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09/05/2018 | FRANCE | N°17-16098

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 mai 2018, 17-16098


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Lampridis, qui exploite un fonds de commerce à l'enseigne Super U, a assigné la société Y... en paiement du prix de fournitures diverses et de carburant ; que cette dernière a interjeté appel du jugement ayant accueilli la demande de la société Lampridis ; que par ordonnance du 1er juillet 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré, en raison de leur tardiveté, les conclusions de la société Lampridis irrecevables ;

Sur le moyen unique, pris

en sa première branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Att...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Lampridis, qui exploite un fonds de commerce à l'enseigne Super U, a assigné la société Y... en paiement du prix de fournitures diverses et de carburant ; que cette dernière a interjeté appel du jugement ayant accueilli la demande de la société Lampridis ; que par ordonnance du 1er juillet 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré, en raison de leur tardiveté, les conclusions de la société Lampridis irrecevables ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner la société Y... à payer à la société Lampridis une certaine somme, l'arrêt retient que les premiers juges ont constaté à bon droit, d'abord, que la société Lampridis justifiait par la production des contrats de location, signés par le locataire, que la société Y... lui avait louée du 27 juin au 10 août 2008 à plusieurs reprises un véhicule utilitaire à des dates correspondant à des périodes de livraison facturées et, ensuite, que les relevés de la carte U de M. Y... démontraient des passages en caisse au moins jusqu'au 17 août 2012 ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Y..., qui demandait de déclarer irrecevables sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile les pièces produites par la société Lampridis à l'appui de ses conclusions déclarées irrecevables, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 11, alinéa 1er, du code de procédure civile ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que la société Y... a toujours refusé de communiquer sa comptabilité avec la société Sopidor, tout en soutenant que celle-ci a été son seul fournisseur à compter de juin ou juillet 2008 et que ce refus ne pouvait être justifié par le secret des affaires au vu des informations contenues, de sorte qu'il convenait, en application de l'article 11, alinéa 1er, du code de procédure civile, de tirer les conséquences de ce refus non légitime au vu des circonstances de l'espèce ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune mesure d'instruction n'avait été ordonnée en vue d'obtenir le versement de la comptabilité de la société Y... aux débats, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 janvier 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société Lampridis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Y....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé dans l'intégralité de ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Saint Nazaire en date du 17 septembre 2014, et d'avoir en conséquence condamné la société Y... à payer à la société Lampridis la somme en principal de 16.363,05 euros TTC tout en la déboutant de toutes ses demandes autres que celle de donné acte de la remise d'un chèque d'un montant 1.785,82 euros à son conseil en paiement des factures de location de véhicule

AUX MOTIFS PROPRES QUE «par ordonnance en date du 1er juillet 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables en application de l'article 909 du Code de procédure civile les conclusions signifiées le 21 avril 2015 par la société LAMPRIDIS [
], en application de l'ancien article 1315 du Code civil, applicable à la cause, et de l'article 9 du code de procédure civile, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation d'en rapporter la preuve ; qu'il appartient donc à la société LAMPRIDIS d'apporter la preuve de la commande et de la livraison à la société Y... des marchandises visées dans les factures émises entre le 31 juillet et le 15 septembre 2012 ; que conformément aux dispositions de l'article L. 110-3 du code de commerce, la preuve peut en l'espèce être rapportée par tout moyen ; que les premiers juges ont retenu à bon droit que la société LAMPRIDIS et la société Y... ont été en relation d'affaire pendant de nombreuses années, ce que confirme au demeurant les bons de livraison fournis par la société Y... elle-même, et en a déduit qu'il existait entre elles des relations de confiance excluant l'absence de formalisme dans leurs rapports ; qu'ils ont constaté toujours à bon droit que la société LAMPRIDIS justifiait par la production des contrats de location signés par le locataire que la société Y... lui avait loué du 27 juin au 10 août 2008 à plusieurs reprises un véhicule utilitaire, et ce donc à des dates correspondant à des périodes de livraison facturées ; qu'ils ont enfin noté que les relevés de la carte U de Monsieur Y... démontrent des passages en caisse au moins jusqu'au 17 août 2012 ; que les attestations versées par les deux parties émanent toutes de préposés ou de membres de la famille des parties à la cause et sont à ce titre dénuées de force probante et aucune d'entre elles n'est susceptible de remettre en cause les constats opérés par les juges du premier degré ; qu'à ces constats, il convient d'ajouter que la société LAMPRIDIS a toujours refusé de communiquer sa comptabilité avec la société SOPIDOR, tout en soutenant que celle-ci était son seul fournisseur à compter de juin ou juillet 2008 ; que ce refus ne peut se légitimer par le secret des affaires au vu des informations contenues et il convient en application de l'article 11 alinéa 1 du code de procédure civile de tirer les conséquences de ce refus non légitime au vu des circonstances de l'espèce ; qu'il ressort de ces éléments qu'il existe au dossier un ensemble suffisant d'indices établissant que les factures dont le paiement est réclamé correspondent effectivement à des livraisons et sont bien dues par la société Y... ; que le jugement sera en conséquence intégralement confirmé » (cf. arrêt p. 2 § 4 et dernier § et p. 3) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « dans ses conclusions, la Société  E...      dit d'une part qu'elle détruisait le bon de livraison après le paiement de la facture correspondante et quelques lignes suivantes elle dit produire des bons de livraison des 19 et 20 Avril 2014 ; que les factures de location de véhicule sont incluses dans la totalité des sommes réclamées à la  Société E... par la Société LAMPRIDIS ; que les contrats de location versés aux débats ont été signés par Monsieur Y..., pour montrer sa bonne foi il lui appartenait de s'acquitter de ces factures dès la réception de l'assignation et non la veille de l'audience ; que le Tribunal déclare l'attestation de Monsieur B... Pascal, salarié de la Société LAMPRIDIS parfaitement valable ; qu'elle sera donc retenue ; que l'attestation de Monsieur Y... Aurélien n'est pas recevable, car ce dernier se dit, dans un document versé à la cause, "Patron" des deux établissements, Garden et Niagara présents au dossier ; que Madame C..., dans son attestation, dit être en possession des clefs du Niagara, qu'elle faisait un contrôle de la marchandise livrée par les fournisseurs, puis signait le bon de livraison, mais elle ne dit pas si elle effectuait ces opérations en présence du livreur ; que les livraisons du Garden étaient assurées par Monsieur Y... à l'aide d'un véhicule « U » ; que Monsieur B... précise que les commandes étaient passées par téléphone, II affirme également avoir effectué les livraisons de ces commandes dans la cave du Niagara ; que Monsieur Y... dit dans ses conclusions "A la suite de difficultés relationnelles récurrentes avec le personnel de la Société LAMPRIDIS, la D... à compter du mois de juin a fait de moins en moins appel à ses services..." ; que Monsieur Y... reconnaît donc avoir continué à passer des commandes après le 1er Juin 2012, même si elles étaient moins importantes; qu'il y a lieu de constater que les locations de véhicules « U » ont continué jusqu'au 10 Août 2012 ; qu'II y a lieu de constater également le rejet d'un prélèvement automatique d'un montant de 12 € pour l'achat de carburant ; que la Société LAMPRIDiS a édité et adressé les factures à Monsieur Y... par courrier du 11 Octobre 2012, ce dernier le confirme dans ses conclusions, mais ne les a jamais contestées avant la mise en demeure ; que le relevé de la carte « U » de Monsieur Y... démontre un passage de marchandises à la caisse du super U de St Gildas, au moins jusqu'au 17 Août 2012 ; que compte tenu des relations commerciales entre les parties depuis plusieurs années, il y a eu consentement des deux parties au contrat ; qu'il convient de considérer que le contrat de vente existe et les conditions de formation ont été respectées, dès lors que les deux parties se sont entendues sur la chose ainsi que sur son prix, par un accord écrit ou oral ; qu'il n'est pas obligatoire que le contrat soit écrit, les co-contractants peuvent choisir la forme de leur contrat, oral au écrit, et aucun support n'est imposé ; qu'en conséquence, II échet de constater que Monsieur Y... n'est pas fondé à contester la réalité des factures ; qu'en vertu de l'article 1650 du Code Civil, l'obligation pour l'acheteur de payer le prix de la vente résulte de l'exécution complète par le vendeur de son obligation de délivrance ; que dès que la matérialité des livraisons est reconnue, l'acquéreur ayant utilisé et conservé les marchandises, il lui incombe d'en payer le prix ; qu'en l'état de ces constatations en énonciations, le Tribunal fait droit à la demande en paiement de la Société LAMPRIDIS et condamne la Société E... à lui régler la somme de 16.363,05 € TTC » (cf. jugement p. 4 et 5).

1/ ALORS QUE le juge est tenu de motiver sa décision ; que les pièces déposées au soutien de conclusions irrecevables doivent être écartées des débats ; que, pour condamner la société Y... au paiement des créances dont la société Lampridis prétendait être titulaire, la cour d'appel a retenu que les premiers juges avaient à bon droit constaté que la société Lampridis justifiait par des contrats de location signés que la société Y... avait loué à plusieurs reprises un véhicule utilitaire et avait noté que les relevés de la carte U de Monsieur Y... démontrent des passages en caisse au moins jusqu'au 17 août ; qu'en statuant ainsi en se référant aux pièces produites par la société Lampridis sans répondre au moyen, pourtant déterminant, de la société Y... faisant valoir que les conclusions de la société Lampridis ayant été déclarées irrecevables par une décision du conseiller de la mise en état en date du 1er juillet 2015, les pièces versées à leur soutien devaient être écartées des débats (cf. concl. d'appel p. 5), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'appel remet la chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; que la cour d'appel ne peut donc statuer en se référant à des pièces qui n'ont pas été régulièrement produites devant elle et à l'examen desquelles elle n'a donc pas pu elle-même procéder ; qu'en entérinant en l'espèce l'appréciation faite par les premiers juges des pièces produites devant eux mais dont, n'ayant pas été régulièrement produites devant elle, elle n'a pas pu avoir connaissance et qu'elle n'a pas pu examiner, la cour d'appel a méconnu son office en violation de l'article 561 du code de procédure civile ;

3/ ALORS QU' « aux termes de l'article 11 du Code de procédure civile, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus » ; qu'en retenant en l'espèce qu'il convenait, en application de ce texte, de tirer les conséquences du refus non justifié de la société Y... de communiquer des extraits de sa comptabilité, quand n'était pas en cause, un refus de la société Y... d'apporter son concours à une mesure d'instruction ordonnée, la cour d'appel a violé l'article 11 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-16098
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 31 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 mai. 2018, pourvoi n°17-16098


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.16098
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