LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
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Le procureur général près la cour d'appel de Nancy,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2016, qui a renvoyé M. X... A... des fins de la poursuite du chef d'exercice illégal de la profession de banquier ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 février 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocat en la Cour et les conclusions de M. l'avocat général VALAT;
Vu le mémoire produit, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 311-1 et L. 311-3 du code monétaire et financier et 591 du code de procédure pénale ;
Vu les articles L. 311-1 et L.311-3 du code monétaire et financier ;
Attendu qu'en application de ces textes, dans leur rédaction en vigueur tant avant le 1er janvier 2014 qu'après cette date, constituent des opérations de banque la réception de fonds remboursables du public, les opérations de crédit et la gestion des moyens de paiement incluant tous les instruments qui permettent à toute personne de transférer des fonds, quel que soit le support ou le procédé technique utilisé ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 15 février 2004, les agents de la direction du renseignement et des enquêtes douanières ont contrôlé un véhicule sur l'autoroute A 36 à bord duquel se trouvaient plusieurs personnes dont deux portaient sur elles des espèces, l'une 820 euros, et l'autre 3 000 euros ; que la découpe d'une roue de secours entreposée dans ledit véhicule permettait aux enquêteurs d'y découvrir, cachée en plusieurs petits paquets, la somme totale, en petites coupures de 10 à 100 euros, de 194 840 euros ; que les investigations alors diligentées conduisaient à démanteler un réseau de collecte et de transfert de fonds caractérisé par le recueil de sommes par des personnes rémunérées auprès de ressortissants tamouls, fonds ensuite confiés à des intermédiaires qui transportaient ces espèces, via la Suisse ou la Grande-Bretagne, vers le Sri Lanka où elles étaient remises aux destinataires ; que l'enquête mettait à jour le rôle joué au sein de ce réseau par M. A... qui récupérait au moins hebdomadairement, soit par lui-même, soit par des hommes de confiance, des sommes de plusieurs milliers d'euros, excédant souvent 10 000 euros, qu'il réceptionnait à son bureau avant de les transférer au Sri Lanka où elles étaient remises à des prêteurs de deniers locaux à titre de remboursement de prêts par eux consentis sur place ;
Attendu que pour renvoyer le prévenu des fins de la poursuite intentée à son encontre du chef d'exercice de la profession illégale de banquier, l'arrêt retient que, dans sa version de l'époque applicable aux faits, commis entre 2003 et 2007, l'article L. 311-1 du code monétaire et financier ne visait pas, parmi les opérations de banque, la réception de fonds remboursables du public, les sommes remises en l'espèce à l'intéressé ayant au surplus été acheminées par ses soins à charge pour lui de les remettre à des tiers sans qu'il y ait remboursement ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la réception habituelle de fonds auprès du public sous forme de dépôts, comme le transferts de fonds, constituent, quelle que soit leur destination, une opération de banque au sens des articles L. 311-1 et L. 312-2 du code monétaire et financier et que le prévenu pouvait disposer librement des sommes recueillies se compensant entre elles et permettant l'octroi de crédits, à charge pour lui de les restituer à des tiers préalablement désignés établis à l'étranger, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 13 décembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Metz, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq avril deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.