société First FFC fournitures ingrédients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société First FFC fournitures ingredients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société First FFC fournitures ingrédients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité de l'ensemble de ses demandes formées contre la société Service de maintenance et d'installation en froid commercial et industrie (SMIFCI) et de l'assureur de cette dernière la société Axa France ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société SMIFCI : la société SMIFCI est intervenue le 27 janvier 2011 sur la chambre froide de la société First FFC, laquelle a constaté le 31 janvier une augmentation de la température de cette chambre froide qui a provoqué la destruction des marchandises qui y étaient stockées. Il ressort du rapport de l'expert d'assurance de la compagnie AXA que les techniciens ont quitté le 27 janvier les lieux sans attendre la descente de la température de la chambre froide, et qu'aucune anomalie n'a été relevée au moment de la fermeture des locaux et de leur mise sous alarme deux heures environ après le départ du frigoriste de la société SMIFCI. S'il a été constaté le 31 janvier que l'interrupteur de la chambre froide était en position arrêt et que la société First FFC en déduit que le technicien de la société Smifci serait parti le 27 janvier sans remettre en marche cette chambre froide, ce que confirmerait la courbe d'augmentation de la température figurant dans le procès-verbal d'huissier dressé le 1er février 2011, la société First FFC a cependant reconnu lors de l'expertise d'assurance que l'inertie de la chambre froide lui permettait de conserver les produits surgelés pendant 24 heures après arrêt total. Or, la société First FFC, qui reproche à la société Smifci de ne s'être pas assurée à l'issue de son intervention du 27 janvier 2011 qu'elle avait eu l'effet escompté, n'a signalé aucun problème particulier de fonctionnement lié à la température de la chambre froide le 28 janvier 2011. Elle n'a pas réagi le 28 janvier 2011 alors que la chambre froide permettait une lecture directe de la température, et qu'un voyant lumineux sur la chambre froide comme l'installation d'alarme sur l'automate Woodley établissaient que la chambre froide était en défaut. Le défaut - ou la carence - de contrôle des températures de la société First FFC, et son absence de réaction dans la journée du 28 janvier 2011 ont empêché toute intervention en temps utile afin de mettre fin à l'élévation de la température, et donc d'empêcher la survenance du dommage. La société First FFC ne peut reprocher à la société SMICFI un manquement à son obligation de maintenance ou de réparation en urgence, car il revenait à la société First FFC le 28 janvier 2011, alors que la température de la chambre froide augmentait, d'en informer la société SMICFI. Aussi, et faute d'établir que la faute alléguée à l'encontre de la société SMICFI est directement à l'origine de son préjudice, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté de la société First FFC de sa demande à l'égard de la société SMICFI ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE la société First FFC demande la condamnation solidaire des sociétés SMIFCI et son assureur AXA à lui payer la somme de 209.203,55 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'intervention de la société SMIFCI sur les équipements de production de froid de sa chambre froide, le 27 janvier 2011. Attendu qu'elle soutient que la société SMIFCI n'aurait pas repositionné l'interrupteur de production de froid sur la position « Marche » et aurait quitté les lieux sans s'assurer que la production de froid avait repris ; que ces faits sont contestés ; qu'il est établi, néanmoins, que la société SMIFCI a quitté les lieux sans s'assurer de la reprise de fa production de froid ; qu'il y a donc bien eu négligence fautive de sa part. Attendu qu'en tout état de cause, avant d'analyser s'il y a eu faute de la société SMFCI, il convient d'examiner si cette faute serait directement responsable du préjudice de la société First FFC ; ce qui est contesté par les société SMIFCI et son assureur AXA ; Attendu que le contrat d'entretien signé entre les sociétés FIRST FFC et SMI FCI précise qu'il ne dispense pas le client, la société First FFC, d'apporter tous les soins à ses installations : Que l'expert X... indique que : « le préposé qui a procédé aux relevés des températures, le vendredi, a maintenu que celles-ci étaient conformes à leur lecture sur des thermomètres dispersés dans la chambre froide alors que celle enregistrée par l'automate renseigne de façon divergente ». Attendu que ces relevés de température par le préposé de la société First FFC ne sont pas versés aux débats. Attendu également qu'il ressort des pièces versées aux débats, la lettre de M. Gérard Z... , que : « depuis le matin [du vendredi 28 janvier 2011], l'installation d'alarme indiquait sur le Woodley ainsi que sur le voyant lumineux installé en façade de chambre froide, que cette dernière était en défaut » ; que, si l'alarme sonore du système de surveillance n'a pas été réenclenchée du fait que la température n'était pas redescendue au seuil d'effacement du défaut (rapport X..., mini -16 0 C), néanmoins, une alarme visuelle était présente qui aurait dû alerter la société First FFC. Attendu qu'ainsi le lien direct de causalité entre le préjudice de la société First FFC et l'intervention de la société SMFCI n'est pas établi, puisqu'il n'est pas contesté que l'inertie de la chambre froide étant de 24 heures, une intervention le vendredi, alors qu'une alarme visuelle était présente, aurait permis d'éviter le sinistre, sachant qu'il est établi que des préposés de la société First FFC ont travaillé ledit jour (relevé des températures), et qu'il est également que la société SMIFCI n tétait pas responsable de l'entretien du dispositif d'alarme ;

1) ALORS QUE la faute de la victime ne peut produire un effet totalement exonératoire que si elle est la cause unique du dommage ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté qu'il était établi que la société SMIFCI, qui était intervenue sur la chambre froide le 27 janvier 2011, avait quitté les lieux sans s'assurer de la reprise de la production de froid, commettant ainsi une négligence ; qu'en retenant, pour débouter la société First FFC de son action en responsabilité à l'encontre de la société SMIFCI, qu'elle n'avait pas réagi dans la journée du vendredi 28 janvier 2011 alors qu'un voyant lumineux établissait que la chambre froide était en défaut et qu'une intervention le vendredi aurait permis d'éviter le sinistre, de sorte que le lien direct de causalité entre le préjudice de la société First FFC et l'intervention de la société SMIFCI n'était pas établi, quand il résultait de ses propres constatations que la faute de la société First FFC, à la supposer établie, n'était pas la cause exclusive du dommage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1147 ancien du code civil applicable en l'espèce ;

2) ALORS QUE le lien de causalité entre la faute et le dommage est caractérisé lorsque, sans la faute, le dommage ne se serait pas produit ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que la société SMIFCI avait commis une faute de négligence en quittant les lieux à la suite de son intervention du 27 janvier 2011 sans s'assurer de la reprise de la production de froid ; qu'en retenant, pour débouter la société First FFC de son action en responsabilité contre la société SMIFCI, qu'elle n'établissait pas que la faute alléguée était directement à l'origine de son préjudice, quand la remontée de la température ne se serait pas produite si la société SMIFCI avait vérifié, à la suite de son intervention, que la production de froid avait été remise en marche, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé encore l'article 1147 ancien du code civil applicable en l'espèce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société First FFC fournitures ingrédients relishes sauces et techniques pour le fast food et la collectivité de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de son assureur la société Axa France Iard,

AUX MOTIFS QUE sur la demande subsidiaire de mise en oeuvre de la garantie « Perte de marchandises » : le contrat n° [...] conclu entre la société First FFC et la société AXA prévoit, au titre de la perte de marchandises couverte par l' « assurance des marchandises en installations frigorifiques » : « Il est précisé que celte garantie est acquise pour l'ensemble des sites assurés par le présent contrat, et avec dérogation à la règle proportionnelle des capitaux. L'assureur garantit les pertes ou avaries totales ou partielles causées aux marchandises entreposées dans les installations frigorifiques en raison de variations de la température dans les installations et/ou d'une fuite de fluide frigorigène pour autant que ces phénomènes résultent de l'une des causes suivantes : - tout dommage ou destruction du transformateur et/ou des installations de production et de transport du froid (y compris appareillage de contrôle et dispositif de sécurité), - carence de fourniture de courant électrique par les services publics, lorsque cette carence a pour origine tout dommage ou destruction des installations de production et d'acheminement du courant électrique appartenant à ces services publics ». En l'espèce, les variations de température ayant entraîné la perte de marchandises ne résultent pas d'une carence dans la fourniture de courant électrique par les services publics, ni d'un dommage ou une destruction du transformateur et/ou des installations de production et de transport de froid. Dans son rapport définitif, l'expert indique du reste que l'origine de la rupture de la chaîne du froid dans la chambre froide ne résulte pas d'un dommage matériel mais d'une négligence non aléatoire, soit une cause sans lien avec celles visées par le contrat d'assurance liant la société First FFC à la compagnie AXA. La société First FFC ne verse pas de pièce contestant cette analyse et de nature à démontrer que la perte des marchandises trouve son origine dans "un dommage ou tine destruction du transformateur et/ou des installations de production et de transport de froid", ou "une carence dans la fourniture de courant électrique par les services publics", au sens du contrat. Par conséquent, la société First FFC doit être déboutée de sa demande, le contrat d'assurance ne trouvant pas application, comme l'a jugé le tribunal de commerce ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE subsidiairement la société First FFC demande la condamnation de son assureur la société Axa France à l'indemniser de son préjudice s'élevant à la somme de 209 203,55 euros ; attendu qu'elle fonde sa demande sur son contrat d'assurance ; attendu que la société Axa France verse aux débats les conditions particulières dudit contrat d'assurance qui ne prévoit la couverture « perte de marchandises » que pour les causes suivantes : « tout dommage ou destruction du transformateur et/ou des installations de production et de transport du froid» et « carence de fourniture de courant électrique par les services publics » ; que le présent sinistre pour lequel la société First FFC sollicite la condamnation de son assureur ne résulte, au vu du rapport de l'expert X..., ce qui n'est pas contesté, ni d'un dommage ou d'une destruction du transformateur ou des installations de production de froid, ni d'une carence de fourniture de courant électrique par un service public ; que le contrat d'assurance ne trouve donc pas application ;

1) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'appliquer une police d'assurance lorsque les conditions en sont réunies ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté elle-même que la garantie « Perte de marchandises en installations frigorifiques » souscrite par la société First FFC auprès de la société Axa était applicable lorsque cette perte avait pour cause « tout dommage ou destruction du transformateur et/ou des installations de production et de transport de froid (y compris appareillage de contrôle et dispositif de sécurité) » ; qu'en pour écarter cette garantie, la cour d'appel a retenu que les variations de température ayant entraîné la perte de marchandises ne résultaient pas d'une telle cause et que l'expert indiquait dans son rapport que l'origine de la rupture de la chaîne du froid dans la chambre froide ne résultait pas d'un dommage matériel mais d'une négligence non aléatoire ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant pour exonérer la société SMIFCI de toute responsabilité que la négligence imputée par l'expert à cette société ne constituait pas la cause du dommage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 ancien du code civil applicable en l'espèce ;

2) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'appliquer une police d'assurance lorsque les conditions en sont réunies ; que dans ses conclusions d'appel, la société First FFC faisait valoir que la cause du dommage ne pouvait être que soit humaine, soit technique ; que la cour d'appel a considéré que la négligence de la société SMIFCI n'était pas la cause du dommage ; qu'en écartant la garantie de la société Axa, sans rechercher, comme le demandait la société First FFC, si la cause de l'interruption de la production de froid, à défaut d'avoir été causée par une négligence humaine, ne résultait pas d'une cause technique garantie par la police, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 ancien du code civil applicable en l'espèce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 17-15008
Date de la décision : 16/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 mai. 2018, pourvoi n°17-15008


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.15008
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