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02/05/2018 | FRANCE | N°17-81225

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 mai 2018, 17-81225


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

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La société Domoti,
La société Euro-Tel,
La société Laboratoire Ineldea,
M. Jean-Philippe X...,
M. Olivier B... ,
M. Nicolas Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 22 novembre 2016, qui, pour exercice illégal de la pharmacie, a condamné les trois premières chacune à 10 000 euros d'amende et les trois derniers chacun à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts ci

vils ;.

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 mars 2018 où étaient présents dans la formation...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

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La société Domoti,
La société Euro-Tel,
La société Laboratoire Ineldea,
M. Jean-Philippe X...,
M. Olivier B... ,
M. Nicolas Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 22 novembre 2016, qui, pour exercice illégal de la pharmacie, a condamné les trois premières chacune à 10 000 euros d'amende et les trois derniers chacun à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;.

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 mars 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle ROUSSEAU et TAPIE et de la société civile professionnelle FRANÇOIS-HENRI BRIARD, de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER et de la société civile professionnelle MARLANGE et DE LA BURGADE, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I- Sur le pourvoi formé par la société Domoti et M. Jean-Philippe X... :

Attendu que les demandeurs n'ont pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par leur conseil, un mémoire exposant leurs moyens de cassation ; qu'il y a lieu, en conséquence, de les déclarer déchus de leur pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale ;

II- Sur le pourvoi formé par la société Euro-Tel et M. Olivier B... :

III- Sur le pourvoi formé par la société Laboratoire Ineldea et M. Nicolas Y... :

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 31 janvier 2007, le conseil national de l'ordre des pharmaciens a porté plainte et s'est constitué partie civile contre la société Domoti pour la vente par correspondance d'un patch pour articulations dénommé "Rhuma Patch" et d'un "Baume chinois contre les douleurs", qu'il considérait comme constituant des médicaments relevant du monopole pharmaceutique, et contre les sociétés Laboratoire technique d'extraction végétale et Euro-tel, fabricants de ces produits ; qu'une information a été ouverte au cours de laquelle une perquisition effectuée au sein des locaux de la société Domoti a conduit à la saisie d'un troisième produit sous forme de gélules dénommé "Articulation, double action jour/nuit" ; que les investigations ont permis d'établir que les produits "Rhuma Patch" et "Baume chinois" avaient été vendus à la société Domoti par la société Euro-Tel et fabriqués respectivement par les sociétés Les trois Chênes et Laboratoire Ineldéa, le produit "Articulation, double action jour/nuit" étant quant à lui fourni par cette dernière société ; que les sociétés Domoti, Euro-Tel, Les trois chênes, Laboratoire Ineldéa et leurs dirigeants respectifs, M. Jean-Philippe X..., M. Olivier B... , M. Eric A... et M. Nicolas Y... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour exercice illégal de la pharmacie ; que le tribunal les a relaxés et a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du conseil national de l'ordre des pharmaciens ; qu'appel a été interjeté par le ministère public et la partie civile ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation présenté pour la société Euro-Tel et M. B..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 4211-1, L. 4223-1, L. 5111-1 du code de la santé publique, article préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, d'une part, a déclaré M. B... et la société Euro-Tel coupables de s'être livrés à des opérations réservées aux pharmaciens sans réunir les conditions exigées pour l'exercice de la pharmacie, en l'espèce en mettant sur le marché sans autorisation des médicaments, notamment des pots de « Baume chinois », des patchs « Rhuma'patch » et des gélules « articulation jour/nuit », d'autre part, les a condamnés respectivement à des amendes de 5 000 euros et 10 000 euros et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs que s'il est vrai que la société Domoti et M. X... concluent encore à l'inapplication en la cause des dispositions légales ainsi invoquées, au motif pris de ce que la notion de médicament par présentation n'aurait pas existé avant la loi du 26 février 2007, que force est toutefois de constater, après les premiers juges, l'ayant, à cet égard, d'ores et déjà pertinemment énoncé, que les dispositions de cet article sont applicables depuis au moins le 22 juin 2000, en sorte que l'argument, inopérant, a été à juste titre rejeté, fût-ce au titre des moyens de nullité, quand il a, en réalité, bien plutôt trait, tel qu'il est d'ailleurs ainsi présenté, au fond du droit ; qu'en cet état, que la seule question utile consiste, en l'espèce, à déterminer si les trois produits incriminés, à savoir le Rhuma'patch, le Baume chinois, ou bien encore celui dénommé Articulation double action jour/nuit constituent des médicaments par présentation, sinon toutefois, au cas d'espèce, par fonction, qualification que le tribunal a par ailleurs fort justement tenue pour exclue, au vu des termes et de la teneur de l'ordonnance de renvoi, par une appréciation que la cour fait dès lors, et sur ce point, également sienne ; qu'à cet égard, qu'il apparaît, tout d'abord, que toute éventuelle qualification alternative de complément alimentaire, ou autre produit cosmétique, se trouve assurément exclue, s'agissant des trois produits litigieux, qu' il s'agisse en effet du Rhuma'patch, comme du Baume chinois, ou bien encore de celui dénommé Articulation double action jour/nuit, dès l'instant qu'un produit défini comme un complément alimentaire est nécessairement destiné à être ingéré, afin de venir, précisément, en complément du régime alimentaire normal ; que, sur ce point, qu'il n'est déjà pas le moindre doute quant au fait, s'agissant des deux premiers produits, « Rhuma' patch » et « Baume chinois », dont le mode d'utilisation ne consiste jamais qu'à procéder par voie d'application, comme leur dénomination l'indique, le premier, d'un patch, et le second, d' un baume, sur la peau, et sans donc devoir, de toute évidence, et pour aucun d'entre eux, être ingérés, qu'ils ne sauraient être dès lors tenus, ni l' un, ni l'autre, pour des compléments alimentaires, tandis que le troisième, « Articulation double action jour/nuit », faisant l'objet d'une présentation sous forme de gélules, et étant certes, comme tel, destiné à être en revanche administré par voie orale, et donc ingéré, n'entre pas, pour autant, ipso facto, ni, encore moins, définitivement, dans les seules prévisions de la réglementation applicable à de tels compléments alimentaires, faute pour celui-ci de pouvoir se réclamer en rien d'une quelconque fonction de cet ordre, voire, en tout état de cause, de devoir entrer, à tout le moins exclusivement, dans les prévisions des textes régissant les compléments alimentaires ; que, pas davantage, ces mêmes produits ne sauraient être regardés comme autant de simples cosmétiques, faute pour le dernier, Articulation double action jour/nuit, destiné à être ingéré, de pouvoir revendiquer une telle appartenance à ce type de produits, et tandis que les deux premiers, quand bien même ils s'appliquent assurément sur la peau, n'ont néanmoins pas plus vocation à relever, en cela seul, ni, en toute hypothèse, à titre exclusif, de l'unique catégorie des produits cosmétiques ; que ces derniers sont définis par l'article L. 5131-1 du code de la santé publique, comme suit : « on entend par produit cosmétique toute substance ou préparation destinée à être mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain, notamment l'épiderme, les systèmes pileux et capillaires, les ongles, les lèvres et les organes génitaux externes, ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d'en modifier l'aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles » ; qu'il s'avère, au regard de cette définition, qu'aucun des trois produits incriminés, et pas même seulement l'un quelconque des deux premiers, qu'il s'agisse donc du Rhuma'patch ou du Baume chinois, ne peut utilement se réclamer d'une quelconque et réelle appartenance à ce type de produits cosmétiques, pour ne jamais tendre à influer sur l'une quelconque des fonctions propres à ces derniers, telles que ci-dessus précisément énumérées ; que, en revanche, la qualification de médicament par présentation leur est nécessairement applicable, dès lors qu'ils répondent effectivement, et en tous points, à cette définition ; qu'il en est ainsi du Rhuma'patch, à partir du moment où ce produit est, tout à la fois, présenté sous la forme d'un patch, constituant, en soi; une forme traditionnellement utilisée pour l'administration de certains médicaments, et comportant la mention de sa composition, à base de plantes médicinales, inscrites à la pharmacopée, comme l'Harpagophytum, avec une référence à des principes actifs, outre l'indication d'une posologie (« Appliquer 1 patch par jour, le matin, sur la ou les zones(s) sensible(s), et retirer le soir », d'après son conditionnement, ou « Appliquer Rhuma 'Patch sur la zone douloureuse », selon la brochure Domoti), outre la référence à des propriétés curatives ou préventives (« Rhuma' Patch : soulagez vos articulations », sur le conditionnement, ou « Rhuma' Patch, sur la douleur : soulagé toute la journée! Douleurs articulaires, contractures, raideurs. Sans effets secondaires. Un progrès décisif contre la douleur ! ») ; que force est dès lors de constater que de tels termes évoquent ainsi autant d'états pathologiques, auxquels ils renvoient, et qui sont répertoriés au sein du classement international des maladies, telles les douleurs articulaires ; qu'il suit de là que le Rhuma'patch ne peut être considéré, au regard de ce faisceau d'indices précis et concordants, que comme un médicament par présentation ; que, s'agissant du Baume chinois, cet autre produit est encore lui-même présenté sous la forme d'un baume, là aussi traditionnellement utilisée par les médicaments, tout en comportant la mention, non seulement de sa composition, à base de plantes médicinales inscrites à la Pharmacopée (« Eucalyptus »), mais aussi de sa posologie (« Utilisé en massage local, une très petite quantité suffit pour produire un effet de soulagement sensible », selon la brochure Domoti), ou bien encore de précautions d'emploi (« ne pas utiliser chez les nourrissons de moins de trente mois », d'après le conditionnement), outre la référence, tant à un vocabulaire médical ("Utilisé par les médecins chinois (...) il est habituellement vendu en pharmacie, cf. Brochure Domoti), qu'à des propriétés curatives ou préventives (« propriétés assainissantes et décongestionnantes. En cas de douleurs musculaires et de contractures », cf. brochure Domoti) ; qu'il convient de constater, à nouveau, pour cet autre produit, que ces termes précis évoquent des états pathologiques, comme les douleurs musculaires, également reconnus dans le classement international des maladies ; que le Baume chinois s'inscrit donc aussi, et pour l'ensemble de ces motifs, au vu de ces différents indices, non moins précis et concordants, au nombre des médicaments par présentation ; que, pour ce qui a enfin trait au produit Articulation double action jour/nuit, il est présenté sous la forme de gélules, étant elle-même traditionnellement utilisée par les médicaments, avec la mention d'une composition, d'une posologie (« 2 gélules avec un verre d'eau le matin avant le petit déjeuner. Programme de 15 jours renouvelable »), et moyennant la référence à des propriétés curatives ou préventives (« réponse globale au phénomène de la gêne articulaire. Apaiser les articulations sensibles », selon la brochure Domoti, « Apaise et protège (...) régénère et renforce. S'adressant à tous ceux qui souhaitent retrouver la mobilité de leurs articulations (...) 2 formules à actions synergiques pour un effet renforcé (...) articulations sensibles (...) Glucosamine et Chondroïtine sont des éléments constitutifs des cartilages et facilitent leur régénération », d'après le conditionnement) ; qu'il s'évince, là encore, des termes précités, que ceux-ci évoquent des états pathologiques, auxquels ils renvoient, et qui sont toujours mentionnés au sein du classement international des maladies, telles les douleurs articulaires ; que ce troisième produit relève donc bien aussi, en raison de tels indices, tout aussi précis et concordants, de la qualification du médicament par présentation ; que, en effet il apparaît, au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, et relatifs à chacun des trois produits incriminés, que ceux-ci se trouvent ainsi présentés de telle manière qu'ils sont de nature à laisser raisonnablement croire, dans l'esprit d'un consommateur moyennement avisé, à l'existence effective de propriétés curatives ou préventives ; qu'il importe peu, à cet égard, qu'ils aient pu être par ailleurs déclarés, fût-ce même régulièrement, et admis ou reconnus, comme constituant, le produit Articulation double action jour/nuit, un complément alimentaire, voire, les produits Baume chinois ainsi que Rhuma'patch, des cométiques, à partir du moment où ils n'en restent pas moins, encore et surtout, et en tout état de cause, également présentés comme autant de médicaments ; que, de même, que la question de leur éventuelle efficacité ne se pose pas tant il est vrai qu'il ne saurait en revanche d'agir de médicaments par fonction, mais uniquement par présentation, apparaissant, en tant que tels, et aux yeux du consommateur moyennement avisé, comme étant indéniablement dotés, au vu de ce qui précède, de propriétés curatives ou préventives ; que, au demeurant, que M. C..., pharmacien-inspecteur de santé publique, et assistant spécialisé, estimait, le 8 octobre 2008, après examen des produits Baume chinois et Rhuma'patch, puis, le 15 décembre 2008, à l'issue de l'examen du produit Articulation double action jour/nuit, que ceux-ci s'analysaient en autant de médicaments par présentation ; que, de même, que M. D..., pharmacien-inspecteur de santé publique, devait lui-même retenir, pour ces trois produits, une semblable qualification de médicaments par présentation ; que, par ailleurs, que l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), depuis lors devenue l'agence nationale de sécurité du médicament, interrogée sur la qualification des trois produits litigieux, avait elle-même successivement émis, les 31 mars 2009, puis 8 octobre 2009, et, enfin, le 1er mars 2011, divers avis convergents, selon lesquels ces derniers devaient recevoir la qualification de médicaments, sinon par fonction, du moins par présentation ; qu'il est pour le surplus avéré que les prévenus ont, en leur ensemble, participé à la distribution de ces trois produits, constituant autant de médicaments par présentation, alors même que les brochure de la gamme « Temps L », les présentant donc bien ainsi comme tels, ont été rédigées par la société Domoti, à partir, pour le Baume chinois, d'une notice établie par la société Euro-Tel, au demeurant fournie aux consommateurs avec ce produit, M. Olivier B...      ayant d'ailleurs admis que les arguments de vente de la société Domoti étaient déterminés au vu d'une fiche qu'il lui avait transmise et que M. Nicolas Y... avait corrigée, celui-ci ayant lui-même reconnu avoir fourni les informations relatives au Baume chinois à M. B..., tandis que les allégations thérapeutiques relatives au produit Articulation double action jour/nuit ont été rédigées en l'état des informations transmises à la société Domoti par M. Y..., et alors même, enfin, que celles des allégations thérapeutiques intéressant autrement le produit Rhuma'patch ont, quant à elles, également été rédigées par la société Domoti, par référence aux informations reçues de la société Euro-Tel, et au vu des documents transmis par le fournisseur, à savoir la société Les trois chênes, ainsi que MM. B... et Eric A... en sont pour leur part convenus ; que, s'agissant pour le surplus de l'argument autrement pris par Nicolas Y... de la prescription de l'action publique, quant au seul produit Articulation double action jour/nuit, et ce, au titre de la seule année 2004, en ce que ce produit, non mentionné dans la plainte avec constitution de partie civile déposée par le CNOP, mais seulement visé dans les termes d'un réquisitoire supplétif intervenu le 6 août 2008, qu'un tel moyen est dénué de pertinence, pour rester sans incidence sur la consommation de l'infraction d'exercice illégal de la pharmacie, n'en restant pas moins acquise, à l'issue des débats intervenus devant la cour, et ce, indistinctement, sur l'entière période de la prévention, à raison, à tout le moins, de l'autre produit, soit le Baume chinois incriminé, et pour lequel il est appelé à répondre, sur l'entière période de la prévention, à raison des mêmes faits, et, toujours, sous la seule et unique qualification du semblable délit d'exercice illégal de la pharmacie, ne fût-il certes prévenu, mais, dès lors, indifféremment, car, pour autant, du même chef, à raison du produit Articulation double action jour/nuit, qu'à compter seulement de l'année 2005 ; que, en cet état, que le délit d'exercice illégal de la pharmacie est indéniablement constitué en son élément matériel ; que, par ailleurs, que, les huit prévenus, s'étant ainsi livrés à diverses opérations ayant eu pour objet des produits dont il a été ci-dessus démontré qu'ils relevaient en réalité, car en tant que médicaments par présentation, du monopole pharmaceutique, et ce, en violation des dispositions légales régissant la santé publique, pour avoir procédé à la fabrication, à la distribution et à la vente de ces mêmes produits, étant à présent ainsi qualifiés de médicaments par présentation, se sont délibérément inscrits dans une véritable stratégie commerciale, qu'ils ont ainsi sciemment privilégiée, au détriment des impératifs supérieurs de santé publique, dont ils ont, dans le même temps, fait abstraction, et ce, en toute connaissance de cause, alors même qu'il incombe, par principe, à tout professionnel de faire preuve d'une obligation de vigilance, revêtant, en l'occurrence, une particulière acuité, quant à la législation et à la réglementation applicables à l'exercice de son activité, et d'autant plus encore lorsque que celle-ci a trait à la fabrication, ou bien encore à la commercialisation, de produits susceptibles de revêtir la qualification de médicaments, qu'il leur incombe dès lors, et tout spécialement, en pareil cas, de veiller à faire écarter par les autorités compétentes en la matière, avant d'être en mesure de régulièrement en poursuivre, à quelque titre, - fabrication, distribution, ou vente-, la mise sur le marché, à destination finale de consommateurs ; qu'il en résulte quel élément intentionnel du même délit d'exercice illégal de la pharmacie est non moins sûrement constitué à l'encontre de l'ensemble des huit prévenus ; que, le délit d'exercice illégal de la pharmacie ainsi reproché à chacun des huit prévenus, personnes morales et physiques, la société Domoti et M. Jean-Philippe X..., son représentant légal, la société Euro-Tel et M. B..., son représentant légal, la société Les trois chênes, et M. M. A..., son représentant légal, la société Laboratoires Ineldea et M. Y..., son représentant légal, étant par-là même caractérisé en l'ensemble de ses éléments constitutifs, tant matériel, que par ailleurs, intentionnel, -ou bien encore, et pour le surplus des motifs ci-dessus énoncés, assurément, légal-, qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a relaxés des fins de la poursuite, afin, statuant à nouveau, de les en déclarer, tout au contraire, et pour chacun d'entre ces huit prévenus, coupables » ;

"1°) alors que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; qu'en condamnant la société Euro-Tel et M. B... pour s'être illégalement livrés à des opérations réservées à des pharmaciens, sans aucunement circonstancier leur implication relativement à la mise sur le marché du produit « Articulation double action jour/nuit », la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

"2°) alors qu'est désigné comme médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales ; qu'en relevant que M. B... et la société Euro-Tel s'étaient illégalement livrés à des opérations réservées à des pharmaciens relativement aux produits dénommés « Articulation double action jour/nuit », « Baume chinois » et « Rhuma'patch », sans rechercher, comme elle en était pourtant requise (conclusions d'appel, pages 5 et 6), si ces produits avaient été présentés comme curatifs ou préventifs à l'égard d'une maladie humaine, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;

Sur le moyen unique de cassation présenté pour la société Laboratoire Ineldea et M. Y...     , pris de la violation des articles L. 4211-1, L. 4223-1, L. 4223-3, L. 5111-1, L. 5131-1, D. 4211-11 du code de la santé publique, 121-1, 121-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Y... et la société Ineldea coupables de mise sur le marché sans autorisation de médicaments par présentation ;

"aux motifs qu'il est de principe que le monopole des pharmaciens a pour objet de réserver aux seules personnes présentant les qualifications scientifiques et garanties professionnelles requises, les diverses opérations réalisées sur les produits réglementés, s'agissant notamment de la préparation des médicaments, destinés à l'usage de la santé humaine, et de la vente en gros ou au détail, comme de toute dispensation au public de médicaments ; qu'il est par ailleurs constant que la notion de médicament est définie par l'article L. 5111-1 du même code, disposant : "On entend par médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l'homme ou chez l'animal, ou pouvant leur être administrée, en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique ; qu'il s'ensuit qu'un produit a vocation à être qualifié de médicament, soit au regard de la présentation, explicite, voire seulement implicite, mais alors certaine, qui en est faite, soit en contemplation de la fonction pouvant lui être attribuée ; que, par ailleurs, l'article L. 5111-1 du code de la santé publique précité, énonce encore, in fine : "Lorsque, eu égard à l'ensemble de ses caractéristiques, un produit est susceptible de répondre à la fois à la définition du médicament prévue au premier alinéa, et à celle d'autres catégories de produits régies par le droit communautaire ou national, il est, en cas de doute, considéré comme un médicament" ; que s'il est vrai que la société Domoti et M. Jean-Philippe X... concluent encore à l'inapplication en la cause des dispositions légales ainsi invoquées, au motif pris de ce que la notion de médicament par présentation n'aurait pas existé avant la loi du 26 février 2007, que force est toutefois de constater, après les premiers juges, l'ayant, à cet égard, d'ores et déjà pertinemment énoncé, que les dispositions de cet article sont applicables depuis au moins le 22 juin 2000, en sorte que l'argument, inopérant, a été à juste titre rejeté, fût-ce au titre des moyens de nullité, quand il a, en réalité, bien plutôt trait, tel qu'il est d'ailleurs ainsi présenté, au fond du droit ; que la seule question utile consiste, en l'espèce, à déterminer si les trois produits incriminés, à savoir le "Rhuma'patch", le "Baume chinois", ou bien encore celui dénommé "Articulation double action jour/nuit" constituent des médicaments par présentation, sinon toutefois, au cas d'espèce, par fonction, qualification que le tribunal a par ailleurs fort justement tenue pour exclue, au vu des termes et de la teneur de l'ordonnance de renvoi, par une appréciation que la cour fait dès lors, et sur ce point, également sienne ; qu'il apparaît, tout d'abord, que toute éventuelle qualification alternative de complément alimentaire, ou autre produit cosmétique, se trouve assurément exclue, s'agissant des trois produits litigieux, qu'il s'agisse en effet du "Rhuma'patch", comme du "Baume chinois", ou bien encore de celui dénommé "Articulation double action jour/nuit", dès l'instant qu'un produit défini comme un complément alimentaire est nécessairement destiné à être ingéré, afin de venir, précisément, en complément du régime alimentaire normal ; qu'il n'est déjà pas le moindre doute quant au fait, s'agissant des deux premier produits, "Rhuma'patch" et "Baume chinois", dont le mode d'utilisation ne consiste jamais qu'à procéder par voie d'application, comme leur dénomination l'indique, le premier, d'un patch, et le second, d'un baume, sur la peau, et sans donc devoir, de toute évidence, et pour aucun d'entre eux, être ingérés, qu'ils ne sauraient être dès lors tenus, ni l'un, ni l'autre, pour des compléments alimentaires, tandis que le troisième, "Articulation double action jour/nuit", faisant l'objet d'une présentation sous forme de gélules, et étant certes, comme tel, destiné à être en revanche administré par voie orale, et donc ingéré, n'entre pas, pour autant, ipso facto, ni, encore moins, définitivement, dans les seules prévisions de la réglementation applicable à de tels compléments alimentaires, faute pour celui-ci de pouvoir se réclamer en rien d'une quelconque fonction de cet ordre, voire, en tout état de cause, de devoir entrer, à tout le moins exclusivement, dans les prévisions des textes régissant les compléments alimentaires ; que, pas davantage, ces mêmes produits ne sauraient être regardés comme autant de simples cosmétiques, faute pour le dernier, "Articulation double action jour/nuit", destiné à être ingéré, de pouvoir revendiquer une telle appartenance à ce type de produits, et tandis que les deux premiers, quand bien même ils s'appliquent assurément sur la peau, n'ont néanmoins pas plus vocation à relever, en cela seul, ni, en toute hypothèse, à titre exclusif, de l'unique catégorie des produits cosmétiques ; que ces derniers sont définis par l'article L. 5131-1 du code de la santé publique, comme suit : "On entend par produit cosmétique toute substance ou préparation destinée à être mise en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain, notamment l'épiderme, les systèmes pileux et capillaires, les ongles, les lèvres et les organes génitaux externes, ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d'en modifier l'aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles" ; qu'il s'avère, au regard de cette définition, qu'aucun des trois produits incriminés, et pas même seulement l'un quelconque des deux premiers, qu'il s'agisse donc du " Rhuma/patch " ou du "Baume chinois", ne peut utilement se réclamer d'une quelconque et réelle appartenance à ce type de produits cosmétiques, pour ne jamais tendre à influer sur l'une quelconque des fonctions propres à ces derniers, telles que ci-dessus précisément énumérées ; que la qualification de médicament par présentation leur est nécessairement applicable, dès lors qu'ils répondent effectivement, et en tous points, à cette définition ; qu'il en est ainsi du "Rhuma'patch", à partir du moment où ce produit est, tout à la fois, présenté sous la forme d'un patch, constituant, en soi, une forme traditionnellement utilisée pour l'administration de certains médicaments, et comportant la mention de sa composition, à base de plantes médicinales, inscrites à la pharmacopée, comme l'Harpagophytum, avec une référence à des principes actifs, outre l'indication d'une posologie ("Appliquer 1 patch par jour, le matin, sur la ou les zones(s) sensible(s), et retirer le soir ", d'après son conditionnement, ou "Appliquer Rhuma'patch sur la zone douloureuse", selon la brochure Domoti), outre la référence à des propriétés curatives ou préventives ("Rhuma'patch : soulagez vos articulations ", sur le conditionnement, ou "Rhuma' Patch, sur la douleur : soulagé toute la journée ! Douleurs articulaires, contractures, raideurs. Sans effets secondaires. Un progrès décisif contre la douleur ; que force est dès lors de constater que de tels termes évoquent ainsi autant d'états pathologiques, auxquels ils renvoient, et qui sont répertoriés au sein du classement international des maladies, telles les douleurs articulaires ; qu'il suit de là que le "Rhuma'patch " ne peut être considéré, au regard de ce faisceau d'indices précis et concordants, que comme un médicament par présentation ; que s'agissant du "Baume chinois", que cet autre produit est encore lui-même présenté sous la forme d'un baume, là aussi traditionnellement utilisé par les médicaments, tout en comportant la mention, non seulement de sa composition, à base de plantes médicinales inscrites à la Pharmacopée ("Eucalyptus"), mais aussi de sa posologie (H Utilisé en massage local, une très petite quantité suffit pour produire un effet de soulagement sensible", selon la brochure Domoti ou bien encore de précautions d'emploi ("Ne pas utiliser chez les nourrissons de moins de trente mois", d'après le conditionnement), outre la référence, tant à un vocabulaire médical (utilisé par les médecins chinois (..) il est habituellement vendu en pharmacie, Cf. Brochure Domoti), qu'à des propriétés curatives ou préventives ("Propriétés assainissantes et décongestionnantes, en cas de douleurs musculaires et de contractures", Cf. Brochure Domoti) ; qu'il convient de constater, à nouveau, pour cet autre produit, que ces termes précis évoquent des états pathologiques, comme les douleurs musculaires, également reconnus dans le classement international des maladies ; que le "Baume chinois" s'inscrit donc aussi, et pour l'ensemble de ces motifs, au vu de ces différents indices, non moins précis et concordants, au nombre des médicaments par présentation ; que pour ce qui a enfin trait au produit "Articulation double action jour/nuit", qu'il est présenté sous la forme de gélules, étant elles-mêmes traditionnellement utilisées par les médicaments, avec la mention d'une composition, d'une posologie ("2 gélules avec un verre d'eau le matin avant le petit déjeuner. Programme de quinze jours renouvelable", Cf. conditionnement), et moyennant la référence à des propriétés curatives ou préventives ("Réponse globale au phénomène de la gêne articulaire. Apaiser les articulations sensibles ", selon la brochure Domoti, "Apaise et protège (...) régénère et renforce. S'adressant à tous ceux qui souhaitent retrouver la mobilité de leurs articulations (...) 2 formules à actions synergiques pour un effet renforcé (...) articulations sensibles (
) Glucosamine et Chondroïtine sont des éléments constitutifs des cartilages et facilitent leur régénération", d'après le conditionnement ; qu'il s'évince, là encore, des termes précités, que ceux-ci évoquent des états pathologiques, auxquels ils renvoient, et qui sont toujours mentionnés au sein du classement international des maladies, telles les douleurs articulaires ; que ce troisième produit relève donc bien aussi, en raison de tels indices, tout aussi précis et concordants, de la qualification du médicament par présentation ; qu'il apparaît, au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, et relatifs à chacun des trois produits incriminés, que ceux-ci se trouvent ainsi présentés de telle manière qu'ils sont de nature à laisser raisonnablement croire, dans l'esprit d'un consommateur moyennement avisé, à l'existence effective de propriétés curatives ou préventives ; qu'il importe peu, à cet égard, qu'ils aient pu être par ailleurs déclarés, même régulièrement, et admis ou reconnus, comme constituant, le produit "Articulation double action jour/nuit", un complément alimentaire, voire, les produits "Baume chinois " ainsi que "Rhuma/patch ", des cosmétiques, à partir du moment où ils n'en restent pas moins, encore et surtout, et en tout état de cause, également présentés comme autant de médicaments ; que la question de leur éventuelle efficacité ne se pose pas, tant il est vrai qu'il ne saurait en revanche s'agir de médicaments par fonction, mais uniquement par présentation, apparaissant, en tant que tels, et aux yeux du consommateur moyennement avisé, comme étant indéniablement dotés, au vu de ce qui précède, de propriétés curatives ou préventives ; que M. C..., pharmacien-inspecteur de santé publique, et assistant spécialisé, estimait, le 8 octobre 2008, après examen des produits "Baume chinois" et " Rhuma/patch ", puis, le 15 décembre 2008, à l'issue de l'examen du produit " Articulation double action jour/nuit", que ceux-ci s'analysaient en autant de médicaments par présentation ; que M. D..., pharmacien-inspecteur de santé publique, devait lui-même retenir, pour ces trois produits, une semblable qualification de médicaments par présentation ; que l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), -depuis lors devenue l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (ANSM)-, interrogée sur la qualification des trois produits litigieux, avait elle-même successivement émis, les 31 mars 2009, puis 8 octobre 2009, et, enfin, le 1er mars 2011, divers avis convergents, selon lesquels ces derniers devaient recevoir la qualification de médicaments, sinon par fonction, du moins par présentation ; qu'il est pour le surplus avéré que les prévenus ont, en leur ensemble, participé à la distribution de ces trois produits, constituant autant de médicaments par présentation, alors même que les brochure de la gamme "Temps L", les présentant donc bien ainsi comme tels, ont été rédigées par la société Domoti, à partir, pour le "Baume chinois", d'une notice établie par la société Euro-Tel, au demeurant fournie aux consommateurs avec ce produit, Olivier B...      ayant d'ailleurs admis que les arguments de vente de la société Domoti étaient déterminés au vu d'une fiche qu'il lui avait transmise et que M. Y... avait corrigée, celui-ci ayant lui-même reconnu avoir fourni les informations relatives au "Baume chinois" à M. B..., tandis que les allégations thérapeutiques relatives au produit "Articulation double action jour/nuit " ont été rédigées en l'état des informations transmises à la société Domoti par M. Y..., et alors même, enfin, que celles des allégations thérapeutiques intéressant autrement le produit Rhuma'patch " ont, quant à elles, également été rédigées par la société Domoti, par référence aux informations reçues de la société Euro-tel, et au vu des documents transmis par le fournisseur, à savoir la société Les trois chênes, ainsi que MM. B... et A... en sont pour leur part convenus ; que l'argument autrement pris par M. Y... de la prescription de l'action publique, quant au seul produit "Articulation double action jour/nuit", et ce, au titre de la seule année 2004, en ce que ce produit, non mentionné dans la plainte avec constitution de partie civile déposée par le CNOP, mais seulement visé dans les termes d'un réquisitoire supplétif intervenu le 6 août 2008, qu'un tel moyen est dénué de pertinence, pour rester sans incidence sur la consommation de l'infraction d'exercice illégal de la pharmacie, n'en restant pas moins acquise, à l'issue des débats intervenus devant la cour, et ce, indistinctement, sur l'entière période de la prévention, à raison, à tout le moins, de l'autre produit, soit le "Baume chinois" incriminé, et pour lequel il est appelé à répondre, sur l'entière période de la prévention, à raison des mêmes faits, et, toujours, sous la seule et unique qualification du semblable délit d'exercice illégal de la pharmacie, ne fût-il certes prévenu, mais, dès lors, indifféremment, car, pour autant, du même chef, à raison du produit "Articulation Double Action Jour Nuit", qu'à compter seulement de l'année 2005 ; que le délit d'exercice illégal de la pharmacie est indéniablement constitué en son élément matériel ; que, les huit prévenus, s'étant ainsi livrés à diverses opérations ayant eu pour objet des produits dont il a été ci-dessus démontré qu'ils relevaient en réalité, car en tant que médicaments par présentation, du monopole pharmaceutique, et ce, en violation des dispositions légales régissant la santé publique, pour avoir procédé à la fabrication, à la distribution et à la vente de ces mêmes produits, étant à présent ainsi qualifiés de médicaments par présentation, se sont délibérément inscrits dans une véritable stratégie commerciale, qu'ils ont ainsi sciemment privilégiée, au détriment des impératifs supérieurs de santé publique, dont ils ont, dans le même temps, fait abstraction, et ce, en toute connaissance de cause, alors même qu'il incombe, par principe, à tout professionnel de faire preuve d'une obligation de vigilance, revêtant, en l'occurrence, une particulière acuité, quant à la législation et à la réglementation applicables à l'exercice de son activité, et d'autant plus encore lorsque que celle-ci a trait à la fabrication, ou bien encore à la commercialisation, de produits susceptibles de revêtir la qualification de médicaments, qu' il leur incombe dès lors, et tout spécialement, en pareil cas, de veiller à faire écarter par les autorités compétentes en la matière, avant d'être en mesure de régulièrement en poursuivre, à quelque titre, fabrication, distribution, ou vente-, la mise sur le marché, à destination finale de consommateurs ; qu'il en résulte que l'élément intentionnel du même délit d'exercice illégal de la pharmacie est non moins sûrement constitué à l'encontre de l'ensemble des huit prévenus ; que le délit d'exercice illégal de la pharmacie ainsi reproché à chacun des huit prévenus, personnes morales et physiques, la société Domoti et M. X..., son représentant légal, la société Euro-Tel et M. B..., son représentant légal, la société Les trois chênes et M. A..., son représentant légal, la société Laboratoires Ineldea et M. Y..., son représentant légal, étant par-là même caractérisé en l'ensemble de ses éléments constitutifs, tant matériel, que par ailleurs, intentionnel, - ou bien encore, et pour le surplus des motifs ci-dessus énoncés, assurément, légal -, qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a relaxés des fins de la poursuite, afin, statuant à nouveau, de les en déclarer, tout au contraire, et pour chacun d'entre ces huit prévenus, coupables ;

"1°) alors qu'un produit ne constitue pas un médicament dès lors qu'il ne vise pas à assurer la guérison de maladies mais à améliorer la santé des consommateurs ; qu'en entrant en voie de condamnation après avoir constaté que les différents produits visaient à soulager les douleurs articulaires et musculaires, les contractures et les raideurs, à apporter une « réponse globale au phénomène de la gêne articulaire », à apaiser et protéger les articulations sensibles, quand de tels malaises peuvent aussi bien découler d'un mauvais positionnement ou d'un effort soutenu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que les juges ne peuvent statuer par des motifs d'ordre général ; qu'en ayant énoncé, concernant le Rhuma'patch, le produit dénommé « Articulation double action jour/nuit » et le Baume chinois, que leur présentation était celle traditionnellement utilisée pour la présentation de certains médicaments, bien que la gélule et le baume puissent servir de conditionnements à des produits autres que pharmaceutiques, la cour d'appel a statué par un motif d'ordre général, équivalant à un défaut de motifs ;

"3°) alors que l'eucalyptus, la menthe, la girofle, le romarin et le thym peuvent être vendus par des personnes autres que les pharmaciens, même si ces plantes sont inscrites à la pharmacopée ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance que les produits incriminés étaient composés de plantes médicinales inscrites à la pharmacopée, notamment l'eucalyptus composant le « Baume chinois », la cour d'appel a violé l'article D. 4211-11 du code de la santé publique ;

"4°) alors que le fabricant d'un complément alimentaire doit obtenir des autorités françaises compétentes une autorisation préalable à leur commercialisation ; qu'à défaut d'avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les produits incriminés n'avaient pas été préalablement et régulièrement notifiés, le 9 août 2006, à la DGCCRF et si cette commercialisation, déclarée légale par cette autorité, ne retirait pas tout caractère délictueux aux faits poursuivis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"5°) alors que sont réservées aux pharmaciens, sauf dérogations, la préparation des médicaments destinés à l'usage de la médecine humaine, la vente en gros, la vente au détail, y compris par internet et toute dispensation au public des médicaments, la vente des plantes médicinales inscrites à la pharmacopée ; qu'en entrant en voie de condamnation contre M. Y... après avoir constaté que son rôle s'était limité à fournir et transmettre des informations à certains prévenus, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"6°) alors que nul n'est pénalement responsable que de son propre fait ; qu'à défaut d'avoir caractérisé l'implication du laboratoire Ineldea dans les faits poursuivis, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables d'exercice illégal de la pharmacie, l'arrêt retient tout d'abord que les produits litigieux, "Rhuma Patch", "Baume chinois", "Articulation double action jour/nuit", présentés sous des formes traditionnellement utilisées par les médicaments, comportent la mention de leur composition, pour les deux premiers à base de plantes médicinales inscrites à la pharmacopée telle que l'harpagophytum ou l'eucalyptus, de leur posologie ou de leurs précautions d'emploi, et font référence à des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines telles que les douleurs articulaires, contractures raideurs, douleurs musculaires, en des termes évoquant des états pathologiques répertoriés au sein du classement international des maladies ; que les juges en déduisent que ces produits sont présentés de telle manière qu'ils sont de nature à laisser raisonnablement croire, dans l'esprit d'un consommateur moyennement avisé, à l'existence effective des propriétés curatives ou préventives et constituent ainsi des médicaments par présentation, peu important alors qu'ils aient pu être par ailleurs déclarés, admis ou reconnus comme constituant un complément alimentaire ou des cosmétiques ; que la cour d'appel relève d'autre part, que les prévenus ont, en leur ensemble, participé à la distribution de ces trois produits ; qu'elle indique notamment que la société Laboratoire Ineldéa a fabriqué les produits "Baume chinois" et "Articulation double action jour /nuit" et les a vendus à la société Domoti puis précise que les brochures présentant le "Baume chinois" ont été rédigées par la société Domoti au regard d'une notice établie par la société Euro-Tel à partir d'informations de la société de M. Y..., que les allégations thérapeutiques relatives au produit "Rhuma'patch" ont été rédigées par référence aux informations reçues de la société Euro-Tel au vu des documents transmis par la société Les trois chênes, et que celles relatives au produit "Articulation double action jour/nuit" l'ont été en l'état des informations transmises à la société Domoti par Y... ; qu'elle en déduit que les prévenus se sont ainsi délibérément inscrits dans une véritable stratégie commerciale qu'ils ont sciemment privilégiée au détriment des impératifs supérieurs de santé publique, et ce en toute connaissance de cause alors même qu'il incombe par principe à tout professionnel de faire preuve d'une obligation de vigilance ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Mais sur le second moyen de cassation présenté pour la société Euro-Tel et M. B... pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-1 et 132-20 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. B... et la société Euro-Tel coupables de s'être livrés à des opérations réservées aux pharmaciens sans réunir les conditions exigées pour l'exercice de la pharmacie, en l'espèce en mettant sur le marché sans autorisation des médicaments, notamment des pots de « Baume chinois», des patchs « Rhuma'patch » et des gélules « articulation jour/nuit », de les avoir condamnés respectivement à 5 000 euros et 10 000 euros d'amende et d'avoir prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs que, sur la peine, il y a certes lieu d'avoir égard à la nature et à la gravité intrinsèque, outre à la pluralité des faits d'exercice illégal de la profession de pharmacien, portant en effet sur la distribution, en de multiples exemplaires, des trois produits distincts incriminés, revêtant la qualification d'autant de médicaments par présentation, ainsi, dès lors, qu'à l'étendue de leurs conséquences dommageables, mais de prendre aussi en compte la personnalité propre à chacun de leurs auteurs, personnes physiques, ou bien encore morales ; qu'il apparaît, à cet égard, que le casier judiciaire de la société Laboratoires Ineldea, ou bien encore de la société Euro-Tel, ne porte pas davantage que celui de MM. X... ou B..., mention d'une quelconque condamnation, tandis que ceux de la société Les trois chênes et de la société Domoti, comme de MM. Y... et A..., révèlent en revanche l'existence de condamnations, la société Les trois chênes, au nombre de deux, intervenues les 14 mars 2006 et 29 septembre 2011, chacune, pour publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, par personne morale, la société Domoti, au nombre de deux également, prononcées, les 25 juin 2004 et 6 décembre 2013, pour publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, par personne morale, et tromperie, par personne morale, sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, M. Y..., d'une seule condamnation, en date du 31 octobre 2007, pour abus des biens ou du crédit d'une société par actions par un dirigeant à des fins personnelles, et M. A..., de quatre condamnations, des 24 novembre 2005 et 14 mars 2006, outre de deux autres, en date du 29 septembre 2011, pour commercialisation ou distribution sans autorisation de mise sur le marché de médicament, spécialité pharmaceutique, générateur, trousse ou précurseur, publicité mensongère ou de nature à induire en erreur (par deux fois), et tromperie sur la nature, la qualité substantielle, l'origine ou la quantité d'une marchandise, toutes condamnations s'étant soldées par autant de peines d'amende ; que force est de constater que la personnalité distincte et propre à chacun des huit mêmes prévenus, ne revêt pas davantage, indépendamment des seuls faits litigieux, un quelconque caractère plus amplement défavorable, au vu du surplus des éléments recueillis au cours de la procédure d'information diligentée, puis devant le tribunal, et ensuite auprès de la cour, rendant tout au contraire, et en leur ensemble, bien plutôt compte, s'agissant des quatre personnes physiques, d'une insertion sociale et professionnelle, et, pour ce qui est par ailleurs des quatre personnes morales, à tout le moins de l'exercice d'une activité commerciale, restant des plus stables et satisfaisantes ; que, dans ces conditions, il convient de condamner, en répression, d'une part, les quatre personnes morales, à savoir les sociétés Domoti, Euro-Tel, Laboratoires Ineldea et Les trois chênes, chacune, à la même peine de 10 000 euros d'amende délictuelle, outre les quatre personnes physiques, soit MM. Nicolas Y..., Eric A..., Olivier B...      et Jean-Philippe X..., chacun, et tout pareillement, à une peine d'amende délictuelle, mais, celle-ci, les concernant, d'un semblable montant de 5 000 euros, de telles sanctions apparaissant en effet à la cour appropriées, car en tous points adaptées à l'ensemble des circonstances particulières de la cause ;

"alors que le juge qui prononce une amende en matière correctionnelle doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en l'espèce, en condamnant respectivement la société Euro-Tel et M. B... à des peines d'amende de 10 000 euros et de 5 000 euros au regard uniquement de leur casier judiciaire, sans s'intéresser aux circonstances de l'infraction, à la personnalité ou à la situation personnelle des exposants ainsi qu'à leurs ressources ou à leurs charges, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;

Vu l'article 132-20, alinéa 2, du code pénal, ensemble l'article 132-1 du même code et les articles 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour condamner la société Euro-Tel et M. B... à des amendes de 10 000 et 5 000 euros, l'arrêt, après avoir relevé qu'il y avait lieu de prendre en compte non seulement la nature et la gravité des faits mais également la personnalité de chacun des auteurs, retient que le casier judiciaire des prévenus ne porte mention d'une quelconque condamnation, que les éléments recueillis rendent compte d'une insertion sociale et professionnelle, et, pour la personne morale, de l'exercice d'une activité commerciale stable et satisfaisante ; que les juges en déduisent que les sanctions sont appropriées car en tous points adaptées à l'ensemble des circonstances particulières de la cause ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans indiquer les ressources et les charges des prévenus qu'elle a pris en compte, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

I- Sur le pourvoi formé par la société Domoti et M. Jean-Philippe X... :

CONSTATE la déchéance du pourvoi ;

II- Sur le pourvoi formé par la société Laboratoire Ineldéa et M. Y... :

Le REJETTE ;

III- Sur le pourvoi formé par la société Euro-Tel et de M. B... :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 22 novembre 2016, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'encontre de la société Euro-Tel et de M. B..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 612-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux mai deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-81225
Date de la décision : 02/05/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 mai. 2018, pourvoi n°17-81225


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP François-Henri Briard, SCP Marlange et de La Burgade, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.81225
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