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22/03/2018 | FRANCE | N°17-10495

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 22 mars 2018, 17-10495


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2016), rendu en référé, que le syndicat des copropriétaires du [...]            (le syndicat) a, après expertise, assigné la SCI Alésia 111, copropriétaire, et la société Jerhas, sa locataire, en démolition des aménagements réalisés sur la cour, partie commune, dont elle a la jouissance exclusive, et en remise en état conformément aux conclusions du rapport d'expertise ;

Attendu qu

e la SCI Alésia 111 fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande ;

Mais attendu, d'une part,...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 2016), rendu en référé, que le syndicat des copropriétaires du [...]            (le syndicat) a, après expertise, assigné la SCI Alésia 111, copropriétaire, et la société Jerhas, sa locataire, en démolition des aménagements réalisés sur la cour, partie commune, dont elle a la jouissance exclusive, et en remise en état conformément aux conclusions du rapport d'expertise ;

Attendu que la SCI Alésia 111 fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant exactement retenu que l'ancienneté de l'installation ou le fait qu'elle ait préexisté à l'acquisition de son lot par la SCI Alésia 111 était sans incidence sur le litige qui se cantonnait à la vérification des conditions d'application des prescriptions de l'article 809, alinéa 1er, du code de procédure civile et constaté que le dommage imminent était constitué par le risque de chute du dispositif de séparation de la cour dont la fragilité de constitution était manifeste, la cour d'appel a pu décider qu'en l'absence d'autorisation du syndicat des copropriétaires pour la réalisation d'un autre dispositif, la remise en état était la seule mesure pouvant être ordonnée ;

Attendu, d'autre part, que, la société Alésia n'ayant pas invoqué l'atteinte disproportionnée à un droit qu'elle tient de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui résulterait de la mesure de remise en état, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Alésia 111 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Alésia 111 et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires du [...]                     de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Alésia 111

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné sous astreinte à la société Alesia 111 de faire procéder à ses frais au démontage et à la dépose ou à la démolition de l'ensemble de la paroi verticale qui sépare la cour intérieure couverte par une verrière et la courette arrière de l'immeuble sur rue, puis à la remise en l'état antérieur consistant en une grille ou un grillage séparant les deux cours implanté sur un muret de soubassement et de l'avoir condamnée à payer, à titre de provision, au syndicat des copropriétaires du [...]                                             ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 809 du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que le dommage imminent s'entend du « dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer » et le trouble manifestement illicite résulte de « toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit » ; qu'il s'ensuit que pour que la mesure sollicitée soit prononcée, il doit nécessairement être constaté, à la date à laquelle la cour statue et avec l'évidence qui s'impose à la juridiction des référés, l'imminence d'un dommage, d'un préjudice ou la méconnaissance d'un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines, qu'un dommage purement éventuel ne saurait donc être retenu pour fonder l'intervention du juge des référés ; que la constatation de l'imminence du dommage suffit à caractériser l'urgence afin d'en éviter les effets ; que la qualité de propriétaire du lot de copropriété nº 7 de la SCI comme son droit d'usage exclusif de la cour et de l'entrée ne sont pas l'objet du litige, le syndicat des copropriétaires ne faisant valoir aucun droit à ce titre, et c'est précisément cette qualité qui justifie que la copropriété agisse à son encontre pour prendre les mesures nécessaires à la cessation du trouble invoqué ; que le moyen de prescription de l'action invoqué par la société Alesia 111 n'est donc pas pertinent ; que l'ancienneté de l'installation ou le fait qu'elle ait préexisté à l'acquisition du lot par l'actuel propriétaire est sans incidence sur le présent litige qui se cantonne à la vérification des conditions d'application des prescriptions légales susvisées ; que l'expert judiciaire, M. Richard Y..., dans son rapport déposé le 14 novembre 2014, indique que la cour abritée à usage privatif rattachée au lot appartenant à la SCI Alesia 111 a été transformée en un 'local abrité' ; qu'en fond de parcelle une ferme métallique verticale transversale de type Eiffel, sur laquelle est fixée la verrière qui constitue le couvert de la cour et qui n'est pas en cause, assure une délimitation entre ladite cour et une courette arrière de l'immeuble sur rue à ciel ouvert ; que cette séparation verticale d'environ 8 m de hauteur sur un linéaire de 8,50 m est assemblée de manière anarchique et très désorganisée de la manière suivante :
- de 0,0 m à 2,80 m : panneaux de bois aggloméré peints de 22 mm d'épaisseur fixés sur des bastaings bois. Ces panneaux sont localement éventrés et des traces d'infiltrations détériorent leur consistance ;
- de 2,80 m à 8 m au faîtage : panneaux de remplissage translucides de type Altuglas rivetés, mais non jointifs et non étanches sur une ossature très légère en profilés aluminium ; que l'examen du dos de cette séparation par l'expert depuis la courette non couverte confirme que cinq bastaings bois 'calés' assurent l'ossature des panneaux formant remplissage jusqu'à une hauteur de 2,80 m ; qu'au-dessus, les plaques translucides déjà décrites sont attachées à l'ossature aluminium par des fils de fer ; qu'en partie haute, dans la hauteur de la ferme triangulée, l'expert a relevé la présence d'une bâche plastique type polyane armé mal déroulée fixée sur des plinthes en bois elles-mêmes accrochées à la charpente par du fil électrique ; que l'expert conclut que la séparation verticale présente un défaut manifeste de solidité et de stabilité ; que cette structure légère est montée « en dépit du bon sens », présente également un danger pour les personnes (clients et personnel de la société Jerhas) mais aussi des copropriétaires se rendant dans le local vélos de la petite courette en cas de turbulences climatiques (vent violent, pluie) ; qu'enfin il alerte les intervenants à l'expertise sur le risque incendie accru que présentent ces « aménagements sauvages » ; que l'avis des services chargés de la sécurité du public de la Préfecture, du 11 juin 2014 et donc antérieur au dépôt du rapport d'expertise, ne contredit pas les conclusions de l'expert puisqu'il indique, côté courette, « l'installation de fortune constituée de panneaux en aggloméré fixés au moyen de bastaings à un muret en brique et surmontés de plaques de polycarbonate alvéolaire fixées sur cornières posés en biais pour récupérer l'aplomb de la verrière. L'ensemble semble stable mais présente des défauts d'étanchéité manifestes qui fragiliseront, à moyen terme la solidité et la stabilité de la paroi qui est, par ailleurs, couronné par une bâche grossièrement ficelée à des planchettes qui menacent de chuter dans la courette » ; que l'absence de péril constaté par ce service ne concerne que l'application des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du CCH et n'a pas d'incidence sur l'appréciation de la situation au regard des dispositions de l'article 809 susvisées ; que le dommage imminent constitué par le risque de chute du dispositif dont la fragilité de la constitution est manifeste est certain à défaut de remise en état ; que les travaux réclamés par le syndicat des copropriétaires consistant à la remise en état antérieur consistant dans une grille ou un grillage séparant les deux cours implanté sur un muret de soubassement, tel que décrit dans le rapport d'expertise, sont les seuls pouvant être ordonnés en l'absence de toute autorisation de la copropriété de réaliser un autre dispositif ; qu'il n'appartient pas à la présente juridiction, qui ne peut être saisie que de prétentions, de donner acte à la société Alesia 111 des actions qu'elle estime se réserver le droit d'engager ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' il résulte tant des conclusions de l'expert que des notifications de la préfecture de police de Paris que la cloison séparatrice litigieuse ne présente pas de garanties de stabilité et de solidité suffisantes et qu'elle constitue un danger pour les personnes tant par le risque de chute de parties de cette cloison que par un risque incendie accru ; qu'il est justifié afin de prévenir un dommage imminent d'ordonner les mesures conservatoires ou de remise en l'état nécessaire ; que celles-ci comportent nécessairement la dépose de la cloison litigieuse qui sera par conséquent ordonnée ; qu'aucune partie ne conteste la nécessité de conserver une séparation ; qu'il convient, en se fondant sur l'analyse de l'expert, d'ordonner de rétablir en lieu et place de la cloison, un grillage qui devra présenter les garanties de solidité et de sécurité nécessaires ; que la société Alesia 111 ne peut se prévaloir de la prescription acquisitive qui l'aurait rendu, si l'on devine son argument, propriétaire de la cloison litigieuse alors que les différents contrats bail, ainsi que les mises en demeure du syndicat des copropriétaires rappelle que la cour intérieure constitue une partie commune ; qu'en l'absence de « possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire », conditions exigées par l'article 2261 du code civil, elle ne saurait se prévaloir de la prescription acquisitive ; qu'il incombe à la société Alesia 111 de procéder aux travaux indiqués rendus nécessaires par la construction de la cloison dans son état actuel, dont il n'est pas démontré ni qu'elle ait été autorisée ni même tolérée par le syndicat des copropriétaires qui a au contraire demandé à plusieurs reprises la remise en état, ni qu'elle soit le fait de l'actuel locataire ; que la clause du bail mettant à la charge du locataire les grosses réparations ne saurait transférer la charge de ces travaux à ce dernier puisqu'il s'agit non de travaux de réparation mais de déposer une construction dans une partie commune sans autorisation de la copropriété dont il apparaît qu'elle existait lors de la conclusion du bail ;

1°) ALORS QUE les actions personnelles entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat de copropriété se prescrivent par un délai de dix ans ; que l'action engagée par un syndicat de copropriété tendant à supprimer une construction érigée sur une partie commune dont l'un des copropriétaires a la jouissance exclusive relève de la prescription décennale ; que le juge des référés, saisi d'une action en cessation d'un dommage imminent, ne saurait remettre en cause ces règles de prescription en ordonnant la destruction d'une construction érigée sur une partie commune dont un copropriétaire a l'usage exclusif après l'expiration du délai de dix ans ; qu'en ordonnant la destruction de la paroi litigieuse et son remplacement par une grille ou un grillage, après avoir jugé que le moyen de prescription invoqué par la société Alesia 111 n'était pas pertinent dès lors que « l'ancienneté de l'installation ou le fait qu'elle ait préexisté à l'acquisition du lot par l'actuel propriétaire était sans incidence sur le présent litige qui se cantonne à la vérification des conditions d'application » de l'article 809 du code de procédure civile, la cour d'appel a méconnu les règles de prescription applicables aux actions personnelles et violé l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

2°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, le juge des référés peut certes, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'il doit cependant se borner à ordonner des mesures provisoires et proportionnées, dans l'attente d'une solution plus durable qui ne pourra être tranchée qu'au fond, sous peine de commettre un excès de pouvoir ; que la cour d'appel a constaté l'existence d'une « séparation verticale d'environ 8 m. de hauteur sur un linéaire de 8,50 m. » entre la cour dont l'actuel copropriétaire, la société Alesia 111, a l'usage exclusif et la cour commune de la copropriété, et a estimé que cette paroi constituait un dommage imminent en raison du risque de chute, à défaut de remise en état ; qu'elle a ordonné la démolition de cette paroi et « la remise en état antérieur consistant dans une grille ou un grillage séparant les deux cours implantés sur un muret de soubassement », tandis qu'elle aurait dû se borner à prononcer une mesure provisoire de remise en état de la paroi telle qu'elle existait au jour où elle a statué, de manière à ne pas compromettre les droits respectifs des parties dans l'attente d'une solution plus durable relevant des pouvoirs du juge du fond ; qu'ainsi, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 809 du code de procédure civile, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10495
Date de la décision : 22/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 22 mar. 2018, pourvoi n°17-10495


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Delvolvé et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10495
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