LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 janvier 2016), que la société Auto 3000, qui exploite un atelier d'équipement et de réparation automobile dans le Finistère, a diffusé un document publicitaire pour des opérations commerciales valables du 5 juillet au 14 août puis du 5 octobre au 26 novembre 2011 ; que, reprochant à M. X..., qui exerce l'activité de garagiste sous l'enseigne « Centre auto de l'Aulne » dans le même département, d'avoir distribué aux mois de décembre 2011 et janvier 2012 un prospectus publicitaire reproduisant, tant sur la forme que sur le fond, les caractéristiques de son propre document, cette société l'a assigné en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et parasitaire ;
Attendu que la société Auto 3000 fait grief à l'arrêt du rejet de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte nécessairement des constatations de la cour d'appel que M. X... avait purement et simplement recopié, dans le même ordre, tant pour les services proposés que pour les tarifs pratiqués, les soixante-six forfaits embrayage et les cinquante et un forfaits distribution figurant dans les pages intermédiaires des prospectus de la société Auto 3000 ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de la société Auto 3000 motif pris de la licéité de la publicité comparative, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et ainsi derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'il résulte nécessairement des constatations de la cour d'appel que M. X... avait purement et simplement recopié, dans le même ordre, tant pour les services proposés que pour les tarifs pratiqués, les soixante-six forfaits embrayage et les cinquante et un forfaits distribution figurant dans les pages intermédiaires des prospectus de la société Auto 3000 ; qu' en se bornant à déclarer que « rien n'interdit à un concurrent de présenter des offres identiques, tant quant à leur contenu que leur prix et leur présentation », sans rechercher, comme cela le lui était demandé par la société Auto 3000, si le fait pour M. X... d'avoir systématiquement recopié, sans la moindre modification de fond ou même de disposition, les contenus de la publicité complexe et complète réalisée par la société Auto 3000 sur le thème de surcroît particulièrement original des forfaits relatifs aux changements d'embrayage et de distribution, ne constituait pas un fait manifeste de parasitisme, la cour d'appel a, à nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'il résulte des constatations de la cour d'appel qu'afin de déterminer ses forfaits, la société Auto 3000 avait effectué un « travail (...) dans son intérêt personnel, en fonction des critères propres à ses conditions d'exploitation, (de ses) tarifs fournisseurs (et de son) expérience ou efficacité technique » et que M. X... s'est immiscé dans le sillage de la société Auto 3000 en copiant purement et simplement le travail complexe effectué par elle ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de la société Auto 3000 aux motifs que M. X... n'en aurait tiré aucune économie injustifiée et qu'en outre les actions promotionnelles en cause portaient sur des périodes différentes ou qu'elles se seraient adressées à une clientèle de proximité distincte, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants ; que, par suite, elle a violé l'article 1382 du code civil ;
4°/ que la cour d'appel a omis de répondre aux conclusions par lesquelles la société Auto 3000 démontrait, éléments de preuve à l'appui, que le concept tout à fait original sur lequel fonctionnait son garage, avec, notamment, la réalisation d'opérations complexes telles que changements d'embrayage ou de direction, dans la journée, sans rendez-vous mais avec si besoin prêt d'un véhicule de courtoisie, et moyennant un forfait en moyenne de 30 à 50 % moins élevé que les tarifs pratiqués par la concurrence, avait attiré une importante clientèle venue d'une grande partie du Finistère, de Paris, d'Orléans, etc..., donc de bien au-delà des « Pays de Brest » ; qu'elle a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir analysé de façon approfondie les prospectus en présence, l'arrêt relève qu'ils se différencient tant par leurs couleurs dominantes opposées que par la présentation de leurs pages extérieures, les dates des opérations promotionnelles, l'identité de l'auteur de la publicité et ses coordonnées étant mises en évidence dans des conditions ne permettant aucune méprise du public d'attention normale, que, s'il existe une similitude des pages intérieures, celles-ci se différencient par leurs couleurs et leur présentation, et qu'ainsi, aucune confusion ou assimilation ne peut en résulter dans l'esprit du consommateur moyen quant à l'origine respective des deux documents ; qu'il observe que la détermination du contenu des prestations offertes et de leur prix ne relève pas d'un savoir-faire et que l'offre de prestations identiques ou similaires, lesquelles sont déterminées par l'entretien et la réparation des mêmes véhicules selon les prescriptions des constructeurs, à un prix identique, n'est que la traduction du jeu de la concurrence, excluant toute démarche parasitaire ; qu'il retient, enfin, après avoir relevé que la société Auto 3000 ne pouvait, de bonne foi, revendiquer des droits sur une clientèle qu'elle avait cédée, que les actions promotionnelles en cause portent sur des périodes différentes et s'adressent à une clientèle de proximité distincte, puisque les deux entreprises sont distantes de cinquante kilomètres ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant inopérante la recherche invoquée à la deuxième branche, et abstraction faite du motif surabondant visé par la première branche, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur de simples allégations dépourvues d'offre de preuve, a pu en déduire que les actes de concurrence déloyale et de parasitisme dénoncés n'étaient pas établis ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa première branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Auto 3000 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X..., exerçant sous l'enseigne « Centre auto de l'Aulne », la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Auto 3000
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté l'intégralité des demandes formées par la société AUTO 3000, Aux motifs que « La société Auto 3000 reproche à son adversaire d'avoir fait diffuser aux mois de décembre 2011 et janvier 2012 un prospectus publicitaire qui serait, selon elle, la copie servile de son propre document publicitaire diffusé au mois de novembre 2011 tant sur la forme que sur le fond, lui reprochant d'avoir ainsi commis un acte de concurrence déloyale et parasitaire.
Elle communique un prospectus publicitaire établi à son profit, sous forme d'une copie double de format 21 x 29,7, sur fond dominant bleu, intitulé "Ensemble préparons l'hiver". Ce prospectus annonçait une opération commerciale valable du 5 octobre au 26 novembre 2011 et reprenait des offres de prestations et fournitures préalablement diffusées pour la période du 5 juillet au 14 août 2010.
Elle prétend que M. X... aurait effectué une copie servile de ce prospectus en diffusant un document de même format présentant en page intérieure des offres identiques, sous le titre "SUPER PROMO PNEUS sur tout marque du 12 au 31 décembre 2011 et du 23 au 31 janvier 2012".
Mais les prospectus versés aux débats, dépourvus l'un et l'autre d'originalité formelle, ne présentent aucun risque de confusion ou d'assimilation entre eux. En effet, leurs couleurs dominantes sont opposées, trois nuances de bleu pour l'un, blanc, jaune ou gris bleuté selon les pages sur fond rouge pour l'autre. Leurs signes et illustrations graphiques sont également distincts et de nombre et dispositions différentes. La présentation des pages extérieures se différencie clairement, notamment par l'adoption du mode portrait pour l'un et du mode paysage pour l'autre. Enfin, chacun de ces documents qui se rapporte à des opérations promotionnelles effectuées à des dates différentes, précise de manière immédiatement évidente sur ses pages extérieures l'identité de l'auteur de la publicité et ses coordonnées dans des conditions qui ne permettaient aucune méprise du public d'attention normale susceptible d'être touché par le document.
La similitude de présentation ne concerne que les pages intérieures d'impact nécessairement moindre. Au demeurant, là encore, les deux documents se différencient immédiatement par leurs couleurs et leur présentation typographique. Ainsi, par exemple, le document de la société Auto 3000 met en évidence le prix des prestations offertes en bleu dans un encart blanc tandis que dans le document de M. X..., les prix sont imprimés en rouge, en caractères de taille inférieure, sur le même fond jaune ou gris que celui de la prestation à laquelle il se rapporte.
Aucune confusion ou assimilation ne peut donc être suscitée dans l'esprit du consommateur moyen quant à l'origine respective de ces deux documents.
Le grief porte uniquement sur le contenu des offres présentées en page intérieure, la société Auto 3000 reprochant à son adversaire d'avoir offert des prestations identiques aux siennes, au même prix et en les présentant dans le même ordre. Mais rien n'interdit à un concurrent de présenter des offres identiques, tant quant à leur contenu que leur prix et leur présentation, ce qui a certes pour effet de favoriser la publicité comparative mais celle-ci est autorisée par la loi.
La société Auto 3000 reproche également à son adversaire d'avoir tiré parti de ses efforts dans la détermination du contenu de ses prestations et de leur prix, ce qu'elle assimile abusivement à un savoir faire. Mais ce travail effectué par elle dans son intérêt personnel, en fonction des critères propres à ses conditions d'exploitation, n'était pas transposable chez ses concurrents qui ne bénéficiaient pas nécessairement des mêmes tarifs fournisseurs, ni de la même expérience ou efficacité technique, ainsi qu'elle se plaît à le souligner. Dès lors, l'adoption d'un tarif identique pour des prestations similaires, dépourvues en elles-mêmes d'originalité puisqu'elles étaient déterminées par l'entretien et la réparation des mêmes véhicules selon les prescriptions des constructeurs, n'était pas pour le concurrent une source d'économie injustifiée caractérisant une démarche parasitaire.
Rien n'interdit par ailleurs à un opérateur économique d'offrir des prestations identiques à celles de ses concurrents pour le même prix, même si ceci peut entraîner pour lui des efforts plus importants en terme de rentabilité. Ceci est en effet la traduction du jeu normal de la concurrence dépourvu en tant que tel de tout caractère fautif.
Enfin le grief est d'autant moins justifié que les actions promotionnelles en cause, portant sur des périodes différentes, s'adressaient à une clientèle de proximité également distincte, puisque les garages étaient éloignés de 50 kilomètres et que leur zone de chalandise ne se superposait pas. A cet égard, la société Auto 3000 ne peut de bonne foi revendiquer des droits sur son ancienne clientèle de Plougastel et de Guilers qu'elle indique avoir cédée, étant en tout état de cause rappelé que nul ne peut s'approprier une clientèle quelle qu'elle soit.
Le jugement critiqué ne peut donc qu'être infirmé et la demande rejetée » ;
1°) Alors que la confusion n'est pas une condition du parasitisme ; qu'en rejetant les demandes de la société AUTO 3000 au motif qu'il n'existe entre les prospectus de celles-ci et celui de M. X..., du fait de leurs différences notamment en termes de couleurs ou de typographie, « aucun risque de confusion ou d'assimilation » dans l'esprit du public concerné, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et, par suite, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
2°) Alors qu' il résulte nécessairement des constatations de la Cour d'appel que M. X... avait purement et simplement recopié, dans le même ordre, tant pour les services proposés que pour les tarifs pratiqués, les 66 forfaits embrayage et les 51 forfaits distribution figurant dans les pages intermédiaires des prospectus de la société AUTO 2000 ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de la société AUTO 3000 motif pris de la licéité de la publicité comparative, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et ainsi derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
3°) Alors qu' il résulte nécessairement des constatations de la Cour d'appel que M. X... avait purement et simplement recopié, dans le même ordre, tant pour les services proposés que pour les tarifs pratiqués, les 66 forfaits embrayage et les 51 forfaits distribution figurant dans les pages intermédiaires des prospectus de la société AUTO 2000 ; qu' en se bornant à déclarer que « rien n'interdit à un concurrent de présenter des offres identiques, tant quant à leur contenu que leur prix et leur présentation », sans rechercher, comme cela le lui était demandé par la société AUTO 3000, si le fait pour M. X... d'avoir systématiquement recopié, sans la moindre modification de fond ou même de disposition, les contenus de la publicité complexe et complète réalisée par la société AUTO 3000 sur le thème de surcroît particulièrement original des forfaits relatifs aux changements d'embrayage et de distribution, ne constituait pas un fait manifeste de parasitisme, la Cour d'appel a, à nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
4°) Alors qu' il résulte des constatations de la Cour d'appel qu'afin de déterminer ses forfaits, la société AUTO 3000 avait effectué un « travail (...) dans son intérêt personnel, en fonction des critères propres à ses conditions d'exploitation, (de ses) tarifs fournisseurs (et de son) expérience ou efficacité technique » et que M. X... s'est immiscé dans le sillage de la société AUTO 3000 en copiant purement et simplement le travail complexe effectué par elle ; qu'en rejetant néanmoins les demandes de la société AUTO 3000 aux motifs que M. X... n'en aurait tiré aucune économie injustifiée et qu'en outre les actions promotionnelles en cause portaient sur des périodes différentes ou qu'elles se seraient adressées à une clientèle de proximité distincte, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants ; que, par suite, elle a violé l'article 1382 du Code civil ;
5°) Et alors et en tout état de cause, que la Cour d'appel a omis de répondre aux conclusions par lesquelles la société AUTO 3000 démontrait, éléments de preuve à l'appui, que le concept tout à fait original sur lequel fonctionnait son garage, avec, notamment, la réalisation d'opérations complexes telles que changements d'embrayage ou de direction, dans la journée, sans rendezvous mais avec si besoin prêt d'un véhicule de courtoisie, et moyennant un forfait en moyenne de 30 à 50 % moins élevé que les tarifs pratiqués par la concurrence, avait attiré une importante clientèle venue d'une grande partie du Finistère, de Paris, d'Orléans, etc..., donc de bien au-delà des "Pays de Brest" ; qu'elle a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.