La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2018 | FRANCE | N°16-20149

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 avril 2018, 16-20149


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 622-22 et R. 622-20 du code de commerce et les articles 386 et 392 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Alcan France, venant aux droits de la société Péchiney, locataire d'un ensemble immobilier que lui avait donné à bail la SCI Le Sevine (la SCI), a assigné cette dernière le 1er mars 2010 en révision du montant du loyer ; que par un jugement avant-dire droit du 24 octobre 2011, le juge des loyers a ordonné un

e expertise dont le rapport a été déposé le 10 juillet 2012 ; que la SCI a été m...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 622-22 et R. 622-20 du code de commerce et les articles 386 et 392 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Alcan France, venant aux droits de la société Péchiney, locataire d'un ensemble immobilier que lui avait donné à bail la SCI Le Sevine (la SCI), a assigné cette dernière le 1er mars 2010 en révision du montant du loyer ; que par un jugement avant-dire droit du 24 octobre 2011, le juge des loyers a ordonné une expertise dont le rapport a été déposé le 10 juillet 2012 ; que la SCI a été mise en redressement judiciaire le 21 juillet 2011, la société C. Basse étant désignée mandataire judiciaire et la société FHB administrateur, celle-ci étant ensuite désignée commissaire à l'exécution du plan par le jugement du 5 juin 2012 qui a arrêté le plan de redressement de la SCI ; que, le 5 octobre 2011, la société Rio Tinto France, venant aux droits de la société Alcan France, a déclaré au passif de la procédure une créance au titre de la régularisation du loyer commercial ; qu'elle a assigné en intervention forcée, devant le juge des loyers, le mandataire judiciaire et le commissaire à l'exécution du plan le 27 septembre 2013 ; que la SCI et ses organes ont opposé la péremption d'instance ;

Attendu que pour dire que l'instance en révision du loyer reprise par le créancier n'est pas périmée, l'arrêt retient, qu'ayant été interrompue en application de l'article L. 622-22 du code de commerce par le redressement judiciaire de la SCI, elle a été reprise de plein droit à compter de la déclaration de la créance du 5 octobre 2011 suivant, qui a fait courir un nouveau délai de péremption, lequel n'était pas expiré lors de l'assignation des mandataires de justice ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le redressement judiciaire de la SCI n'avait interrompu l'instance et, partant, le délai de péremption, qu'au profit de cette seule partie, de sorte que, le créancier ne pouvant s'en prévaloir, la SCI et les mandataires judiciaires étaient fondés à soutenir que l'instance était périmée, faute pour lui d'avoir accompli dans le délai de deux ans les diligences nécessaires à sa reprise régulière, la cour d'appel, qui a constaté que la société Rio Tinto avait assigné les mandataires plus de deux ans après le redressement judiciaire, a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Confirme le jugement ;

Condamne la société Rio Tinto France aux dépens, incluant ceux exposés devant la cour d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la SCI Le Sevine, et aux sociétés C. Basse et FHB, en leur qualité respective de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la SCI, la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société C. Basse, ès qualités, la société Le Sevine et la société FHB, ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'instance reprise par les assignations de la SAS RIO TINTO FRANCE du 27 septembre 2013 en intervention forcée de la SELARL FEB es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SCI LE SEVINE et la SELARL C.BASSE es qualités de mandataire judiciaire de la SCI LE SEVINE n'est pas périmée et d'avoir fixé à 1.218.780 € par an hors taxes et hors charges le prix annuel du loyer dû au 15 mai 2009 par la SAS RIO TINTO FRANCE à la SCI LE SEVINE pour les locaux situés à l'angle de l'[...]             et de l'[...]                               ;

Aux motifs que « la SAS RIO TINTO FRANCE conteste la péremption d'instance retenue par le juge des loyers commerciaux aux motifs que suite à sa déclaration de créance au passif de la SCI LE SEVINE le 5 octobre 2011, elle a attrait dans les deux ans la SELARL FHB es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SCI LE SEVINE et la SELARL C.BASSE es qualités de mandataire judiciaire de la SCI LE SEVINE par assignations en intervention forcée du 27 septembre 2013 dans l'instance du juge des loyers commerciaux, et que l'instance a dès lors été reprise dans les conditions de l'article L.622-2 du code de commerce. Elle explique qu'en tout état de cause, sa déclaration de créance a interrompu la prescription biennale de l'action en révision du loyer, qui ne commencera à courir qu'à compter de la date de clôture de la procédure (le redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la SCI LE SEVINE.

Les intimées sollicitent la confirmation du jugement entrepris, faisant valoir que seule la reprise d'instance interrompt le délai de péremption, que la SAS RIO TINTO FRANCE n'a attrait devant le juge des loyers commerciaux les organes de la procédure de la SCI LE SEVINE que le 27 septembre 2013 soit plus de deux ans après l'ouverture de la procédure collective le 21 juillet 2011, que la déclaration de créance n'a aucun effet sur l' instance en cours et ne constitue pas une diligence interruptive de péremption, que de plus celle-ci est autonome et n'a pas de lien direct et nécessaire avec l'instance en cours portant sur la fixation d'un loyer révisé à compter du 15 mai 2009. Elles ajoutent que l'action en révision de loyer est prescrite depuis le 15 mai 2011, puisque la prescription de l'action n'a pas pu être interrompue en raison de la péremption de l'instance et que la notification de la demande de révision au bailleur est du 15 mai 2009.

En application de l'article L.622-2 du code de commerce, sous réserve des dispositions de l'article L, 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l'administrateur ou le commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

La SAS RIO TINTO FRANCE produit une déclaration de créance au passif de la SCI LE SEVINE en date du 5 octobre 2011 portant notamment sur le montant de 1.717.690,60€ TTC au titre du loyer révisé pour la période du 15 mai 2009 au 31 décembre 2011. Cette déclaration de créance au passif du redressement judiciaire du débiteur équivalant à une demande en justice, il s'ensuit qu'elle en produit ses effets et qu'un nouveau délai de péremption, a dès lors commencé à courir à compter de cette date.

Si l'instance initialement introduite devant le juge des loyers commerciaux de Nanterre le 1er mars 2010 qui a fait l'objet d'un jugement avant dire droit du 24 octobre 2011 ordonnant une expertise, s'est trouvée interrompue par le placement en redressement judiciaire de la SCI LE SEVINE le 21 juillet 2011 jusqu'au 5 octobre 2011, jour de la déclaration de créance du créancier, la reprise de l'instance est subordonnée à la mise en cause du mandataire judiciaire dans la cause pendante devant le juge des loyers commerciaux de Nanterre. Or dans le délai de deux ans de la déclaration de créances du 5 octobre 2011, la SAS RIO TINTO FRANCE a appelé dans la cause la SELARL FHB es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SCI LE SEVINE et la SELARL C. BASSE es qualités de mandataire judiciaire de la SCI LE SEVINE par assignations en intervention forcée en date du 27 septembre 2013.

Alors que l'objet de la déclaration de créances de la SAS RIO TINTO FRANCE portait à titre principal sur le montant de la régularisation du loyer révisé, que la SAS RIO TINTO FRANCE a fait état dans sa déclaration de créances de la procédure en révision pendante devant le juge des loyers commerciaux de Nanterre qui sous-tend la demande en restitution des loyers trop perçus, que par ordonnance du 18 décembre 2012 le juge commissaire du tribunal de grande instance de Nanterre, indiquant que la somme de 1.717.690,60e TTC est contestée aux motifs que cette créance fait l'objet d'une procédure en cours, a prononcé le sursis à statuer sur l'admission de cette créance, les intimées ne peuvent valablement soutenir que les deux procédures en révision de loyer et en restitution des loyers trop perçus ne sont pas rattachés par un lien de dépendance direct et nécessaire.

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la péremption de l'instance devant le juge des loyers commerciaux n'est pas acquise et d'infirmer en conséquence le jugement querellé. L'instance de la SAS RIO TINTO FRANCE devant le juge des loyers commerciaux n'étant pas périmée, la demande portant sur la prescription de l'action est devenue sans objet » ;

Alors que l'instance en cours interrompue en application de l'article L. 622-21 du code de commerce est reprise à l'initiative du créancier dans les conditions de l'article L. 622-22 du code de commerce, dès que celui-ci a produit à la juridiction saisie de l'instance en cours une copie de la déclaration de sa créance et a mis en cause le mandataire judiciaire ainsi que, le cas échéant, l'administrateur lorsqu'il a pour mission d'assister le débiteur ou le commissaire à l'exécution du planque, et que seule une reprise d'instance régulière interrompt le délai de péremption biennal ; qu'en l'espèce, il est constant que les mandataires judiciaires n'ont été mis en cause que le 27 septembre 2013, soit plus de deux ans après l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SCI LE SEVINE intervenue le 21 juillet 2011 et qu'ainsi la péremption était acquise ; qu'en énonçant pourtant que la déclaration de créance, en date du 5 octobre 2011, avait fait courir un nouveau délai de péremption d'instance de deux ans à l'intérieur duquel les mandataires de justice avait été mise en cause par assignations en intervention forcée du 27 septembre 2013, et qu'ainsi l'instance en cours n'était pas périmée, la Cour d'appel a violé l'article L.622-22 du code de commerce, ensemble les articles R. 622-20 du code de commerce et 372 et 386 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-20149
Date de la décision : 11/04/2018
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 24 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 avr. 2018, pourvoi n°16-20149


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.20149
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award