LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, troisième, cinquième et sixième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 2 novembre 2016), que Mme X..., présidente du conseil départemental de la Haute-Garonne de l'Association des paralysés de France (l'association) et représentante départementale de cette association, a été exclue de l'association par une décision de son conseil d'administration ; que Mme X... a fait citer l'association devant le tribunal de grande instance de Toulouse, par la délivrance d'une assignation à son siège social situé à Paris, aux fins d'annulation de son exclusion de l'association et de réintégration en son sein ; que Mme X... a formé un contredit contre le jugement de ce tribunal se déclarant territorialement incompétent et renvoyant l'affaire à celui de Paris ;
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt, recevant le contredit, de déclarer le tribunal de grande instance de Toulouse compétent et de renvoyer la procédure devant cette juridiction, alors, selon le moyen :
1°/ que si le demandeur peut avoir le choix d'attraire une personne morale devant le tribunal du lieu de son siège social ou celui du lieu de sa succursale, la domiciliation de la personne morale doit s'effectuer au jour de la demande d'introduction d'instance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que Mme X... avait attrait l'association devant le tribunal de grande instance de Toulouse tout en lui faisant délivrer l'assignation à son siège social situé à Paris ; que l'absence de domiciliation, dès l'assignation, au lieu de son établissement de Toulouse ôtait toute possibilité à Mme X... d'attraire ladite association devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle disposerait d'une succursale ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 42 et 43 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent sans répondre aux conclusions d'appel de l'association faisant valoir que le fait pour Mme X... d'avoir, dans l'assignation qu'elle lui avait fait délivrer, domicilié l'association à son siège social de Paris lui ôtait toute possibilité de se prévaloir de la théorie dite « des gares principales » et de l'attraire devant la juridiction dans le ressort de son établissement de Toulouse, la cour d'appel a, à tout le moins, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que si une personne morale peut être assignée devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle dispose d'une succursale, encore faut-il que cette succursale possède une certaine autonomie et ait à sa tête un agent susceptible de la représenter valablement ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par l'association, si les conseils départementaux et régionaux de l'association avaient une autonomie suffisante et s'ils ne constituaient pas, au contraire, de simples relais locaux aux décisions politiques définies au niveau national, de sorte que la délégation départementale ou la direction régionale de Haute-Garonne ne justifiait pas de l'autonomie suffisante pour justifier de la compétence du tribunal de grande instance de Toulouse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 43 du code de procédure civile ;
4°/ que si une personne morale peut être assignée devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle dispose d'une succursale ayant le pouvoir de la représenter à l'égard des tiers, encore faut-il que la cause de l'action présente un lien étroit avec l'activité propre de cette succursale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser l'implication de la délégation départementale de Haute-Garonne dans le litige, bien que l'association le contestait en rappelant dans ses écritures que le litige était relatif aux prises de position nationales de Mme X... en violation des règles statutaires, la cour d'appel a violé l'article 43 du code de procédure civile ;
5°/ que l'association se prévalait expressément dans ses conclusions d'appel de l'absence d'intervention de la succursale dans la réalisation du litige ; qu'elle soutenait ainsi que le litige n'était pas en relation avec la gestion locale du conseil départemental ou avec une difficulté rencontrée par le conseil départemental en tant que tel, mais était relatif aux prises de position nationales de Mme X..., en violation des règles statutaires ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions de l'association, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que l'article 690 du code de procédure civile permet à la partie qui, en application de l'article 43 du même code, attrait une personne morale devant le tribunal du lieu où est situé un de ses établissements secondaires, de délivrer l'assignation à cette fin, à son choix, au lieu de l'établissement principal de cette personne morale ou de son établissement secondaire concerné ; qu'ayant relevé que l'assignation de l'association à comparaître devant le tribunal de grande instance de Toulouse avait été délivrée au siège social de l'association, la cour d'appel a statué sans encourir les griefs formulés par les deux premières branches du moyen ;
Et attendu, ensuite, qu'une personne morale peut être assignée devant la juridiction du ressort dans lequel elle dispose d'un établissement ayant le pouvoir de la représenter à l'égard des tiers, dès lors que l'affaire se rapporte à son activité ou que les faits générateurs de responsabilité se sont produits dans le ressort de celui-ci ;
Qu'ayant, relevé, d'une part, que l'article 11 des statuts de l'association dispose que dans chaque département, le conseil départemental met en oeuvre les orientations politiques nationales de l'association et définit dans ce cadre les orientations départementales, que le conseil départemental est composé de membres élus par les adhérents du département et parmi eux, il élit en son sein un représentant départemental et un suppléant, que le directeur de la délégation départementale apporte son concours au conseil départemental et que l'article 13 desdits statuts dispose que les missions, la composition, les modalités d'élection et de fonctionnement des conseils départementaux et régionaux seront précisées par le règlement intérieur, qui précise, dans son article 8-1-3, que le représentant départemental représente l'association dans le département et met en oeuvre les orientations politiques nationales avec l'appui du directeur de la délégation, pour en déduire souverainement qu'il existait un organisme local de l'association à Toulouse composé d'un conseil départemental ayant le pouvoir de définir les orientations départementales, avec le concours du directeur de la délégation départementale de l'association, et, d'autre part, que Mme X... était présidente du conseil départemental de la Haute-Garonne de l'association et représentante départementale de cette association et que son action avait pour objet de contester son exclusion de l'association, au motif qu'elle n'avait pas suivi les directives nationales relatives à la représentation de l'association dans des commissions administratives et avait diffusé des prises de positions poussant à des réformes statutaires que le siège national jugeait incompatibles avec sa politique, faisant ainsi ressortir que l'affaire se rapportait, au moins pour partie, à l'activité du conseil départemental de l'association, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré le tribunal de grande instance de Toulouse compétent ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la quatrième branche du moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Association des paralysés de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour l'Association des paralysés de France
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR, recevant le contredit, déclaré le tribunal de grande instance de Toulouse compétent et renvoyé la procédure devant cette juridiction ;
AUX MOTIFS QUE : « une association peut être assignée valablement en tout lieu où elle exerce son activité habituelle, dès lors qu'en ce lieu, elle dispose d'un organisme régional ou local dont l'action est conforme à ses statuts ; que Mme Odile X..., adhérente de l'APF depuis 2008, a attrait celle-ci devant le tribunal de grande instance de Toulouse en lui faisant délivrer une assignation à son siège social situé à Paris en annulation de l'exclusion prononcée à son encontre par lettre du 14 décembre 2015 et en réintégration en son sein ; que l'article 11 des statuts de l'APF dispose que dans chaque département, le conseil départemental met en oeuvre les orientations politiques nationales de l'association et définit dans ce cadre les orientations départementales ; que le conseil départemental est composé de membres élus par les adhérents du département et parmi eux, il élit en son sein un représentant départemental et un suppléant ; que le directeur de la délégation départementale apporte son concours au conseil départemental ; que l'article 13 desdits statuts dispose que les missions, la composition, les modalités d'élection et de fonctionnement des conseils départementaux et régionaux seront précisées par le règlement intérieur, qui précise, dans son article 8-1-3, que le représentant départemental représente l'association dans le département et met en oeuvre les orientations politiques nationales avec l'appui du directeur de la délégation ; qu'or, Mme Odile X... avait été élue à la fin de l'année 2012 au conseil départemental 31 puis représentante départementale de l'association en Haute Garonne ; que de la sorte, il existe un organisme local de l'APF à Toulouse composé d'un conseil départemental qui a le pouvoir de définir les orientations départementales, avec le concours du directeur de la délégation départementale de l'APF ; qu'il convient en conséquence de recevoir le contredit, d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Toulouse, de le déclarer compétent et de lui renvoyer la procédure » ;
ALORS 1°/ QUE si le demandeur peut avoir le choix d'attraire une personne morale devant le tribunal du lieu de son siège social ou celui du lieu de sa succursale, la domiciliation de la personne morale doit s'effectuer au jour de la demande d'introduction d'instance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que Mme X... avait attrait l'Association des Paralysés de France devant le tribunal de grande instance de Toulouse tout en lui faisant délivrer l'assignation à son siège social situé à Paris ; que l'absence de domiciliation, dès l'assignation, au lieu de son établissement de Toulouse ôtait toute possibilité à Mme X... d'attraire ladite association devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle disposerait d'une succursale ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 42 et 43 du code de procédure civile ;
ALORS 2°/ QU'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent sans répondre aux conclusions d'appel de l'exposante faisant valoir que le fait pour Mme X... d'avoir, dans l'assignation qu'elle lui avait fait délivrer, domicilié l'Association des Paralysés de France à son siège social de Paris lui ôtait toute possibilité de se prévaloir de la théorie dite « des gares principales » et de l'attraire devant la juridiction dans le ressort de son établissement de Toulouse, la cour d'appel a, à tout le moins, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 3°/ QUE si une personne morale peut être assignée devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle dispose d'une succursale, encore faut-il que cette succursale possède une certaine autonomie et ait à sa tête un agent susceptible de la représenter valablement ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était expressément demandé par l'exposante, si les conseils départementaux et régionaux de l'Association des Paralysés de France avaient une autonomie suffisante et s'ils ne constituaient pas, au contraire, de simples relais locaux aux décisions politiques définies au niveau national, de sorte que la délégation départementale ou la direction régionale de Haute Garonne ne justifiait pas de l'autonomie suffisante pour justifier de la compétence du tribunal de grande instance de Toulouse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 43 du code de procédure civile ;
ALORS 4°/ QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, l'article 11 des statuts de l'Association des Paralysés de France stipule que « dans chaque département, le conseil départemental met en oeuvre les orientations politiques nationales de l'Association et définit dans ce cadre les orientations départementales » ; que l'article 8-1 du règlement intérieur précise encore que le conseil départemental « met en oeuvre les orientations politiques nationales de l'Association des Paralysés de France et définit, dans ce cadre, des orientations politiques départementales » ; que l'article 8-1-3 du règlement intérieur énonce que « le représentant départemental met en oeuvre les orientations politiques nationales » ; qu'il en résultait ainsi clairement que le conseil départemental ne constituait que le relais local des orientations politiques définies au niveau national ; qu'en estimant qu'il résultait tant des statuts de l'association que du règlement intérieur que le conseil départemental avait le pouvoir de définir les orientations départementales, pour lui reconnaître en définitive l'autonomie suffisante pour justifier de la compétence de la juridiction dans le ressort de laquelle il se trouvait, à savoir le tribunal de grande instance de Toulouse, la cour d'appel a dénaturé ces documents et ainsi violé l'article 1103 du code civil ;
ALORS 5°/ QUE si une personne morale peut être assignée devant la juridiction dans le ressort de laquelle elle dispose d'une succursale ayant le pouvoir de la représenter à l'égard des tiers, encore faut-il que la cause de l'action présente un lien étroit avec l'activité propre de cette succursale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser l'implication de la délégation départementale de Haute Garonne dans le litige, bien que l'Association des Paralysés de France le contestait en rappelant dans ses écritures que le litige était relatif aux prises de position nationales de Mme X... en violation des règles statutaires, la cour d'appel a violé l'article 43 du code de procédure civile ;
ALORS 6°/ QUE l'Association des Paralysés de France se prévalait expressément dans ses conclusions d'appel de l'absence d'intervention de la succursale dans la réalisation du litige ; qu'elle soutenait ainsi que le litige n'était pas en relation avec la gestion locale du conseil départemental ou avec une difficulté rencontrée par le conseil départemental en tant que tel, mais était relatif aux prises de position nationales de Mme Odile X..., en violation des règles statutaires ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Toulouse compétent sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.